B. DES STATISTIQUES RÉCENTES, BIEN QUE PARCELLAIRES, DÉMONTRENT LA PRÉGNANCE DU PHÉNOMÈNE DANS LE MONDE AGRICOLE FRANÇAIS

Une succession d'études, conduites dans la dernière décennie, a permis de documenter ce phénomène à partir de données relativement plus récentes. Il en ressort, notamment, que la surmortalité par suicide en agriculture reste particulièrement prégnante. L'essentiel des chiffres aujourd'hui utilisés dans le débat public au sujet du suicide en agriculture proviennent de ces études.

Force est toutefois de constater que la forte hétérogénéité des méthodologies employées empêche de parvenir à un consensus sur l'ampleur exacte du phénomène, ce que déplorent les rapporteurs. Or l'étude d'une situation aussi grave nécessite de parvenir à une objectivation de celle-ci, sur laquelle pourront s'appuyer les pouvoirs publics et les parties prenantes du monde agricole pour élaborer et calibrer les outils d'identification et d'accompagnement des agriculteurs en détresse.

À cet égard, le fait que l'étude la plus récente en la matière se fonde sur des données de 2015 pose la question de l'actualisation de ces analyses, qui doit être bien plus régulière : le soutien aux agriculteurs en détresse ne saurait se satisfaire d'un écart de plusieurs années entre le moment du suicide et celui de son analyse.

1. Trois études concluent à un taux de suicide supérieur pour les agriculteurs exploitants
a) Une étude de 2013 trouve une surmortalité dans l'élevage bovins lait et dans l'élevage bovins viande, parmi les hommes de 45 à 64 ans

En 2013, dans le cadre du plan de prévention du suicide dans le monde agricole annoncé en 2011 par le ministre en charge de l'agriculture, l'Institut national de veille sanitaire (INVS) a mesuré chaque année 27 ( * ) , entre 2007 et 2009, la mortalité par suicide et par causes externes dans la population de exploitants agricoles.

Cette étude a notamment été décidée face au constat qu'« à l'heure actuelle, malgré les données statistiques nationales existantes, il n'est pas possible de quantifier avec précision le nombre de suicides survenant chaque année dans la population agricole, ni d'en décrire la répartition par caractéristiques professionnelles ou d'en suivre l'évolution ».

La population étudiée par l'INVS est constituée de tous les chefs d'exploitation agricoles 28 ( * ) et collaborateurs d'exploitation, en activité professionnelle au 1 er janvier d'une des trois années d'étude (2007, 2008, 2009), soit 500 164 sujets par an. Les données sociodémographiques et professionnelles les concernant proviennent des bases de données de la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) et ont été appareillées aux données de mortalité provenant du centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc) de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

Les principales conclusions de l'étude sont les suivantes :

• les agriculteurs connaissent une sous-mortalité globale inférieure à celle de la population française (de 46 % en 2007, 44 % en 2008 et 45 % en 2009 chez les hommes) ;

• entre 2007 et 2009, 417 agriculteurs et 68 agricultrices se sont suicidés. Le suicide représente chez les hommes la troisième cause de décès (15 % des décès, contre 32 % pour cause de cancer et 19 % en raison d'affection de l'appareil cardio-vasculaire). Chez les femmes, il s'agit également de la troisième cause de décès (6,8 %, contre 49 % et 18 % pour les deux autres causes). La pendaison est par ailleurs le mode de suicide le plus fréquent, dans les deux cas ;

• chez les hommes, une surmortalité par suicide de 28 % par rapport à la population générale est observée en 2008 et de 22 % en 2009 . Cette surmortalité se concentre essentiellement sur les hommes âgés de 45 à 54 ans (risque supérieur de 31 % de décéder par suicide) et de 55 à 64 ans (risque 47 % supérieur) ;

• la surmortalité par suicide frappe essentiellement 29 ( * ) les agriculteurs travaillant dans les secteurs « élevage bovins lait » (surmortalité par suicide supérieure de 56 % à celle de la population générale) et « élevage bovins viande » (127 %) 30 ( * ) ;

b) Un suicide d'agriculteur tous les deux jours, selon une étude de 2017

Une étude 31 ( * ) menée tout d'abord en 2016 par Santé publique France 32 ( * ) a porté sur les années 2010 et 2011, à partir de la même méthodologie que celle de 2013, qui portait alors sur les années 2007 à 2009 ( cf. supra ). Elle ajoute donc deux années aux trois déjà étudiées.

Ses résultats corroborent ceux de la première étude, puisqu'elle conclut à un excès de suicides de 20 % en 2010 33 ( * ) pour les agriculteurs par rapport à la population générale, particulièrement marqué pour les hommes de 45 à 54 ans (+ 30 %) et dans le secteur « élevage bovins lait » (taux de suicide supérieur de 51 %).

Au total, 253 suicides ont été dénombrés sur les deux années parmi les agriculteurs, et 43 parmi les agricultrices, soit environ 300 personnes.

L'affirmation d'« un agriculteur qui se suicide tous les deux jours en France » se fonde donc sur les données de cette étude .

