(3) S'appuyer sur une connaissance approfondie de l'aléa

Pour être efficace, un système d'alerte doit s'appuyer sur une connaissance précise de l'aléa. Plusieurs études ont déjà été réalisées par le passé et de nombreux modèles de simulation ont été développés, mais ces travaux ont été confiés à de nombreux instituts de recherche sans coordination d'ensemble. Il convient donc de recenser les projets de recherche effectués et en cours et d'arrêter une ligne directrice sur les besoins existants.

Plusieurs pistes devraient être privilégiées.

D'abord, la connaissance des sources doit être approfondie. L'étude du BRGM sur l'exposition des côtes françaises en Méditerranée et aux Antilles constitue un premier pas. Toutefois, selon les informations obtenues par votre rapporteur, les zones retenues et les séismes qui y ont été associés ne recueillent pas l'unanimité dans la communauté scientifique. Les travaux de recherche visant à préciser les zones exposées au risque de tsunami doivent donc être poursuivis.

En ce qui concerne les glissements de terrain, les études sont plus lacunaires même si des travaux remarquables ont été menés tels que ceux du GIS/CURARE dans le cirque Marcel. Il faut donc poursuivre ce travail de longue haleine.

La constitution d'une base de données sur les tsunamis, entamée par le BRGM, doit également être complétée. Néanmoins, le cahier des charges mériterait d'être modifié. Jusqu'à présent, le BRGM utilise seulement des documents écrits mentionnant un événement dont les caractéristiques ressemblent à celles d'un tsunami. Or, cette approche est trop réductrice pour pouvoir recenser les tsunamis très anciens ou ayant touché des zones isolées. L'exemple du tsunami des Salomons en avril 2007 est révélateur. A la lecture de la presse locale, il n'a quasiment pas affecté la Nouvelle Calédonie. Or, une mission destinée à recueillir des témoignages sur cet événement a révélé plusieurs phénomènes caractéristiques d'un tsunami (retraits de la mer, mascarets, tourbillons dans les ports) que personne n'avait jugé bon de rapporter dans la mesure où ils n'avaient provoqué ni dégâts matériels ni victimes. Les enquêtes sur place et les études post-tsunamis sont donc essentielles pour une meilleure appréhension de cet aléa.

Dans la perspective d'un système d'alerte, les modélisations sont également indispensables pour bien connaître l'impact d'un tsunami sur une côte. Toutefois, elles ne sont efficaces que si la bathymétrie à l'approche des côtes est suffisamment précise pour tenir compte des effets de site. Or, la cartographie marine à l'approche des côtes est incomplète. Ainsi, en 1998, une campagne en mer de l'IPGP sur un navire de l'IFREMER avait été menée pour cartographier les reliefs sous-marins autour de la Martinique et de la Guadeloupe. Hélas, en raison d'une grève des dockers, le sondeur multifaisceau n'avait pas pu être livré à temps et la zone entre 0 et -200 m n'avait pas pu être cartographiée. Une mission de 24 jours de temps bateau serait nécessaire pour compléter la couverture bathymétrique actuelle, en sachant que le coût journalier d'un bateau s'élève entre 10.000 et 20.000 euros.

Actuellement, il existe plusieurs programmes nationaux, essentiellement dédiés aux eaux territoriales (12 milles) :

- le projet Litto 3 D lancé en partenariat entre le SHOM et l'IGN (Institut Géographique National) pour la partie - 10m/+ 10m autour du trait de côte;

- le projet REBENT d'IFREMER pour des zones pilotes dans la bande allant du niveau de la mer à -20m ;

- les actions ponctuelles à travers des campagnes scientifiques ou les campagnes réalisées souvent avec le soutien des conseils régionaux pour la cartographie des formations superficielles.

Le programme Litto 3 D vise à établir une cartographie précise de la bande côtière comprise entre 10 mètres d'altitude pour la partie terrestre et 6 milles marin pour la partie marine. Les levés sont réalisés à partir d'un système aéroporté (lidar bathymétrique) et par vedette hydrographique équipée d'un sondeur multifaisceau, ce qui permet d'atteindre une précision inégalée jusqu'à présent et indispensable pour les modélisations.

Les données bathymétriques et altimétriques détenues par les deux instituts ont été recensées, adaptées pour être présentées « sans couture » 79 ( * ) et mises à disposition sur le serveur Géoportail. En outre, deux campagnes de levés bathymétriques ont été réalisées dans le Golfe du Morbihan et à Toulon afin de montrer la qualité des cartes obtenues avec l'utilisation de ces instruments de mesure modernes.

Votre rapporteur soutient ce projet qui a le double avantage d'une part, d'avoir recensé l'existant pour éviter les redondances et, d'autre part, permet une précision dans les levés indispensable pour une prévention et une gestion fine des risques de submersion côtière d'origine marine. A moyen terme, les levés bathymétriques devront être complétés pour couvrir la zone de 0 à -200m.

En outre, compte tenu du rôle croissant des collectivités territoriales dans la collecte de données bathymétriques, il faudrait éviter que ces dernières ne financent l'acquisition de données qui pourraient ne pas répondre aux standards mis en place par le SHOM et l'IGN.

* 79 C'est-à-dire référencées par rapport à un même référentiel d'altitude.

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