F. DÉBAT JOINT SUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE

1. Le changement climatique : un cadre pour un accord mondial en 2015

Le changement climatique est aujourd'hui avéré. Imputable pour une large part aux activités humaines, il devient une menace croissante pour les constructions humaines et les habitats naturels, et à terme pour la stabilité économique et les ressources énergétiques, voire pour des vies humaines. Les experts scientifiques s'inquiètent d'une potentielle irréversibilité du phénomène au cas où la communauté internationale échouerait à réduire les émissions de gaz à effet de serre de manière efficace rapidement.

Le Protocole de Kyoto, qui fixait les premiers objectifs de réduction des émissions pour les pays industrialisés, a été prolongé pour une deuxième période d'engagement allant de 2013 à 2020. Toutefois, la plupart des grandes économies et parmi elles les plus grands pollueurs n'ont encore souscrit aucun engagement formel. Tandis que le temps presse et le coût de l'inaction ne fait que croître, le rapport appelle instamment les pays à conclure un accord mondial ambitieux d'ici à 2015 au plus tard.

Le rapport propose d'adopter une approche mixte à la fois « ascendante » et « descendante » 2 ( * ) pour réduire les émissions de gaz à effet de serre au plan mondial. Il préconise une coopération bilatérale intensifiée avec les pays clés et une implication plus forte des parlements afin de faire progresser les législations nationales sur le climat, de diffuser les meilleures pratiques, de renforcer les capacités et de promouvoir des approches communes.

2. La diversification de l'énergie en tant que contribution fondamentale au développement durable

Une énergie propre, sûre et abordable est la clé d'un développement durable et de la qualité de vie. L'Europe est en transition vers un modèle de développement plus équilibré respectueux des ressources de la planète. Pour cela, chacun, que ce soient les pouvoirs publics, les entreprises ou les particuliers, doit participer à l'optimisation de la production, de la distribution et de l'utilisation de l'énergie.

La consommation d'énergie doit être dissociée du modèle de développement choisi. L'efficience énergétique doit permettre de modérer les besoins énergétiques, tout en utilisant en priorité les sources d'énergie les plus propres et abondantes, notamment les sources renouvelables.

Une attention particulière doit être aussi accordée aux conditions d'exploration et d'exploitation de gaz et d'huile de schiste, ainsi qu'à la gestion des déchets nucléaires. Enfin, le rapport propose diverses mesures afin d'éradiquer la pauvreté énergétique, d'améliorer la taxation, la réglementation des marchés et la coordination des réseaux et de promouvoir les bonnes pratiques dans le domaine des technologies de l'énergie.

M. André Schneider (Bas-Rhin - UMP), s'exprimant au nom du groupe PPE/DC , a appelé à une prise de conscience au sujet des deux thèmes abordés : changement climatique et responsabilité énergétique :

« En février 2013, le Conseil économique et social européen affirmait avec justesse : « L'énergie est un bien commun essentiel qui permet à chacun d'avoir une vie digne ».

Pourtant, la précarité énergétique est le quotidien de plus de 50 millions d'Européens. La difficulté pour ces personnes de payer leur facture énergétique, voire leur accès limité à une énergie suffisante représente un drame quotidien. Elle constitue un facteur supplémentaire de fragilisation pour des ménages déjà durement touchés par la crise économique.

Pour lutter contre cette précarité, il convient d'agir sur deux facteurs.

Le premier est le prix de l'énergie - qu'il s'agisse du chauffage ou du carburant nécessaire à la mobilité des ménages. Ce prix dépend bien sûr de choix énergétiques et budgétaires propres à chaque pays, mais il est aussi trop souvent soumis à des intérêts géostratégiques. Si les droits des fournisseurs doivent être respectés, l'accès à l'énergie ne devrait jamais servir des intérêts politiques tant l'absence d'énergie est en soi une atteinte aux droits de l'Homme.

Deuxième facteur : les mesures d'efficacité énergétique. L'isolation des logements est fondamentale pour faire baisser la facture énergétique. Or les ménages modestes n'ont souvent pas les moyens de faire les travaux de rénovation nécessaires.

Pour remédier à cela, nous devons réfléchir ensemble au niveau européen à des mécanismes de financement innovants. Cependant, fort heureusement, la plupart des États européens prévoient des dispositifs spécifiques, comme des « tarifs sociaux », pour protéger les plus faibles.

Dans le monde, la réalité de la pauvreté énergétique montre malheureusement un autre visage : plus d'un milliard d'individus n'ont pas accès à l'électricité ! L'absence de services énergétiques modernes représente une entrave au développement de ces pays du Sud et se traduit par des situations dramatiques pour leurs citoyens.