Excès de suicides parmi les agriculteurs exploitants entre 2008 et 2011
par rapport à la population générale française

Source : Commission des affaires économiques, à partir des deux études mentionnées supra .

Les résultats montrent qu'en 2008, 2009 et 2010, la mortalité par suicide d'hommes exploitants agricoles était plus élevée que dans la population générale, mais qu'elle ne l'était pas en 2007 et 2011 . Nicolas Deffontaines souligne à ce titre, dans sa thèse précitée, qu' « il reste que, face à ces variations conjoncturelles, le constat d'un taux de suicide plus élevé des agriculteurs au cours du temps et dans nombre de pays développés nous place bien face à un fait social » 34 ( * ) .

À partir des données agrégées sur les cinq années, une étude de Santé publique France parue en 2017 35 ( * ) analyse certaines caractéristiques socioprofessionnelles associées à cette surmortalité par suicide. Les auteurs identifient plusieurs facteurs augmentant le risque de suicide chez les agriculteurs :

• une exploitation à titre individuel ;

• une activité d'exploitant à titre exclusif ;

• une surface agricole utile comprise entre 20 et 49 hectares ;

• la localisation de l'exploitation dans certaines régions (Bretagne, Bourgogne-Franche-Comté, Hauts-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes).

Au total, 674 décès par suicide d'hommes 36 ( * ) exploitants agricoles ont été enregistrés sur cinq ans.

L'étude de Santé publique France note par ailleurs que le phénomène de surmortalité par suicide touche plus particulièrement les exploitants dont l'âge est compris entre 45 et 54 ans.

Si, après ajustement, aucun secteur d'activité n'apparaissait associé à un risque plus élevé de mortalité par suicide, une analyse spécifique en élevage bovin montre que ce dernier est toutefois particulièrement touché.

Surmortalité par suicide dans le secteur « élevage bovins »
entre 2008 et 2010

Source : Commission des affaires économiques, à partir de Santé publique France (2017).

En outre, en se fondant sur les données de 2007 à 2011, les travaux de Nicolas Deffontaines concluent à une hétérogénéité intra-catégorielle de l'exposition au suicide, puisque « l'examen des taux bruts de suicide montre que le taux de suicide brut varie du simple au double selon la taille de l'exploitation : il est maximal pour les exploitants exerçant sur 20-49 hectares, et minimal pour ceux exerçant sur plus de cent hectares ».

c) Une moindre mortalité par suicide pour les salariés agricoles, selon une étude de 2018

Santé publique France réalise en 2018 une étude 37 ( * ) relative aux données de mortalité des salariés agricoles affiliés à la MSA en activité entre 2007 et 2013. Il s'agit d'une démarche inédite : si la littérature épidémiologique internationale 38 ( * ) conclut dans l'ensemble à un excès de risque de mortalité par suicide parmi ces salariés par rapport à d'autres groupes professionnels, aucune étude de ce type n'avait été jusqu'alors menée en France.

La population d'étude a inclus les salariés de 15 à 64 ans ayant effectué au moins un contrat ouvrant droit au régime de protection sociale agricole entre le 1 er janvier 2007 et le 31 décembre 2013. Sur cette période, 692 suicides ont été dénombrés (613 chez les hommes, 79 chez les femmes).

L'étude conclut à une sous-mortalité par suicide des salariés agricoles par rapport au reste de la population générale française (mortalité inférieure de 19 % pour les hommes, et de 54 % pour les femmes 39 ( * ) ), et ce pour presque toutes les années, bien que la sous-mortalité par suicide ne soit pas toujours statistiquement significative.

Symptomatologie dépressive dans le milieu agricole :
une étude 40 ( * ) de 2019 fournit de premières estimations

À partir des réponses de 2 363 professionnels agricoles qui avaient déclaré une activité professionnelle en 2010, Santé publique France, en collaboration avec la CCMSA, a pu établir en 2019 une première estimation de la prévalence des symptômes dépressifs dans ce milieu.

Conduite dans cinq départements 41 ( * ) , notamment à partir du rapport des agriculteurs aux efforts consentis et aux récompenses obtenues en retour, l'étude conclut que :

- parmi les salariés, 14,7 % des hommes et 21,2 % des femmes présentent une symptomatologie dépressive, cette dernière augmentant chez les hommes avec l'âge ;

- parmi les agriculteurs exploitants, 15,3 % des hommes et 18,4 % des femmes présentent de tels symptômes. Par ailleurs, les éleveurs bovins-lait et bovins-viande, dont il a été vu supra que la mortalité par suicide était plus élevée que dans les autres catégories professionnelles, semblent présenter une prévalence de même ordre de grandeur que celle observée chez l'ensemble des exploitants agricoles.

En particulier, il ressort de l'étude que les salariés (hommes et femmes) et les exploitants hommes les plus exposés aux efforts ou présentant un ratio efforts/récompenses élevé présentent des prévalences de la symptomatologie dépressive plus élevées que les autres. Corollairement, les personnes exposées aux plus faibles récompenses semblent présenter des symptômes dépressifs significativement plus élevés que celles exposées aux récompenses les plus importantes.

