B. UNE COORDINATION DES ACTEURS DU SOIN AU PROFIT D'UNE PRISE EN CHARGE GLOBALE DE LA PERSONNE

En vue de construire un véritable parcours de soin autour du malade, l'INCa a prolongé son action en mettant en place des procédures et structures de coordination des acteurs du soin.

L'INCa a d'abord rendu obligatoire les réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP). Ces réunions ont modifié la pratique quotidienne de la cancérologie et accru la sécurité pour les malades. En permettant une confrontation des points de vue entre professionnels de santé, elles participent aussi à la formation et à l'amélioration des pratiques de soins. La généralisation des RCP par l'INCa est emblématique du rôle joué par l'opérateur, dans la mesure où si les RCP étaient déjà pratiquées dans certains établissements spécialisés, comme les centres de lutte contre le cancer, l'autorité de l'Institut a permis sa généralisation. Or il s'agit d'un dispositif de coordination peu coûteux mais performant pour actualiser les pratiques et réduire les risques de pertes de chance.

L'annuaire national des RCP est accessible sur le site de l'INCa aux professionnels et aux patients depuis septembre 2014. Le processus d'alimentation de l'annuaire est suivi mensuellement par les ARS et les réseaux régionaux de cancérologie (RRC, cf. infra ). Le contenu minimal de la fiche RCP comprend des informations médicales, administratives et organisationnelles. En collaboration avec les RRC ces informations ont été précisées et complétées, en vue de leur intégration au dossier communicant de cancérologie (DCC).

L'échange de données de santé entre professionnels de santé est indispensable pour assurer la coordination des soins, en particulier s'agissant de pathologies comme le cancer, requérant l'intervention coordonnée de nombreux professionnels. À ces fins, le DCC permet le partage de différents supports de la coordination des soins, dont la fiche de synthèse de la RCP. Contrairement au dossier médical partagé introduit par la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie 44 ( * ) , dossier personnel dont le patient est propriétaire et qu'il est amené à gérer lui-même, le DCC est un outil métier, visant à partager entre professionnels de santé des informations médicales permettant la prise en charge médicale du patient. Malgré des objectifs ambitieux de généralisation du DCC effective dès 2015, son déploiement demeure en cours, et 32 % des patients atteints de cancer disposaient d'un DCC en 2014. Les difficultés liées au développement du DCC avaient été soulignées dans le rapport de bilan du deuxième plan cancer 45 ( * ) , pointant l'absence d'harmonisation et d'interopérabilité entre les logiciels développés par les réseaux régionaux de cancérologie, l'absence d'utilisation par les professionnels, l'absence de communication simple avec le médecin traitant.

Il s'agit pourtant d'un enjeu important de coordination et de connaissance de la maladie. Le DCC fournit les informations nécessaires à une meilleure appréhension des parcours de santé des personnes atteintes de cancer, des pertes de chance, et des inégalités face aux cancers, tant géographiques que socioéconomiques.

Le premier plan cancer a créé des réseaux régionaux de cancérologie (RRC) pour assurer la coordination des acteurs de santé au niveau territorial et à l'amélioration des pratiques professionnelles. L'ensemble des régions françaises est couvert par un réseau régional de cancérologie et chacun d'entre eux été reconnu par l'INCa en lien avec les ARS.

Carte des 25 RRC reconnus en 2013

Source : INCa.

Le réseau régional de cancérologie fédère l'ensemble des institutions et professionnels prenant en charge des patients atteints de cancer. Les établissements de santé doivent être membres d'un réseau de cancérologie pour être autorisés à pratiquer les traitements du cancer, conformément aux critères d'agrément définis par l'INCa. Le RRC a un rôle important d'animation et de coordination des différents opérateurs, de mise à disposition des outils. Ces structures ont concouru à faire progresser la qualité et la sécurité des prises en charge en cancérologie.

