B. LE CAS PARTICULIER DU HARCÈLEMENT SEXUEL : AMÉLIORER LA FORMATION ET LA SENSIBILISATION POUR PRÉVENIR DES SITUATIONS PRÉJUDICIABLES À TOUS DANS L'ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL

Les auditions auxquelles la délégation a procédé sur le harcèlement sexuel mettent en évidence la nécessité de poursuivre la connaissance statistique du phénomène, a fortiori dans le contexte actuel de libération de la parole. Quant au cadre juridique, il semble aujourd'hui relativement abouti, et les difficultés paraissent résider davantage dans son application. À cet égard, des avancées sont encore nécessaires pour renforcer la prévention et la sensibilisation des acteurs du monde du travail aux enjeux des violences sexuelles.

1. Une connaissance statistique à amplifier

Les statistiques disponibles en matière de harcèlement sexuel sont pour l'essentiel issues d'une enquête réalisée par le Défenseur des Droits en 2014. Selon les résultats de cette étude, un quart des agressions sexuelles se font au travail, et une femme active sur cinq estime avoir été confrontée au harcèlement au travail (23 % dans le secteur privé, et 19 % dans le secteur public, s'agissant des femmes de 18 à 64 ans). Les ordres de grandeur entre le secteur privé et la fonction publique sont donc comparables.

En outre, selon cette étude, 57 % des actifs s'estiment plutôt mal informés sur le harcèlement au travail, près de neuf actifs sur dix pensent qu'il n'est pas suffisamment reconnu dans les situations de travail , et plus de sept actifs sur dix estiment qu'il est difficile à identifier.

Selon le Défenseur des Droits, on constate une augmentation des expériences rapportées depuis les années 2000, dans un contexte de reconnaissance sociale des victimes et de mobilisation des pouvoirs publics et de la société civile. Il importe donc de disposer d'enquêtes actualisées sur le harcèlement sexuel, notamment au travail .

Le Défenseur des Droits recommande de renforcer la connaissance des situations de harcèlement sexuel (fréquence, circonstances, recours entamés et raisons de l'éventuelle absence de démarche), par le biais de la réalisation d'une nouvelle enquête . Ce travail pourrait par exemple être réalisé dans le cadre de l'étude Virage , pilotée par l'Institut national des études démographiques (INED).

Afin d'améliorer la connaissance des situations de sexisme et de harcèlement sexuel au travail, la délégation souhaite que l'enquête du Défenseur des droits sur le harcèlement au travail , réalisée en 2014, soit régulièrement actualisée .

2. Un dispositif juridique étoffé
a) Un cadre législatif relativement abouti
(1) La loi de 2012

Le cadre juridique du harcèlement sexuel concerne tant la loi pénale que le droit du travail . Il a évolué au fil du temps de manière à prendre en compte les manifestations diverses du harcèlement, s'écartant de la définition initiale qui impliquait une relation hiérarchique et centrée sur l'obtention de « faveurs de nature sexuelle », pour s'étendre à des agissements portant atteinte à la dignité de la personne par leur caractère « dégradant ou humiliant ».

Le 4 mai 2012, le Conseil constitutionnel, saisi par le moyen d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), a abrogé l'article 222-33 du code pénal relatif au harcèlement sexuel issu de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale. Le juge constitutionnel a en effet considéré que cet article ne définissait pas assez précisément les éléments constitutifs de l'infraction de harcèlement sexuel et méconnaissait le principe de légalité des délits et des peines .

Une nouvelle loi a été adoptée par le Parlement dès le mois de juillet 2012 195 ( * ) , après plusieurs semaines d'intenses travaux pour améliorer la définition du harcèlement sexuel 196 ( * ) . La définition actuellement en vigueur résulte donc de la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel.

DÉFINITIONS DU HARCÈLEMENT SEXUEL ANTÉRIEURES À LA LOI DU 6 AOÛT 2012

La définition initiale supposait une relation de subordination :

L'article 222-33 du code pénal, issu de la loi n° 92-684 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des crimes et délits contre les personnes, se référait au « fait de harceler autrui en usant d'ordres, de menaces ou de contraintes, dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, par une personne abusant de l'autorité que lui confèrent ses fonctions ».

Cette définition s'est étendue au fil des évolutions législatives, sans que les sanctions (un an d'emprisonnement et 15 000 euros d'amende) soient modifiées :

- l'élément matériel de l'infraction a été élargi par la loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu'à la protection des mineurs aux « pressions graves », s'ajoutant aux « ordres », « menaces » ou « contraintes » initialement prévus ;

- la relation hiérarchique a disparu de la définition résultant de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle ») qui supprimait également les précisions concernant les moyens utilisés par le harceleur. Parallèlement, l'article L. 1153-1 du code du travail disposait alors que « les agissements de harcèlement de toute personne dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d'un tiers sont interdits ».

Les objectifs du législateur, en 2012, étaient :

- d'adopter une définition du harcèlement sexuel qui soit suffisamment précise , tout en prenant en compte des comportements très divers , dont tous ne visent pas des relations sexuelles et ne s'inscrivent pas nécessairement dans un lien de subordination ;

- d'assurer la cohérence du code pénal , du droit du travail et du statut des trois fonctions publiques .

LES TRAVAUX DU GROUPE DE TRAVAIL SÉNATORIAL DE 2012
SUR LE HARCÈLEMENT SEXUEL

Le groupe de travail sur le harcèlement sexuel, constitué en mai 2012 au Sénat entre la délégation aux droits des femmes et les commissions des lois et des affaires sociales pour préparer l'examen du projet loi destiné à combler le vide juridique résultant de la décision du Conseil constitutionnel, a clairement exposé les priorités des sénateurs et sénatrices , auxquelles la loi votée a donné satisfaction 197 ( * ) :

- tirer les conséquences de situations n'impliquant pas la répétition d'actes de harcèlement : cette exigence a été retenue par la loi, qui distingue les situations où la qualification de harcèlement sexuel exige la répétition (il s'agit des « propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à [la] dignité [de la personne] en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ») de celles où un acte isolé suffit à établir l'infraction : « le fait, même non répété, d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers » 198 ( * ) ;

- prendre en considération les comportements qui visent davantage à humilier les personnes qu'à l'obtention de « faveurs sexuelles » : or par ses références aux atteintes à la dignité de la victime et à la création d'une « situation intimidante, hostile ou offensante » , la loi de 2012 est précisément centrée sur les conséquences des agissements du harceleur sur la victime ;

- ne pas limiter la définition du harcèlement sexuel à l'existence d'un pouvoir hiérarchique , tout en faisant de l'abus d'autorité une circonstance aggravante de l'infraction : tel est précisément l'angle retenu pour l'article 222-33 du code pénal, qui se réfère au fait d'« imposer à une personne », sans mention d'un lien de subordination ;

- sanctionner l'ensemble des manifestations de l'infraction , c'est-à-dire tout propos, acte ou comportement , physique, verbal ou non, y compris les « propos écrits ou envoyés à la victime par courrier ou par Internet, dès lors qu'ils ont une connotation sexuelle et que, directement ou indirectement, ils ont un caractère intimidant, humiliant ou offensant ou qu'ils portent atteinte à la dignité de la personne » 199 ( * ) : la circulaire d'application du ministère de la justice du 7 août 2012 200 ( * ) précise à cet égard que les faits constitutifs de harcèlement sexuel relèvent d'une gamme très large d'agissements , intégrant les « attitudes » : il s'agit de « comportements de toute nature (propos, gestes, envois ou remises de courriers ou d'objets, attitudes...) » et que la condition concernant la connotation sexuelle des comportements n'exige pas « qu'ils présentent un caractère explicitement et directement sexuel ».

La loi de 2012 définit deux dimensions du harcèlement sexuel , qui se distinguent en fonction de leur répétition éventuelle .

S'il y a répétition , la définition repose sur des « propos ou comportements » :

- qui « portent atteinte à la dignité de la personne » en raison de leur « caractère dégradant ou humiliant » ;

- ou qui créent un environnement hostile, intimidant ou offensant pour la victime.

Le code pénal s'appuie sur deux critères cumulatifs : ces comportements doivent à la fois être imposés ou revêtir une « connotation sexuelle ».

L'article 222-33 du code pénal assimile au harcèlement sexuel les « pressions graves » exercées, même de manière non répétée , dans le but d'obtenir un acte de nature sexuelle. On notera :

- que dans ce cas de figure, le consentement n'entre pas en ligne de compte ;

- et que la pression peut être exercée dans un but « réel ou apparent », ce qui permet de prendre en considération l'hypothèse où la victime aurait toutes les raisons de supposer qu'elle fait l'objet d'un chantage sexuel, même si l'attitude du harceleur n'est pas réellement explicite.

L'article L. 1153-1 du code du travail actuellement en vigueur reprend cette définition double du harcèlement sexuel, selon que les faits constitutifs du harcèlement sont ou non répétés .

Par ailleurs, certaines des précisions apportées par la circulaire du ministère de la Justice du 7 août 2012 méritent d'être rappelées :

- le non-consentement de la victime , qui se déduit du verbe imposer , s'apprécie au regard du contexte , sans qu'il soit nécessaire que la victime l'ait fait connaître de façon explicite ;

- le sexisme et la grivoiserie sont reconnus parmi les éléments constitutifs du harcèlement sexuel : la « situation intimidante, hostile ou offensante » peut en effet résulter de « propos ou comportements ouvertement sexistes, grivois, obscènes, tels que des paroles ou écrits répétés constituant des provocations, injures ou diffamations, même non publiques » ;

- la circulaire intègre à la définition du harcèlement les provocations commises « en raison de l'orientation ou de l'identité sexuelle de la victime. Il peut évidemment s'agir de comportements homophobes ou dirigés contre des personnes transsexuelles ou transgenres » ;

- la notion de « pression grave » exercée sur la victime peut recouvrir des situations très variées : non seulement l'hypothèse où l'« acte de nature sexuelle » serait imposé en contrepartie d'un avantage comme l'obtention d'un emploi, l'obtention d'une augmentation, l'obtention d'un contrat de bail, la réussite à un examen... »), mais aussi l'hypothèse où le fait de céder au chantage sexuel permettrait d' éviter « une situation particulièrement dommageable , telle qu'un licenciement ou une mutation dans un emploi non désiré, une augmentation significative du montant d'un loyer payé au noir, un redoublement lors des études... ».

Enfin, la circulaire inscrit le harcèlement sexuel dans un cadre global , soulignant que « Les dispositions de l'article 222-33 ont en tout état de cause une portée générale et s'appliquent dans tous les milieux, notamment les milieux sportifs ou éducatifs ». Elle mentionne à cet égard, entre autres exemples, le cas de propriétaires de logement , d' examinateurs (examens et concours) ou d' employeurs qui exigeraient une relation sexuelle en échange de la signature d'un contrat de bail, d'un résultat- favorable ou d'une embauche.