À cette vulnérabilité s'ajoute celle induite par les changements climatiques. Qu'il s'agisse de la montée des eaux ou des catastrophes naturelles comme la sécheresse ou les inondations, malgré l'actualité récente, force est de constater qu'elles touchent et toucheront principalement des pays pauvres, entraînant des migrations forcées.

Si la disparition de certaines îles du Pacifique ou de l'Océan indien est souvent citée en exemple pour évoquer la notion de réfugiés climatiques, nous ne devons pas oublier que le changement climatique aura un impact fort sur les régions agricoles d'Afrique sub-saharienne par exemple. Nous devons aussi avoir conscience du fait que la grande majorité des migrations environnementales seront vraisemblablement internes, nous obligeant à réexaminer nos dispositifs relatifs aux personnes déplacées.

Sans existence juridique, quel statut sera celui de ces réfugiés climatiques ? La communauté internationale devra repenser ces instruments institutionnels pour que la solidarité internationale s'adapte à cette nouvelle forme de migration.

Nous avons aujourd'hui une double responsabilité : celle de modifier nos comportements pour ralentir le changement climatique et éviter le pire, et celle de promouvoir la solidarité énergétique en Europe et au-delà pour une énergie durable et sûre. C'est notre devoir envers les générations futures.

Bien entendu, j'approuve les rapports de nos deux rapporteurs. »

M. Frédéric Reiss (Bas-Rhin - UMP) a insisté sur les conditions à réunir pour réussir la transition énergétique :

« Madame et Monsieur les rapporteurs, je vous félicite pour la qualité de votre travail dont l'enjeu n'est ni plus ni moins que l'avenir de notre belle planète.

Comme vous le savez, mon pays accueillera la prochaine Conférence climat de l'ONU, en 2015. Les problèmes du changement climatique ne pourront être résolus sans y associer la grande majorité des émetteurs de gaz à effet de serre, les GES. La Chine en représente 29 %, les États-Unis 17 % et l'Europe 11 %.

Cet accord associant les principaux émetteurs de gaz à effet de serre devra, pour être une réussite, être contraignant et soumis à un contrôle avec la possibilité de sanctions.

Depuis les sommets de Doha et de Durban, sous l'effet de la prospérité économique des pays émergents et de leur niveau croissant de développement, on assiste à une prise de conscience progressive des opinions publiques concernant la menace climatique. C'est le cas de la Chine, de l'Inde, du Brésil et, dans une moindre mesure, de l'Afrique du Sud. Par ailleurs, le président Obama s'est montré disposé à avancer sur ce sujet. Ces évolutions sont importantes pour qu'un tel accord puisse enfin voir le jour.

Au titre du Protocole de Kyoto, les pays industrialisés se sont engagés à respecter des quotas de réduction ou de limitation de leurs émissions de gaz à effet de serre. L'Union européenne a été en pointe sur ce sujet et, le 22 janvier, la Commission européenne a proposé que les 28 États membres se fixent pour objectif de réduire de 40 % leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030 par rapport à 1990. Fin 2012, l'Europe avait réduit ses émissions de 18 % par rapport à 1990. C'est un objectif ambitieux qui nécessite un engagement de tous les États, en particulier les plus grands émetteurs de gaz à effet de serre par habitant.

Madame la rapporteure, vous avez évoqué la sortie du nucléaire par l'Allemagne, mais je voudrais rappeler que l'essor des énergies vertes est freiné par des coûts trop élevés et que le retour au charbon n'est pas idéal. Bien au contraire ! Ce retour au charbon semble favorisé également dans certains pays des Balkans - avec le soutien de l'Union européenne ! - sous le prétexte, assumé par le commissaire à l'énergie, d'une priorité à « l'indépendance énergétique » de l'Union européenne et de ses partenaires, quitte à sacrifier les critères environnementaux.

Où sont les priorités ? Je n'évoquerai pas l'énergie nucléaire, mais j'affirme que la diversification des énergies sera indispensable pour permettre à la fois de réduire les émissions, mais également de favoriser une plus grande indépendance énergétique. C'est pourquoi nous devons tout mettre en oeuvre pour réussir la transition énergétique. Celle-ci demande à la fois du courage et de la volonté, elle demande surtout que l'Europe accorde les violons de son avenir énergétique. C'est pour toutes ces raisons et bien d'autres que la Conférence de Paris devra réussir. »


* 2 L'approche « ascendante » consiste pour des États à s'engager en faveur d'objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, par opposition à l'approche « descendante » qui consiste à fixer ces objectifs au niveau global, puis à les décliner au niveau national.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page