II. DEUX FACTEURS ESSENTIELS DE DÉRIVE

Bien que le système soit relativement bien encadré, des « dérapages » peuvent se produire à deux niveaux :

- le comptable public peut, le cas échéant sous la pression de l'autorité politique, interpréter de manière contestable les règles de la comptabilité nationale (la plupart des Etats membres se sont rendus coupables, à des degrés variables, de ce genre de pratique) ;

- mais les dérives les plus graves concernent le cas où les données de comptabilité publique utilisées par le comptable national sont délibérément faussées. Ce phénomène n'a semble-t-il concerné à ce jour qu'un seul Etat de l'Union européenne, la Grèce.

A. L'INTERPRÉTATION LAXISTE DES RÈGLES DE LA COMPTABILITÉ NATIONALE : UNE PRATIQUE PLUS DIFFICILE QU'IL Y A QUELQUES ANNÉES

La situation grecque est une anomalie au sein de la zone euro. En effet, il ne semble pas qu'aucun autre Etat ait falsifié ses chiffres 9 ( * ) .

Les autres Etats membres ne sont pas pour autant irréprochables. Ainsi, comme l'a souligné Benoît Coeuré, ils ont fréquemment recouru à des pratiques d' « optimisation comptable » 10 ( * ) .

1. Des pratiques longtemps répandues

De nombreux Etats membres ont recouru à des pratiques comptables contestables, même si elles n'étaient pas nécessairement contraires aux règles d'Eurostat : titrisation de revenus futurs, partenariats public-privé, swaps de devises, enregistrement des impôts en droits constatés, et d'une manière générale recettes exceptionnelles.

Ces pratiques, ainsi que d'autres, ont été portées à l'attention du grand public par la presse. A titre d'exemple, on peut mentionner un article 11 ( * ) de Mark Brown et Alex Chambers, publié en 2005 dans le magazine Euromoney . Selon cet article, sans ces mesures. - dont diverses titrisations. -, l'Italie aurait été en déficit excessif de manière quasiment continue dans la première moitié des années 2000 12 ( * ) .

a) Les recettes exceptionnelles

Une pratique répandue jusqu'à la réforme du pacte de stabilité de 2005 a été le recours à des mesures exceptionnelles, incluant des soultes, la vente de licences UMTS 13 ( * ) , des mesures fiscales ponctuelles et des opérations de titrisation de créances publiques.

Impact des principales mesures budgétaires exceptionnelles (recettes) sur le solde public, recensées dans l'Union européenne à Quinze (1997-2004)

(en points de PIB)

Source : Banque de France, Bulletin n° 128, août 2004, d'après Commission européenne, « Public finances in EMU 2004 », European Economy, 2004

Ainsi, la France a recouru à la fameuse soulte de France Télécom. Benoît Coeuré estime que celle-ci était justifiée et s'est faite dans la transparence comptable 14 ( * ) . Votre rapporteur, alors ministre de l'économie et des finances, est plus dubitatif à ce sujet.

Dans le cas de la France, on peut ajouter à ces soultes celle, de 0,4 point de PIB, versée en 2005 par la Caisse nationale des industries électriques et gazières (CNIEG), chargée du financement des retraites d'EDF, au fonds de réserve pour les retraites (FRR).

b) La titrisation de revenus futurs

Une pratique emblématique a été la titrisation de revenus futurs.

Comme l'explique Benoît Coeuré, « les titrisations de créances de sécurité sociale sont tout simplement la cession à une banque d'un droit sur des flux futurs de recettes en matière de sécurité sociale ». Cela ne pose pas de problème si cette dette des administrations publiques est bien intégrée dans la dette publique, ce qui n'était pas le cas à l'époque. Ainsi, « il y a eu des titrisations de recettes de sécurité sociale, certes pas en France. Certains pays ont par exemple procédé à des titrisations de recettes de loterie, voire même à des titrisations d'impôts sur le revenu futur. - ce qui et encore plus étrange, conceptuellement ».

Benoît Coeuré estime cependant que la titrisation peut parfois être justifiée, comme dans le cas de la titrisation des recettes fiscales belges 15 ( * ) .

La France n'a, en ce qui la concerne, jamais recouru à la titrisation.

2. Des pratiques auxquelles il est désormais plus difficile de recourir

Il serait désormais plus difficile de recourir à de telles pratiques, pour deux raisons essentielles.

a) La modification de la jurisprudence d'Eurostat

Tout d'abord, Eurostat a modifié sa jurisprudence dans le sens d'une plus grande rigueur.

En ce qui concerne la lutte contre l' « optimisation comptable », on peut citer en particulier les décisions concernant :

- les partenariats public-privé (11 février 2004) ;

- les opérations de titrisation effectuées par les administrations publiques (3 juillet 2002 et surtout 25 juin 2007).

