N° 441

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 2 juillet 2008

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation du Sénat pour la Planification (1) sur les dépenses publiques ,

Par M. Bernard ANGELS,

Sénateur.

(1) Cette délégation est composée de : M. Joël Bourdin, président ; M. Pierre André, Mme Évelyne Didier, MM. Joseph Kergueris, Jean-Pierre Plancade, vice-présidents ; MM. Yvon Collin, Claude Saunier, secrétaires ; MM. Bernard Angels, Gérard Bailly, Yves Fréville, Yves Krattinger, Philippe Leroy, Jean-Luc Miraux, Daniel Soulage .

RÉSUMÉ

- Le présent rapport sur les « dépenses publiques » est parti de l'ambition de clarifier des questions évoquées trop superficiellement et avec une certaine confusion dans le débat public.

Au terme de ce travail parlementaire qui emprunte un peu aux travaux de recherche, on peut espérer que certaines idées reçues seront dissipées et que des choix publics importants, dont les implications sont souvent laissées dans l'ombre, seront mieux éclairés . Par ailleurs, il faudra explorer les pistes de réflexion ouvertes par un rapport qui, bien que « copieux », ne se veut surtout pas « définitif » ; et rester attentifs à ce qu'enfin, le vaste champ de réflexions qu'offrent les dépenses publiques fasse toute sa place à l'évaluation, qui doit succéder à l'incantation .

- Les attitudes des Français face aux dépenses publiques portent la marque des imprécisions des approches actuelles du sujet. Quand on les interroge sur le niveau global des dépenses publiques, ils le trouvent souvent trop élevé. Mais quand on les interroge sur chaque catégorie de dépenses publiques, c'est l'opinion inverse qui l'emporte en général.

En outre, on ne peut se défendre de l'impression que ces opinions, contradictoires, reposent sur des motivations qui ne sont pas complètement informées.

- Au demeurant, comment le niveau des dépenses publiques, qui mobilisent une fraction importante des ressources économiques (autour de 47 % en zone euro et plus de 53 % en France) n'inviterait-il pas a priori à renoncer aux facilités des références unitaires et globalisantes quand on veut décrire avec pertinence une réalité qu'on devine complexe ?

- D'ailleurs, l'effort entrepris dans le cadre du rapport pour présenter simplement ce que sont les dépenses publiques et pour identifier les grandes questions qu'elles posent afin d'apporter des éléments de réponse, a dû surmonter, hormis d'importantes difficultés conceptuelles, de très nombreux obstacles statistiques.

C'est un premier constat : il n'y a généralement pas de statistiques disponibles « sur étagère » pour effectuer des études économiques de fond sur les dépenses publiques. En bref, nous manquons de la boîte à outils qu'il faudrait et ceci témoigne à soi seul de la fragilité des « opinions » qui s'expriment en ce domaine.

Un deuxième constat est que les controverses sur les dépenses publiques sont vives mais plutôt stériles. Elles se résument trop souvent à stigmatiser le niveau général des dépenses publiques sans avoir, en général, de prolongements concrets.

Il y a là un paradoxe qui vient probablement en partie de ce que les questions économiques et sociales posées par les dépenses publiques ne sont pas clairement formulées.

Dans ce domaine, « la réponse précède la question » ; l'un des objectifs du rapport a été d'inverser cette séquence .

- Celui-ci s'ordonne autour de trois parties qui correspondent à trois grandes questions que pose, en fait, l'analyse économique des dépenses publiques :

- Première question : le niveau des dépenses publiques est-il un élément déterminant dans l'utilisation des ressources économiques d'un pays ?

- Deuxième question : le niveau des dépenses publiques influence-t-il, en tant que tel, la croissance économique et le niveau de vie ?

- Troisième question : les dépenses publiques ont-elles des effets redistributifs ?

- Avant d'examiner une à une ces questions, il faut développer un peu un constat primordial . Si, juridiquement et comptablement, les dépenses publiques renvoient à une réalité qui est dotée d'une identité à peu près simple, d'un point de vue économique , les dépenses publiques recouvrent des objets si différenciés qu'il est factice et, finalement, trompeur de les ranger sous une catégorie unique.

Il n'y a pas « les dépenses publiques », il y a différentes sortes de dépenses publiques .