Cette causalité semble corroborée, ceteris paribus , par les témoignages d'agriculteurs en difficultés recueillis par les rapporteurs à l'occasion de l'appel à témoignage lancé sur le site du Sénat, des déplacements réalisés ou encore des auditions menées. Le sentiment de « travailler énormément pour rien », c'est-à-dire le constat d'efforts substantiels pour une très faible récompense, a fréquemment été mis en avant comme une des causes de la détresse de certains agriculteurs.

d) Une nouvelle étude de la CCMSA, conduite en 2019, confirme le phénomène de surmortalité par suicide dans le milieu agricole

En se fondant sur des données de 2015 du Système national des données de santé (SNDS), la CCMSA a calculé le taux de suicide parmi les personnes de 15 à 64 ans affiliées au régime agricole et ayant consommé au moins un soin ou une prestation dans l'année, avant de le comparer aux taux de suicide de la population des autres régimes 42 ( * ) . Ces résultats ont été transmis au Parlement dans le rapport annuel « charges et produits » de la MSA.

605 assurés du régime agricole de plus de 14 ans se sont suicidés en 2015, soit 1,7 par jour. Si le taux de suicide parmi les femmes augmente avec l'âge, celui des hommes progresse jusqu'à 40 ans puis reste stable jusqu'à 65 ans, avant d'augmenter nettement. Il ressort par ailleurs de l'étude que le taux de mortalité par suicide est globalement plus élevé chez les non-salariés que chez les salariés agricoles 43 ( * ) . Au total, « l'étude menée par Santé publique France [...] a mis en évidence une surmortalité des exploitants agricoles en activité par rapport à la population générale ».

Taux brut de mortalité par suicide pour 100 000 au régime agricole en 2015

Source : CCMSA-SNDS, Rapport au Parlement.

Il convient par ailleurs de souligner que cette étude parvient à des conclusions opposées à celles de l'étude de Santé publique France de 2018 en ce qui concerne les salariés agricoles. Si cette dernière observait une absence de surmortalité par suicide parmi cette catégorie professionnelle, l'étude de la CCMSA de 2019 trouve au contraire que les salariés agricoles présentent un excès de risque de décès par suicide par rapport à la population générale .

Recommandation n° 2 44 ( * ) : fournir chaque année au Parlement, dans le rapport « charges et produits » que lui transmet la CCMSA, une actualisation des données de la mortalité par suicide en agriculture, sur le modèle de ce qui a été fait dans le rapport de 2019 pour 2020.

Ainsi que le résume M. Deffontaines dans sa thèse précitée, « être agriculteur, c'est témoigner tout au long de sa carrière professionnelle d'une plus grande propension à mettre volontairement fin à ses jours. La généralité et la stabilité du phénomène sont deux attributs de ce fait social qui le rendent visible statistiquement » 45 ( * ) .

Des modes plus radicaux de suicide

Outre un taux de suicide supérieur à celui des autres catégories socioprofessionnelles, les agriculteurs hommes et femmes tendent également à utiliser des moyens plus radicaux de suicide que les autres catégories : la pendaison et les armes à feu.

Ce faisant, la probabilité que la tentative de suicide mène effectivement à la mort est plus élevée.

Taux de suicides par pendaison et arme à feu, 1968-2011, par CSP (hommes)

Source : Nicolas Deffontaines, Thèse de doctorat soutenue le 29 mai 2017,
Université de Bourgogne (p. 154).

Une des hypothèses qui pourrait expliquer ce plus grand recours aux modes radicaux de suicide réside dans le rapport que les agriculteurs (hommes et femmes) entretiendraient avec leur corps. La vision « virile », « rude », d'un corps bâti pour l'extérieur et les efforts physiques, les conduirait à privilégier des moyens plus drastiques, qui ne laissent que peu de chance de survie.

Synthèse des études quantifiant le phénomène de surmortalité par suicide en agriculture

L'étude de Santé publique France, conduite en 2017 sur des données de 2007 à 2011, trouve qu'un agriculteur se suicide tous les deux jours en France (300 personnes en deux ans). Celle de la MSA en 2019, sur des données 2015, fait état de deux suicides par jour (605 personnes).

Si les résultats de ces études varient grandement (d'un rapport de un à quatre), elles concluent toutes à une surmortalité par suicide des exploitants agricoles par rapport à la population générale.

Ces analyses témoignent de l'urgente nécessité d'élaborer une politique publique efficace et volontaire à destination des agriculteurs en difficultés.

