3. Une gestion opérationnelle assurée par les agences dans des conditions globalement satisfaisantes
a) Un trinôme ANRU, ACSE, EPARECA qui connaît parfois des tensions

La mise en oeuvre de la politique de la ville repose sur l'action de plusieurs établissements publics, opérateurs à titre principal ou secondaire de la mission « Ville et logement », essentiellement au titre du programme 147 « Politique de la ville ».

Ces opérateurs sont au nombre de quatre : ANRU, ACSE, EPARECA, EPIDe. Si le SG-CIV exerce une tutelle (toujours partagée) sur chacun d'entre eux, seuls trois bénéficient, en 2010, de subventions pour charges de service public inscrites au programme « Politique de la ville » : l'ACSE (pour 12 millions d'euros), l'ANRU (5 millions d'euros) et l'EPIDe (26 millions d'euros) 12 ( * ) . Ce dernier établissement ayant un rôle très spécifique, c'est en réalité sur le trinôme ANRU, ACSE et EPARECA que repose l'exécution de la politique de la ville.

Les trois agences « piliers » de la politique de la ville.

L'ACSE a été créée par la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances pour renforcer l'action de l'Etat en faveur des habitants des 2 213 quartiers de la politique de la ville par des actions en faveur des personnes rencontrant des difficultés d'insertion sociale ou professionnelle et pour promouvoir l'égalité des chances et la diversité. Elle gère l'essentiel des crédits spécifiques consacrés par l'Etat à ces priorités ainsi que le fonds interministériel de prévention de la délinquance.

L'ANRU est un établissement public à caractère industriel et commercial créé par la loi du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine dans le but de simplifier l'ensemble des procédures et des financements du secteur de la rénovation urbaine. Elle apporte, dans le cadre du programme national de rénovation urbaine (PNRU), son soutien aux collectivités, aux établissements publics et organismes privés ou publics conduisant des opérations de restructuration urbaine, tant en matière de construction ou réhabilitation de logements sociaux que d'aménagement des quartiers prioritaires de la politique de la ville. A compter de 2009, l'essentiel des moyens d'intervention de l'ANRU est constitué d'une partie du produit de la participation des employeurs à l'effort de construction.

Etablissement public à caractère industriel et commercial, l'EPARECA a été créé en 1996 pour restructurer les pôles commerciaux situés sur les territoires de la géographie prioritaire de la politique de la ville. Opérateur disposant de prérogatives de puissance publique pour mener à bien les projets commerciaux dont il est maître d'ouvrage, l'EPARECA bénéficie d'une partie des ressources du FISAC (Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce).

Votre rapporteur spécial a entendu à plusieurs reprises les responsables des trois opérateurs sur leur action d'une part, et sur leur appréciation de la structuration des différentes instances intervenant dans le cadre de la politique de la ville, d'autre part.

Au terme de ces auditions, il apparaît bien que, pris séparément, chaque opérateur présente des résultats satisfaisants en termes de performance . Ils ont, en particulier, très sensiblement amélioré leur organisation pour raccourcir leurs procédures et renforcer leur efficacité.

A titre d'exemple, on notera que l'EPARECA, qui était quasiment à l'arrêt en 2004 et 2005 avec une seule opération passée au stade de la production sur les deux années, est passé à un rythme de 6 opérations engagées par an entre 2006 et 2008 et à 10 opérations annuelles actuellement.

L'ACSE, pour sa part, a réussi une amélioration spectaculaire de réduction des délais de paiement aux associations intervenant dans les quartiers de la politique de la ville, en même temps qu'elle a mis en place un système efficace de remontées d'information, permettant la réaffectation des crédits d'intervention en fonction des besoins effectifs. La mise à disposition des moyens s'effectue désormais dès la mi janvier, permettant une bonne visibilité aux préfets, alors que parallèlement, le taux de conventions pluri annuelles d'objectifs s'élève à environ 40 % et que les paiements s'effectuent dans un délai de J+2 après réception du dossier, favorisant ainsi la sécurisation des acteurs locaux.