Pour ordonner cette diversité, plusieurs typologies sont envisageables. Le rapport s'articule autour de la distinction entre les dépenses publiques de production et celles de transferts , parmi lesquelles les dépenses de protection sociale ont une place essentielle. Ces deux catégories de dépenses publiques correspondent, même si quelques recoupements les unissent partiellement, à des fonctions différentes de l'État .

Les dépenses de production recouvrent les moyens nécessaires à la fourniture des biens et services publics par l' État-producteur : santé, éducation, sécurité, défense... Elles financent les moyens de la production non marchande.

Les dépenses de transferts regroupent des subventions, la charge des intérêts de la dette publique et, principalement, les dépenses d'assurances sociales pour lesquelles le plus souvent l'État est gestionnaire d'assurances .

Il faut insister sur cette partition des dépenses publiques parce qu'elle a de fortes implications . Dans une proportion, estimée selon les pays entre 60 et 80 % d'entre elles, les dépenses publiques sociales correspondent à un simple lissage dans le temps de la perception de revenus individuels (cf. les dépenses de retraite et de santé).

Ainsi, sur un volet de dépenses publiques compris en France entre 18 et 24 points de PIB (34 à 45 % des dépenses publiques), la responsabilité de l'État se limite pour l'essentiel, à organiser des assurances individuelles qui trouvent alors satisfaction dans un cadre qui, pour être collectif, n'est pas le seul envisageable et n'est pas essentiellement « étatique ».

Au demeurant, dans les pays où l'État est en retrait de la gestion des risques, celle-ci mobilise des ressources comparables même si elles empruntent des voies différentes (voir la première question abordée dans le présent rapport).

QUELQUES ORDRES DE GRANDEUR

Au seuil de cet examen, quelques ordres de grandeur doivent être rappelés :

- Première observation : la prédominance des dépenses de « transfert » dans les dépenses publiques .

Quand on raisonne au niveau des grands pays de l'Europe , on observe que la prédominance des dépenses de transferts dans le total des dépenses publiques est nette.

Dans la zone euro , environ 60 % des dépenses publiques sont consacrées à des transferts , et les seules dépenses d' assurances sociales mobilisent près de 46 % du total des dépenses publiques.

STRUCTURE DES DÉPENSES PUBLIQUES EN EUROPE 1 (EN % DU TOTAL)

1995

2005

Variations
en points

Consommations intermédiaires

9,1

10,6

+1,5

Traitements publics

20,6

21,9

+1,3

Intérêts

10,2

6,3

-3,9

Subventions

3,1

2,6

-0,5

Allocations sociales 2

41,1

45,9

+4,8

Autres (fonctionnement)

3,0

4,7

+1,7

Transferts en capital

7,9

2,7

-5,2

Investissements

5,0

5,3

+0,3

Total

100

100

0

1 Europe des 12 : zone euro.
2 Hors Santé.

Source : Commission européenne. Rapport sur les finances publiques dans l'Union européenne. 2006.

- Quand on convertit ces données en points de PIB , on observe que les dépenses publiques en zone euro représentaient en 2005, 47,5 % du PIB en moyenne, avec d'un côté des transferts égaux à 27,3 % du PIB , dont des assurances sociales pour 21,8 % du PIB , et, de l'autre, les dépenses publiques correspondant à la production non marchande pour 20,2 % du PIB .

LES DÉPENSES PUBLIQUES EN EUROPE 1 EN 2005
(en points de PIB total)

Consommations intermédiaires

5,1

Traitements publics

10,4

Intérêts

3,1

Subventions

1,1

Allocations sociales 2

21,8

Autres (fonctionnement)

2,2

Transferts en capital

1,3

Investissements

2,5

Total

47,5

1 Europe des 12 : zone euro.

2 Hors Santé.

Moyennant quelques nuances, on peut retenir que les dépenses publiques de production et les dépenses publiques d'assurances sociales représentent en Europe des ordres de grandeur comparables (à peu près à un cinquième du PIB chacune) .

Au niveau des 30 plus grands pays de l'OCDE , un même constat s'impose moyennant un équilibre un peu différent . Les transferts sont aussi légèrement majoritaires, mais la moyenne des dépenses publiques sociales est moins élevée (14,8 points de PIB contre 21,8 points en zone euro pour l'OCDE à 30 pays), ce qui se traduit par un niveau des dépenses publiques dans le PIB moins élevé. De leur côté, les dépenses publiques correspondant à la production non marchande atteignent un niveau moyen comparable à la zone euro : 20 points de PIB .