Selon le Défenseur des Droits, entendu par la délégation le 25 janvier 2018, la loi du 6 août 2012 a marqué un changement radical dans la conception du harcèlement sexuel , qui se définit non plus seulement par l'intention de l'auteur (obtenir des faveurs sexuelles), mais par les conséquences de son comportement sur la victime . Cette définition modifiée figure aujourd'hui à l'identique dans le code pénal 201 ( * ) , le code du travail 202 ( * ) et le statut des fonctionnaires 203 ( * ) .

LA DÉFINITION ACTUELLE DU HARCÈLEMENT SEXUEL

Article 222-33 du code pénal

I - Le harcèlement sexuel est le fait d'imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

II - Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d'user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou d'un tiers.

Article L1153-1 du code du travail

Aucun salarié ne doit subir des faits :

1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

2° soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers.

Statut des fonctionnaires (Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires - article 6 ter )

Aucun fonctionnaire ne doit subir les faits :

a) soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

b) soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers.

Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire :

1° Parce qu'il a subi ou refusé de subir les faits de harcèlement sexuel mentionnés aux trois premiers alinéas, y compris, dans le cas mentionné au a, si les propos ou comportements n'ont pas été répétés ;

2° parce qu'il a formulé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces faits ;

3° ou bien parce qu'il a témoigné de tels faits ou qu'il les a relatés.

Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou enjoint de procéder aux faits de harcèlement sexuel mentionnés aux trois premiers alinéas.

Pour autant, selon Jacques Toubon, la loi du 27 mai 2008 transposant les directives européennes sur les discriminations 204 ( * ) donne du harcèlement sexuel une définition qui va encore au-delà de celle qu'a adoptée le législateur en 2012 : dans son article 1 er , elle assimile le harcèlement à une discrimination, permettant de considérer comme du harcèlement des actes « à connotation sexuelle », ayant pour effet de créer un « environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant », même s'ils ne sont pas répétés , contrairement à ce que supposent le I de l'article 222-33 du code pénal et le 1° de l'article L. 1153-1 du code du travail.

ARTICLE 1 ER DE LA LOI N° 2008-496 DU 27 MAI 2008

Constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son origine, de son sexe, de sa situation de famille, de sa grossesse, de son apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son patronyme, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, de son état de santé, de sa perte d'autonomie, de son handicap, de ses caractéristiques génétiques, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une prétendue race ou une religion déterminée, une personne est traitée de manière moins favorable qu'une autre ne l'est, ne l'a été ou ne l'aura été dans une situation comparable.

Constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d'entraîner, pour l'un des motifs mentionnés au premier alinéa, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d'autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés.

La discrimination inclut :

1° Tout agissement lié à l'un des motifs mentionnés au premier alinéa et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ;

2° le fait d'enjoindre à quiconque d'adopter un comportement prohibé par l'article 2.

Le Défenseur des Droits recommande donc d'harmoniser les différentes définitions du harcèlement sexuel pour prendre en compte tout agissement, même non répété, s'il porte atteinte à la dignité de la personne ou crée à son encontre une situation humiliante et offensante . L'objectif est d'aboutir à une prise en considération plus large du phénomène de harcèlement 205 ( * ) .

(2) Les apports ultérieurs à la loi de 2012

Par ailleurs, la loi de 2012 a été complétée récemment par plusieurs dispositions visant à lutter contre le sexisme au travail et à mieux indemniser les victimes de harcèlement .

Ainsi, la loi relative au dialogue social et à l'emploi de 2015 206 ( * ) a introduit l'agissement sexiste dans le code du travail (à l'initiative, d'ailleurs, de plusieurs membres de la délégation aux droits des femmes du Sénat). Cette disposition figure désormais à l'article L. 1142-2-1 du code du travail.

ARTICLE L. 1142-2-1 DU CODE DU TRAVAIL
RELATIF À L'AGISSEMENT SEXISTE

Nul ne doit subir d'agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d'une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

On notera que la définition de l'agissement sexiste reprend la notion d'environnement « intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant » inspiré de la directive européenne transposée en 2008.

De plus, la loi du 8 août 2016 relative au travail et à l'emploi 207 ( * ) , dite loi « El Khomri », a étendu l'agissement sexiste au statut de la fonction publique 208 ( * ) .

De surcroît, cette loi prévoit l e remboursement par l'employeur des indemnités chômage versées à une personne licenciée à la suite d'un traitement discriminatoire ou d'un acte de harcèlement, ainsi que le versement d'une indemnité plancher de six mois pour tout salarié licencié en raison d'un motif discriminatoire ou à la suite d'un harcèlement dont il a été victime.

Comme le Défenseur des Droits et l'association AVFT, la délégation aux droits des femmes préconise de porter le montant de cette indemnité plancher à douze mois . Plusieurs de ses membres avaient d'ailleurs déposé des amendements en ce sens au moment de l'examen de la loi « El Khomri ».

Au cours de son audition, le 31 janvier 2018, Marylin Baldeck, déléguée générale de l' Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AVFT) a rappelé que l'AVFT milite depuis 2013 pour que le montant de l'indemnisation des victimes de discrimination au travail soit au moins égal à douze mois de salaire : « ce niveau d'indemnisation qui assure aux victimes une meilleure prise en charge des préjudices , mais encourage aussi les employeurs à respecter leurs obligations de prévention , doit, selon l'AVFT, bénéficier à toutes les victimes dans une démarche d'harmonisation ».

La délégation souhaite que soit porté à douze mois de salaire le montant de l'indemnité plancher au profit de toute personne licenciée après avoir été victime de harcèlement.

Un autre point souligné par le Défenseur des Droits lors de son audition tient au fait que les victimes de harcèlement sexuel bénéficient d'un aménagement de la charge de la preuve devant les juridictions civiles et administratives , ce qui peut les aider à obtenir gain de cause. Ainsi, la loi « El Khomri » a aligné le régime probatoire du harcèlement sexuel sur celui des discriminations en généra l 209 ( * ) , tel que prévu par l'article 4 de la loi du 27 mai 2008 précitée.

Autrement dit, le salarié victime de harcèlement ne doit plus établir des faits qui permettent de présumer l'existence de harcèlement, mais seulement « présenter des éléments de faits » . Selon le Défenseur des Droits, « ce changement lexical est particulièrement important : établir des faits renvoie à une démonstration et va au-delà de la simple présentation prévue en matière de discrimination. Cette nouvelle formulation va donc renforcer les droits des victimes de harcèlement sexuel ».

Il s'agit là d'une avancée importante.

ARTICLE L. 1154-1 DU CODE DU TRAVAIL

Lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement .

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Pour autant, cette disposition est généralement méconnue des victimes, notamment dans des cas de harcèlement sexuel pour l'accès aux biens et aux services (par exemple un logement ou une demande crédit). Le Défenseur des Droits recommande donc, dans son avis transmis à la délégation 210 ( * ) , de mieux informer les victimes de harcèlement sexuel que l'aménagement de la charge de la preuve vaut également pour les faits commis lors de l'accès aux biens et aux services , point qui n'est selon lui pas suffisamment connu à l'heure actuelle 211 ( * ) .

Enfin, le cadre légal du harcèlement a récemment été modifié par la loi du 27 février 2017 réformant la prescription 212 ( * ) , qui a porté de trois à six ans le délai de prescription du harcèlement sexuel , au même titre que les autres délits.

(3) Plusieurs points de vigilance

Plusieurs dispositions adoptées dans le cadre des « ordonnances travail » 213 ( * ) sont susceptibles d'avoir des incidences en matière de prévention du harcèlement sexuel et des violences sexuelles dans les entreprises, et nécessitent donc une certaine vigilance de la part du législateur.

Tout d'abord, la délégation note avec satisfaction que la procédure de prise d'acte en raison du harcèlement a finalement été exclue du plafonnement des indemnités prévu en cas de licenciement abusif , au même titre que les autres licenciements pour motif discriminatoire.

En outre, la délégation a entendu la préoccupation exprimée par Marylin Baldeck, déléguée générale de l'AVFT, au cours de son audition du 31 janvier 2018, concernant une disposition remettant en cause une jurisprudence protectrice pour les salariées victimes de harcèlement .

Ainsi qu'elle l'a rappelé, selon une jurisprudence constante de la Chambre sociale de la Cour de cassation , le licenciement d'un salarié pour dénonciation de faits de harcèlement sexuel est nul de plein droit, sauf à ce que l'employeur puisse démontrer l'absence de fondement de ces allégations, et quand bien même d'autres motifs de licenciement auraient été mentionnés dans la lettre de licenciement. Ces motifs complémentaires n'ont alors même pas à être examinés par le juge, au regard de la gravité des faits de harcèlement.

Or une disposition des « ordonnances travail » revient sur cette jurisprudence, à travers une mesure relative à la pluralité des motifs de licenciement.

En effet, la réforme du code du travail prévue par les ordonnances travail a créé un article L. 1235-2-1 qui dispose : « en cas de pluralité de motifs de licenciement, si l'un des griefs reprochés au salarié porte atteinte à une liberté fondamentale, la nullité encourue de la rupture ne dispense pas le juge d'examiner l'ensemble des griefs énoncés, pour en tenir compte, le cas échéant, dans l'évaluation qu'il fait de l'indemnité à allouer au salarié, sans préjudice des dispositions de l'article L. 1235-3-1 ».

L'AVFT dénonce cette évolution et en conteste l'utilité même, alors que les licenciements intervenus pour avoir dénoncé des faits de harcèlement sexuel sont selon elle peu fréquents, les employeurs usant d'autres motifs pour licencier ces salariés.

Enfin, la délégation estime qu'il conviendra d'être vigilant sur les conséquences de la fusion des instances représentatives du personnel (IRP) dans les nouveaux Comités sociaux et économiques (CSE) en matière de prévention du harcèlement sexuel au travail.

En effet, le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) est compétent pour interpeller les employeurs et demander des enquêtes en matière de sexisme et de harcèlement sexuel. Aux termes de l'article 4612-1 du code du travail, avant la réforme de 2017 214 ( * ) , il avait pour mission de « contribuer à l'amélioration des conditions de travail, notamment en vue de faciliter l'accès des femmes à tous les emplois et de répondre aux problèmes liés à la maternité ». En outre, son rôle a été renforcé par la loi du 8 août 2016 qui a introduit l'obligation de proposer des actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes 215 ( * ) .

De même, les délégués du personnel peuvent mettre en oeuvre le droit d'alerte au titre de « faits de harcèlement sexuel et moral » (art. L. 2313-2 du code du travail avant réforme).

LA CONTRIBUTION DES DÉLÉGUÉS DU PERSONNEL ET DES CHSCT À LA PRÉVENTION
DU HARCÈLEMENT ET À LA DÉTECTION DES SITUATIONS DE HARCÈLEMENT

L'article L. 2313-2 du code du travail, modifié par la loi du 6 août 2012 sur le harcèlement sexuel, a étendu aux faits de harcèlement les « atteintes aux personnes » fondant le droit d'alerte des délégués du personnel auquel l'employeur devait répondre en procédant « sans délai à une enquête avec le délégué » et en prenant les « dispositions nécessaires pour remédier à cette situation ».

