B. LA NÉCESSITÉ D'UN SOUTIEN FISCAL POUR ATTEINDRE L'OPTIMUM ÉCONOMIQUE

1. Des investissements spontanés insuffisants

Une fois établie l'importance de disposer d'une importante activité de recherche, et notamment de R&D privée, sur le sol national, il s'agit de savoir si la marche normale des entreprises, sans soutien public, permet d'atteindre spontanément l'optimum économique et social.

Les études menées sur ce sujet montrent que tel n'est pas le cas.

En effet, l'activité de R&D des entreprises engendre des « externalités positives », c'est-à-dire qu'elle ne profite pas seulement à ceux qui la mènent et la financent, mais également à d'autres entreprises et à l'ensemble de la société du fait de la diffusion technologique. L'annexe du rapport précité 9 ( * ) de notre collègue Joël Bourdin détaille ce processus. Il y est bien souligné que les rendements privés de la R&D sont plus faibles que les rendements sociaux (et à la limite les premiers peuvent être décroissants et les seconds croissants) en raison de transferts de connaissances entre les différents acteurs. L'innovation produit des effets dans l'entreprise mais la diffusion de cette innovation par différents canaux (brevets, littérature scientifique, échanges de savoir faire, échanges de personnels, échanges de biens entre firmes ou nations) va produire des effets complémentaires très importants qui vont augmenter les rendements de la recherche au point qu'ils peuvent devenir non décroissants.

En conséquence, ne pouvant capter tous les bénéfices de leur activité de R&D, les entreprises tendent à sous-investir par rapport à ce qui serait souhaitable du point de vue de la société , ce que souligne également bien le dernier rapport au Parlement 10 ( * ) sur le crédit d'impôt recherche établi par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche (MESR).

Dès lors, un soutien public à cette activité, tendant à abaisser son coût pour les entreprises, apparaît à la fois légitime et potentiellement efficace d'un point de vue économique.

De plus, le risque inhérent à certains types de recherches, à la fois novatrices et « gourmandes » en capitaux, peut rendre indispensable un tel soutien public, les acteurs privés n'étant pas, le plus souvent, en mesure d'assumer seuls de tels risques.

2. L'outil fiscal apparaît bien adapté pour soutenir la R&D privée

A partir de ce constat, le soutien public à la R&D privée peut prendre plusieurs formes, en particulier les subventions et les aides fiscales.

La France, comme de nombreux pays, utilise ces deux instruments, qui présentent chacun des mérites : meilleur ciblage, meilleur contrôle et bonne garantie contre les « effets d'aubaine » dans le cas des subventions ; plus grande puissance, neutralité sectorielle et meilleure utilisation par le marché pour les aides fiscales.

D'une manière générale, comme l'a montré l'analyse du tableau de bord européen de l'innovation, établi par la Commission européenne en octobre 2001, « les incitations fiscales [sont] les moyens privilégiés par les gouvernements désireux d'encourager les dépenses d'innovation dans l'ensemble de l'économie » et elles apparaissent bien adaptées pour les Etats dont le taux de l'impôt sur les sociétés est élevé .

Dans son rapport public annuel de 2007, la Cour des comptes a repris cette analyse et souligné que « malgré les effets d'aubaine inévitables on admet généralement que la dépense fiscale , et singulièrement le crédit d'impôt recherche, permet d'atteindre les objectifs poursuivis dans des conditions satisfaisantes dès lors que ce sont les entreprises elles-mêmes qui déterminent le montant de l'aide fiscale selon un dispositif leur faisant supporter la part essentielle des dépenses de recherche ».

* 9 Rapport d'information Sénat n° 391 (2003-2004).

* 10 Rapport au Parlement sur le crédit d'impôt recherche, mars 2010.

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