Pour résumer, au niveau de l'OCDE, comme c'est le cas dans la zone euro, la majorité des dépenses publiques sont des dépenses de transferts, mais leur prédominance est moins accusée sous l'effet de dépenses publiques sociales qui sont inférieures au niveau atteint en zone euro. En revanche, les dépenses publiques correspondant à des biens et services publics sont presque identiques dans les deux zones, constat qui tranche singulièrement avec l'idée répandue parfois d'un handicap pour l'Europe du fait du poids excessif des « prélèvements bureaucratiques » .

- Deuxième observation : l'analyse des dépenses publiques de production non marchande montre d'abord qu'elles sont majoritairement consacrées à des fonctions non-régaliennes , avec notamment une forte proportion des dépenses pour la santé et l'enseignement, si bien que les suggestions visant à « recentrer l'État sur ses fonctions régaliennes » apparaissent un peu irréelles.

Par ailleurs, il faut relever que ces dépenses sont, en Europe, pour un peu plus de la moitié (autour de 10 % du PIB) des dépenses directes de salaires publics, l'autre moitié étant constituée de consommations intermédiaires (5 points de PIB), d'investissements (2,5 points de PIB) et de dépenses diverses. La structure moyenne de la fonction de production des administrations publiques ne révèle pas de singularités fortes par rapport aux services privés . On peut incidemment relever que la masse salariale publique a beaucoup moins augmenté au cours des vingt ans écoulés que la masse salariale du secteur des services financiers et n'est qu'un peu supérieure à celle-ci (9 % de la masse salariale privée).

*

Le rapport commence par une première question : le niveau des dépenses publiques est-il une variable qui détermine significativement l'utilisation globale des ressources économiques ?

Cette interrogation est partie de l'idée de donner un peu de substance aux inquiétudes formulées du fait du niveau (« trop » ou « trop peu ») des dépenses publiques. On peut imaginer que ces affirmations récurrentes renvoient aux incidences du niveau des dépenses publiques sur l'utilisation des richesses économiques (leur « affectation » dans le jargon économique). Il est donc important d'examiner cette question avant celle de l' incidence des dépenses publiques sur la production des richesses économiques qui est la deuxième question abordée dans le présent rapport. Enfin, l'examen d'une troisième question , celle de la redistributivité des dépenses publiques , clôt le rapport.

PREMIÈRE QUESTION : LES DÉPENSES PUBLIQUES INFLUENCENT-ELLES SIGNIFICATIVEMENT L'UTILISATION DES RESSOURCES ÉCONOMIQUES ?

Vue sur la longue durée (plusieurs siècles), la réponse à cette question semble évidente puisque l'augmentation séculaire des dépenses publiques a correspondu à l'essor de biens et services publics (santé, éducation...) autrefois marginaux.

De même, des expériences-limites, comme celles des pays du bloc soviétique, montrent que la collectivisation des ressources économiques peut influencer leur utilisation.

Mais, c'est dans un autre cadre qu'on raisonne ici, en examinant, pour les pays de l'OCDE en ce début de XXIème siècle, la question de savoir si la place qu'ils réservent aux dépenses publiques a des incidences significatives sur l'usage qu'ils font de leurs ressources.

- Les niveaux de dépenses publiques dans les pays de l'OCDE sont très diversifiés quand on les appréhende à partir de leur poids dans le PIB .

DÉPENSES PUBLIQUES RAPPORTÉES AU PIB EN 2004

Source : OCDE

L' écart entre la France et les États-Unis atteint 18,4 points de PIB si bien que, pour que les États-Unis rattrapent le niveau des dépenses publiques en France, il leur faudrait augmenter leurs dépenses publiques de moitié.

L' écart-moyen entre quinze de principaux pays de l'OCDE, qui est un indice de dispersion permettant d'estimer si les situations nationales sont proches ou lointaines les unes des autres, s'élève à 7,9 points de PIB , soit environ 20 % du niveau moyen des dépenses publiques dans ces pays.

- La diversité des niveaux de dépenses publiques varie selon qu'on considère les dépenses sociales ou les dépenses de production. Elle est plus forte pour les premières que pour les secondes .

DÉPENSES PUBLIQUES RAPPORTÉES AU PIB EN 2004

1. Y compris les services de santé

Source : OCDE

- Par exemple, pour 19 grands pays de l'OCDE , l'écart-type à la moyenne de dépenses publiques sociales (22,8 points de PIB), est de 4,7 points de PIB.