Le code du travail prévoyait alors, en cas de carence de l'employeur ou de divergence entre celui-ci et le délégué du personnel sur la réalité des faits, la saisine du conseil de prud'hommes « qui statue selon la forme des référés ».

Or ce droit d'alerte des délégués du personnel, très protecteur pour les victimes de harcèlement, qu'il soit moral ou sexuel, ne figure plus dans la version de l'article L. 2313-2 du code du travail résultant de l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 216 ( * ) .

La même remarque vaut pour les CHSCT, consultés sur les mesures de prévention du harcèlement et susceptibles en application de l'article L. 4612-3 du code du travail de « proposer notamment des actions de prévention du harcèlement moral et sexuel » ainsi que des agissements sexistes, le refus de l'employeur dans ce cas devant être motivé.

L'évolution du CHSCT est un sujet de préoccupation pour la délégation .

Compte tenu de ses prérogatives spécifiques en matière de prévention du harcèlement sexuel, la délégation sera attentive à ce que la fusion du CHSCT et des délégués du personnel dans le nouveau CSE ne dilue pas la question des violences sexistes et sexuelles et ne la rende pas secondaire, parmi les autres préoccupations traitées par le CSE .

Ce risque a été évoqué par Brigitte Grésy, secrétaire générale du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP) au cours de son audition du 7 décembre 2017, par Sandrine Rousseau, fondatrice de l'association Parler, lors de son audition du 17 janvier 2018, et par Marylin Baldeck, déléguée générale de l'AVFT, entendue le 31 janvier 2018.

Selon cette dernière, « la fusion des instances représentatives du personnel (IRP) - dont le CHSCT au sein d'une nouvelle instance, le Comité Social et Économique (CSE), peut s'analyser à la fois positivement , puisque celui-ci récupère des compétences en matière de traitement du harcèlement sexuel , mais aussi fort négativement, en diluant la spécificité du CHSCT , instance dédiée exclusivement aux questions de sécurité et de santé au travail. Plusieurs dispositions des ordonnances permettent de conclure des accords directement au niveau de l'entreprise, en dépossédant les branches de certaines de leurs prérogatives ; aussi nous étonnons-nous que n'ait pas été laissée la possibilité aux entreprises qui le désiraient de conserver leur CHSCT lorsqu'il fonctionnait bien ».

Pour sa part, le Défenseur des Droits a jugé plutôt positive la fusion des IRP dans le CSE et ne craint pas une dilution des sujets , estimant qu'il est prématuré de porter un jugement à ce stade : « il est encore trop tôt (...) pour juger des conséquences de la mise en oeuvre de la réforme du CHSCT en matière de lutte contre le harcèlement sexuel en milieu professionnel. Pour ma part, je ne suis pas certain qu'il faille s'en inquiéter : elle pourrait conduire, et cela est positif, l'ensemble des membres du nouvel organe à se saisir du dossier de manière efficace, en ne traitant pas la question uniquement sous l'angle de la santé au travail ».

La délégation note en revanche que la mission de prévention du harcèlement sexuel et moral confiée par l'article L. 4622-2 du code du travail aux services de santé au travail, chargés de conseiller l'employeur en la matière, a été préservée par l'article 2 de l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017.

La délégation attire l'attention sur les risques d'affaiblissement de la prévention et de la lutte contre les violences sexistes et sexuelles au travail et d'un accompagnement dégradé des victimes , qui pourraient résulter de la fusion des institutions représentatives du personnel (IRP) au sein du nouveau comité social et économique (CSE) prévue par les « ordonnances travail » 217 ( * ) .

Elle souhaite qu'une vigilance particulière accompagne la mise en place de ces nouvelles instances.

b) Des avancées jurisprudentielles importantes

Au-delà des modifications législatives récentes, la jurisprudence en matière de harcèlement sexuel a également évolué de manière favorable aux victimes.

Au cours de son audition par la délégation, le 25 janvier 2018, le Défenseur des Droits a salué la reconnaissance du « harcèlement d'ambiance » ou harcèlement sexuel dit « environnemental », dans un arrêt du 7 février 2017 de la cour d'appel d'Orléans 218 ( * ) .

LA RECONNAISSANCE DU HARCÈLEMENT SEXUEL D'AMBIANCE
PAR LA JURISPRUDENCE

« Compétent en matière de discrimination sexiste et de harcèlement sexuel au travail, le Défenseur des droits a contribué cette année à faire avancer la jurisprudence en présentant ses observations au soutien de la reconnaissance du harcèlement sexuel d'ambiance devant la cour d'appel d'Orléans.

Une salariée, rédactrice dans un journal, se plaignait d'un environnement de travail particulièrement hostile, ponctué de blagues salaces, de propos insultants envers les femmes, de photographies humiliantes affichées sur les murs de l' open-space , de fonds d'écran pornographiques. Confortant les recommandations du Défenseur des Droits, la cour d'appel a retenu la notion de harcèlement d'ambiance fondée sur le sexe. »

Source : rapport d'activité 2017 du Défenseur des Droits

Au terme de l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, le harcèlement sexuel est reconnu quand une salariée est confrontée à un environnement de travail marqué par des commentaires sexuels , d'images à caractère pornographique ou encore de commentaires dégradants sur les femmes, sans pour autant qu'une salariée soit explicitement visée .

De surcroît, un deuxième arrêt important a été rendu au mois de mai 2017 par la Cour de cassation 219 ( * ) . La Cour admet qu'un acte unique suffise à caractériser le harcèlement sexuel (la répétition n'est donc pas nécessairement exigée) , y compris lorsqu'il n'y a pas de « pressions graves » et lorsqu'il n'y a pas d'intention, de la part de l'auteur, d'obtenir un acte de nature sexuelle. Pourtant, la lecture de la loi ne l'invitait pas forcément à une telle interprétation.

La Cour de Cassation considère donc que le harcèlement sexuel peut être caractérisé par un « comportement non répété » et laisse à la libre appréciation des juges du fond le point de savoir dans quelles circonstances un acte unique est suffisant pour prononcer la condamnation civile d'un employeur pour harcèlement sexuel.

Ces évolutions jurisprudentielles sont très positives et pourraient inspirer un tournant favorable à la protection des victimes de harcèlement , tout en facilitant la reconnaissance de leur préjudice.

***

Le cadre législatif et jurisprudentiel du harcèlement sexuel est donc relativement complet et protecteur pour les victimes . Pour autant, plusieurs des interlocuteurs de la délégation ont insisté sur l'application perfectible de la loi , notamment par les petites entreprises.

Comme l'a affirmé en particulier le Défenseur des Droits au cours de son audition du 25 janvier 2018, « la législation française en matière de lutte contre les délits sexuels mériterait d'être plus systématiquement appliquée ». Ce point tient notamment à un manque d'information et de formation au sein des entreprises.

3. La formation et de la sensibilisation : un enjeu déterminant

La prévention et la lutte contre les violences sexistes et sexuelles dans l'environnement de travail (entreprise et fonction publique) ne passent pas que par des mesures législatives ou réglementaires. Elles tiennent également à la bonne information et à la mobilisation des employeurs et des salariés. À cet égard, le rôle des partenaires sociaux est important .

Pour rappel, l'article L. 1153-5 du code du travail crée à l'égard de l'employeur un devoir de prévention et d'information , en l'engageant :

- à informer « par tous moyens » les salariés , personnes en formation, stagiaires et candidats à l'embauche ou à un stage du texte de l'article 222-33 du code pénal, qui doit être affiché dans les lieux de travail et dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l'embauche ;

- à prendre « toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les faits de harcèlement sexuel, d'y mettre un terme et de les sanctionner ».

Ces obligations s'inscrivent dans le cadre de l'obligation générale faite à l'employeur d'« assurer la sécurité » et de « protéger la santé mentale des travailleurs » (article L. 4121-1 du code du travail), par des « actions de prévention », des « actions d'information et de formation » et la « mise en place d'une organisation et de moyens adaptés ».

ARTICLE L. 4121-1 DU CODE DU TRAVAIL

L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 ;

2° des actions d'information et de formation ;

3° la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes.

De plus, l'article L. 4121-2 du code du travail impose à l'employeur d'intégrer à la prévention « les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel » .

Selon la circulaire du 12 novembre 2012 du ministère du Travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social relative au harcèlement dans les relations de travail 220 ( * ) , les actions de formations mises en oeuvre par l'employeur peuvent viser à « améliorer la connaissance, la prévention et l'identification des phénomènes de harcèlement ». L'adoption de mesures appropriées visant à « faciliter le repérage des faits de harcèlement » fait partie de la démarche de prévention visée par la circulaire.

La délégation constate une réelle mobilisation de l'administration pour faire progresser la prévention et le traitement du harcèlement sexuel et des violences sexuelles en général dans la fonction publique .

Des efforts similaires sont attendus pour renforcer la mobilisation dans les entreprises , sous l'impulsion des ministères concernés, mais aussi des partenaires sociaux.

a) Une réelle mobilisation de l'administration pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles dans la fonction publique

Comme cela a été rappelé plus haut, la loi du 13 juillet 1983 a intégré la notion de harcèlement en 1992 (loi du 2 novembre 1992 relative à l'abus d'autorité en matière sexuelle dans les relations de travail) . Seuls ont donc été pris en compte, dans un premier temps, les agissements de supérieurs hiérarchiques envers des subordonnés. La loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale a par la suite rendu la définition du harcèlement sexuel indépendante des relations hiérarchiques , élargissant ainsi la notion aux agissements entre collègues, voire d'un subordonné à l'égard d'un supérieur. Enfin, la loi de 2012 a aligné les dispositions du statut du fonctionnaire sur le code pénal , reprenant la double définition du harcèlement sexuel selon qu'il peut, ou non, résulter d'actes répétés.

Deux circulaires de 2014 et 2018 font de la lutte contre le harcèlement une priorité dans la fonction publique .

(1) La circulaire du 4 mars 2014

Tout d'abord, la circulaire du 4 mars 2014 relative à la lutte contre le harcèlement dans la fonction publique 221 ( * ) envisage de manière globale la lutte contre le harcèlement, tant moral que sexuel . Ce texte estime à juste titre que « les situations de souffrance liées au harcèlement dans l'administration rendent impérieuses, en amont, la mise en oeuvre de mesures préventives ». La circulaire précise les obligations de l'employeur public à l'égard des victimes, dans le cadre de la protection fonctionnelle prévue par l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 :

- une obligation de prévention du harcèlement (changement d'affectation, éloignement ou suspension des fonctions) et l'engagement d'une procédure disciplinaire contre l'auteur des faits ; on notera que la protection fonctionnelle ne peut en principe être refusée ;

- une obligation de réparation ;

- une obligation d'assistance juridique des victimes pour les aider dans les procédures judiciaires entreprises, y compris au pénal.

