VIII. L'« ÉCONOMIE DE GUERRE » : PASSER DES MOTS AUX ACTES

Si l'expression d' « économie de guerre » a le mérite d'impulser une dynamique, elle est excessive, voire trompeuse, au regard des objectifs poursuivis et, surtout, des résultats obtenus à ce jour.

Sans engagements fermes de l'État, sans contrats-cadres pluriannuels, les industriels continuent à dépendre de l'exportation et ne bénéficient pas de la visibilité nécessaire pour se préparer le cas échéant à monter en puissance . Un engagement sur des volumes permet d'obtenir, en outre, des économies d'échelle, ce que ne permettent pas des commandes fragmentées. En reportant l'effort à la prochaine LPM, nous avons déjà perdu au moins un an. Or la remobilisation de l'industrie, la relance de la production sont cruciales pour répondre à une demande croissante. C'est d'autant plus nécessaire que certaines industries concurrentes sont, quant à elles, bien présentes et prêtes à assurer un recomplètement rapide des stocks d'équipements livrés à l'Ukraine (États-Unis, Corée du sud...). Le risque, à défaut, est celui de la marginalisation de l'industrie française .

En outre, plusieurs verrous doivent être levés :

- La simplification des procédures et des normes , la réduction des exigences documentaires sont des priorités : il est possible de qualifier beaucoup plus rapidement des produits néanmoins sûrs et fiables, et d'accélérer ainsi considérablement les programmes.

- Des relocalisations sont nécessaires. C'est le cas pour les poudres propulsives.

- L'État doit s'impliquer avec les industriels dans la constitution de stocks stratégiques , mutualisés, autant que possible, entre secteurs industriels.

- En cas de crise, un dispositif doit permettre à l'industrie de défense d'être approvisionnée en priorité .

- Les entreprises de la BITD sont confrontées à une pénurie de main d'oeuvre . En 2022, 86% des entreprises du secteur de la défense terrestre anticipaient des difficultés pour recruter. Un grand plan interministériel de revalorisation des métiers industriels est nécessaire. L'industrie, et en particulier l'industrie de défense, est partie prenante de la souveraineté. La mise en place d'une réserve industrielle de défense pourrait être l'un des fers de lance de cette stratégie.

- Les entreprises de la BITD sont confrontées à une pénurie de financements : le soutien des acteurs financiers privés est indispensable, pour passer à l'échelle de l' « économie de guerre », ce qui implique une vigilance particulière vis-à-vis des initiatives réglementaires européennes (de type écolabel, taxonomie). Le risque à l'image doit s'inverser , en valorisant les activités de souveraineté et de défense. La guerre d'Ukraine souligne toute la légitimité d'une telle démarche.

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