TROISIÈME PARTIE
LA DÉLIVRANCE DES VISAS
FACE À
UNE TRIPLE CONTRAINTE D'EFFICACITÉ,
DE SÉCURITÉ ET
D'ATTRACTIVITÉ
I. POURSUIVRE LA MODERNISATION DES SERVICES CONSULAIRES
A. LA NÉCESSITÉ DE CONSERVER UNE MAÎTRISE DES DÉLAIS D'INSTRUCTION, SANS EN AUGMENTER EXCESSIVEMENT LES COÛTS
1. Limiter la progression des délais de traitement : un objectif qui doit demeurer prioritaire
Pour les demandeurs, le délai de traitement constitue l'indicateur principal de la qualité du service rendu par les services consulaires français. Sans majorer de manière excessive les coûts de traitement, reposant essentiellement sur des dépenses de personnel, ni sacrifier les exigences de sécurité, il importe de conserver une durée raisonnable de traitement des dossiers.
Le sous-indicateur « visa de court séjour » de l'indicateur de performance 1.2 du programme 151 retrace dans les documents budgétaires le délai de traitement des demandes pour ce type de visa. De treize jours en 2022, il a été ramené à huit jours en 2023 avant de remonter à neuf jours pour les années 2024 et 202543(*). Le stade de l'instruction est par conséquent relativement rapide et se décompose entre une phase de pré-instruction, partagée entre le PSE et les services consulaires, et une phase d'instruction.
Il importe de noter que le délai de traitement des demandes de visas ne recouvre pas le délai réel d'obtention du visa par le demandeur : il court à compter du dépôt de la demande auprès du prestataire ou du consulat. Or, le dépôt est effectué sur rendez-vous, fixé par le prestataire de services extérieurs en fonction du nombre de créneaux déterminé par le consulat. Ce dernier établit le nombre de rendez-vous en prenant en compte ses propres capacités de traitement. Le délai d'obtention d'une plage de rendez-vous peut prendre des semaines selon le type de visa demandé et se trouve, dans les pays à forte demande, perturbé par les pratiques de certaines officines locales.
Déroulement de l'instruction d'une demande de visa
Source : commission des finances d'après les réponses au questionnaire des rapporteurs spéciaux
Les capacités de traitement des demandes de visas par les services dépendent de plusieurs facteurs, parmi lesquels les effectifs figurent en première place. En effet, l'instruction est limitée par la capacité individuelle des agents à traiter un stock de dossiers. Sur les postes de Casablanca et Rabat, des quotas d'instruction ont été attribués aux agents : une quarantaine de dossiers par pré-instructeur par jour et entre 80 et 85 demandes par instructeur et par jour.
Sur l'ensemble du réseau consulaire, un sous-indicateur « visa » de l'indicateur « nombre de documents délivrés par ETPT » du programme 151 permet de suivre les capacités moyenne de traitement par agent : 240 visas par ETP ont été délivrés en 2022, contre 307 en 2023. Des cibles respectivement de 440 et 350 visas ont été fixées pour les années 2024 et 2025. La baisse des objectifs affichés entre 2024 et 2025 s'explique par le renforcement des effectifs des services consulaires et la réorganisation des procédures de traitement.
Des facteurs calendaires peuvent également affecter les délais de traitement des demandes. Les services consulaires connaissent ainsi des pics saisonniers, en particulier à l'été où se cumulent les demandes de visas tourisme, de visas étudiants et de visas saisonniers. Le consulat général de Rabat, dont le délai moyen de traitement s'élevait à neuf jours au premier semestre, a atteint une trentaine de jours en août en raison de cet afflux estival. Faute de pouvoir lisser cette demande, les services d'instruction peuvent accumuler des retards de traitement. Dans ce type de situation, le stade de l'instruction apparaît comme un potentiel « goulet d'étranglement ».
Par ailleurs, le délai de traitement varie selon le type de dossier ou de visa demandé. Les dossiers présentant peu de chances d'obtention d'un visa sont, par exemple, plus aisés à traiter.
2. Les retours d'expérience des difficultés de la « crise des visas » invitent à renforcer la réactivité des services consulaires
Si les difficultés apparues lors de la « crise des visas », consécutive à la brutale remontée du volume de demandes post-crise sanitaire, ont pu être maitrisée par une reconstitution des effectifs et une refonte des procédures, les difficultés ponctuelles de traitement, évoquées supra ne devraient pas disparaitre. La saisonnalité des demandes de visas entraine nécessairement des périodes plus intenses pour les services. Si leur organisation interne permet une forme de lissage des demandes, par une communication à l'égard des demandeurs et une priorisation de certaines catégories de demandes, des périodes de plus grande pression sont inévitables.
Pour pallier les difficultés ponctuelles rencontrées dans le traitement des demandes, trois dispositifs coexistent actuellement au Quai d'Orsay :
- tout d'abord, un vivier de missionnaires permanents, de l'ordre de 29 agents, prêts à être mobilisés sur des missions à l'étranger dans divers domaines ;
- ensuite, des missionnaires occasionnels, à savoir des vacataires extérieurs, qui peuvent répondre à des offres publiées sur le site du MEAE ;
- enfin, un « centre de soutien consulaire », constitué à la suite de la « crise des visas » et fort de cinq agents de catégorie C spécialistes dans le domaine des visas et de 25 missionnaires, spécialisés dans l'administration des Français de l'étranger.
Concernant le centre de soutien consulaire, davantage qu'une structure permanente et organisée, il s'agit d'un vivier d'agents en poste qui peuvent effectuer une à deux missions de renfort par an, sous réserve des nécessités de service. En ce sens, il correspond plus à une forme de « réserve opérationnelle » d'agents consulaires potentiellement mobilisables qu'à une véritable cellule de soutien. Cette solution présente à la fois le mérite de la souplesse et de ne pas peser excessivement sur les dépenses de personnel de la mission. Pour autant, ce dispositif ne suffit pas à répondre à l'ensemble des besoins. À titre d'exemple, sur l'année 2023, si 52 agents instructeurs missionnaires avaient été déployés dans les pays où la demande était la plus forte, 22 demandes de vacation n'avaient pas pu être satisfaites44(*).
Il paraît donc nécessaire d'élargir cette réserve en identifiant un plus grand nombre d'agents susceptibles d'effectuer des missions de renfort en cas de besoin. Cela implique pour la DFAE un travail d'identification et de formation des agents, prioritairement dirigé vers les services présents à Nantes sur les visas.
* 43 Ce délai ne concerne toutefois que les demandes de visas qui reçoivent une réponse positive.
* 44 Par comparaison, pour l'année 2025, 20 missions de renfort ont d'ores et déjà été effectuées.