Malgré ces bons résultats, des tensions et des défauts de coordination sont encore à déplorer. Il apparaît, en effet, que les trois établissements ont des difficultés à travailler harmonieusement ensemble , ce qui peut être mis sur le compte d'une certaine rivalité alimentée par des rumeurs de restructuration ou de projets de fusions.

Ainsi, la convention qui existait entre l'ANRU, l'EPARECA et la Caisse des dépôts et consignations en vue d'établir des diagnostics d'opportunité d'intervention sur les projets de rénovation urbaine, qui avait correctement fonctionné en 2007 et 2008, n'est plus mise en application. De même, on ne peut que déplorer qu'aucune réunion des opérateurs de la politique de la ville n'ait jamais été organisée sous l'autorité du SG-CIV.

Dans ce contexte parfois tendu, il serait particulièrement utile que celui-ci fasse, enfin, aboutir la démarche de conventionnement et d'engagement sur la performance, qui répondrait en outre aux obligations imposées désormais à tous les opérateurs de l'Etat.

Les nouvelles règles de gouvernance des opérateurs de l'Etat

La nouvelle gouvernance repose sur des droits et des devoirs : la tutelle définit clairement l'objectif et les opérateurs le mettent en oeuvre en optimisant la gestion des subventions qui leur sont octroyées.

Les cinq engagements pour l'Etat

Au titre de la tutelle, l'Etat prend les cinq engagements suivants :

- définir clairement les priorités stratégiques de l'opérateur via une lettre de mission généralisée progressivement à l'ensemble des opérateurs ;

- instaurer une tutelle unique ou un chef de file ;

- attribuer au dirigeant de l'opérateur une part variable de rémunération au regard des objectifs fixés et évalués annuellement ;

- signer avec les opérateurs les plus importants un contrat de performance ;

- renforcer la qualité des conseils d'administration où la tutelle sera plus présente.

Les cinq engagements pour les opérateurs

En contrepartie des engagements de la tutelle, les opérateurs devront consentir les mêmes efforts de gestion que l'Etat :

- moderniser leur gestion des ressources humaines afin de réaliser des gains de productivité ;

- réduire les dépenses de fonctionnement ;

- réformer la gestion immobilière en élaborant d'ici juin 2010 des schémas immobiliers respectant notamment le ratio de surface de 12 m 2 par agent. A compter de janvier 2012, les opérateurs devront acquitter un loyer à l'Etat s'il est propriétaire des lieux ;

- accroître la transparence et la fiabilité des comptes ;

- mieux intégrer les personnes handicapées.

Source : Ministère du budget et circulaire du Premier ministre du 26 mars 2010 relative au pilotage stratégique des opérateurs de l'Etat.

Si l'ANRU a signé en 2006 une convention avec la délégation interministérielle à la ville qui fixe les objectifs en matière de rénovation urbaine et précise les modalités techniques de la tutelle et si l'EPARECA a signé en fin d'année 2009 un contrat d'objectifs et de moyens 2009-2011, ni l'ANRU, ni l'ACSE ne disposent encore d'un contrat d'objectifs et de performances.

La conclusion de ces pactes d'intervention permettrait également de mettre définitivement fin au débat sur la restructuration des institutions de la politique de la ville, qui alimente inutilement les conflits, et de confirmer le choix de l'organigramme actuel que votre rapporteur spécial trouve satisfaisant.

En effet, si le périmètre d'action des intervenants est désormais sensiblement le même, l'ANRU intervenant en dehors des seuls quartiers du PNRU de même que l'ACSE et l'EPARECA sont appelés à exercer leur action dans les zones de rénovation urbaine, et s'il existe une grande complémentarité entre les missions des opérateurs, chacun d'entre eux dispose de compétences spécifiques et de modalités d'intervention particulières qu'il convient de préserver.


* 12 L'établissement public d'insertion de la défense (EPIDe) a été créé par ordonnance n°2005-883 du 2 août 2005. Il est chargé d'assurer l'insertion sociale et professionnelle de jeunes adultes volontaires sans qualification ni emploi ou en voie de marginalisation sociale. Son champ d'action est à la frontière de la politique de la ville stricto sensu.

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