AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

La chute du mur de Berlin et la disparition du bloc soviétique à la fin des années 1980 et au début des années 1990 ont été interprétées par certains comme le triomphe du modèle démocratique occidental. Or cette thèse semble définitivement obsolète, le monde contemporain ayant été marqué, depuis lors, par une succession de crises et de conflits.

La France, par son histoire, occupe une place de premier plan dans le règlement des crises mondiales à travers sa diplomatie mais aussi par le déploiement de ses forces armées.

L'armée française a connu d'importantes réformes depuis vingt ans. Le 22 février 1996, le président de la République Jacques Chirac annonce ainsi la fin du service militaire et la constitution d'une armée « de métier » constituée de professionnels entraînés et préparés à l'engagement sur des théâtres d'opération de plus en plus diversifiés et faisant appel à des technologies de plus en performantes.

Depuis les années 1990, les forces françaises ont participé à de nombreuses opérations. L'opération Harmattan en Lybie marque cependant une accélération du rythme et de l'intensité des opérations extérieures (OPEX) en lien avec la lutte contre le terrorisme islamique.

Le cadre des théâtres a en outre profondément évolué depuis la fin de la guerre froide. Très étendus, se caractérisant par des conditions géographiques et climatiques extrêmes, ces théâtres éprouvent durement les militaires et leurs matériels.

Or si chacun reconnaît aujourd'hui que nos armées sont un facteur de souveraineté et qu'elles assurent, y compris lorsqu'elles interviennent à l'extérieur de nos frontières, la sécurité de la France, les moyens qui sont mis à leur disposition ne semblent pas à la hauteur.

Les décisions récentes du président de la République vont certainement dans le bon sens, mais force est de constater que le compte n'y est pas.

Certes, le contexte budgétaire actuel ne permet pas à la France d'entretenir une armée pléthorique et de lancer sans compter de nouveaux programmes d'armement. Pour autant, des choix politiques ne peuvent être différés. Ainsi, l'insincérité budgétaire caractérisant le montant de la provision destinée au financement du surcoût des OPEX, au-delà d'un enjeu de droit budgétaire, pose la question de la capacité opérationnelle de l'armée française et donc de la capacité de la France à assurer sa sécurité.

L'importance de l'enjeu a conduit votre rapporteur spécial à souhaiter, qu'en complément de ses propres travaux, la Cour des comptes réalise une enquête sur les opérations extérieures menées depuis 2012 en application des dispositions de l'article 58 §2 de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 1 ( * ) .

Le constat qu'il dresse est à la fois empreint d'admiration devant la capacité de nos armées à tenir leur rang avec des moyens limités, mais aussi d'inquiétude en raison de l'érosion progressive de leur capital humain et matériel.

Si la France entend continuer de jouer le rôle qu'elle s'est assignée sur la scène internationale, il apparaît indispensable de remédier rapidement à cette situation. En particulier, votre rapporteur spécial préconise de satisfaire au principe de sincérité budgétaire en inscrivant une provision permettant de couvrir les besoins liés aux OPEX tout en sanctuarisant les ressources du ministère de la défense. En effet, si l'inscription d'une provision prudente pouvait se justifier par le passé compte tenu des évolutions incertaines de l'activité opérationnelle de nos armées, force est de constater que l'engagement de la France dans des conflits armés est désormais durable et présenté comme tel. Il convient par conséquent de mettre en accord les discours et les actes en prévoyant une dotation budgétaire permettant de répondre aux besoins actuels et de préparer l'avenir.

Cet effort de la Nation, qui est dû à ses armées, doit être prioritaire dès lors que sa sécurité est en jeu. Votre rapporteur spécial a pu mesurer le parfait dévouement de nos forces, soumises à des conditions extrêmes sur les théâtres d'opération, de leur capacité d'adaptation malgré la faible disponibilité de leurs matériels, ainsi que de leur certitude et de leur fierté de contribuer, même en dehors des frontières nationales, à la protection de notre pays.


* 1 Loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

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