Ainsi que le rappelle la circulaire du 4 mars 2014, « la logique préventive passe d'abord, dans la fonction publique, par un plein exercice de la responsabilité hiérarchique », qui s'inscrit dans l'obligation générale faite aux chefs de service de « veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité » 222 ( * ) . Les administrations sont en effet soumises, en matière de santé et de sécurité au travail, aux mêmes obligations que les autres employeurs .

La responsabilité de l'administration peut être engagée devant le juge administratif si aucune mesure n'a été prise pour faire cesser des agissements dont elle a eu connaissance et dont elle a pu vérifier la réalité. En cas d'engagement devant le juge de sa responsabilité, l'administration doit apporter la preuve qu'elle a mis en oeuvre des moyens pour faire cesser les agissements de harcèlement, sa carence constituant une faute de service : l'administration peut être condamnée pour sa négligence et son inertie, indépendamment des suites pénales éventuelles .

On notera que l'obligation d'affichage prévue, à titre d'information des personnels, par l'article L. 1153-5 du code du travail, concerne les employeurs privés ; elle s'applique toutefois aux personnels des personnes publiques employées dans les conditions du droit privé. Elle peut aussi s'inscrire, pour les employeurs publics, dans la démarche de prévention qui relève de leur responsabilité.

Par ailleurs, la circulaire se réfère à la déontologie des agents publics et aux valeurs de la fonction publique : « l'agent public, harceleur, contrevient donc à ses obligations en adoptant un comportement répréhensible, contraire à sa mission et indigne de ses fonctions ». De surcroît, l'article 40 du code de procédure pénale prévoit une obligation de signalement pour tout fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, « acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit » : le juge admet toutefois que le signalement au procureur de la République puisse être fait par le supérieur hiérarchique du fonctionnaire ayant eu connaissance des faits délictueux.

Enfin, la circulaire de 2014 engage les employeurs publics à mobiliser, pour prévenir les faits de harcèlement, les CHSCT et les médecins de prévention . Elle mentionne également la formation initiale et continue des agents publics, qui « revêt une importance stratégique » pour prévenir le harcèlement, tant sexuel que moral. Elle invite les administrations à mettre en place dans cette logique des « formations spécifiques pour mieux connaître, prévenir et traiter le harcèlement », pour « renforcer la prise de conscience des situations de harcèlement » et la « maîtrise du cadre juridique » pour permettre aux agents concernés de réagir de la manière la plus adaptée.

(2) La circulaire du 9 mars 2018

La circulaire du 9 mars 2018 relative à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans la fonction publique 223 ( * ) actualise celle du 4 mars 2014 pour accompagner le plan d'action ambitieux contre les violences sexuelles et sexistes annoncé par le Président de la République le 25 novembre 2017 .

La circulaire décline un plan de prévention et de traitement des violences sexuelles et sexistes en trois axes au demeurant classiques : la prévention par la formation et la sensibilisation des acteurs, le traitement des signalements et la sanction des comportements de harcèlement.

- Axe 1 : Prévenir les violences sexuelles et sexistes dans la fonction publique .

Dans ce cadre, la circulaire invite les responsables administratifs à déployer à partir de 2018 un « plan ambitieux de formation à la prévention et à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes », indiquant qu'« une formation initiale et continue dédiée à la prévention et à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes sera élaborée dans les trois versants de la fonction publique ». Cette formation sera prioritairement destinée aux agents en situation d'encadrement, aux référents Égalité et diversité, aux personnels des ressources humaines , aux médecins du travail et de prévention, aux inspecteurs de santé et sécurité au travail et aux représentants du personnel, mais aussi aux élèves des écoles de service public dans le cadre de leur formation initiale . Un référentiel commun sera élaboré.

En outre, le volet prévention du plan prévoit d'« informer et sensibiliser le plus grand nombre d'agents sur les situations de violences et les acteurs à mobiliser ». À cet effet, les employeurs publics pourront par exemple mettre en place un affichage dédié dans les espaces communs , reposant sur un message explicite « « Zéro tolérance en matière de violences sexuelles et sexistes », le rappel du numéro vert 3919 « Violences Femmes info » et créer un dépliant ad hoc permettant à tout agent de savoir qui contacter et quelle procédure suivre lorsqu'il est victime de tel acte ou en a connaissance.

- Axe 2 : Traiter les situations de violences sexuelles et sexistes.

Il s'agit tout d'abord de définir et mettre en oeuvre un dispositif de signalement et de traitement des violences sexuelles et sexistes . La circulaire indique que « les employeurs publics sont tenus de définir et de mettre en place un dispositif de signalement (cellule d'écoute ou dispositif équivalent) et de traitement des violences sur le lieu de travail ainsi qu'un circuit RH de prise en charge permettant d'accompagner les agents victimes . »

Quel que soit le format retenu pour le signalement, le dispositif (cellule d'écoute ou personne référente) devra comporter toutes les garanties nécessaires en termes d'accueil, de confidentialité, d'expertise, de qualité et de rapidité de traitement et de suivi des saisines .

La délégation relève que le ministère des Armées a su mettre en place avec succès , dès 2014, une cellule d'écoute, d'information, d'accueil et d'accompagnement des victimes, dénommée « Thémis » , dont l'action a été présentée à la délégation par Érick Dal, contrôleur général des armées, chef de la cellule Thémis , le 19 décembre 2017 224 ( * ) .

Certes, ce dispositif ne saurait à lui seul, il faut en être conscient, prévenir les faits de harcèlement et les comportements sexistes. L'actualité récente a illustré la persistance d'agissements inacceptables à l'égard des jeunes filles dans certaines classes préparatoires aux écoles militaires. La ministre des Armées a d'ailleurs réagi à ces comportements dans la logique de l'esprit de tolérance zéro qui avait présidé à la mise en place de la cellule Thémis .

Le rapport d'information fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale par Pascale Crozon et Guy Geoffroy sur l'évaluation de la loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel 225 ( * ) , publié en novembre 2016, consacrait un développement particulier à la cellule Thémis et estimait que celle-ci constitue un modèle de structure d'accueil et d'accompagnement des victimes.

Parmi leurs recommandations, les députés suggéraient de « développer dans la fonction publique des dispositifs tels que celui mis en place par le ministère de la Défense avec la mise en place de la cellule Thémis » 226 ( * ) , ce qui souligne le caractère exemplaire de celle-ci, comme l'avait tout particulièrement relevé Catherine Coutelle, alors présidente de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, lors de l'examen du rapport précité 227 ( * ) .

S'agissant du traitement des signalements , la circulaire rappelle que lorsque des faits constitutifs d'une violence sexuelle ou sexiste sont signalés par un agent, l'administration doit, dans les délais les plus brefs, procéder à une enquête interne , orienter le plaignant vers les acteurs adéquats, faire cesser les faits en prenant toute mesure conservatoire et s'assurer que la victimes ne subit pas d'actes de représailles .

Il s'agit ensuite de protéger et accompagner les victimes . À cet égard, la circulaire rappelle que l'obligation de protection des agents s'impose à tout employeur public et rappelle les trois obligations recouvrées par la protection fonctionnelle (prévention, assistance juridique et réparation) et que la responsabilité de l'employeur peut être engagée en cas de carence en matière de prévention et de traitement des violences dont peuvent être victimes les agents publics sur leur lieu de travail. Enfin, les employeurs publics sont incités à étendre l'application de ces dispositifs aux violences et au harcèlement d'origine extra-professionnelle détectés sur le lieu de travail.

- Axe 3 : Sanctionner les auteurs de violences sexuelles et sexistes.

Le troisième volet du plan met en exergue la nécessité d'une exemplarité des employeurs dans la sanction de ces violences et rappelle les dispositions concernées du code pénal. La circulaire rappelle par ailleurs que les actes constitutifs de violences sexuelles ou sexistes doivent être sanctionnés par le biais de la procédure disciplinaire 228 ( * ) et/ou par le juge pénal . Ils peuvent également donner lieu à une indemnisation par le juge civil .

LA CELLULE THÉMIS : UN DISPOSITIF EXEMPLAIRE DE SIGNALEMENT
ET D'ACCOMPAGNEMENT DES VICTIMES AD HOC
MIS EN PLACE AU SEIN DU MINISTÈRE DES ARMÉES

La cellule Thémis a été créée par une décision du 21 juillet 2014 . Il s'agit d'une cellule d'accueil des signalements et d'enquête administrative , sous l'autorité du contrôle général des armées. Elle permet à chaque personnel , qu'il soit civil ou militaire, homme ou femme, du ministère de la Défense, victime ou témoin de harcèlement, de discriminations ou de violences sexuelles, commises soit en service, soit dans les lieux soumis à son autorité de le signaler .

En effet, le plan d'action ministériel contre les cas de harcèlement, discriminations et violences sexuelles du ministère de la Défense, présenté le 15 avril 2014, a prévu la mise en oeuvre d'une douzaine d'actions selon quatre axes complémentaires : l'accompagnement des victimes, la prévention de tels faits, la transparence de l'action du ministère et la sanction des auteurs.

L'article 2 de la décision du 21 juillet 2014 précise que cette cellule « est chargée d'étudier les cas de harcèlement, violence et discrimination sexuels commis au sein du ministère de la Défense et de ses établissements publics, en liaison avec les inspecteurs généraux des armées . »

À ce titre, cette cellule :

- reçoit les signalements des cas par tous moyens ;

- propose à l'autorité hiérarchique les mesures conservatoires nécessaires ;

- informe les victimes sur leurs droits ;

- peut conduire des enquêtes administratives . Dans ce cas, elle peut indiquer à l'autorité habilitée la ou les sanctions disciplinaires susceptibles d'être prises, sans préjudice d'une éventuelle procédure judiciaire ;

- communique aux inspecteurs généraux des armées, aux inspecteurs d'armée ou de service ou à l'inspecteur du personnel civil les cas qui ont fait l'objet d'une procédure « évènement grave » et dont le traitement lui paraît justifier la saisine de la cellule ;

- apporte tous conseils au commandement ;

- et contribue à l'élaboration des statistiques en matière de harcèlements, violences et discriminations sexuels.

Une personne victime de harcèlement peut également se tourner vers un psychologue en contactant le réseau Écoute Défense , qui a été créé pour accompagner les victimes de stress post-traumatique et leur entourage, et qui est aussi ouvert à l'accueil des victimes de harcèlement, de discriminations et de violences sexuelles.

Depuis sa création, en 2014 229 ( * ) , la cellule Thémis a été saisie ou s'est saisie près de 300 fois pour des motifs relevant de sa compétence .

Selon le responsable de la cellule Thémis , « le flux des nouveaux dossiers ouverts est, en moyenne, de six à sept par mois ; actuellement onze dossiers sont en phase « instruction », vingt-deux en « action du commandement », et 79 dossiers en « suivi » 230 ( * ) .

Plusieurs enseignements peuvent être tirés sur le profil des victimes au regard des statistiques disponibles de la cellule Thémis :

- 90 % des signalements sont faits par les femmes ;

- le ratio civil/militaire (21 %/79 %) correspond sensiblement au rapport des deux populations au sein du ministère, mais la répartition des infractions semble différente : on constate davantage de harcèlement chez les civils, et d'agressions chez les militaires ;

- le nombre des infractions et leur répartition restent stables au fil du temps ;

- le harcèlement sexuel reste l'infraction la plus déclarée .