La circulaire du 25 septembre 2007 46 ( * ) précise leurs missions :

- la promotion et l'amélioration de la qualité des soins en cancérologie comprenant la diffusion auprès des professionnels de santé des recommandations pour la bonne pratique clinique en cancérologie ;

- la facilitation des échanges entre professionnels de santé, notamment via la promotion des outils communs de communication au sein de la région, dont le dossier communicant de cancérologie (DCC) ;

- l'information des professionnels de santé, des patients et de leurs proches ;

- l'aide à la formation continue des professionnels de santé ;

- le recueil des données relatives à l'activité de soins cancérologiques et l'évaluation de la qualité des pratiques en cancérologie ;

- la mesure et l'analyse de l'impact des actions menées notamment dans le domaine de l'amélioration de la qualité des soins en cancérologie, de la coordination des acteurs, des pratiques professionnelles collectives.

Interlocuteurs privilégiés des ARS pour le cancer, les RRC ont accompagné l'évolution des relations entre l'INCa et les ARS. Dans le cadre de la réforme territoriale, du troisième plan cancer, et de la loi de modernisation de notre système de santé, les missions et l'organisation territoriale des RRC sont appelées à évoluer. Il s'agit en outre d'accompagner l'évolution des prises en charge en cancérologie et de répondre aux enjeux d'accès aux innovations et de continuité des parcours de soins.

Le troisième plan cancer vise à ce titre à redéfinir la place des acteurs régionaux et territoriaux en appui des ARS. Aux côtés des RRC s'ajoutent des structures régionales de gestion des dépistages ainsi que d'autres structures d'organisation du soin, comme les centres de coordination en cancérologie (3C). Dans ce cadre, le troisième plan cancer entend conforter le rôle des RRC auprès de l'ARS comme structure régionale d'appui et d'expertise en cancérologie et développer les liens entre les structures de gestion des dépistages et les structures de coordination du soin afin de garantir la fluidité du parcours du patient, du dépistage aux soins. Pour ce faire, une piste envisagée par le troisième plan cancer serait de favoriser des rapprochements entre ces structures, pour expérimenter des structures unifiées de coordination en cancérologie. L'objectif est de doter les ARS de structures capables de leur apporter un appui fort dans le pilotage régional de la lutte contre le cancer.

L'INCa est chargé de construire des propositions, en lien avec les ARS et en concertation avec les acteurs et les parties prenantes, pour définir le nouveau cahier des charges des missions des RRC. Cette réflexion est toujours en cours. Le cahier des charges refondu devrait comporter des missions étendues sur l'accès à la recherche clinique, et développer l'articulation entre prévention et dépistage.

Toutefois, votre rapporteur spécial a pu noter les inquiétudes des ARS face au risque que le renforcement des missions de coordination des RRC les éloigne de leur rôle de structure d'appui et entraine la création de structures administratives, certes centrées sur le cancer, mais dont les compétences se chevaucheraient avec celles des ARS. Les RRC doivent s'en tenir à leur fonction initiale d'entité opérationnelle. Aux termes de leurs missions légales, les ARS sont compétentes pour organiser la cohérence des politiques de santé sur leur territoire. Ces missions sont d'ailleurs renforcées par la loi de modernisation du système de santé 47 ( * ) qui intègre la notion de parcours de soins. Votre rapporteur spécial considère donc que la circulaire définissant les missions actualisées des RRC doit rester fidèle à l'esprit selon lequel l'ARS constitue l'interlocuteur de l'INCa dans les territoires, et le RRC la structure d'appui territoriale de l'ARS.

Recommandation n° 8 : À l'occasion de l'actualisation des missions des réseaux régionaux de cancérologie, veiller à conserver l'objectif initial ayant présidé à leur création par le premier plan cancer. Tout en soutenant l'ambition d'un parcours de soin unifié du dépistage au processus thérapeutique, les réseaux régionaux de cancérologie doivent demeurer une structure d'appui et l'ARS le pilote des politiques de santé en territoire.


* 44 Loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.

* 45 « Rapport final au Président de la République », INCa, juin 2013.

* 46 Circulaire DHOS/CNAMTS/INCA/2007/357 du 25 septembre 2007 relative aux réseaux régionaux de cancérologie.

* 47 Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

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