2. La quantification exacte de cette surmortalité par suicide bute toutefois sur la diversité de méthodologies employées

Si les différentes études listées supra apportent des éléments chiffrés quant au phénomène de surmortalité par suicide dans le monde agricole, il ne peut qu'être déploré que leurs divergences de méthodologie empêchent de parvenir à un consensus sur la teneur et l'ampleur exactes du phénomène. Ce faisant, sa bonne connaissance par les pouvoirs publics, les chercheurs et le grand public en pâtit, contribuant de fait à invisibiliser un peu plus encore le phénomène, mécanisme que le présent rapport entend contrer.

a) Les différences de méthodologie empêchent de disposer d'une vision globale du phénomène
(1) Les populations étudiées ne sont pas toujours similaires

Pour des raisons pratiques, les auteurs des études sont fréquemment contraints d'exclure de leur analyse certaines catégories de population qui relèvent pourtant de la profession agricole :

• l'étude de 2018 de Santé publique France portant sur les salariés agricoles n'inclut pas les salariés nés hors de France métropolitaine ainsi que ceux ne disposant pas d'un numéro certifiée d'identification au répertoire 46 ( * ) (comme les travailleurs détachés), en raison de l'impossibilité pour les auteurs d'effectuer un appariement de qualité avec les causes médicales de décès. De même, les salariés dans les outre-mer sont exclus, en raison cette fois de l'absence de caisses MSA 47 ( * ) ;

• l'étude de 2016 consacrée à la mortalité des agriculteurs exploitants en 2010 et 2011 exclut les aides familiaux ainsi que les chefs d'entreprises du monde agricole qui ne sont pas exploitants (entreprise de travaux agricoles, scierie, etc.). Elle écarte également les agriculteurs exploitants nés hors de France métropolitaine 48 ( * ) , ainsi que ceux en activité dans les outre-mer et les cotisants de solidarité 49 ( * ) , alors même qu'ils peuvent faire face aux mêmes difficultés que la population retenue dans l'étude ;

• l'étude de 2017 de Santé publique France, qui analyse les caractéristiques socioprofessionnelles de la surmortalité par suicide à partir des résultats des études de 2013 et de 2016 portant respectivement sur les années 2007 à 2009 et 2010 à 2011, intègre les exploitants installés en Alsace-Moselle alors qu'ils avaient été étudiés séparément lors de l'étude de 2013, leurs informations professionnelles ne permettant pas de procéder aux mêmes analyses que pour le reste de la population étudiée.

Par conséquent, non seulement ces études présentent-elles des résultats qui sont, par construction, parcellaires puisque fondés sur une fraction seulement de la population pertinente ; mais en outre, les différences de choix effectués par leurs auteurs quant aux populations retenues ou exclues empêchent les comparaisons et analyses croisées de ces études.

À ces différences de populations étudiées s'ajoutent des différences plus substantielles de méthodologies employées. Dans son étude de 2019, la CCMSA y voit un élément important d'explication du fait que ses résultats soient diamétralement opposés à ceux de l'étude de 2018 en ce qui concerne les salariés agricoles.

En effet, alors que l'étude de Santé publique France de 2018 a fait le choix de retenir les individus ayant disposé entre 2007 et 2013 d'un contrat de travail ouvrant droit au régime de protection sociale agricole, la CCMSA a décidé de concentrer ses travaux sur les personnes consommant des soins et ayant eu une certaine permanence dans des entreprises agricoles pour s'ouvrir des droits au régime. Il s'agit là de l'effet du « travailleur sain » : porter son attention sur les salariés ayant travaillé, comme le fait Santé publique France, implique mécaniquement une surreprésentation d'actifs en bonne santé dans la population étudiée, car en sont exclus les salariés au chômage et ceux en situation d'invalidité, de handicap ou confrontés à des symptômes dépressifs qui les éloignent du marché de l'emploi.

Par conséquent, la population étudiée est « mécaniquement » en meilleure santé que la population générale. L'étude de la CCMSA, en privilégiant une approche par régime de protection sociale, qui inclut donc les bénéficiaires de la couverture maladie universelle (CMU) ou d'une pension d'invalidité 50 ( * ) , se veut donc plus globale.

(2) Des obstacles techniques fragilisent la bonne exploitation des résultats

La portée de ce type d'études est naturellement limitée par la qualité et la quantité des données sur lesquelles elles portent. Or la pertinence de la quantification du nombre de suicides dans le milieu agricole dépend avant tout de leur bon renseignement dans les certificats de de décès puis de la bonne transmission de ces derniers au Centre d'épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc ).

Si certains décès ne laissent que peu de place au doute (pendaison, ingestion de médicaments), d'autres sont plus équivoques (noyade, arme à feu, accident d'engin ou de machine agricole). Dans le doute, le médecin peut donc parfois privilégier la case « accident » à celle de « suicide » lorsqu'il remplit ledit certificat . La sous-évaluation générale du suicide dans les certificats de décès a par ailleurs été évaluée à 9 % par le CépiDc 51 ( * ) .

En outre, le fait que l'assurance remboursement d'un prêt financier ne fonctionne pas lorsque le suicide a lieu durant la première année dudit prêt 52 ( * ) peut conduire le médecin certificateur, dans certains cas ou sous la pression de la famille du défunt ou de son environnement, à écarter le suicide comme cause du décès, minorant de fait les statistiques .

Un autre écueil technique réside dans le manque de statistiques concernant certains sous-groupes de population , au premier rang desquels celui des femmes.