La délégation souhaite saluer le travail précurseur mené par le ministère des Armées à travers la création, dès 2014, de la cellule Thémis , dédiée au signalement des violences et à l'accompagnement des victimes. Elle estime que ce dispositif pourrait inspirer d'autres structures, privées ou publiques , souhaitant mettre en place un accompagnement complet des victimes de harcèlement ou de violences dans le cadre professionnel.

b) Des efforts à poursuivre pour améliorer la prévention et le traitement des violences sexistes et sexuelles dans les entreprises
(1) Une prise de conscience et un engagement plus marqués des partenaires sociaux

Si la mobilisation et les outils qui l'accompagnent existent dans la fonction publique, l'engagement des employeurs sur la prévention du harcèlement doit encore être renforcé dans les entreprises, à travers une intensification des outils de formation et de sensibilisation .

Au cours de son audition, le 25 janvier 2018, le Défenseur des Droits a regretté une mise en oeuvre partielle, par les entreprises, des obligations prévues en matière de harcèlement . Il constate notamment que peu d'organisations ont mis en place des actions d'information et de prévention.

Ainsi, selon l'enquête réalisée en 2014 à son initiative, seuls 18 % des actifs interrogés affirment que leur employeur a pris de telles mesures. Il s'agit essentiellement des entreprises de grande taille, 91 % des entreprises de moins de dix salariés n'ayant mis en oeuvre aucune action .

Pour autant, la délégation observe une prise de conscience récente et plus marquée de la part des syndicats et du patronat sur le harcèlement sexuel dans l'environnement de travail.

Cette prise de conscience se traduit notamment par une action destinée à renforcer l'information des employeurs et des salariés sur le cadre juridique du harcèlement et des violences sexuelles et sur les moyens d'y faire face.

Par exemple, la Confédération générale du travail (CGT) a élaboré en 2016 un guide complet intitulé Outils pour l'action syndicale. Combattre les violences sexistes et sexuelles, que la délégation a consulté avec intérêt.

La délégation relève également une implication plus marquée du Medef sur ces questions . Comme le relevaient Pascale Crozon et Guy Geoffroy dans leur rapport de 2016 231 ( * ) , la répression du harcèlement sexuel souffrait au sein du syndicat patronal de deux stéréotypes tenaces fondés sur la « séduction » ou « l'esprit latin » qui existerait dans les relations entre les hommes et les femmes en France d'une part, et le risque d'une « guerre des sexes » comme il en existerait aux États-Unis d'autre part.

Ils illustraient ce constat par un extrait des propos liminaires d'une note écrite transmise par le Medef dans le cadre de leurs travaux : « Nous souhaitons rappeler que la France relève d'une culture latine, et qu'il n'est sans doute pas souhaitable d'appliquer chez nous des idées relevant directement d'une conception anglo-saxonne des relations entre les hommes et les femmes. La connaissance de nos différences fait notre richesse, et est à la base du vivre ensemble tel que nous le concevons ».

Fort heureusement, les éléments transmis par le Medef à la délégation en réponse à sa demande de contribution écrite dans le cadre du présent rapport ne reprennent pas ces stéréotypes . Ils insistent au contraire sur le caractère « perturbateur d'ambiance » des allusions à caractère sexuel ou des propos sexistes en entreprise , selon un baromètre réalisé en interne par le Medef 232 ( * ) en 2017, et sur le fait que les stéréotypes de genre sont vécus comme la deuxième source de moquerie au sein de l'entreprise, derrière « les heures d'arrivée et de départ ».

Les propositions du Medef pour la prévention du harcèlement sexuel s'inspirent notamment des travaux du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP) 233 ( * ) :

- le chef d'entreprise est invité à afficher son engagement sur le sujet ;

- les entreprises sont incitées à sensibiliser et former la direction, les managers et les collaborateurs et, plus généralement, à créer un climat de confiance, en rappelant qu'une culture d'entreprise tolérant les remarques sexistes sera susceptible de créer un terreau propice aux agissements sexistes, voire au harcèlement sexuel . Il paraît important de mettre à disposition des collaborateurs des informations sur les procédures à suivre en cas de problème 234 ( * ) .

En ce qui concerne la communication , le Medef propose d'impliquer les représentants des salariés dans la conception d'outils de prévention et d'information ou de politique d'accompagnement ; de définir un code de conduite mentionnant explicitement les actes prohibés dans l'entreprise 235 ( * ) ; de communiquer auprès des fournisseurs, des clients, des partenaires et usagers sur l'adhésion de l'entreprise à ces engagement, notamment en l'affichant dans les lieux accessibles à tous dans ses publicités, sur son site Internet et ses réseaux sociaux ; d'engager des procédure de labélisation ; de veiller à construire une communication interne et externe à l'entreprise dépourvue de stéréotypes de sexe .

En ce qui concerne la sensibilisation des collaborateurs , le Medef suggère une offre de formation et de conférences en ligne ou en présentiel 236 ( * ) sur ces sujets, pour apprendre à réagir face aux situations de sexisme et de harcèlement, et pour analyser ses propres comportements. Il cite à titre d'exemple la mise en place d'un module de e-learning dédié à la prévention du harcèlement déployé auprès des salariés du groupe PSA, une conférence organisée en novembre 2017 pour « comprendre les stéréotypes de genre et instaurer une culture non sexiste » accessible en ligne, ainsi que l'organisation d'une conférence en live streaming le 19 décembre 2017 pour tous les collaborateurs du groupe BNP Paribas.

Il envisage aussi de développer des actions valorisant la mixité au sein de l'entreprise 237 ( * ) , ou encore d'impliquer les entreprises dans des journées d'action à l'occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes (25 novembre) ou de la Journée internationale des droits des femmes (8 mars) 238 ( * ) .

Au-delà de la communication et de la sensibilisation, le Medef émet des propositions sur l'instauration de dispositifs d'alerte professionnelle des situations de harcèlement , voire, quand cela est possible, d'une cellule d'écoute dédiée permettant de garantir la traçabilité et la confidentialité des données recueillies, de repérer et de traiter ces situations.

Il cite à cet égard la mise en place d'une messagerie dédiée au sein des groupes PSA ou BNP Paribas ainsi que des applications dédiées, telles que « App-Elles » et « HandsAway », destinées aux victimes et aux témoins.

La délégation observe que les grandes entreprises pourraient s'inspirer, pour la mise en place de ce dispositif, de la cellule Thémis mise en place au ministère des Armées ( cf. supra ).

En ce qui concerne les TPE et les PME, il conviendrait d'envisager au moins la désignation au sein de l'entreprise de personnes de confiance ou de référents , formés à cet effet et indépendants de la hiérarchie, dont le rôle serait de recevoir les témoignages, d'accompagner et d'orienter les victimes, et d'alerter la direction.

La délégation est consciente que l'ensemble des bonnes pratiques proposées par le Medef n'est pas forcément transposable dans toutes les entreprises, notamment les plus petites d'entre elles . Les actions mises en oeuvre sont d'ailleurs généralement le fait de grandes entreprises. Au cours de son audition, Brigitte Grésy a estimé que les PME-TPE sont moins bien outillées que les grandes entreprises en matière de lutte contre le sexisme : selon elle, « nous avons besoin de régulation et d'outils d'encadrement pour faciliter le travail des PME ». Il est donc important d'encourager des initiatives visant à ouvrir les formations ou actions portées par les grandes entreprises aux TPE-PME .

Plus généralement, le Medef a mis en garde contre la tentation d'imposer des sujétions aux entreprises qui ne seraient pas en mesure de mettre en oeuvre ce type d'actions . Il a marqué sa préférence pour la prise de conscience de ces enjeux par la mise en place d'actions volontaires. Selon lui, « toute démarche contraignante serait contreproductive ».

Il n'en demeure pas moins que la contrainte est parfois le seul moyen d'obtenir des résultats tangibles en matière d'égalité entre les femmes et les hommes.

(2) Mieux tirer parti des leviers de la négociation et de la régulation

Brigitte Grésy, secrétaire générale du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP), au cours de son audition devant la délégation, le 7 décembre 2017 239 ( * ) , a présenté des propositions très concrètes pour améliorer la prévention du sexisme, du harcèlement et des violences sexuelles dans l'entreprise. Elle a suggéré de d'activer les leviers de la négociation et de la régulation .

Sur le premier point, Brigitte Grésy a estimé que l'obligation de négocier un accord sur l'égalité professionnelle et la qualité de vie au travail constituait une disposition d'ordre public, pour les entreprises de plus de cinquante salariés. Cette obligation porte sur neuf domaines d'action , dont la « santé et la sécurité » au travail. Selon Brigitte Grésy, ce levier de la négociation pourrait être amélioré en complétant la référence à la « santé et sécurité au travail » par une référence aux « violences sexistes et sexuelles » dans la partie réglementaire du code du travail qui présente les indicateurs de la base de données économique et sociale.

En ce qui concerne la régulation , Brigitte Grésy recommande de travailler sur une amélioration du contenu du règlement intérieur . L'article L. 1321-2 du code du travail impose de citer dans le règlement intérieur les agissements sexistes à côté des harcèlements moral et sexuel. Pour mémoire, le règlement intérieur, « acte règlementaire de droit privé », obligatoire dans les entreprises ou les établissements employant habituellement au moins vingt salariés, est élaboré de manière unilatérale par l'employeur.

Brigitte Grésy propose notamment de modifier les modalités de diffusion du règlement intérieur , en complétant l'article R. 1321-1 240 ( * ) du code du travail par un alinéa qui prévoirait que le règlement intérieur serait remis en main propre à tout nouvel employé, contre une décharge affirmant qu'il a pris connaissance de ce règlement.

À cet égard, elle a cité l'exemple de la Belgique, pays dans lequel toute nouvelle personne recrutée doit signer le règlement intérieur de son entreprise.

La délégation suggère :

- que le règlement intérieur des entreprises comporte des dispositions précises en matière de prévention et de répression des comportements menaçant l'égalité femmes-hommes ;

- qu'il soit donné en main propre à toute personne recrutée, contre remise d'une décharge qui engagerait le nouveau salarié à se conformer à ces exigences.

Plus généralement, la délégation rappelle son attachement à la mixité au travail . Il ne s'agit pas d'instaurer des mesures qui aboutiraient à une codification artificielle et excessive des rapports entre les hommes et les femmes au sein de l'entreprise, telle qu'elle peut exister dans certains pays. Les situations de harcèlement ou de violence sexuelle au travail ne sont pas le quotidien des salariés. Il s'agit de situations extrêmes dont il faut éviter la survenance, la prévention du harcèlement étant dans l'intérêt de tous.

