IV. ACCÉLERER L'EXÉCUTION DE LA PEINE ET RENFORCER SON CONTRÔLE
A. DÉVELOPPER UNE CULTURE DE L'EXÉCUTION DES PEINES AU SEIN DES FORCES DE SÉCURITÉ INTÉRIEURE
Les rapporteures regrettent que les forces de sécurité intérieure, auxquelles le code de procédure pénale confie de nombreuses tâches liées à l'exécution des peines, ne puissent, en raison d'une forte mobilisation sur les missions de voie publique et de police judiciaire, s'investir davantage dans ces tâches autrement qu'en cas de difficulté de signification des jugements.
Au-delà des enjeux liés aux moyens alloués aux forces de sécurité intérieure, et sans qu'une réforme législative ne soit nécessaire, les rapporteures appellent à un changement de culture en leur sein, par exemple par le biais d'une circulaire ministérielle, a minima pour que ces dernières aient pleinement conscience que les missions liées à l'exécution des peines font partie intégrante de leur coeur de métier, en sus et non en concurrence avec les missions de voie publique et de police judiciaire. En outre, il serait souhaitable qu'une véritable ligne directrice soit définie quant au contrôle de l'exécution des peines, notamment des peines alternatives à l'emprisonnement, qui s'opère concrètement sous la forme de contrôles fortuits.
B. ACCÉLÉRER L'EXÉCUTION DE LA PEINE EN FAVORISANT LA PRÉSENCE DU PRÉVENU AUX AUDIENCES ET EN MODERNISANT LES VOIES DE SIGNIFICATION DES JUGEMENTS
Alors que plus de 20 % des jugements rendus par les tribunaux correctionnels le sont en l'absence du prévenu, il appert que ce dernier a de facto intérêt à ne pas se présenter afin d'en freiner l'exécution puisque les jugements sont proportionnellement davantage exécutés lorsque le prévenu se présente aux audiences. Le taux d'exécution à 5 ans des jugements contradictoires à signifier n'atteint que de 76 % en 2024, contre 95 % pour les autres types de jugements.
En effet, la présence du prévenu aux audiences permet - notamment - de respecter les exigences liées au principe du contradictoire et ainsi de rendre exécutoire la décision de l'autorité judiciaire. Outre qu'elle facilite la signification du jugement et évite la mobilisation des forces de sécurité intérieure, la présence du prévenu aux audiences permet aussi sa prise en charge rapide une fois sa condamnation acquise, puisqu'il peut être reçu physiquement par le bureau de l'exécution des peines afin que lui soit présenté son parcours judiciaire.
L'un des moyens pour accélérer l'exécution des peines est donc d'améliorer l'information des prévenus, aussi bien en amont pour qu'il soit présent lors des audiences, qu'en aval pour que les jugements contradictoires à signifier soient transmis avec célérité. L'objectif est ainsi d'éviter que le prévenu ait intérêt à ne pas se présenter à l'audience, d'une part, ou à développer une stratégie d'évitement de la signification du jugement, d'autre part.
Sur le premier point, la mission d'information fait sienne la suggestion émise par la mission d'urgence sur l'exécution des peines, consistant à généraliser et étendre, notamment au stade pré-sentenciel, le rappel automatique et dématérialisé des dates d'audiences et des convocations, qui est actuellement expérimenté dans un peu moins d'une centaine de tribunaux judiciaires et services pénitentiaires d'insertion et de probation.
Sur le second point, les rapporteures partagent le constat assez unanime quant à l'inadaptation du cadre juridique régissant les voies de signification des jugements, notamment aux fins de les rendre exécutoires. Elles appellent donc à ce que la réflexion sur la modernisation des voies de signification des jugements soit poursuivie, voire accélérée, en ciblant davantage la participation des forces de sécurité intérieure à cette mission du service public de la justice et en considérant que, sauf mention contraire, le consentement à la transmission dématérialisée des documents judiciaires est réputé acquis. En outre, pour inciter le prévenu à se rendre aux audiences, il pourrait être donné à la décision d'emprisonnement ferme inférieur à un an non aménagé la valeur d'un ordre de recherche et d'arrestation à destination des officiers de police judiciaire.