Deux raisons peuvent l'expliquer : d'une part, la faiblesse de leur effectif par rapport à celui des hommes (de plus en plus d'épouses d'agriculteurs occupent un emploi en dehors du monde agricole) ; d'autre part, leur participation à la tenue de l'exploitation agricole a longtemps été ignorée par les pouvoirs publics (au-delà du statut de « conjoint collaborateur », au demeurant peu demandé), ce qui n'a pas facilité le recueil de données sociodémographiques les concernant. Il est à cet égard significatif que l'étude de Santé publique France de 2017, qui analyse les caractéristiques socioprofessionnelles de la surmortalité par suicide trouvée par les études de 2013 et 2016, ne porte que sur les hommes.

Enfin, les études sont le plus souvent de nature descriptive : elles analysent les causes de décès au cours d'une période considérée, mais n'établissent pas de lien certain entre l'activité agricole et la surmortalité par suicide observée. Surtout, ces études ne permettent pas le suivi individuel des personnes. Par conséquent, un agriculteur qui se suicide dans l'année qui suit une liquidation judiciaire ou une vente forcée sera absent des statistiques, alors même que la période liée à la fin contrainte d'une exploitation est largement reconnue comme pouvant être source de stress, de sentiment d'échec et de désespoir pour l'exploitant agricole qui y fait face.

b) Plus généralement, l'établissement d'un lien de causalité entre le milieu professionnel et le suicide pose d'importantes questions de méthode
(1) Le concept d'agriculteur, entre statut juridique et représentation sociale

L'étude des décès par suicide en agriculture repose sur l'appariement entre, d'une part, les fichiers des causes de décès du CépiDc ( cf. infra ) et, d'autre part, des données sociodémographiques et professionnelles de la personne décédée, détenues souvent par la mutualité sociale agricole ou l'Insee.

Or le codage de la catégorie socioprofessionnelle du défunt répond à deux logiques différentes selon qu'il est réalisé par le CépiDc ou par la MSA.

Dans le premier cas, en effet, il se fonde sur la catégorie inscrite dans le certificat de décès, elle-même communiquée au médecin constatant le décès par l'entourage de la victime. Or, ainsi que le souligne Nicolas Deffontaines, « les proches lors du décès sont tentés de renseigner un rôle social plutôt qu'un statut juridique » 53 ( * ) . Autrement dit, une personne décédée peut être inscrite comme « agriculteur » dans un certificat de décès car c'est ainsi que la voit son entourage, sans pour autant que cela soit toujours exact juridiquement (par exemple si la personne est depuis peu en retraite, ou si elle a été contrainte de cesser son activité), tant cet entourage peut être attaché au concept même d'agriculteur 54 ( * ) .

La définition retenue par la MSA, quant à elle, obéit à une logique plus stricte, celle du statut auquel sont attachés des droits sociaux.

Outre le fait que la robustesse des études peut être amoindrie par le caractère déclaratif de certaines données professionnelles, cette différence de codage peut entraîner également des écarts de résultats significatifs 55 ( * ) . En effet, elle contribue à « invisibiliser », aux yeux de la MSA et de Santé publique France, les suicides d'individus ayant cessé le métier d'agriculteur (et ne disposant donc plus du statut), même s'ils l'ont quitté en raison précisément des difficultés (chute des prix, burn-out , liquidation judiciaire, etc.) qui les conduisent peu de temps après à mettre fin leurs jours. Or il paraît évident que ces suicides participent du phénomène plus général de « surmortalité par suicide en agriculture » ; il est, à ce titre, regrettable qu'ils ne soient pas pris en compte.

(2) Des difficultés structurelles de définition même du phénomène, qui complexifient le lien de causalité entre profession et suicide

Il est complexe, si ce n'est impossible, de définir de façon univoque le phénomène suicidaire ; par conséquent, il est tout aussi difficile de l'objectiver rigoureusement.

Ainsi que l'a souligné lors de son audition M. Philippe Spoljar, professeur de psychologie clinique à l'université de Picardie et auteur de travaux sur le suicide en agriculture, la définition du phénomène en lui-même manque de précision, avant même toute considération méthodologique : en retenant la volonté de se donner la mort comme dénominateur commun du suicide, « il y a un nombre nécessairement limité de situations qui peuvent apparaître clairement comme des actes suicidaires », d'autant qu'il existe également beaucoup d'« équivalents suicidaires », comme certains accidents plus ou moins troubles, des conduites à risque, ou encore des suicides plus passifs comme la négligence plus ou moins consciente de soins médicaux pourtant nécessaires.

Seul le moyen utilisé (corde, fusil, etc.) constitue une donnée réellement objective ; mais il n'est pas possible de connaître en amont son importance, ou son symbolisme 56 ( * ) , aux yeux de l'agriculteur qui se donne la mort.

Au surplus, l'approche purement quantitative présente plusieurs limites, indiquées par les auteurs 57 ( * ) de certaines études vues supra , comme « l'absence de définition validée de l'imputabilité d'un suicide au travail, de la difficulté d'appréhender les liens entre activité professionnelle et suicide dans une approche épidémiologique, sans recours à des méthodes qualitatives, et de l'importante variété des situations d'emploi à couvrir ».