(3) Des outils de communication et d'information à mobiliser

Dans la fonction publique comme en entreprise, la délégation attire l'attention sur l'importance des guides généraux et des campagnes de sensibilisation en matière de prévention du harcèlement sexuel. À cet égard, elle souhaite citer plus particulièrement plusieurs outils méthodologiques récents, dont il convient d'assurer une large diffusion :

- le kit pour Agir contre le sexisme : trois outils pour le monde du travail (CSEP, 2016) , qui présente dix leviers de lutte contre le sexisme ordinaire ;

- le Guide de prévention et de traitement des situations de violences et de harcèlement dans la fonction publique 241 ( * ) ;

- les Fiches pratiques sur la conduite à tenir dans les situations de harcèlement sexuel au sein de la fonction publique 242 ( * ) .

Il existe par ailleurs des outils de communication internes aux entreprises . Si de nombreux guides ont déjà été créés et sont disponibles en ligne 243 ( * ) , il paraît important de relayer les guides généraux réalisés au niveau national, existant sur le sujet.

La délégation salue l'élaboration de ces outils et encourage leur diffusion à large échelle dans toutes les entreprises et les administrations.

Il semble important que les entreprises communiquent de manière continue sur leur engagement, les dispositifs d'alerte, les procédures à suivre en cas de problème, l'accompagnement des collaborateurs et les sanctions existantes. En outre, ces informations doivent être facilement et rapidement accessibles aux salariés.

Afin d'informer et de sensibiliser le plus grand nombre de salariés aux enjeux du harcèlement et des violences sexuelles au travail, la délégation préconise une large diffusion du kit Agir contre le sexisme : trois outils pour le monde du travail , élaboré par le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP).

Elle propose par ailleurs d'étendre la diffusion des Fiches pratiques sur la conduite à tenir dans les situations de harcèlement sexuel au sein de la fonction publique aux services des ressources humaines des entreprises privées et aux organisations syndicales, en les adaptant à l'environnement de travail des entreprises.

La délégation tient également à mentionner et à saluer la récente campagne d'information menée par le Défenseur des Droits pour améliorer la sensibilisation de tous au harcèlement 244 ( * ) . L'objectif de cette campagne est de donner les moyens d'identifier et de réagir face au harcèlement sexuel au travail et de connaître les intervenants à saisir 245 ( * ) .

Dans ce cadre, des supports d'information ont été transmis à près d'un millier de structures sur l'ensemble du territoire national, susceptibles d'accueillir des personnes victimes de harcèlement sexuel et de les accompagner dans leur démarche. Cette campagne s'est également déployée sur les réseaux sociaux, avec le hashtag #Unefemmesurcinq .

(4) Une formation en interne à renforcer

Parallèlement à la sensibilisation des employeurs et des salariés par l'information, il convient aussi de renforcer la formation de tous aux problématiques du harcèlement , ce qui est un gage pour bien accueillir les victimes présumées et ne pas les laisser sans solution, mais aussi pour garantir un environnement de travail serein, au bénéfice de tous, employeurs comme salariés .

À cet égard, Brigitte Grésy propose de rendre obligatoire, par la loi, une formation aux violences sexistes et sexuelles, pour tous les salariés, et notamment les membres des comités sociaux et économiques (CSE) - les nouvelles instances représentatives du personnel -, les partenaires sociaux, les managers et les responsables des ressources humaines. Une telle mesure pourrait être réalisée en deux temps.

Tout d'abord, la loi du 27 janvier 2017 246 ( * ) sur l'égalité et la citoyenneté a créé un article L. 1131-2 du code du travail pour faire en sorte que dans « toute entreprise employant au moins 300 salariés et toute entreprise spécialisée dans le recrutement, les employés chargés des missions de recrutement reçoivent une formation à la non-discrimination à l'embauche au moins une fois tous les cinq ans ». Brigitte Grésy propose d'étendre la possibilité de diffuser cette information dans les TPE et les PME.

Sans méconnaître les contraintes de moyens des TPE et des PME par rapport aux grandes entreprises, la délégation souscrit à l'objectif légitime de former le plus de salariés possible aux enjeux de la discrimination et du harcèlement en entreprise.

Ensuite, au-delà de cette formation à la discrimination à l'embauche, Brigitte Grésy propose d'ajouter aux formations obligatoires prévues à l'article L. 1131-2 du code du travail une formation sur les violences sexuelles et sexistes à destination de tous les salariés , au moins pour les managers, les partenaires sociaux, les responsables des ressources humaines et les responsables de la santé et de la sécurité au travail.

La délégation préconise de modifier l'article L.1131-2 du code du travail 247 ( * ) pour étendre la formation obligatoire à la non-discrimination, destinée aux employés chargés des missions de recrutement, aux violences sexistes et sexuelles .

Elle suggère aussi la mise à l'étude d'une extension de ces obligations de formation prévues par l'article L. 1131-2 du code du travail dans les entreprises de 300 salariés et plus, aux entreprises de moins de 300  salariés .

La délégation attache une importance particulière aux dispositions susceptibles de permettre la formation du plus grand nombre de salariés sur le harcèlement et les violences sexuelles au travail. Celui lui paraît un enjeu crucial pour aider les employeurs et les managers à assumer leurs responsabilités juridiques en matière de santé et de sécurité au travail , dans l'intérêt de tous.

(5) Quelles perspectives d'évolution dans les entreprises ?

La délégation prend acte du fait que le Gouvernement s'est engagé à adopter de nouvelles mesures pour renforcer la prévention et la lutte contre le harcèlement et les violences sexuelles au travail, dans le cadre du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel 248 ( * ) .

Tout d'abord, des dispositions en matière d'information aux victimes de harcèlement figurent dans le projet de loi initial déposé à l'Assemblée nationale.

Selon son exposé des motifs, « le chapitre IV introduit des dispositions dont l'objectif est à la fois de favoriser l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, notamment sur le plan des rémunérations, et de lutter contre les violences sexuelles et sexistes au travail ».

L'article 62 prévoit ainsi l'obligation pour l'employeur d'afficher les voies de recours civiles et pénales ouvertes en matière de harcèlement sexuel et les coordonnées des services compétents .

Cette disposition sera sans doute de nature à aider les victimes à faire valoir leurs droits auprès des interlocuteurs adéquats (par exemple, les coordonnées du Défenseur des Droits).

De surcroît, la délégation a noté que la ministre du Travail et la secrétaire d'État à l'Égalité entre les femmes et les hommes ont présenté le 9 mai 2018 quinze actions pour mettre un terme aux écarts de salaires injustifiés - estimés à 9 % au niveau national - et lutter contre les violences sexistes et sexuelles au travail . Ce plan « pour une égalité professionnelle réelle entre les femmes et les hommes » résulte d'une concertation avec les syndicats et le patronat .

Selon les annonces des ministres, les actions qui nécessitent des mesures législatives seront introduites lors de l'examen du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

Parmi les quinze actions du plan d'action pour l'égalité professionnelle présenté le 9 mai 2018, cinq concernent directement la lutte contre les violences sexistes et sexuelles et rejoignent les préoccupations exprimées par la délégation .

LES CINQ ACTIONS DU PLAN POUR L'ÉGALITÉ PROFESSIONNELLE
VISANT À LUTTER CONTRE LES VIOLENCES SEXISTES ET SEXUELLES

1. Mobiliser les acteurs du dialogue social

* Confier un rôle de prévention aux commissions paritaires régionales interprofessionnelles et aux branches

* Introduire un volet dédié à la prévention des violences sexistes et sexuelles dans le document unique d'évaluation des risques

2. Former

* Former les inspecteurs du travail de façon systématique pour détecter les violences et apporter les réponses adéquates

* Former les professionnels de la médecine du travail de façon systématique pour accompagner les victimes, ainsi que les personnels de santé

* Former les délégués syndicaux et les élus du personnel au titre de leur formation en santé, sécurité et conditions de travail

* Former les conseillers prud'homaux

3. Informer

* Sensibiliser l'encadrement et les services des ressources humaines des grandes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire, et les chefs des petites entreprises, dans des conditions à définir par un accord de branche ou d'entreprise, et par les commissions paritaires régionales interprofessionnelles

* Informer sur les voies de recours possibles par tout moyen, en rendant obligatoire la communication par l'employeur, sur le lieu de travail, des contacts du Défenseur des Droits, de l'Inspection du travail, du référent en médecine du travail et les référents internes à l'entreprise qui seront obligatoires

4. Accompagner les victimes

* Mettre en place des référents formés et identifiables pour tous les salariés : un référent choisi parmi les représentants des élus du personnel, et un référent dans les services de médecine du travail

* Dans les entreprises de plus de 250 salariés, instituer un référent au sein des Ressources humaines

* Soutenir les associations oeuvrant en faveur de l'accompagnement des victimes

5. Sanctionner

* En cas de faits avérés, sanctionner les coupables de façon proportionnée aux violences, le cas échéant par une mutation, voire un licenciement

* Les DIRECCTE orienteront les employeurs ayant besoin de conseils sur la sanction appropriée

* Un guide pratique sera élaboré avec les partenaires sociaux pour clarifier les sanctions adaptées à chaque situation

Source : document de présentation du plan d'action pour l'égalité professionnelle, présenté par le Gouvernement le 9 mai 2018.

Si ces propositions vont dans le bon sens , elles ne pourront être effectives qu'à travers des moyens adaptés , notamment du point de vue des subventions aux associations (cf. supra ), mais également en ce qui concerne les effectifs de l'inspection du travail , qui a un rôle central à jouer dans la prévention du harcèlement sexuel et doit aussi être davantage mobilisée en matière de lutte contre les agissements sexistes.

Comme l'a rappelé Brigitte Grésy au cours de son audition, le 7 décembre 2017, l'article L. 1153-56 du code du travail prévoit des sanctions disciplinaires à l'encontre de « tout salarié ayant procédé à des faits de harcèlement sexuel ». La circulaire précitée du 12 novembre 2012 du ministère du Travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social 249 ( * ) rappelle la compétence de l'Inspection du travail pour le constat des infractions, qu'il s'agisse des faits de harcèlement ou des discriminations qui lui seraient liées : « les faits de harcèlement peuvent être constatés sur procès-verbal établi notamment par les Inspecteurs et Contrôleurs du travail et sont passibles des sanctions prévues par le code pénal ».

Or, selon Brigitte Grésy, les effectifs de l'Inspection du travail ont diminué de 20 % depuis 2010 250 ( * ) . C'est un constat préoccupant , alors que l'Inspection du travail a, entre autres missions, celle d'informer sur les dispositions relatives au harcèlement et aux agissements sexistes . De fait, elle ne paraît pas en mesure d'évaluer la réalité ou l'efficacité de la sensibilisation aux violences sexistes et sexuelles . Plus globalement, cela pose aussi un problème d'égalité , puisque le traitement des violences sexistes et sexuelles n'est pas homogène sur l'ensemble du territoire , en fonction des effectifs de l'Inspection du travail.

La délégation rappelle l'importance du rôle de l'Inspection du travail dans la prévention et la lutte contre les violences sexistes et sexuelles au travail.

Elle souhaite que ses effectifs soient renforcés de façon à garantir une égalité territoriale en ce domaine.

