PREMIÈRE PARTIE :
LES MESURES PRESCRITES PAR
LE GOUVERNEMENT EN APPLICATION
DU RÉGIME DE L'ÉTAT D'URGENCE SANITAIRE

Dès le lundi 23 mars, date d'entrée en vigueur de l'état d'urgence sanitaire, le Gouvernement a pris deux principales mesures réglementaires, un décret du Premier ministre et un arrêté du ministre de la santé, qui se sont substituées à l'ensemble des arrêtés et décrets pris depuis le début de la crise sanitaire.

Ces actes ont été, depuis leur date d'entrée en vigueur, modifiés à cinq reprises .

La plupart des mesures qu'ils contiennent figuraient dans les décrets et arrêtés pris par les autorités publiques au cours des dernières semaines 7 ( * ) . Certaines adaptations ont toutefois été portées au dispositif pour tenir compte de l'évolution de la situation sanitaire, des avis rendus par le comité scientifique 8 ( * ) ainsi que de l'ordonnance rendue par le Conseil d'État le 22 mars 2020 9 ( * ) .

Toutes entrent dans le champ des prérogatives accordées par le législateur.

I. LE DÉCRET DU PREMIER MINISTRE DU 23 MARS 2020 : LA DÉFINITION DU CADRE GÉNÉRAL DE LA LUTTE CONTRE L'ÉPIDÉMIE DU COVID-19

Pris sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique créé par la loi d'urgence, le décret du Premier ministre n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrit plusieurs mesures générales destinées à lutter contre l'épidémie du Covid-19. Certaines reprennent les dispositions déjà prévues par les arrêtés et décrets pris au cours des dernières semaines ; d'autres sont des mesures nouvelles.

A. DES MESURES DE « CONFINEMENT » RENFORCÉES ET PROLONGÉES

Le décret réitère tout d'abord l'interdiction de sortie du domicile qui avait été prescrite par le décret n° 2020-260 du 16 mars 2020, tout en modifiant légèrement son contenu.

Aux cinq motifs de déplacements exceptionnels qui avaient été prévus (exercice de l'activité professionnelle, achats de fournitures nécessaires à l'activité professionnelle ou de biens de première nécessité, motif de santé, motif familial impérieux, déplacements de courte durée pour pratiquer une activité physique ou promenade), trois nouveaux motifs ont ainsi été ajoutés : les déplacements résultant d'une obligation de présentation aux services de police ou de gendarmerie ou à tout autre service imposée par l'autorité de police administrative ou judiciaire ; les déplacements résultant d'une convocation émanant d'une juridiction administrative ou de l'autorité judiciaire ; les déplacements réalisés aux seules fins de participer à des missions d'intérêt général sur demande de l'autorité administrative.

Ces nouveaux motifs ont notamment vocation à couvrir les obligations de « pointage » des personnes faisant l'objet d'une mesure individuelle de contrôle administratif ou de surveillance (MICAS) sur le fondement des articles L. 228-1 et suivants du code de la sécurité intérieure ainsi que les convocations devant les services d'insertion et de probation des personnes placées sous main de justice.

Il a par ailleurs été procédé à un encadrement plus strict de certaines dérogations , auquel le juge des référés du Conseil d'État invitait, s'agissant d'une part des déplacements pour pratiquer une activité physique, limités à un rayon d'un kilomètre, et d'autre part des déplacements pour motifs de santé, désormais limités aux seules situations ne pouvant être traitées à distance ou ne pouvant être différées.

Enfin, d'un point de vue temporel, ces mesures de confinement, initialement prévues jusqu'au 31 mars, ont été prolongées jusqu'au 15 avril par décret modificatif le 27 mars 2020, conformément à l'avis public du conseil de scientifiques du 23 mars 10 ( * ) .


* 7 Ces mesures figuraient dans les textes réglementaires suivants : décret n° 2020-197 du 5 mars 2020 relatif aux prix de vente des gels hydro-alcooliques, décret n° 2020-247 du 13 mars 2020 relatif aux réquisitions nécessaires dans le cadre de la lutte contre le virus covid-19, décret n° 2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus covid-19, arrêtés du ministre de la santé du 6 mars 2020 et du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du covid-19.

* 8 En particulier l'avis du 23 mars 2020, dans lequel le conseil scientifique se prononce en faveur d'un prolongement et d'un durcissement des mesures de confinement.

* 9 Saisi par le syndicat Jeunes Médecins, le juge des référés du Conseil d'État, dans une ordonnance rendue le 22 mars, a refusé d'ordonner le confinement total de la population. Il a toutefois enjoint le Gouvernement à préciser la portée de certaines mesures prescrites, jugées ambiguës, en particulier la dérogation pour les « déplacements pour motif de santé », la dérogation pour les « déplacements brefs, à proximité du domicile, liés à l'activité physique individuelle des personnes », jugée trop large, et de l'absence d'encadrement du fonctionnement des marchés ouverts.

* 10 Décret n° 2020-344 du 27 mars 2020 complétant le décret n° 2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire.

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