3. Réduire les délais de transmission des données de décès pour disposer d'un suivi en temps réel du phénomène

Le faible nombre d'études relatives au suicide en agriculture et le décalage conséquent entre l'année d'observation et la date de publication de l'analyse résultent d'un manque de données récentes sur le phénomène. Les rapporteurs joignent donc leur voix à celle des différents chercheurs avec lesquels ils ont échangé pour recommander une accélération de la transmission des données relatives aux suicides. La compréhension et la connaissance du phénomène seraient en effet grandement renforcées si la science pouvait appréhender, presque « en temps réel », son évolution et son ampleur.

a) Le circuit de transmission des certificats de décès manque de célérité

La connaissance exacte de la surmortalité par suicide dans l'agriculture souffre en outre d'un manque de données suffisamment proches dans le temps pour permettre aux pouvoirs publics de réagir et d'adapter leurs outils à la réalité mouvante du phénomène.

Les rapporteurs déplorent en effet que les études conduites en France sur le sujet depuis 2013 ne portent que sur des données datées en moyenne de cinq ans . L'étude de 2013 portait ainsi sur les années 2007 à 2009, celle de 2016 sur les années 2010 et 2011, celle de la CCMSA de 2019 sur l'année 2015 (4 ans d'écart), et celle relative aux salariés agricoles, publiée en 2018, sur des données s'arrêtant en 2013.

Il ressort des auditions conduites par les rapporteurs qu'il ne s'agit pas de choix méthodologiques de la part des auteurs des études, mais d'une problématique de délai de mise à disposition des données de décès par l'Inserm, elle-même dépendante de la bonne transmission du volet médical des certificats de décès par les différents intermédiaires .

Le circuit administratif du certificat de décès

Un certificat de décès comporte deux parties 58 ( * ) :

- un volet administratif, qui comporte le nom et les informations d'état civil de la personne décédée, ainsi que les informations funéraires (obligation ou non de mise en bière immédiate, obstacle ou non au don du corps à la science, etc.) ;

- un volet médical, qui renseigne les causes du décès (maladies ou affections morbides ayant directement provoqué le décès, ainsi que les autres états morbides, facteurs ou états physiologiques (comme une grossesse) ayant contribué au décès). C'est dans ce volet qu'est indiqué si le décès est lié à un « suicide », un « accident », une « mort naturelle », ou encore à un « fait de guerre ».

Le médecin constatant le décès remplit les deux volets du certificat et scelle la partie médicale. Le certificat est ensuite transmis à la mairie, qui rédige deux documents :

- l'avis 7 bis , qui reprend le nom et les informations d'état civil du défunt et qui est transmis à la direction régionale de l'Insee afin que l'institut actualise le répertoire national d'identification des personnes physiques ;

- le bulletin 7, qui comprend ces informations, sans le nom, transmis avec le volet médical (toujours scellé) du certificat de décès à la délégation territoriale de l'Agence régionale de santé (DT-ARS) 59 ( * ) . Cette dernière ouvre le volet médical et a donc, dès lors, connaissance des causes du décès. Ce certificat et le bulletin 7 sont ensuite envoyés à l'Inserm. En son sein, le CépiDc analyse la partie médicale du certificat de décès, afin notamment d'établir des statistiques nationales sur les causes médicales de décès.

Le circuit vise donc à cloisonner le niveau d'information dont disposent les différents organismes : l'Insee connaît l'état civil du défunt mais ignore la raison de son décès, tandis que l'Inserm connaît la cause de la mort mais ne sait pas qui est décédé.

Circuit administratif du certificat de décès

Source : Inserm CépiDc.

En outre, le corps du défunt peut faire l'objet d'analyses complémentaires par un institut médico-légal dans le cas d'une mort suspecte, notamment dans le cas d'un suicide, ou d'une mort semblant liée à une infraction et ayant conduit à l'ouverture d'une enquête judiciaire 60 ( * ) . Dans ce cas, les résultats de l'analyse sont transmis électroniquement à l'Inserm par l'institut médico-légal. Ces analyses complémentaires entraînent parfois un délai supplémentaire conséquent lorsque l'institut médico-légal tarde à transmettre les résultats de son analyse à l'Inserm, ce qui ne semble pas rare d'après plusieurs acteurs institutionnels entendus.

Deux sources principales de retard dans la transmission des données relatives aux décès par suicide des agriculteurs peuvent donc être identifiées :

• premièrement, les délais d'envoi du certificat par chaque intermédiaire : du médecin à la mairie, de la mairie à l'Insee pour le volet administratif (pour l'avis 7 bis , ce délai est en principe fixé à huit jours 61 ( * ) ), de la mairie à la DT-ARS pour le volet médical et le bulletin 7, de la DT-ARS à l'Inserm, de l'envoi des analyses de l'institut médico-légal à l'Inserm, de la transmission des informations par l'Inserm à Santé publique France, etc. ;

• une fois les certificats papier réceptionnés par l'Inserm et transmis au CépiDc, ce dernier doit opérer une codification des causes du décès afin de rendre les données exploitables à grande échelle par les universitaires et chercheurs.