La délégation note que la lutte contre les violences et le harcèlement au travail fait aussi l'objet d'une mobilisation internationale . En effet, l'Organisation internationale du travail (OIT) a annoncé au début de mai 2018 sa décision d'entamer un processus de négociation des normes internationales en matière de violences et de harcèlement au travail.

Dans ce cadre, les diplomates et représentants des employeurs et des employés devront arrêter le cadre formel de ces normes : convention ou recommandations. Selon le directeur de l'OIT, qui défend la mise en place de systèmes de protection des victimes et des lanceurs d'alerte, ainsi que le principe des sanctions, un sondage réalisé auprès des États membres de l'organisation révèle un « fort soutien pour une convention » 251 ( * ) .

Notre pays ne peut donc s'exonérer de ses responsabilités dans ce domaine .

4. Comment améliorer la répression du harcèlement ?
a) Un nombre de plaintes et de condamnations toujours peu élevé au pénal

Comme l'a souligné Marylin Baldeck, déléguée générale de l'AVFT, au cours de son audition par la délégation, le 31 janvier 2018, « si l'arsenal législatif actuel est grosso modo satisfaisant, la réponse pénale est loin de l'être . »

Dans leur rapport sur l'application de la loi de 2012, Pascale Crozon et Guy Geoffroy constataient en 2016 252 ( * ) que le nombre de condamnations pour harcèlement sexuel au pénal était rare .

Ils observaient que l'adoption de la loi du 6 août 2012 ne semblait pas avoir provoqué une hausse du nombre de plaintes et de condamnations.

Selon les données alors transmises par la Direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) du ministère de la Justice aux députés, entre 30 et 40 condamnations pénales pour des faits de harcèlement sexuel ont été prononcées chaque année entre 1994 et 2003, et de 70 à 85 condamnations entre 2006 et 2010. En 2012 et 2013, compte tenu de la censure du Conseil constitutionnel et de l'entrée en vigueur de la loi du 6 août 2012, le nombre de condamnations fut très faible 253 ( * ) . En 2014, sur 1 048 plaintes déposées pour des faits de harcèlement sexuel, seulement 65 condamnations ont été prononcées et 50 % des poursuites ont donné lieu à des procédures alternatives.

Au total, les députés notaient que le nombre de condamnations restait particulièrement peu élevé , avec un taux de 6,2 % de plaintes seulement aboutissant à des condamnations 254 ( * ) .

Les deux tableaux ci-après, transmis par la DACG à la délégation, confirment ces constats et montrent que le nombre de condamnations pour harcèlement sexuel demeure limité par rapport aux condamnations pour agressions sexuelles 255 ( * ) .

Condamnations en infraction principale pour agression sexuelle, viol,
exhibition, harcèlement sexuel et atteinte sexuelle 256 ( * )

Infraction

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016*

Agression sexuelle

5 614

5 526

5 496

4 907

4 761

4 838

4 422

4 159

4 232

4 260

Viol

1 668

1 496

1 412

1 361

1 258

1 275

1 196

1 078

1 027

1 012

Exhibition

1 948

1 935

1 634

1 511

1 485

1 543

1 430

1 374

1 402

1 365

Harcèlement sexuel

56

53

54

48

42

22

16

48

69

88

Atteinte sexuelle

427

458

455

429

418

393

377

322

344

323

Source : DACG - Casier judiciaire national - traitement DACG-PEPP

*2016 : données provisoires

De surcroît, le nombre de condamnations paraît faible quand on le rapporte aux faits constatés et enregistrés par les logiciels de rédaction des procédures de la Police et de la Gendarmerie nationales.

D'après les données transmises à la délégation par la Direction générale de la Police nationale, les faits constatés pour harcèlement sexuel étaient au nombre de 1 267 en 2014, 1 381 en 1 583 en 2016 et 1 682 en 2017.

Par ailleurs, le procureur de la République de Paris a éclairé la délégation sur les chiffres relatifs à la répression du harcèlement au sein de son parquet, lors de son audition, le 22 février 2018. Le nombre de plaintes pour harcèlement sexuel y est d'une centaine de procédures par an. Parmi ces plaintes, les deux tiers ne peuvent donner lieu à poursuite , en raison de problèmes de prescription ou parce que l'infraction n'est pas caractérisée. Autrement dit, seul un tiers des dossiers est susceptible de poursuites devant le tribunal correctionnel .

De surcroît, les saisines du Défenseur des Droits pour des cas de harcèlement sexuel demeurent peu nombreuses (environ dix cas par an depuis la loi de 2012). Cette situation s'explique par le fait que peu de personnes savent que le harcèlement sexuel est une discrimination et que le Défenseur est donc compétent pour en traiter.

Dans ce contexte, Marylin Baldeck  a mis en lumière le fait que « ce sont les conseils de prud'hommes qui pour l'essentiel établissent les faits de harcèlement sexuel et ordonnent la réparation par l'employeur des préjudices des victimes », alors que plus de 80 % des plaintes au pénal sont classées sans suite .

Il est donc primordial de faciliter l'aboutissement des procédures devant les conseils de prud'hommes pour favoriser une condamnation du harcèlement et la réparation du préjudice des victimes . Cela passe notamment par l'établissement de la preuve du harcèlement.

b) La difficulté de la preuve

La faible répression du harcèlement sexuel tient en particulier à la difficulté d'en établir la preuve , plus encore lorsque celui-ci s'est produit hors cadre de travail et quand les faits sont anciens.

En effet, les victimes disposent rarement de preuves , s'agissant de comportements insidieux et cachés .

La délégation estime en conséquence qu'il est fondamental de prendre des mesures pour faciliter l'établissement de la preuve du harcèlement .

Elle a identifié deux pistes d'amélioration à cet égard : elles concernent le témoignage et la recevabilité de certains moyens de preuve .

(1) Faciliter les témoignages des victimes, mais aussi de l'entourage

Un premier obstacle souligné par les interlocuteurs de la délégation en ce qui concerne l'établissement de la preuve du harcèlement tient aux témoignages. On sait que la difficulté à parler ou témoigner est particulièrement grande dans un environnement professionnel , car elle se conjugue avec la peur de perdre son emploi. Il faut donc inciter les victimes et leur entourage témoin du harcèlement à révéler les faits.

Comme l'a indiqué Brigitte Grésy, secrétaire générale du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP), il faut « imaginer un lieu d'écoute et de libération de la parole, soit interne, soit externe à l'entreprise ».

À cet égard, la délégation a noté avec intérêt que le volume des témoignages des collègues est beaucoup plus important si l'enquête est réalisée non pas en interne, mais confiée à un cabinet de conseil extérieur qui recueille les témoignages de manière anonyme . Ce point a été plus particulièrement souligné par Marylin Baldeck, déléguée générale de l'AVFT au cours de son audition du 31 janvier 2018.

En outre, le Docteur Marie-France Hirigoyen, psychiatre, entendue par la délégation le 30 novembre 2017, a cité une bonne pratique dont pourraient s'inspirer les entreprises pour offrir un interlocuteur dédié aux victimes et les inciter à parler sans appréhension de leurs problèmes : les « personnes de confiance » ou ombudsmen , sur le modèle de ce qui se fait au Parlement européen et au Conseil de l'Europe. Il s'agit de personnes spécialement formées, placées en dehors de toute hiérarchie, qui ont pour mission d'accompagner et d'orienter les victimes. La mise en place de ce type de dispositif peut toutefois difficilement se concevoir au sein des TPE et PME .

Pour sa part, et dans le même esprit, Sandrine Rousseau, présidente de l'association Parler , auditionnée le 17 janvier 2018, a suggéré la création de référents dédiés aux violences sexuelles , hors hiérarchie, désignés pour recevoir les témoignages et alerter la direction de l'entreprise.

Le Medef insiste également sur l'importance que le référent soit bien formé à ces questions et qu'il n'y ait pas de rapport hiérarchique ( cf supra ).

Une autre bonne pratique mentionnée par le Medef pour permettre de libérer la parole consiste à élaborer un mail type de dénonciation et d'agression pour faciliter la tâche des victimes présumées ou des éventuels témoins.

En outre, le procureur de la République de Paris a indiqué aux membres de la délégation que le parquet de Paris , lorsqu'il envoie la plainte au commissariat, rappelle systématiquement qu'il faut notifier aux témoins les dispositions des articles 225-1-1 et 225-2 du code pénal . Ces deux articles prévoient une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende à l'égard de toute personne qui prononcerait une sanction professionnelle contre un employé témoignant de faits de harcèlement.

La délégation salue cette bonne pratique qui mériterait d'être encouragée au sein des commissariats . Elle peut en effet faciliter la libération de la parole dans un cadre professionnel.

LES DISPOSITIONS DU CODE PÉNAL
PROTECTRICES DES TÉMOINS DE DISCRIMINATIONS

Article 225-1-1

Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes parce qu'elles ont subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel tels que définis à l'article 222-33 ou témoigné de tels faits, y compris, dans le cas mentionné au I du même article, si les propos ou comportements n'ont pas été répétés.

Article 225-2

La discrimination définie aux articles 225-1 à 225-1-2, commise à l'égard d'une personne physique ou morale, est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende lorsqu'elle consiste :

1° à refuser la fourniture d'un bien ou d'un service ;

2° à entraver l'exercice normal d'une activité économique quelconque ;

à refuser d'embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne ;

4° à subordonner la fourniture d'un bien ou d'un service à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1 ou prévue à aux articles 225-1-1 ou 225-1-2 ;

5° à subordonner une offre d'emploi, une demande de stage ou une période de formation en entreprise à une condition fondée sur l'un des éléments visés à l'article 225-1 ou prévue aux articles 225-1-1 ou 225-1-2 ;

6° à refuser d'accepter une personne à l'un des stages visés par le 2° de l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale.

Lorsque le refus discriminatoire prévu au 1° est commis dans un lieu accueillant du public ou aux fins d'en interdire l'accès, les peines sont portées à cinq ans d'emprisonnement et à 75 000 euros d'amende.

(2) Envisager la recevabilité de tous les enregistrements comme moyen de preuve au civil ?

Un deuxième obstacle souligné par les interlocuteurs de la délégation en ce qui concerne l'établissement de la preuve du harcèlement concerne le refus de prise en compte, par les juridictions civiles, des enregistrements réalisés à l'insu des auteurs présumés .

Ces enregistrements sont parfois le seul moyen pour la victime d'établir la réalité des faits . Or les juridictions civiles, de manière constante, ne les considèrent pas comme des preuves recevables. Selon une jurisprudence constante, « l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée, effectuée et conservée à l'insu de l'auteur des propos évoqué est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue 257 ( * ) ».

Pourtant, de tels enregistrements sont acceptés comme moyen de preuve en matière pénale , conformément à l'article 427 du code de procédure pénale, qui prévoit que « hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le juge décide d'après son intime conviction . Le juge ne peut fonder sa décision que sur des preuves qui lui sont apportées au cours des débats et contradictoirement discutées devant lui ». Les victimes d'infractions pénales peuvent donc apporter la preuve , même par des procédés tels que des enregistrements audio réalisés à l'insu de l'auteur présumé des faits, à condition que le principe du contradictoire soit respecté .