Pour les dépenses publiques de production, la dispersion est légèrement moins forte.

- Il est intéressant d'observer qu'au niveau de l'OCDE, pour les dépenses publiques sociales, les trois quarts de la dispersion entre pays s'expliquent par les dépenses de retraite qui représentent pourtant un peu moins que la moitié des dépenses publiques sociales.

Pour les deux grandes catégories de dépenses publiques (de protection sociale et de production), il est possible d'établir des classements par pays qui montrent, d'une part, l'existence de noyaux durs assez homogènes et, d'autre part, certaines singularités nationales fortes au regard de telle ou telle dépense.

On doit aussi souligner un constat qui oblige à renoncer à une idée reçue : les dépenses publiques correspondant aux activités de l'État - producteur de services publics - sont relativement plus importantes dans les principaux pays anglo-saxons que dans les pays européens .

LA PRODUCTION DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

(en points de PIB)

2001

2006

Évolution 2006/2001

Autriche

15,2

15,0

- 0,2

Belgique

16,7

17,1

+ 0,4

Canada

22,2

22,4

+ 0,2

Danemark

27,4

27,1

- 0,3

France

20,9

21,1

+ 0,2

Irlande

14,3

15,6

+ 1,3

Italie

17,9

18,7

+ 0,8

Japon

13,6

12,6

- 1,0

Pays-Bas

18,9

19,1

+ 0,2

Portugal

20,2

19,5

- 0,7

Espagne

15,9

16,8

+ 0,9

Suède

28,5

27,6

- 0,9

Royaume-Uni

21,2

24,0

+ 2,8

États-Unis

18,5

19,8

+ 1,3

Moyenne arithmétique simple

19,0

19,3

+ 0,3

- S'agissant de la situation de la France , on observe que le niveau des dépenses publiques y est supérieur de 5,7 points de PIB par rapport à la moyenne de l'Europe des 25, soit 12,2 % de plus.

ÉCARTS ENTRE LE POIDS DES DÉPENSES PUBLIQUES EN FRANCE ET EN EUROPE 1
PAR FONCTION (2003)

En points de PIB

En % par rapport
à la moyenne

Protection sociale

+ 2,9

+ 15,2

Services publics généraux

+ 0,7

+ 10,4

Santé

+ 0,8

+ 10,8

Enseignement

+ 1,0

+ 25,5

Affaires économiques

- 0,8

- 20,0

Défense

+ 0,2

+ 11,8

Logement et équipements collectifs

+ 0,8

+ 80,0

Loisirs, culture et culte

+ 0,4

+ 40,0

Ordre et sécurité publics

- 0,4

- 24,0

Protection de l'environnement

+ 0,1

+ 14,3

Total

5,7

+ 12,2

1 Europe à 25.

Ce sont les dépenses publiques de protection sociale (+ 2,9 points) qui expliquent la majeure partie du surplus de dépenses publiques que connaît la France .

Les autres fonctions contribuant significativement à cet écart sont : l'« Enseignement » ( + 1 point ), le « Logement et les Équipements collectifs » ( + 0,8 point ) et la « Santé » ( + 0,8 point ).

Quand on compare la France à quelques grands pays de développement économique comparable, on observe que la France , qui a une position singulière au regard de la protection sociale, se situe autour de la moyenne pour les dépenses publiques correspondant à la production non marchande .

APERÇUS DE QUELQUES ÉCARTS RELATIFS AUX DÉPENSES PUBLIQUES REPRÉSENTATIVES DE LA PRODUCTION (HORS SANTÉ) DE BIENS ET SERVICES
DANS DIFFÉRENTS PAYS EN 2004 (EN POINTS DE PIB)

France

Allemagne

Italie

Suède

Royaume Uni

États-Unis

Moyenne

Écarts France

Moyenne des pays

États-Unis

Dépenses publiques liées à la production non marchande

23,7

18,6

23,9

24,5

20,5

22,7

22,3

+ 1,0

+ 1,4

Total dépenses publiques

53,4

46,6

48,1

54,6

44,4

37,1

47,4

+ 6,0

+16,3

Pour ces dépenses, le niveau des « consommations publiques » , notion de comptabilité nationale qui regroupe les consommations intermédiaires (par exemple, l'électricité consommée) et les salaires publics n'est que très faiblement plus élevé en France que dans les autres pays développés .