(1) La modification de la jurisprudence d'Eurostat relative aux titrisations

Eurostat a publié, le 25 juin 2007, une décision, non rétroactive, tendant à rendre plus contraignante la prise en compte des opérations de titrisation par les comptes nationaux 16 ( * ) .

Selon cette décision, doivent être comptabilisées comme emprunt public les opérations de titrisation relatives à des créances fiscales ou dont le risque n'est pas effectivement transféré à l'acquéreur 17 ( * ) .

Comme l'ont souligné Benoît Coeuré et Gallo Gueye, cette décision d'Eurostat a entraîné la quasi disparition des opérations de titrisation 18 ( * ) .

(2) La modification de la jurisprudence d'Eurostat relative aux partenariats public-privé

Dans le cas des partenariats public-privé (PPP), Eurostat a publié une décision le 11 février 2004.

Les principes de cette décision ont été présentés par notre collègue Charles Guené dans son rapport pour avis 19 ( * ) sur le projet de loi relatif aux contrats de partenariat, les partenariats public-privé (PPP).


La prise en compte des partenariats public-privé par la comptabilité nationale

« Eurostat a adopté, le 11 février 2004, une décision relative au traitement comptable dans les comptes nationaux des PPP et à leur impact sur le déficit/excédent public et la dette publique. L'office statistique recommande que les actifs liés à un partenariat public-privé soient classés comme actifs non publics et ne soient donc pas enregistrés dans le bilan des administrations publiques si les deux conditions suivantes sont réunies :

« - le partenaire privé supporte le risque de construction ;

« - le partenaire privé supporte au moins l'un des deux risques suivants : celui de disponibilité ou celui lié à la demande.

« Si le risque de construction est supporté par l'Etat, ou si le partenaire privé supporte seulement le risque de construction et aucun autre risque, les actifs sont classés comme actifs publics, ce qui a des conséquences importantes pour les finances publiques, tant du point de vue du déficit que de la dette. Les dépenses initiales en capital, relatives aux actifs, seront enregistrées comme formation de capital fixe des administrations publiques, avec un impact sur le déficit/excédent public. En contrepartie de cette dépense de l'Etat, la dette publique augmentera sous la forme d'un « prêt imputé » du partenaire, qui fait partie du concept de « la dette de Maastricht ».

« Le risque de construction couvre notamment les livraisons tardives, le non-respect des normes, les surcoûts, ou encore la déficience technique. "L'obligation de l'Etat de commencer à effectuer des paiements réguliers à un partenaire sans tenir compte de l'état effectif des actifs est la preuve que l'Etat supporte la majorité des risques de construction", selon Eurostat.

« L'Etat est réputé ne pas supporter le risque de disponibilité s'il lui est permis de réduire de façon significative (à titre de pénalité) ses paiements périodiques, comme tout "client normal" pourrait l'exiger dans un contrat commercial lorsque le partenaire privé s'avère ne pas être en mesure de livrer le volume contractuellement convenu ou de répondre, comme spécifié dans le contrat, aux normes de sécurité et de certification publiques liées à la prestation de service aux utilisateurs finals. Ceci s'applique également lorsque le partenaire ne répond pas aux normes de qualité relatives à la prestation de services, requises dans le contrat et découlant d'un manque évident de "performance" du partenaire.

« Le risque lié à la demande couvre, pour sa part, la variabilité de la demande plus élevée ou plus faible qu'escomptée lors de la signature du contrat lorsque celle-ci n'est pas imputable au comportement ou à la gestion du partenaire du secteur privé. Le gouvernement sera réputé assumer le risque lorsque celui-ci est obligé de garantir un niveau donné de paiement au partenaire indépendamment du risque effectif de la demande exprimée par l'utilisateur final, rendant sans effet les fluctuations du niveau de la demande sur la rentabilité au partenaire.

« L'analyse d'Eurostat peut conduire à une modification dans le partage des risques entre le partenaire public et le partenaire privé : c'est en effet la partie qui est relativement la plus exposée, même à hauteur de 51 %, qui porte la totalité des engagements liés aux contrats : ceci peut conduire un contractant public à transférer des risques additionnels au prestataire privé à des fins purement déconsolidantes. Cette hypothèse a été confirmée en audition par votre rapporteur pour avis des responsables du ministère de la justice : le partage des risques du contrat de partenariat conclu en février 2008 relatif aux prisons a été conçu à des fins consolidantes. »

Source : Charles Guené, avis n° 243 (2007-2008) fait au nom de la commission des finances, déposé le 26 mars 2008