Il est ainsi difficile au corps scientifique de savoir avec précision à partir de quelle date l'ensemble des données liées aux suicides ou morts suspectes ont bien été transmises du lieu de décès jusqu'au CépiDc. Par prudence, le choix est donc souvent fait d'étudier le phénomène de surmortalité par suicide à partir de données d'il y a plusieurs années, afin de maximiser la probabilité que tous les décès par suicide aient bien été transmis au niveau national.

Or cet état de fait empêche les pouvoirs publics de disposer d'un état des lieux régulier et « actualisé » du phénomène ; il les contraint donc à n'agir que sur la base de données assez éloignées dans le temps.

b) La dématérialisation des certificats de décès devrait être accélérée

La dématérialisation des certificats de décès, en principe la règle 62 ( * ) depuis 2006, semble une piste prometteuse pour accélérer ces différentes étapes de transmission. Pour peu que les médecins rédigent de façon dématérialisée les certificats via l'application CertDc, et que les mairies soient raccordées au même dispositif, les causes du décès seraient automatiquement transmises à l'Inserm. En supprimant certaines étapes intermédiaires, le circuit administratif des certificats de décès doit donc gagner en célérité et permettre aux pouvoirs publics de disposer de données plus bien contemporaines et même quasi annuelles.

Chaîne de transmission dématérialisée du certificat de décès

Source : Inserm, plaquette d'accompagnement relative au raccordement au réseau
des certificats électroniques.

La transmission électronique généralisée présente en outre deux autres avantages :

• d'une part, elle faciliterait et accélérerait grandement l'exploitation des données par le CépiDc puis par les chercheurs intéressés ;

• d'autre part, l'envoi électronique de l'avis 7 bis par la mairie à l'Insee ouvre la possibilité pour cette dernière, et uniquement dans ce cas, de transmettre à Santé publique France des informations (non-médicales) sur les décès par commune, afin qu'elle puisse lancer, si besoin, des alertes épidémiologiques.

Les rapporteurs déplorent que le corps médical et les mairies se soient, jusqu'à présent, insuffisamment approprié la dématérialisation des certificats de décès (seuls 12 % d'entre eux étaient envoyés électroniquement en 2017 63 ( * ) ). Ce retard en la matière est par ailleurs, et paradoxalement, prévu implicitement par le pouvoir réglementaire lui-même. L'article R. 2213-1-4 du code général des collectivités territoriales (CGCT) prévoit en effet qu'« à titre provisoire, jusqu'à la généralisation du certificat de décès sur support électronique, le certificat peut être établi sur support papier [...] ». Or rien ne semble plus justifier que les médecins continuent de privilégier le support papier, ni que le Gouvernement n'engage pas le raccordement des mairies à l'application CertDc.

Ils recommandent donc de supprimer, d'ici deux ans maximum, la dérogation prévue par ledit article R. 2213-1-4 du CGCT afin de rendre effective l'obligation d'envoi dématérialisé des certificats de décès. Ce délai de deux ans doit par ailleurs être mis à profit par le Gouvernement pour déployer l'application CertDc dans toutes les mairies.

Recommandation n° 3 : rendre effective, sous deux ans, l'obligation de dématérialisation des certificats de décès en supprimant la dérogation, prévue à l'article R. 2213-1-4 du code général des collectivités territoriales, permettant aux médecins de continuer à privilégier l'envoi du certificat sur support papier. En parallèle, engager au plus vite le déploiement de l'application CertDc dans toutes les mairies.


* 27 Claire Bossard, Gaëlle Santin, Irina Guseva Canu, « Surveillance de la mortalité par suicide des agriculteurs exploitants - premiers résultats », 2013.

* 28 Les agriculteurs exploitants nés hors France métropolitaine ainsi que ceux en activité dans les départements et territoires d'outre-mer en sont toutefois exclus en raison de difficultés d'accès aux données de mortalité.

* 29 À noter, en particulier, une surmortalité importante par suicide en 2007 dans les secteurs « cultures et élevages non spécialisés » et « maraîchage, floriculture ».

* 30 Il est à cet égard significatif que, dans nombre de départements, la grande majorité des cas d'agriculteurs en difficultés signalés aux cellules d'identification et d'accompagnement concernent la filière laitière ( cf. infra ). Ainsi de la Manche, par exemple, où 76 % des agriculteurs concernés ont une activité laitière.

* 31 Imane Khireddine-Medouni, Éléonore Breuillard, Claire Bossard, « Surveillance de la mortalité par suicide des agriculteurs exploitants », 2016.

* 32 L'INVS a été fusionné au sein de l'agence Santé publique France lorsque cette dernière a été créée en 2016.

* 33 Pour l'année 2011, seuls les hommes de 45 à 54 ans présentaient un tel excès de suicide par rapport à la population générale.

* 34 Nicolas Deffontaines, « Les suicides des agriculteurs. Pluralité des approches pour une analyse configurationnelle du suicide », Thèse de doctorat soutenue le 29 mai 2017, Université de Bourgogne.

