C. LES ENSEIGNEMENTS POUVANT EN ÊTRE TIRÉS

1. Pas de « recette idéale » mécaniquement transposable...

Les pays réalisant de bonnes performances présentent de grandes disparités d'organisation sociale, de structuration politique et administrative et de configuration des études. Il n'est donc pas possible de définir un idéal-type que l'on pourrait appliquer mécaniquement à n'importe quel pays.

Toutefois, le choc que créent les résultats de l'enquête est à l'origine de l'évolution du système éducatif dans un grand nombre de pays . Ainsi l'Allemagne, pourtant longtemps considérée comme un modèle, a-t-elle été surprise de constater les mauvaises performances de ses élèves dans les trois domaines étudiés, l'impact très important du milieu social sur la performance des jeunes et le caractère élitiste de l'accès au lycée et à l'université.

2. ... mais un faisceau de facteurs invitant à l'autoévaluation...

a) Les principaux facteurs du succès finlandais

Les analyses de votre délégation, présentées au sein du présent rapport, permettent de tracer les contours du « modèle finlandais ».

Elles recoupent largement celles présentées devant votre commission, le 13 octobre 2009, par M. Eric Charbonnier, analyste à la direction de l'éducation de l'OCDE .

En définitive, les résultats finlandais sont meilleurs, y compris que ceux des autres pays scandinaves, notamment en raison :

- de la formation des enseignants, qui comprend un apprentissage et une évaluation des capacités en matière de communication, de transmission des savoirs et de psychologie, fondamentales pour réussir dans cette profession ;

- du respect des enseignants par les parents, les chefs d'établissement, les élèves, et plus généralement par l'ensemble de la société, sachant que leurs salaires sont comparables à ceux des enseignants français ;

- les fonctions de chef d'établissement constituent en Finlande un métier à part entière, confiées essentiellement à des gestionnaires, qui peuvent largement choisir leur équipe pédagogique, alors que l'un des problèmes français réside dans le manque de confiance entre les différents acteurs de l'éducation et l'absence de véritables équipes enseignantes, à la différence d'autres pays où la notion de travail en équipe éducative est essentielle.

On peut citer également :

- un système éducatif caractérisé par une forte autonomie des élèves ;

- le caractère modulaire de l'enseignement au lycée, qui entraîne la possibilité d'un choix des élèves, au risque d'une spécialisation précoce ;

- une charge de travail moins lourde qu'en France ;

- ou, plus généralement, la culture et la population finlandaises, dont la démographie et le nombre de nationalités présentes au sein d'un même établissement sont très éloignées de la situation française.

b) Pouvons-nous adopter et adapter quelques « secrets de fabrication » ?

Votre commission rappelle que la proportion d'élèves français en difficulté s'accroît depuis neuf ans , le système éducatif peinant à les aider à combler leur retard. Pourtant, ainsi qu'il a été dit, les élèves français de 7 à 15 ans assistent à 1 heure 30 de cours de plus que les élèves finlandais. En effet, le système français comporte le plus grand nombre d'heures, notamment au lycée. Pour le représentant de l'OCDE : « la lourdeur des programmes ainsi que la faiblesse du travail en petits groupes et du soutien individualisé au sein de l'école, contribuent à expliquer le taux de redoublement et l'augmentation de la proportion d'élèves en difficulté. »

Les réformes du système éducatif français se mettent cependant en place, même si, pour M. Eric Charbonnier, elles risquent d'imposer aux élèves des journées très longues.

Pour M. Paul Robert, précité : « sans chercher à « finlandiser » la France, on pourrait sûrement acclimater certains aspects d'un système qui ne cesse de faire ses preuves. Qu'on ne se leurre pas, toutefois. Ce n'est pas en saupoudrant, de-ci de-là, telle ou telle recette, ou en changeant les programmes du primaire, du collège ou du lycée qu'on pourra faire avancer les choses. Rien ne bougera, dans notre pays, tant qu'on n'aura pas modifié radicalement la formation des enseignants et tant que ces derniers continueront à transmettre des savoirs de façon abstraite, faute d'avoir acquis les outils suffisants leur permettant de s'adresser de manière efficace à tous les élèves, quel que soit leur profil. En Finlande, près de la moitié de la formation d'un enseignant est consacrée à la pédagogie, et les stages commencent dès la première année de leurs études. Nous sommes loin du compte en France, où l'on considère que la maîtrise d'un contenu disciplinaire est une qualification suffisante pour s'engager dans ce métier même si le nouveau schéma de la formation inclut des stages de sensibilisation en master 1 et 2. Enfin, en Finlande, le professeur n'est pas que professeur. Il est aussi surveillant, parfois « assistant social » ; il n'hésite pas à se rendre au domicile de ses élèves. Il n'y a pas, comme chez nous, ce cloisonnement étanche entre la sacro-sainte délivrance du savoir et le reste. »

Quoique l'on puisse penser de cette approche, qui a ses adeptes et ses détracteurs , l'étude du système éducatif finlandais incite votre commission à souhaiter la prise en compte des quatre facteurs suivants pour toute réforme de l'enseignement secondaire , ainsi que l'a indiqué son rapporteur pour l'enseignement scolaire, dans son rapport précité :

- le développement de l'autonomie des établissements ;

- le renforcement de la formation des enseignants tout au long de leur carrière ;

- la nécessité de créer un système d'orientation efficace accessible à tous ;

- la réalisation périodique d'évaluations indépendantes des résultats au niveau des établissements et des académies.

Par ailleurs, votre commission partage avec M. Eric Charbonnier l'idée selon laquelle un changement des mentalités est nécessaire afin que les mathématiques ne constituent plus la discipline primordiale pour l'orientation des jeunes. De nombreux pays disposent d'un système comportant un tronc d'enseignements communs, assorti de la possibilité pour l'élève de choisir des matières optionnelles à concurrence d'au moins 10 à 15 % des heures de cours. Cela implique aussi une réflexion sur la prédominance des mathématiques dans les examens.

Enfin, pour votre commission, la formation des enseignants doit mettre davantage l'accent sur le développement des compétences pédagogiques, et leur sélection doit mieux prendre en compte ces dernières.

En effet, notre pays est culturellement très attaché à la formation disciplinaire de ses enseignants, trop souvent au détriment des principales qualités requises d'un professeur : le talent pédagogique, la motivation et la capacité à transmettre ses connaissances.

Telle est la priorité affichée par la Finlande et votre délégation y voit l'une des raisons majeures de sa réussite éducative.

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