Ainsi, le 31 mars 2010, c'est-à-dire le jour même des auditions de Jean-Philippe Cotis, Paul Champsaur, Benoît Coeuré et Gallo Gueye par la commission des finances, l'Insee a publié une estimation de la dette publique au 31 décembre 2009 prenant en compte sa requalification des partenariats conclus pour la construction de prisons en les réintégrant dans la dette publique 20 ( * ) .

b) La réforme du pacte de stabilité de 2005 et la prise en compte du déficit hors mesures temporaires

Par ailleurs, la réforme du pacte de stabilité de 2005 a fait quasiment disparaître l'intérêt des mesures exceptionnelles puisque celles-ci ne sont plus prises en compte en ce qui concerne la variation annuelle du solde public (même si toutefois la limite de déficit de 3 points de PIB continue de s'apprécier en termes de déficit effectif). La notion utilisée est désormais celle du « solde budgétaire corrigé des variations conjoncturelles, déduction faite des mesures ponctuelles et autres mesures temporaires ».

Ainsi, selon le règlement n° 1055/2005 du Conseil du 27 juin 2005 21 ( * ) , « lorsqu'il évalue la trajectoire d'ajustement qui doit conduire à la réalisation de l'objectif budgétaire à moyen terme, le Conseil examine si l'État membre concerné procède à l'amélioration annuelle de son solde budgétaire corrigé des variations conjoncturelles, déduction faite des mesures ponctuelles et autres mesures temporaires , de 0,5 % du PIB en tant que référence, requise pour atteindre son objectif budgétaire à moyen terme ».

Surtout, le règlement n° 1056/2005 du Conseil du 27 juin 2005 22 ( * ) prévoit que, quand il lui demande d'adopter une action suivie d'effet, ou le met en demeure de mettre fin à son déficit excessif dans un certain délai, le Conseil « invite l'État membre concerné à parvenir à une amélioration annuelle minimale, correspondant à au moins 0,5 % du PIB à titre de référence, de son solde budgétaire corrigé des variations conjoncturelles, déduction faite des mesures ponctuelles et autres mesures temporaires , dans le but d'assurer la correction du déficit excessif dans le délai fixé dans les recommandations ».

Ainsi, comme le souligne Benoît Coeuré, « s'il y avait une titrisation que l'on considérerait comme justifiée au plan économique ou du point de vue de la réforme de l'Etat, on pourrait la faire mais la Commission n'en tiendrait alors pas compte dans l'évolution de la trajectoire de finances publiques ».

3. Dans le cas de la France : la création de l'autorité de la statistique publique (2008)

Dans le cas de la France, l'Insee répond aux exigences d'impartialité que l'on attend d'un institut statistique.

On rappelle que l'article 144 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie a modifié la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques, afin de créer « une Autorité de la statistique publique qui veille au respect du principe d'indépendance professionnelle dans la conception, la production et la diffusion de statistiques publiques ainsi que des principes d'objectivité, d'impartialité, de pertinence et de qualité des données produites ». Cette autorité administrative indépendante, présidée par Paul Champsaur, ancien directeur général de l'Insee, comprend neuf membres, dont notre ancien collègue Yves Fréville, vice-président, désigné par le président du Sénat.

L'intérêt de la mise en place de l'autorité statistique a été souligné par Benoît Coeuré 23 ( * ) .

Comme on l'a vu plus haut, l'indépendance de l'Insee a en outre pu être mise en évidence lors des auditions par la commission des finances, l'institut ayant publié le 31 mars 2010 un montant de l'encours de dette publique au 31 décembre 2009 requalifiant les partenariats conclus pour la construction de prisons en les réintégrant dans la dette publique.


* 9 Jean-Philippe Cotis a ainsi déclaré, lors de son audition par la commission des finances : « Très honnêtement, les institutions budgétaires et statistiques de l'Union européenne sont en moyenne très satisfaisantes. Il y a une idiosyncrasie grecque, avec une première crise puis une deuxième. Le fond du problème est que les finances publiques et la comptabilité budgétaire n'étaient pas, dans leur ensemble, sincères et elles ne l'étaient pas à l'échelle du gouvernement. » De même, Benoît Coeuré a estimé : « En termes de sincérité, il me semble (...) que la Grèce est un cas vraiment à part. Les rapports d'Eurostat sur ce pays ont bien mis en évidence l'absence d'indépendance de l'institut de statistiques, la manipulation des comptes par le Gouvernement et le fait qu'il y avait un problème de gouvernance majeur en Grèce. (...) C'est un problème spécifiquement grec et, à ma connaissance, je ne crois pas que qu'il y ait eu des problèmes d'insincérité des comptes à la même échelle dans les autres pays européens. Je ne le crois pas. »

* 10 Benoît Coeuré a ainsi déclaré, lors de son audition par la commission des finances : « Je pense qu'il faut différencier l'optimisation comptable et la sincérité. Toute règle entraîne une forme d'optimisation, et pendant toute la période où les règles en matière de titrisation et de partenariat public/privé étaient relativement accommodantes, un certain nombre de pays ont procédé à ces opérations. Mais ils ont arrêté de le faire depuis que les règles ont été durcies. (...) Il y a donc eu de l'optimisation comptable par le passé. Elle n'était pas litigieuse mais elle résultait simplement de l'utilisation des règles existantes. »

* 11 Mark Brown, Alex Chambers, « How Europe's governements have enronized their debts », 1er septembre 2005.