Dans son avis sur le harcèlement sexuel transmis à la délégation à la suite de son audition 258 ( * ) , le 25 janvier 2018, le Défenseur des Droits recommande de mener un travail sur cette question de la recevabilité des enregistrements dits clandestins par les juridictions civiles , qui « reste parfois la seule manière pour les victimes de démontrer la réalité de ce qu'elles allèguent » 259 ( * ) .

Cette recommandation paraît d'autant plus pertinente que « ces enregistrements constituent (...) un élément faisant partie intégrante du faisceau d'indices constituant la présomption du harcèlement sexuel qu'il appartient à l'employeur de renverser. Les agissements de harcèlement sexuel ont souvent lieu en huis clos, sans témoin, et il est très difficile pour les victimes de solliciter des témoignages de collègues qui seraient toujours en poste ».

Le Docteur Marie-France Hirigoyen, psychiatre, a exprimé le même point de vue au cours de son audition, le 30 novembre 2017 : « les enregistrements de conversations devraient être reconnus comme des preuves, quand bien même ils seraient réalisés à l'insu de l'agresseur ».

La délégation a été convaincue par ces arguments , d'autant plus qu'il est difficile de comprendre pourquoi un enregistrement dit clandestin serait recevable en matière pénale, et pas en matière civile. En outre, un enregistrement réalisé à l'insu de l'auteur présumé qui serait produit comme moyen de preuve devant les juridictions civiles seraient également soumis au principe du contradictoire , comme toute pièce du dossier, permettant au mis en cause de répliquer oralement ou par écrit, voire de le contester. Il n'y aurait donc pas d'atteinte a priori au principe des droits de la défense .

Comme l'a suggéré le Défenseur des Droits, la délégation propose, pour faciliter l'établissement de la preuve dans les affaires de harcèlement sexuel au travail, que soit étudiée la possibilité de tenir compte, devant les juridictions civiles , d'enregistrements réalisés à l'insu de l'auteur présumé des faits, à l'instar de ce qui est déjà admis devant les juridictions pénales.


* 195 Loi n° 2012-954 du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel.

* 196 À cet égard, voir le rapport Restaurer le délit de harcèlement sexuel , rapport fait par Annie David, Brigitte Gonthier-Maurin et Jean-Pierre Sueur au nom du groupe de travail sur le harcèlement sexuel émanant de la commission des affaires sociales, de la commission des lois et de la délégation aux droits des femmes, n° 596 (2011-2012).

* 197 Annie David, Brigitte Gonthier-Maurin, Jean-Pierre Sueur, Restaurer le délit de harcèlement sexuel , Rapport d'information n° 596 (2011-2012).

* 198 Selon la circulaire d'application du 7 août 2012 du ministère de la Justice, l'exigence de répétition des faits prévue au I de l'article 222-33 du code pénal « exige simplement que les faits aient été commis à au moins deux reprises. Elle n'impose pas qu'un délai minimum sépare les actes commis, ces actes pouvant être répétés dans un très court laps de temps ».

* 199 Restaurer le délit de harcèlement sexuel , rapport d'information n° 596, 2011-2012, op. cit., p. 10.

* 200 http://www.textes.justice.gouv.fr/art_pix/1_1_circulaire_07082012.pdf

* 201 Article 222-33 du code pénal.

* 202 Article L. 1153-1 du code du travail.

* 203 Article 6 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

* 204 Loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

* 205 Voir l'avis du Défenseur des Droits en annexe du présent rapport.

* 206 Loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l'emploi.

* 207 Loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.

* 208 La loi « El Khomri » a également introduit des dispositions imposant l'obligation pour l'employeur de rappeler dans le règlement intérieur la définition légale des agissements sexistes, comme c'est déjà le cas pour les dispositions légales en matière de harcèlement sexuel ; disposant que le principe de planification de la prévention des risques que doit respecter tout employeur peut s'appliquer aux agissements sexistes ; prévoyant que le CHSCT peut proposer des actions de prévention des agissements sexistes.

* 209 L'article 3 de la loi du 8 août 2016 a modifié l'article L. 1154-1 du code du travail en ce sens.

* 210 Voir l'avis du Défenseur des Droits en annexe du présent rapport.

* 211 La recommandation n° 3 est ainsi formulée : « Le Défenseur des Droits rappelle la nécessité de campagnes nationales régulières d'information sur la définition du harcèlement sexuel et les voies de recours possibles, et recommande également d'informer le public sur l'aménagement de la charge de la preuve en matière civile et administrative ».

* 212 Loi n° 2017-242 du 27 février 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale.

* 213 Les ordonnances ont été ratifiées par la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

* 214 Cet article a été abrogé par l'ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 (article 1).

* 215 Article L. 4612-3 du code du travail.

* 216 Article premier, entré en vigueur depuis le 1 er janvier 2018.

* 217 Les ordonnances ont été ratifiées par la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018 ratifiant diverses ordonnances prises sur le fondement de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d'habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

* 218 Arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 7 février 2017.

* 219 Cour de Cassation, civile, Chambre sociale, 17 mai 2017. 15-19-300.

* 220 http://circulaires.legifrance.gouv.fr/pdf/2012/12/cir_36192.pdf

* 221 Circulaire n° SE1 2014-1 du 4 mars 2014 relative à la lutte contre le harcèlement dans la fonction publique.

* 222 Article 2-1 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail.

* 223 Circulaire du 9 mars 2018 relative à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans la fonction publique

* 224 Voir en annexe le compte-rendu de cette réunion. Cette cellule avait été présentée à la délégation au moment de sa mise en place, lors de l'audition, le 19 mai 2014, des deux officiers généraux ayant contribué à en définir les contours. http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20140519/femmes.html

* 225 http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rap-info/i4233.pdf

* 226 Recommandation n° 12.

* 227 Voir son intervention page 82 du rapport.

* 228 Les mesures administratives applicables pouvant être prises par les employeurs publics sont les suivantes : mesures de suspension de l'auteur présumé des faits et sanctions disciplinaires proportionnées à la gravité des faits, pouvant aller jusqu'à la révocation.

* 229 À la date du 19 décembre 2017, jour de la réunion avec les responsables de la cellule Thémis. (voir en annexe le compte rendu de cet échange).

* 230 Chiffres en date du 19 décembre 2017.

* 231 Harcèlement sexuel : une loi adaptée, une mise en oeuvre à consolider , rapport d'information n °4233 de Pascale Crozon et Guy Geoffroy fait au nom de la commission des lois, novembre 2016.

* 232 Baromètre Medef du climat d'égalité des chances : il donne le ressenti de l'entreprise par ses salariés et permet de définir des axes d'amélioration.

* 233 Les développements ci-après se fondent sur la contribution écrite transmise par le Medef à la demande de la délégation.

* 234 Cette communication peut passer par le site intranet, un affichage dans les locaux, voire par la réalisation d'un livret d'accueil pour les nouveaux arrivants mentionnant les procédures à suivre et les coordonnées des interlocuteurs adéquats en cas de besoin.

* 235 La note du Medef cite à cet égard la diffusion d'un code de bonnes pratiques et d'un e-learning correspondant, pour tous les collaborateurs, au sein du groupe BNP Paribas.

* 236 Intervenant externe ou interne, jeu de rôle, intervention de troupes de théâtre...

* 237 La note du Medef cite par exemple la démarche Pluri'elles chez AG2R La Mondiale, qui a pour objectif de valoriser le rôle des femmes par des actions de formation dédiées, de sensibilisation (conférences, ateliers...).

* 238 Par exemple, le groupe PSA sensibilise ses équipes en communiquant le 25 novembre. En 2017, le groupe a réalisé et diffusé un film « Des mots sur le sexisme » et un guide sur ce sujet.

* 239 Voir en annexe le compte rendu de cette audition.

* 240 « Le règlement intérieur est affiché à une place convenable et aisément accessible dans les lieux de travail ainsi que dans les locaux et à la porte des locaux où se fait l'embauche ».

* 241 Document élaboré par la DGAFP en 2017.

* 242 Fiches réflexe réalisées par le SDFE-ministères sociaux, la DGAFP et le Défenseur des Droits.

* 243 On peut citer des documents réalisés par l' AFB , PSA , Action logement , le Manuel de résistance aux stéréotypes sexistes en entreprise du Medef, publié en 2013. En outre, d'après les informations transmises par les interlocuteurs du Medef à la délégation, un guide sera publié prochainement sur la prévention du harcèlement sexuel dans les entreprises.

* 244 Cette campagne a été lancée en février 2018.

* 245 https://www.defenseurdesdroits.fr/fr/communique-de-presse/2018/02/harcelement-sexuel-au-travail-unefemmesurcinq-le-defenseur-des-droits

* 246 Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté.

* 247 « Dans toute entreprise employant au moins trois cents salariés et dans toute entreprise spécialisée dans le recrutement, les employés chargés des missions de recrutement reçoivent une formation à la non-discrimination à l'embauche au moins une fois tous les cinq ans. »

* 248 Ce projet de loi a été enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 27 avril 2018.

* 249 http://circulaires.legifrance.gouv.fr/pdf/2012/12/cir_36192.pdf

* 250 Selon Muriel Pénicaud, la France compte un nombre d'inspecteurs du travail supérieur aux normes édictées par l'Organisation internationale du travail (OIT). Source : Libération, 9 mai 2018.

* 251 Un tel texte devrait ensuite être formellement approuvé puis ratifié par les États membres pour s'imposer à eux.

* 252 Harcèlement sexuel : une loi adaptée, une mise en oeuvre à consolider , rapport d'information n° 4233 de Pascale Crozon et Guy Geoffroy au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, novembre 2016, XIV e législature.

* 253 142 auteurs étaient « poursuivables » et 22 ont été condamnés en 2012, contre respectivement 164 et 18 en 2013.

* 254 Harcèlement sexuel : une loi adaptée, une mise en oeuvre à consolider , rapport d'information n° 4233 de Pascale Crozon et Guy Geoffroy fait au nom de la commission des lois, novembre, 2016, XIV e législature.

* 255 Les chiffres de condamnations présentées couvrent toutes les juridictions, dont celles pour les mineurs.

* 256 Le tableau présente les condamnations en infractions principales, c'est-à-dire les condamnations définitives pour lesquelles l'infraction concernée apparaît au premier rang dans l'extrait de jugement envoyé au Casier judiciaire. Elles ne prennent donc pas en compte les condamnations pour lesquelles l'infraction concernée est connexe ou apparaît à un rang inférieur.

* 257 Civ ; 2 ème , 7 octobre 2004, Bull.civ. II, n°447 ; Soc ; 23 mai 2007, n°06-43209.

* 258 Avis du Défenseur des Droits n°18-03, annexé au présent rapport.

* 259 Il s'agit de la 14 ème recommandation de son avis.

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