ÉVOLUTION DES CONSOMMATIONS PUBLIQUES
DANS LES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE ENTRE 1995 ET 2006

(en % du PIB)

1995

2006

Variation
du total
2006/1995

Consom-
mations
inter-
médiaires

Salaires

Total

Consom-
mations
inter-
médiaires

Salaires

Total

Autriche

6,0

12,5

18,5

4,5

9,3

13,8

- 4,7

Belgique

3,1

11,9

15,0

3,6

11,8

15,4

+ 0,4

Canada

8,4

13,7

22,1

8,9

11,6

20,5

- 1,6

Danemark

7,6

17,1

24,7

8,5

16,9

25,4

+ 0,7

Finlande

8,8

15,1

23,9

9,2

13,4

22,6

- 1,3

France

5,5

13,6

18,8

5,2

13,1

18,3

- 0,5

Allemagne

4,1

8,8

12,9

4,2

7,2

11,4

- 1,5

Irlande

5,6

10,1

15,7

5,0

9,7

14,7

- 1,0

Italie

4,8

11,0

15,8

5,3

11,1

16,4

+ 0,6

Corée

3,5

6,6

10,1

Nd

Nd

Nd

Nd

Luxembourg

3,5

8,5

12,0

3,1

7,4

10,5

- 1,5

Pays-Bas

6,6

10,6

17,2

7,2

9,4

16,6

- 0,6

Nouvelle-Zélande

7,1

9,2

16,3

Nd

Nd

Nd

Nd

Norvège

7,8

14,0

21,8

6,2

11,9

18,1

- 3,7

Portugal

Nd

Nd

Nd

4,1

13,6

17,7

Nd

Espagne

4,5

11,2

15,7

5,0

10,0

15,0

- 0,7

Suède

10,8

16,4

27,2

9,5

15,3

24,8

- 2,4

Suisse

3,7

8,4

12,1

Nd

Nd

Nd

Nd

Royaume-Uni

9,2

10,7

19,9

11,7

11,4

23,1

+ 3,2

États-Unis

7,2

10,4

17,6

8,4

10,1

18,5

+ 0,9

Moyenne arithmétique simple

6,2

11,6

17,8

6,5

11,4

17,9

Nd

Source : OCDE. Comptes nationaux. Comptes des administrations publiques.

De fait, si la France se caractérise par un niveau d'emplois publics relativement élevé , cette caractéristique ne trouve pas de prolongements à due proportion quand on observe les salaires publics .

Le poids de l'emploi public dans l'emploi total, qui a été constant entre 1993 et 2002, est supérieur en France de 5,3 points à ce qu'il est dans des pays comparables.

CLASSEMENT DES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE
SELON LE POIDS DE L'EMPLOI PUBLIC
(en % de l'emploi total)

Classement en 2002

Pays

% Emploi public
en 2002

Classement
en 1992

Classement
en 1982

Tendance
1993-2002

1

Suède

30,0

1

1

diminution

2

Danemark

29,0

2

2

augmentation

3

Finlande

22,4

3

4

constant

4

France

21,2

4

5

constant

5

Royaume-Uni

17,8

5

3

diminution

6

Portugal

17,0

7

14

augmentation

7

Belgique

16,8

6

6

constant

8

Luxembourg

14,9

10

10

constant

9

République Tchèque

14,8

Nd

Nd

diminution

10

États-Unis

14,7

9

8

constant

11

Italie

14,4

8

7

diminution

12

Espagne

13,0

13

15

augmentation

13

Autriche

12,2

11

13

diminution

14

Pologne

12,1

Nd

Nd

diminution

15

Grèce

11,4

16

16

constant

16

Irlande

11,0

14

11

diminution

17

Pays-Bas

10,7

15

12

diminution

18

Allemagne

10,2

12

9

diminution

19

Japon

8,1

17

17

constant

Moyenne (arithmétique simple)

15,9

NS

NS

NS

Source : OCDE (2003)

La France semble avoir une productivité par tête relativement faible dans le domaine de la production non marchande : égale à celle du Royaume-Uni mais inférieure à celle de l'Allemagne par exemple.