* 35 Santé publique France, « Caractéristiques associées à la mortalité par suicide parmi les hommes agriculteurs exploitants entre 2007 et 2011 », septembre 2017.

* 36 Les données concernant les femmes agricultrices n'étant pas statistiquement significatives, elles n'ont pu être analysées, selon Santé publique France.

* 37 Santé publique France, « Mortalité par suicide des salariés affiliés au régime agricole en activité entre 2007 et 2013 : description et comparaison à la population générale », 2018.

* 38 J. Klingelschmidt, A. Milner, I. Khireddine-Medouni, K. Witt, EC. Alexopoulos, S. Toivanen, « Suicide among agricultural, forestry and fishers workers : a systematic literature review and meta-analysis », 2018.

* 39 Par rapport à celle qui aurait été observée si la population d'étude présentait la même mortalité par sexe et par âge que la population générale.

* 40 Santé publique France, « Prévalence de la symptomatologie dépressive et exposition aux facteurs professionnels psychosociaux chez les actifs affiliés à la mutualité sociale agricole de cinq départements en 2010 : résultats de la phase pilote de la cohorte Coset-MSA », 2019.

* 41 Bouches-du-Rhône, Finistère, Pas-de-Calais, Pyrénées-Atlantiques et Saône-et-Loire.

* 42 MSA, « Rapport au ministre chargé de la sécurité sociale et au Parlement sur l'évolution des charges et des produits au titre de 2020 », 2019.

* 43 Cette différence n'est cependant particulièrement significative que pour la tranche d'âge de 30 à 39 ans et la tranche des plus de 65 ans.

* 44 La numérotation des recommandations obéit à leur ordre de présentation dans la liste figurant au début de ce rapport. Dans le corps de ce dernier, les numéros sont susceptibles de ne pas se suivre.

* 45 Ibid , p. 137.

* 46 Il s'agit du numéro attribué par l'INSEE à toute personne née en France métropolitaine ou dans les départements et territoires d'outre-mer et plus communément appelé « numéro de sécurité sociale ».

* 47 La gestion y relève des sections agricoles des caisses générales de sécurité sociale.

* 48 Notamment en raison des difficultés d'accès aux données de mortalité.

* 49 Les exploitants dont l'importance de l'activité agricole est inférieure aux seuils d'assujettissement au régime des non-salariés agricoles.

* 50 Le ministère des solidarités et de la santé indique dans sa contribution écrite transmise au groupe de travail que « quel que soit le régime, [bénéficier d'une pension d'invalidité] est un facteur de risque de suicide encore plus élevé ».

* 51 Aouba A, Pequignot F, Camelin L, Jougla E, « Évaluation de la qualité et amélioration de la connaissance des données de mortalité par suicide en France métropolitaine », 2006

* 52 Art. L. 132-7 du code des assurances : « L'assurance en cas de décès est de nul effet si l'assuré se donne volontairement la mort au cours de la première année du contrat ».

* 53 Ibid, p. 140.

* 54 Ce statut social qui s'attache à la personne de l'agriculteur peut ainsi expliquer que la famille d'un défunt le considère comme tel même s'il est particulièrement âgé et ne participe plus aux travaux agricoles, là où la MSA le considèrera comme retraité, et non plus comme agriculteur.

* 55 M. Deffontaines souligne ainsi que si le nombre total de suicides en agriculture recensés sur la période 2007-2011 par les fichiers du CépiDc (782) et ceux de Santé publique France (786) est similaire, les courbes annuelles des deux organismes sont divergentes. À la différence des données de Santé publique France fournies par la MSA, qui attestent d'un pic de suicide entre 2007 et 2009, celles du CépiDc placent ce pic en 2010, soit postérieurement à la crise agricole de 2008-2009.

* 56 C'est par exemple le cas de l'ingestion volontaire de pesticides.

* 57 C. Bossard, G. Santin, V. Lopez, E. Imbernon, C. Cohidon, « Surveillance des suicides liés au travail en France : une étude exploratoire », Revue d'épidémiologie et de santé publique, n° 64, 2016, p. 202.

* 58 Art. R. 2213-1-1 du code général des collectivités territoriales.

* 59 L'instruction technique n° 550/DG75-F501 du 1 er avril 2015, transmise aux maires par le ministre de l'intérieur, celui de la décentralisation et de la fonction publique, celui des finances et des comptes publics, celui de l'économie, de l'industrie et du numérique et celui des outre-mer leur rappelle que l'envoi des certificats de décès aux ARS fait partie de la mission de transmission des bulletins statistiques qui leur est attribuée.

* 60 Art. 230-28 du code de procédure pénale.

* 61 Section 6 du chapitre 1 er du titre II de l'instruction générale relative à l'état civil, du 11 mai 1999.

* 62 Art. R. 2213-1-2 du code général des collectivités territoriales, créé par le décret n° 2006-938 du 27 juillet 2006 relatif au certificat de décès et modifiant le code général des collectivités territoriales.

* 63 Observatoire national du suicide, 3 e rapport, février 2018.

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