II. LE RETOUR À UN TAUX RÉDUIT POUR LA FILIÈRE ÉQUINE EST UNE NÉCESSITÉ ET PASSE PAR UNE RÉINTERPRÉTATION DE LA « DIRECTIVE TVA »

La filière équine est une filière d'excellence qui contribue au rayonnement de la France bien au-delà de la célèbre vente annuelle de yearlings à Deauville (à peine 3 800 chevaux) ou de ses champions olympiques. Les activités liées au cheval sont en adéquation avec les aspirations de notre époque : environnement, contact avec la nature, animation des territoires ruraux, loisirs, activités périscolaires, thérapie. Son déclin mérite donc d'être enrayé et la solution passe par un retour au taux réduit pour l'ensemble de la filière, ce qui ne peut se faire rapidement que par une réinterprétation du droit existant.

A. UN TAUX RÉDUIT POUR LES ACTIVITÉS DES CENTRES ÉQUESTRES

Sans attendre l'entrée en vigueur de la proposition de directive sur les taux réduits, il devrait être possible dans le cas des activités des centres équestres de revenir à un taux réduit en s'appuyant sur les points 15 et 14 de l'Annexe III de la « Directive TVA » sans qu'il soit besoin d'en forcer l'interprétation. L'Annexe III donne la liste des activités pouvant bénéficier du taux réduit. Il s'agit d'activités économiques éligibles au taux réduit dont on peut comprendre aisément qu'elles recouvrent celles des centres équestres.

En effet, le point 15 ainsi rédigé : « La livraison de biens et la prestation de services par des organismes reconnus comme ayant un caractère social par les États membres et engagés dans les oeuvres d'aide et de sécurité sociales dans la mesure où ces opérations ne sont pas exonérées en vertu des articles 132, 135 et 136 » et le point 14 : « Le droit d'utilisation des installations sportives ».

• Point 15

Reconnaître que l'équitation a un caractère social demande de mettre en lumière certaines activités des centres équestres et de modifier la vision restrictive entretenue par la Commission européenne. Le taux réduit est déjà appliqué sur le fondement du point 15 mais seulement aux prestations d'animation, de découverte et de familiarisation avec l'environnement du cheval et pour les prestations d'équitation offertes à des publics particuliers comme les scolaires, les handicapés ou les jeunes gens en réinsertion.

Comme le rappelle la Fédération française d'équitation (FFE), ces prestations de services sont fournies par des organismes reconnus comme ayant un caractère social. La Cour de justice européenne admet que les États membres disposent d'un pouvoir d'appréciation pour reconnaître un caractère social à certains organismes, même si elle estime que ce pouvoir d'appréciation doit être exercé conformément au droit de l'Union et dans le respect de certaines limites. La Cour reconnaît aussi que ce critère n'exclut pas la possibilité que des entités privées même à but lucratif puissent bénéficier d'un taux réduit à ce titre.

Ainsi la France pourrait conférer aux centres équestres ladite reconnaissance d'organismes ayant un caractère social dans la mesure où la grande majorité des centres équestres offrent aujourd'hui les prestations déjà mentionnées. On sait que la Cour prend en compte les objectifs poursuivis par les organismes en cause considérés dans leur globalité ainsi que la stabilité de leur engagement social. Pour l'interprétation de la notion « d'oeuvre d'aide et de sécurité sociales », il convient de prendre en compte la référence faite aux articles 132, 135 et 136 de la « Directive TVA ». Cette référence doit être comprise comme permettant d'appliquer un taux réduit aux opérations visées lorsque l'État membre n'a pas choisi d'opter directement pour l'exemption que la « Directive TVA » autorise aux termes des articles 132, 135 et 136.

Or l'article 132 vise l'éducation de l'enfance et de la jeunesse, l'enseignement scolaire ou universitaire, la formation ou le recyclage professionnel ainsi que les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectuées par des organismes de droit public de même objet ou par d'autres organismes reconnus par l'État membre comme ayant des fins comparables.

La pratique du sport, l'éducation, la formation, la caractère culturel sont visés et force est de reconnaître que les centres équestres jouent un rôle important dans ces domaines même s'il n'a pas été suffisamment mesuré et reconnu jusqu'à présent.

Il conviendrait donc que la France reconnaisse que les activités des centres équestres ont une portée indéniablement sociale. En effet, l'enseignement de l'équitation est assuré par des établissements qui sont tous affiliés à la FFE. Or les fédérations sportives reçoivent un agrément de l'État reconnaissant l'intérêt et le caractère social des activités qu'elles développent. Les établissements affiliés ou agréés par les fédérations sportives le sont au regard du respect des objectifs sociaux qui leur sont assignés par les fédérations elles-mêmes.

Rien donc ne saurait s'opposer à ce que l'État français reconnaisse le caractère social des centres équestres : premièrement les leçons d'équitation sont données très majoritairement à des enfants et à des adolescents. Deuxièmement, on reconnaît aujourd'hui que le contact avec les animaux, le respect des animaux et le sport ont une valeur éducative. On sait aussi que l'équitation développe la motricité et l'habileté psychomotrice et qu'elle rend les enfants beaucoup plus responsables. En outre, l'équitation est recommandée aux enfants difficiles et la pratique de l'équithérapie est conseillée aux enfants handicapés ou mal sociabilisés.

Il convient d'ajouter que la réforme des rythmes scolaires pousse à développer les activités périscolaires et les centres équestres ont là un atout majeur à jouer, sans compter que l'équitation contribue à la découverte de la nature et du patrimoine et participe au spectacle vivant.

Sur la question du taux réduit de TVA sur l'activité des centres équestres, l'Irlande semble avoir tranché la question sans mal en appliquant un taux réduit de 9 % sur l'ensemble des activités des centres équestres considérés à juste titre comme des centres sportifs (cf. Annexe II). La France pourrait s'inspirer de cet exemple vertueux.

• Point 14

La référence au point 14 de la directive TVA permet le recours au taux réduit chaque fois que les installations sportives sont utilisées. Si le point 15 trouve à s'appliquer comme il a été démontré, la mise à disposition d'équipements sportifs ne vise plus alors que les cavaliers propriétaires de chevaux (aujourd'hui une minorité) et les cavaliers extérieurs aux centres équestres ne prenant pas de leçons et désireux d'utiliser le manège ou la carrière.

Quelle que soit la voie que le Gouvernement acceptera d'emprunter pour revenir au taux réduit, il sera nécessaire de simplifier les règles de Bulletin officiel des impôts (BOI-TVA-SECT-80-10-30-50-20140131) visant entre autres choses le taux de TVA sur les activités hippiques, car elles sont trop complexes et conduisent les centres équestres à une lourde comptabilité analytique régulièrement remise en cause par les services fiscaux. Ainsi outre le déclin de leur activité, les centres équestres font face à une insécurité fiscale qui ne trouve pas de fondement logique. Il n'est pas logique qu'en France, la mise à disposition des installations hippiques soit taxée à 5,5 % tandis que la mise à disposition d'un cheval ou l'enseignement de l'équitation le soit à 20 %.

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