RAPPROCHEMENT DE LA PRODUCTION DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
ET DE L'EMPLOI PUBLIC

Production non marchande 1
(part du total)

A

Emploi public 2
(part du total)

B

Écarts
B - A

Suède

32,9

30,0

- 2,9

Danemark

30,4

29,0

- 1,4

France

30,9

21,2

- 9,7

Royaume-Uni

27,6

17,8

- 9,8

Belgique

31,3

16,8

- 14,5

États-Unis

29,9

14,7

- 15,2

Italie

29,7

14,4

- 15,3

Espagne

25,7

13,0

- 12,7

Autriche

29,4

12,2

- 17,2

Allemagne

24,7

10,2

- 14,5

Japon

26,7

8,1

- 18,6

1 En 2004.

2 En 2002.

Note de lecture : dans la première colonne, on recense le niveau de la production non marchande des administrations publiques approchée par les dépenses publiques hors dépenses de protection sociale ; dans la deuxième, on indique le poids relatif de l'emploi public dans l'emploi total ; la troisième colonne relève les différences par pays entre le deuxième et le premier chiffre. Il s'agit plus d'indicateurs que de mesures précises, mais ils donnent un aperçu du contenu en emplois de la production non marchande publique. Plus il est faible (plus le nombre est élevé), moins le contenu en emplois de la production non marchande est fort.

On peut attribuer une partie importante de cette situation au développement relatif de la production non marchande : pour les pays considérés, on remarque que plus celle-ci occupe une place importante moins la productivité relative du secteur public est forte. Il est vraisemblable qu'on puisse faire un constat symétriquement inverse pour le secteur privé : quand celui-ci assume des fonctions ailleurs à la charge du secteur public, fonctions qui correspondent à des activités où la productivité du travail est structurellement faible, la productivité du secteur privé doit en être affectée.

Mais, surtout, on doit relever que les écarts concernant les salaires publics sont nettement moins importants que ceux relatifs à l'emploi public .

SITUATION DES PRINCIPAUX PAYS DE L'OCDE
AU REGARD DES SALAIRES PUBLICS EN 2006

(en points de PIB)

Écart à la moyenne

Autriche

- 2,1

Belgique

+ 0,4

Canada

+ 0,2

Danemark

+ 5,5

Finlande

+ 2,0

France

+ 1,7

Allemagne

- 4,2

Irlande

- 1,7

Italie

- 0,3

Luxembourg

- 4,0

Pays-Bas

- 2,0

Norvège

+ 0,5

Portugal

+ 2,2

Espagne

- 1,4

Suède

+ 3,9

Royaume-Uni

0

États-Unis

- 1,3

Écart moyen à la moyenne

1,95

Le poids des salaires publics n'est, en France, supérieur que de 1,7 points de PIB par rapport à la moyenne de 17 grands pays de l'OCDE.

La rémunération par tête est donc inférieure à la moyenne observée dans les pays développés.

- Si les pays diffèrent beaucoup au regard du niveau des dépenses publiques dans le PIB, les différences dans l'utilisation globale des ressources économiques sont nettement moins marquées .

Quand on ajoute les dépenses privées aux dépenses publiques recensées au titre des fonctions dans lesquelles celles-ci interviennent, les ressources économiques consacrées à chacune d'elles, de très disparates deviennent nettement plus homogènes.

MÉTHODE

Les dépenses publiques sont réparties entre 10 fonctions répertoriées par la nomenclature internationale « classement des fonctions des administrations publiques (CFAP ou, en anglais, COFOG).

Pour mesurer le total des ressources économiques consacrées à ces fonctions, on ajoute, quand les données disponibles le permettent, les dépenses privées aux dépenses publiques.

Ce constat est renforcé, quand on ajoute en plus des dépenses privées, les dépenses fiscales (celles dont la compilation est disponible) et les effets de la fiscalité sur les revenus résultant du versement des dépenses publiques.

Dans le champ des dépenses sociales et pour quelques grands pays de l'OCDE, l'écart moyen à la moyenne passe de 4,8 (pour les seules dépenses publiques) à 3,8 points de PIB (pour la totalité des dépenses). Des pays situés très au-dessous de la moyenne sous l'angle des dépenses publiques à caractère social - les États-Unis (- 6,2 points de PIB), le Royaume-Uni (- 1,8 point de PIB) - se trouvent consacrer à la protection sociale des dépenses totales supérieures à la moyenne : États-Unis (+ 4,8 points de PIB), Royaume-Uni (+ 2,5 points de PIB).

Les dépenses de retraite jouent un rôle important dans ce processus d'homogénéisation puisque, souvent, quand les dépenses publiques de retraite sont relativement faibles, les dépenses privées sont, au contraire, relativement élevées.

