N° 477

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2013-2014

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 avril 2014

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1) sur Europol et Eurojust : perspectives d'avenir ,

Par MM. André GATTOLIN, Dominique BAILLY, Pierre BERNARD-REYMOND et Mme Colette MÉLOT,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Simon Sutour, président ; MM.  Alain Bertrand, Michel Billout, Jean Bizet, Mme Bernadette Bourzai, M. Jean-Paul Emorine, Mme Fabienne Keller, M. Philippe Leroy, Mme Catherine Morin-Desailly, MM. Georges Patient, Roland Ries, vice-présidents ; MM. Christophe Béchu, André Gattolin, Richard Yung, secrétaires ; MM. Nicolas Alfonsi, Dominique Bailly, Pierre Bernard-Reymond, Éric Bocquet, Mme Françoise Boog, Yannick Botrel, Gérard César, Mme Karine Claireaux, MM. Robert del Picchia, Michel Delebarre, Yann Gaillard, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Joël Guerriau, Jean-François Humbert, Mme Sophie Joissains, MM. Jean-René Lecerf, Jean-Jacques Lozach, Mme Colette Mélot, MM. Aymeri de Montesquiou, Bernard Piras, Alain Richard, Mme Catherine Tasca.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le présent rapport est le compte rendu d'une visite qu'une délégation de la commission des affaires européennes a rendue à Europol et à Eurojust les 11 et 12 février 2014 à La Haye (Pays-Bas). Ce déplacement nous a permis de nous entretenir avec les principaux responsables de ces deux organismes et d'évoquer en particulier leurs perspectives d'avenir.

Europol est une agence européenne de 700 personnes environ avec un budget de 84,2 millions d'euros. Eurojust est une « unité de coopération judiciaire » - appelée à devenir une « agence européenne » selon un projet de règlement en cours de négociation - de 350 personnes, dont 80 magistrats , et dont le budget est de l'ordre de 32 millions d'euros.

Il faut observer - nos interlocuteurs ont insisté sur ce point - que depuis plusieurs années l'activité d'Europol et d'Eurojust progresse de façon sensible à périmètre financier quasi-constant. On peut se demander, à cet égard, si les deux entités n'auraient pas vocation à bénéficier des plus-values générées par le renforcement de la lutte contre les atteintes aux intérêts financiers de l'Union.

Europol est actuellement concerné par la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l'Agence de l'Union européenne pour la coopération et la formation des services répressifs (Europol) et abrogeant les décisions 2009/371/JAI et 2005/681/JAI. (COM (2013) 173 final)

Deux projets d'actes législatifs, actuellement en cours de négociation, sont étroitement liés et intéressent directement Eurojust. Ils ont été proposés au mois de juillet 2013 par la Commission. Il s'agit :

- de la proposition de règlement du Conseil portant création du Parquet européen (COM (2013) 534) ;

- de la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l'Agence de l'Union européenne pour la coopération judiciaire en matière pénale (Eurojust) (COM (2013) 535 final).

I. EUROPOL

À Europol, la délégation de la commission des affaires européennes a été reçue par MM. Michel Quillé, directeur-adjoint, en charge du département Opérations, Jean-Jacques Colombi, chef de la direction des relations internationales à la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), Jean-Dominique Nollet, chef d'unité de laboratoire de recherche, Centre européen de lutte contre la cybercriminalité (EC3) à Europol, et Gregory Mounier, conseiller Affaires stratégiques et relations extérieures.

A. HISTORIQUE : DE LA CONVENTION DE 1995 AU TRAITÉ DE LISBONNE

Europol est l'organisme qui est en charge de faciliter les opérations de lutte contre la criminalité au sein de l'Union européenne. Son rôle principal est de faciliter l'échange de renseignements entre polices nationales notamment en matière de stupéfiants, de terrorisme, de criminalité organisée et de pédophilie.

La coopération policière entre les États membres a débuté en 1976, avec la création du groupe TREVI, longtemps demeuré secret, qui portait principalement sur la lutte contre le terrorisme.

Puis c'est une convention de 1995, signée et ratifiée par tous les États membres de l'Union européenne, qui a créé l'Office européen de police. Il a fallu attendre 1999 pour qu'Europol exerce réellement l'ensemble de ses missions du fait des délais nécessaires pour conclure le protocole, prévoir les mesures d'application et faire ratifier la Convention par tous les États membres.

Jusqu'au traité de Lisbonne, la coopération policière s'est inscrite dans le cadre du « 3 ème pilier de l'Union ». Cela signifiait que toute décision se prenait à l'unanimité, que le Parlement européen était peu engagé, que les compétences de la Cour étaient limitées ou encore qu'il n'existait pas de directives ou de règlements, mais des décisions et des décisions-cadres.

Le traité de Lisbonne a « communautarisé », ou plutôt « lisbonnisé », pour reprendre la terminologie en cours, la coopération policière.

La procédure législative ordinaire (majorité qualifiée et codécision) est désormais applicable, tout comme le contrôle exercé par la Cour. De même, les normes juridiques deviennent contraignantes, grâce à l'adoption de règlements et de directives.

Malgré tout, des spécificités subsistent. Ainsi, les États membres conservent leur droit d'initiative, partagé avec la Commission européenne.

Par ailleurs, trois pays ont obtenu un « opting-out » pour la coopération policière : le Royaume-Uni, l'Irlande et le Danemark.

De plus, l'unanimité et la consultation simple du Parlement européen sont maintenues pour les décisions d'un État membre d'intervention sur le territoire d'un autre État membre ou pour les aspects opérationnels de la coopération.

Depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam (1999), l'Office européen de police est une agence européenne dotée d'un budget et d'un effectif communautaire .

L'article 88 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dispose désormais que le Parlement européen et le Conseil, statuant par voie de règlements conformément à la procédure législative ordinaire, déterminent la structure, le fonctionnement, le domaine d'action et les compétences d'Europol.

La mission d'Europol est « d'appuyer et de renforcer l'action des autorités policières et des autres services répressifs des États membres ainsi que leur collaboration mutuelle dans la prévention de la criminalité grave affectant deux ou plusieurs États membres, du terrorisme et des formes de criminalité qui portent atteinte à un intérêt commun qui fait l'objet d'une politique de l'Union, ainsi que la lutte contre ceux-ci ». Europol facilite l'échange d'informations entre les autorités répressives des États membres et fournit des analyses de la criminalité afin d'aider les forces de police nationales à mener des enquêtes transfrontières.

Dans le cadre du « programme de Stockholm », le Conseil européen a appelé Europol à évoluer et à devenir le « centre névralgique de l'échange d'informations entre les services répressifs des États membres et à jouer le rôle de prestataire de services et de plate-forme pour les services répressifs ».

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