* 12 « Italy has used one-off measures including tax amnesties, sales of future revenue streams, real estate asset sales and the CDP deal to keep its deficit within 3% of GDP in four of the past five years, according to Fitch » (« L'Italie a utilisé des mesures temporaires incluant des amnisties fiscales, des ventes de flux futurs de recettes, des cessions immobilières et l'opération de la [ Cassa Depositif e Prestiti ] pour maintenir son déficit sous les 3 points de PIB quatre des cinq dernières années, selon Fitch »).

* 13 « Universal Mobile Telecommunications System ». Il s'agit d'une des technologies de téléphonie mobile de troisième génération européenne.

* 14 Benoît Coeuré a ainsi déclaré, lors de son audition par la commission des finances : « Je pense à la soulte France Télécom de 1997. La presse nous en fait parfois le reproche comme étant un artifice comptable, mais il fallait changer le statut des personnels de France Télécom. L'important était que cela soit fait dans la transparence comptable et n'affecte pas le jugement porté par les autres pays européens et par la Commission européenne sur notre trajectoire budgétaire et nos engagements en matière de réduction des déficits. Ce n'était pas le cas en 1997 comme aujourd'hui (...) ».

* 15 « Elles étaient à l'époque présentées par le Trésor belge comme une manière d'augmenter le taux de collecte de l'impôt. Le contrôle de la perception était toujours opéré par l'administration d'Etat mais il y avait une incitation financière. Le produit futur de l'impôt avait été cédé sur le marché et une partie du produit avait été utilisée pour créer une incitation financière, une forme d'intéressement de l'administration fiscale au taux de collecte. On pouvait donc considérer que cette technique financière accompagnait une réforme de l'Etat, à savoir l'intéressement de l'administration fiscale à l'amélioration du taux de collecte. Cela pouvait être le cas ou non, mais l'essentiel demeure la neutralité comptable et l'absence de diminution de la dette publique. »

* 16 La première décision d'Eurostat relative aux opérations de titrisation date de 2002.

* 17 Ce qui concerne les opérations comprenant une clause de prix d'achat différé (suggérant que l'acquéreur n'a pas la pleine propriété économique des actifs) ; ou comprenant une clause relative à la possibilité de substitution d'actifs (par exemple si l'on constate a posteriori que les actifs prévus ne peuvent être collectés) ; ou comprenant une clause stipulant une compensation ex ante des administrations publiques (par exemple en cas de déficit de l'acquéreur) ; ou se traduisant ex post (même si cela n'est pas prévu dans le contrat) par une compensation de la part du Gouvernement (cette compensation accroissant en outre le déficit public l'année où la compensation est décidée).

* 18 Selon Benoît Coeuré, « un certain nombre d'opérations réalisées par plusieurs Etats européens en matière de titrisation, leur ayant permis de se procurer des ressources financières sans augmenter leur dette publique, ne seraient aujourd'hui plus possibles. Je pense en particulier à la titrisation de créances dans le domaine de la sécurité sociale ». De même, selon Gallo Gueye, « les décisions prises par Eurostat en ce qui concerne la titrisation ont fait que, depuis 2007, ce type d'opération s'est complètement raréfié, voire évanoui ».

* 19 Avis n° 243 (2007-2008), 26 mars 2008.

* 20 Benoît Coeuré a ainsi déclaré, lors de son audition par la commission des finances : « Eurostat a également durci sa jurisprudence en matière de partenariat public/privé. On en a d'ailleurs eu une illustration ce matin à travers les chiffres publiés par l'Insee sur la dette du quatrième trimestre 2009 puisqu'il a notamment requalifié les partenariats conclus pour la construction de prisons en les réintégrant dans la dette publique. (...) L'Insee n'a fait qu'appliquer les nouvelles règles d'Eurostat datant de 2007. »

* 21 Règlement modifiant le règlement (CE) n° 1466/97 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques.

* 22 Règlement modifiant le règlement (CE) n o 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la procédure concernant les déficits excessifs.

* 23 « Mon sentiment à ce sujet est que l'article 144 de la loi de modernisation de l'économie a déjà fait faire un grand progrès pour l'indépendance de l'Insee avec la création de l'autorité statistique ».

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