POSITION DES PAYS SELON LE NIVEAU DES DÉPENSES PUBLIQUES ET PRIVÉES
DE RETRAITE

Il faut ajouter que les données utilisées pour apprécier le niveau d'homogénéité des dépenses sociales ne sont pas exhaustives, ce qui accentue sans doute les écarts apparents. En effet, ne sont prises en compte ni les dépenses familiales, ni une partie des dépenses fiscales, ni les prélèvements opérés à partir des patrimoines privés, toutes données qui semblent d'autant plus importantes que les couvertures publiques des risques sociaux sont moins développées.

Des observations analogues peuvent être faites dans le domaine de l'éducation .

DÉPENSES D'ÉDUCATION AU TITRE DES ÉTABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT EN 1999
(en % du PIB)

Dépenses

Publiques

Dépenses

Privées

Dépenses

totales

Japon

3,5

1,2

4,7

Grèce

3,6

0,3

3,9

Turquie

3,9

0

3,9

Corée

4,1

2,7

6,8

Pays-Bas

4,2

0,5

4,7

Irlande

4,2

0,4

4,6

Slovaquie

4,3

0,1

4,4

Allemagne

4,3

1,2

5,5

Italie

4,3

0,5

4,8

Royaume-Uni

4,3

0,9

5,2

États-Unis

4,9

1,6

6,5

Suisse

5,4

0,5

5,9

Finlande

5,7

0

5,7

France

5,8

0,5

6,3

Autriche

6,0

0,4

6,4

Danemark

6,4

0,3

6,7

Suède

6,5

0,2

6,7

Norvège

6,5

0,1

6,6

Source : OCDE, DPD. Ministère de l'Éducation.

Globalement, la prise en compte des dépenses privées d'éducation égalise les situations.

*

* *

Au total, la dispersion des dépenses privées dans le domaine de la protection sociale et dans celui de l'éducation - inverse de celle des dépenses publiques - conduit à réduire significativement les effets de la dispersion des niveaux d'intervention publique sur l'utilisation globale des ressources économiques .

Il existe, en effet, un phénomène de vases communicants dont les États-Unis offrent un exemple particulièrement illustratif . On y consacre 6 points de PIB de moins qu'en moyenne aux dépenses publiques de protection sociale et d'éducation mais 7,5 points de PIB de plus aux dépenses privées. Au niveau de l'OCDE , la dispersion des dépenses publiques consacrées à ces fonctions est divisée par deux quand on considère les différents redressements explicités plus haut. Les pays consacrent finalement, à 8 % près (2,7 points de PIB), les mêmes ressources à ces fonctions. Cette marge de variation qui serait encore plus faible si un recensement plus exhaustif des moyens était disponible et qui doit être appréciée en tenant compte des écarts de situations économiques, notamment conjoncturels, ou de données physiques différenciées (les incidences de la démographie, par exemple), montre que le niveau des dépenses publiques n'est pas un déterminant majeur de l'utilisation du revenu national .

Le niveau relatif de développement économique est la variable qui apparaît essentielle .

PROTECTION SOCIALE ET PIB PAR TÊTE EN PARITÉS DE POUVOIR D'ACHAT (PPA)
EN 2003

Protection sociale par tête en PPA PIB par tête en PPA

Source : EUROSTAT, SESPROS

Ces constats, souvent négligés au profit d'une dramatisation des enjeux associés au niveau des dépenses publiques, confirment l'existence d'une certaine homogénéité des aspirations des agents économiques et le rôle discriminant pour leur réalisation joué par la contrainte financière (ici le niveau de richesse d'un pays).

Ils ne doivent pas être mal interprétés :

- si, malgré des niveaux très différents de dépenses publiques, l'utilisation globale du revenu est plutôt homogène, le degré de l'intervention publique a des incidences sur les inégalités (cf. troisième partie du présent rapport) et les écarts subsistant entre pays quant à l'utilisation des ressources économiques sont, en partie, le résultat du rationnement que subissent certains agents du fait de la plus grande sélectivité des assurances et services publics dans certains pays ;

- l'équivalence globale des niveaux des ressources économiques allouées aux fonctions dans lesquelles se manifeste l'intervention publique ne dispense pas d'un examen et d'une évaluation systématiques de l'impact de chaque dépense publique notamment lorsque des situations singulières - dont certaines sont identifiées dans le rapport - sont constatées.

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