3. Contribution écrite de l'Association des régions de France (ARF)

1. Beaucoup appellent de leurs voeux le développement de la chaleur d'origine renouvelable en France. Quelle est votre position sur la question ? Comment peut-on expliquer le retard de la France et de l'Europe dans le développement de la chaleur d'origine renouvelable ?

La politique énergétique française a été marquée par la production d'électricité à base d'énergie nucléaire et d'hydroélectricité. Le développement du chauffage électrique ainsi que le poids des grands groupes publics d'électricité et de gaz sont certainement pour beaucoup dans le retard du développement des énergies renouvelables en France.

Dans un contexte mondial d'accroissement des prix des énergies fossiles et de raréfaction progressive de l'offre, il y a une certaine urgence à développer les énergies renouvelables.

Cet enjeu essentiel concerne les divers volets du développement durable : outre l'aspect environnemental et notamment l'augmentation des gaz à effet de serre, les aspects économiques et sociaux sont à considérer : logement social, recyclage des sommes économisées, création d'entreprises et d'emplois...

La priorité peut se décliner selon 3 objectifs :

- production d'électricité d'origine renouvelable ;

- production de chaleur d'origine renouvelable (chauffage, eau chaude sanitaire) ;

- maîtrise de la consommation et développement d'économies d'énergie.

La problématique est différente dans le secteur des transports et dans celui du bâtiment, et c'est dans le bâtiment (neuf et ancien) qu'il faut développer tous les types de productions délocalisées d'énergies renouvelables, en zone urbaine dense comme en zone d'habitat dispersé, sans oublier les économies d'énergie.

2. Les collectivités territoriales disposent de plusieurs leviers d'action pour agir en matière d'énergie : construction de réseaux de chaleur, collecte et élimination des déchets ménagers (incinération, décharge), compétences en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire, rôle pédagogique), économies d'énergie... Dans quels domaines les collectivités territoriales peuvent-elles, selon vous, agir le plus efficacement en matière d'énergie ?

Le levier le plus important concerne les économies d'énergie.

Le deuxième levier est celui du développement d'énergies renouvelables.

Les collectivités territoriales ont un rôle essentiel dont différentes facettes sont indiquées dans le questionnaire.

Les Régions agissent comme maître d'ouvrage et gestionnaire de patrimoine public (lycées, bâtiments régionaux avec la prise en compte de critères de qualité environnementale).

Les Régions agissent comme porteurs de politiques publiques, en particulier par l'éducation et la sensibilisation, les aides techniques et financières pour les particuliers, les entreprises et les collectivités...

Mais elles peuvent aussi intervenir pour l'information du public, la concertation et la participation à la création d'un consensus social sur cette question, le soutien à la recherche développement en partenariat.

4. Les énergies renouvelables thermiques sont-elles compétitives sans subvention ni exonération fiscale et quel est leur seuil de rentabilité par rapport au baril de pétrole ? Leur temps moyen de retour sur investissement ? Avec quel taux d'intérêt d'emprunt ?

La compétitivité économique des énergies renouvelables thermiques dépend de plusieurs facteurs : les prix de l'énergie de référence, les taux d'intérêt des prêts contractés pour les investissements, les prix des équipements et les coûts de maintenance. Dans le passé les énergies renouvelables ont été bénéficiaires puis victimes des fluctuations. Pour l'avenir il faut se situer dans une perspective de long terme et évaluer les coûts globaux en intégrant les externalités. Un travail sur des indicateurs est sans doute nécessaire.

L'augmentation actuelle des prix des énergies fossiles tend à accentuer la compétitivité des énergies renouvelables.

Les aides (subventions, crédit d'impôt...) ont un rôle incitatif dans la décision et dans la mise en place de filières et améliorent la rentabilité. Si la défiscalisation est importante, le retour sur investissement est plus rapide.

Les filières de géothermie et d'utilisation de déchets sont mieux adaptées à l'habitat collectif et les filières solaires, bois, conviennent bien à l'habitat individuel. Des bilans détaillés ont été publiés notamment par l'ADEME.

Les économies d'énergie sont compétitives, l'énergie la moins chère est celle que l'on ne consomme pas.

5. La France s'est fixé plusieurs objectifs ambitieux à l'horizon 2010, notamment l'augmentation de 50 % de la chaleur d'origine renouvelable. Ces objectifs sont-ils réalistes ?

Les objectifs semblent réalistes mais seront-ils atteints ? Ils ne pourront l'être qu'en fonction des moyens qui seront mis en oeuvre, à la fois en investissement et en fonctionnement. Cela suppose des aides et des mesures fiscales, de l'information, des actions normatives, mais aussi un développement des recherches par exemple dans les pôles de compétitivité concernés.

