II. TIRER LES LEÇONS D'UNE RÉPONSE INSTITUTIONNELLE ENGAGÉE MAIS PERFECTIBLE

La nature et l'ampleur des violences et dégradations, qui ont été commises entre le 27 juin et le 7 juillet 2023 sur l'ensemble du territoire national, démontrent la nécessité d'interroger les instruments dont dispose l'État pour assurer le rétablissement rapide de l'ordre public face à des violences urbaines, puis le maintien de l'ordre public ainsi restauré dans le respect des droits et libertés constitutionnellement garantis. Une telle question se pose avec une acuité renouvelée tant le risque de nouveaux phénomènes - le cas échéant plus localisé - de violences ou d'émeutes urbaines pourrait, à l'avenir, se présenter très rapidement.

Eu égard aux constats dressés à la suite des travaux de la mission, celui-ci estime que, si la réponse institutionnelle a été particulièrement forte lors des émeutes de juin et juillet 2023, elle doit néanmoins être perfectionnée à six principaux égards.

A. LA NÉCESSAIRE MODERNISATION DES MOYENS DU RÉTABLISSEMENT ET DU MAINTIEN DE L'ORDRE PUBLIC EN CONTEXTE ÉMEUTIER À DISPOSITION DES FORCES DE SÉCURITÉ INTÉRIEURE

La mission a constaté qu'aucune préparation en amont d'une réponse policière coordonnée et nationale spécifique au contexte émeutier n'avait été établie et que, pour la première fois, des forces d'intervention spécialisées ont été mobilisées sur des opérations éloignées de leur champ d'action traditionnel, sans véritable doctrine d'emploi préalablement établie. Elle estime, en conséquence, indispensable de moderniser, tout en préservant les acquis de l'expérience des émeutes urbaines de l'été 2023, les moyens du rétablissement et du maintien de l'ordre public en contexte émeutier par cinq mesures :

· construire un schéma national de rétablissement et de maintien de l'ordre en contexte émeutier et stabiliser la doctrine d'emploi des forces de sécurité intérieure en facilitant notamment le décloisonnement et le dézonage de l'emploi des forces de sécurité intérieure, y compris quant aux chaînes de commandement ;

· entretenir les capacités humaines au regard des besoins opérationnels spécifiques d'un contexte émeutier par des formations régulières aux tirs et à l'usage des armes et des formations communes aux diverses forces afin de faciliter leur coopération ;

· moderniser et adapter les matériels et équipements aux contextes émeutiers longs et protéiformes.

Plus précisément, la mission préconise un renforcement des capacités de production des munitions et des armements de la filière industrielle ainsi qu'une augmentation des quotas de munitions des armes de force intermédiaire, ainsi que des armes classiques, en profitant du développement d'un prochain système d'information sur les armes. Elle juge également indispensable de poursuivre le déploiement et l'équipement systématique des caméras-piétons, et constituer des stocks pour un déploiement rapide en cas de mobilisation de forces en contexte émeutier. Sur ce même point, permettre, en contexte émeutier, l'enregistrement en continu des interventions par les caméras-piétons, ou leur déclenchement à distance par les postes de commandement apparait particulièrement utile à la mission.

Enfin, la mission souhaite encourager la modernisation des flottes de drones et des caméras de vidéo-surveillance pour permettre leur utilisation nocturne et propose d'expérimenter l'équipement et l'utilisation de matériels de marquage codés en cas d'émeutes ;

· assurer la sécurisation des bâtiments et armureries des forces de l'ordre par la conduite d'un audit des besoins de sécurisation immédiats et la constitution d'un stock de matériels mobiles permettant d'assurer leur sécurisation, y compris en cas d'assaut ;

· renforcer les moyens du suivi et de la connaissance des phénomènes de violences urbaines ainsi que la cartographie des « quartiers sensibles » par les services de renseignement mais également par le biais d'outils transdisciplinaires.

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