B. INTERNET ET LA POLITIQUE : LES EFFETS DES NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION SUR LA DÉMOCRATIE

L'internet fait aujourd'hui partie intégrante de la vie quotidienne. Selon les données d'Eurostat, en 2012, au sein de l'Union européenne, 76 % des ménages avaient un accès internet à domicile, 60 % des utilisateurs en faisant un usage journalier. Le développement des nouveaux médias sociaux a, dans le même temps, considérablement transformé les pratiques sociales. Pour l'année 2012 toujours, 61 % des utilisateurs ont lu la presse en ligne et 52 % ont publié des messages sur les réseaux sociaux.

Les effets amplificateurs d'internet donnent une portée mondiale et immédiate à toute information, qu'elle contribue à la transparence démocratique, ou qu'elle procède de rumeurs ou de désinformation. Internet n'est ainsi pas sans impact sur l'exercice des libertés d'information, d'expression, d'opinion, de réunion et d'association, de même que sur la participation politique, l'articulation des relations entre électeurs et forces politiques, et entre citoyens, élus et administrations. Il a permis de renouveler la participation de la population aux processus démocratiques. Le développement du web invite à la réflexion quant à la recherche d'un nouvel équilibre entre démocratie électronique directe et démocratie représentative traditionnelle, qui permettrait d'accroître la participation citoyenne et d'améliorer le fonctionnement démocratique des structures politiques.

Cependant, la fragmentation du processus décisionnel, symptomatique d'Internet, nécessite aussi l'élaboration d'un modèle de gouvernance qui permette de préserver la liberté sur le web tout en garantissant la sécurité en ligne et le respect des droits de l'Homme, notamment dans les pays où ils sont les plus menacés.

C'est sur cette question de la régulation que M. Pierre-Yves Le Borgn' (Français établis hors de France - SOC) , s'exprimant au nom du groupe SOC a souhaité orienter son intervention :

« Internet a changé nos vies. J'ai du mal à me souvenir de ce qu'était ma vie de citoyen, de consommateur, d'homme avant cette révolution. Le flux de l'information était bien plus faible, plus prévisible, moins partagé et surtout moins instantané. Internet a bousculé de manière irréversible la relation entre la sphère de l'action publique et les citoyens, posant un défi pour la démocratie représentative, plus encore dans le contexte présent de crise de confiance en nos institutions.

Ce défi est le bienvenu, au sens où il nous oblige, nous, parlementaires et plus largement décideurs publics, à expliquer, argumenter, défendre nos réflexions, décisions et votes. Internet ouvre largement le droit de savoir et d'interroger. Il nous expose, certes, à une pression immédiate qui parfois est rude, mais il offre une chance réelle à la légitimation de l'action publique.

Mon élection à l'Assemblée nationale, en France, doit beaucoup à internet. Député des Français de l'étranger, j'ai été élu à l'occasion d'un scrutin dont plus de 70 % des suffrages exprimés l'ont été par vote en ligne sécurisé. Ce type de vote, inédit dans mon pays, a autorisé des compatriotes établis parfois à des centaines de kilomètres du bureau de vote à participer à un rendez-vous démocratique qui, pour la première fois, permettait aux Français du monde entier d'élire 11 députés sur les 577 que compte l'Assemblée nationale. Ce vote en ligne a induit, en amont, une campagne électorale mobilisant nombre d'outils nés sur la Toile, comme bien sûr les sites de campagne et les réseaux sociaux, mais aussi, par exemple, les séminaires en ligne rassemblant des centaines d'internautes citoyens autour des candidats. De fait, le vote par internet a entraîné une mobilisation collective d'un autre type que j'ai d'ailleurs souhaité prolonger, en aval, dans mon activité quotidienne de parlementaire.

C'est précisément parce que je crois dans le renouveau citoyen impulsé par la révolution internet que je rejoins l'idée de veiller à ce que la liberté la plus absolue sur la Toile ne se traduise pas par un recul de la démocratie et des droits de l'Homme. Il y a, sur internet, le meilleur et le pire, la bonté et la haine, la générosité et le racisme, la paix et la violence. Des développements récents nous ont montré, malheureusement, que la vie privée peut être scrutée et les données les plus personnelles exploitées en dehors de toute légalité.

Madame la rapporteure, je soutiens vos propositions en faveur de règles communes aux États membres du Conseil de l'Europe concernant la sécurité et la gouvernance sur internet. Je souhaite que les opérateurs soient étroitement associés, en responsabilité, à la définition de ces mesures. Il faut, comme vous le proposez à très juste titre, un Livre blanc du Conseil de l'Europe qui soit, pour nous tous, autant une feuille de route qu'une obligation impérieuse de résultats. »

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page