Il convient de développer toutes les énergies renouvelables, c'est la mise en commun qui pourra permettre d'atteindre les objectifs, et il convient parallèlement de faire des économies d'énergie. La production de chaleur doit être l'objectif principal en matière d'énergie renouvelable.

Pour les véhicules, il faut être ambitieux en matière de recherche. Quant aux biocarburants, il apparaît certain que cette filière, si elle est développée selon des pratiques fortement consommatrices en intrants de synthèse et en eau et destructrices des sols, elle ne sera pas un facteur de développement durable : il est nécessaire d'en faire un bilan environnemental complet.

6. Quels sont les modèles étrangers qui vous paraissent intéressants eu égard au rôle confié aux collectivités territoriales en matière de promotion des énergies renouvelables thermiques ?

De nombreux exemples existent dans les pays européens qui ont favorisé depuis plus longtemps ces énergies renouvelables : pays scandinaves (réseaux de chaleur locaux), Allemagne, Autriche (ex réseau chaleur bois), Grande-Bretagne et d'autres.

7. Connaissez-vous en France des bonnes pratiques locales qui soient facilement reproductibles ?

Les Régions ont inscrit le développement durable dans leurs politiques et notamment le volet énergétique, maîtrise de la consommation, développement des énergies renouvelables, réductions des gaz à effet de serre.

Le partenariat des Régions avec l'ADEME est en cours de redéfinition, de nouvelles conventions étant en cours d'élaboration.

La définition des priorités de chaque politique régionale tient compte des spécificités des territoires.

La filière bois-énergie existe depuis plusieurs années par exemple en Aquitaine et en Franche-Comté.

La plupart des Régions ont des dispositifs d `incitations (ex Bretagne, Midi-Pyrénées, Lorraine, Haute-Normandie ...) vis-à-vis des particuliers ou des collectivités.

La Région Provence-Alpes-Côte-d'Azur a défini un plan global Energie 2010, dispositif complet surtout axé sur le solaire thermique comprenant divers leviers y compris la concertation et un observatoire régional.

La Région Alsace a un programme Energivie initié en 2003.

La Région Rhône-Alpes a un plan de développement des énergies renouvelables, Languedoc Roussillon et Champagne-Ardenne un schéma de développement de l'éolien.

La Région Centre ambitionne d'être un pôle d'excellence européen en matière d'efficacité énergétique et a engagé la réalisation d'un atlas du potentiel géothermique.

8. Que pensez-vous à la cogénération ? Pour quelles raisons ?

La cogénération est un outil techniquement satisfaisant car le rendement est augmenté grâce à la production combinée de chaleur et d'électricité. Si la production d'électricité peut être injectée dans le réseau électrique, la production de chaleur nécessite un besoin de consommation à proximité. Les questions de tarif de rachat et d'électricité et de chaleur doivent être débattues.

Des pistes à creuser pourraient être :

- la cogénération dans les industries pour les besoins propres ou par regroupements entre industriels ;

- le développement de réseaux de chaleur et de cogénération dans de nouveaux quartiers ;

- de la cogénération à partir d'énergies non fossiles (ex biomasse).

9. Peut-on considérer que 1000 TEP d'énergie produite par des ENR créent trois emplois directs nets non délocalisables ? Quid des emplois enduits ?

L'investissement dans les énergies renouvelables et la maintenance induisent en bonne partie des emplois locaux. Les différentes filières doivent être encouragées en France.

Les calculs en emplois sont à faire au niveau national.

10. Quels sont les freins aujourd'hui au développement des énergies renouvelables ?

Les freins sont nombreux et de tous ordres : la question énergétique doit prendre place dans les débats de société et dans les politiques publiques. Il y a des freins d'ordre économique : poids des pétroliers, poids de la TIPP pour l'Etat, coût des installations, retard dans la formation des installateurs et des professionnels, des freins réglementaires (raccordement, autorisations).

Les mesures ont déjà été évoquées : information, formation, aides à la décision (comparaison de solutions et calcul de temps de retour), aides financières, recherche et développement.

11. L'ARF joue-t-elle un rôle actif dans la promotion des énergies renouvelables et en particulier dans le renforcement de l'action des collectivités territoriales en matière d'énergies renouvelables ?

Les Régions ont, comme l'Etat et les autres acteurs publics, un rôle essentiel à jouer. Il faut ériger la politique d'économies d'énergie et de recours aux énergies renouvelables en une priorité.

L'Association des Régions de France favorise notamment les échanges d'expériences entre Régions au sein de sa commission développement durable et les discussions globales avec les partenaires, en particulier l'ADEME.

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