B. LES UNIVERSITÉS, DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS À LA TRANSFORMATION INACHEVÉE
Les transformations impulsées par la puissance publique au cours des deux dernières décennies, ont été opérées sans vision d'ensemble et avec de nombreux effets de bord. La fragmentation du paysage universitaire qui en découle appelle des ajustements stratégiques.
1. Un processus de différenciation aux multiples impensés
Le processus de différenciation mis en oeuvre depuis 2010, qui a atteint l'objectif de structurer des universités internationalement compétitives, a eu des effets mal régulés au-delà de ces établissements intensifs en recherche. La généralisation des financements sélectifs a favorisé la concentration des moyens sur un seul type d'universités, tout en créant une mise en concurrence généralisée des établissements. Associée à la diversification des cadres de fonctionnement dérogatoires, au travers notamment du statut d'établissement public expérimental, cette évolution conduit à une hétérogénéité croissante du paysage universitaire, qui complexifie son pilotage et fait courir le risque d'un éclatement de la notion même d'université.
Des établissements caractérisés par l'importance de leur activité de formation pluridisciplinaire, avec un fort poids du premier cycle et de filières de sciences humaines moins susceptibles de mobiliser des financements sélectifs, apparaissent comme les « perdants » de cette politique. Le rôle territorial des établissements, notamment au travers de leurs antennes, apparaît par ailleurs comme un impensé stratégique. Dans ce contexte, le pilotage au cas par cas déployé par le ministère ne permet pas la régulation d'ensemble nécessaire au fonctionnement d'un service public de qualité sur l'ensemble du territoire.
2. Un principe d'autonomie sans moyens opérationnels
Alors que leur autonomie réelle apparaît limitée regard des objectifs fixés en 2007, les universités ne disposent pas des moyens opérationnels nécessaires à l'exercice d'une fonction stratégique en partie déplacée à l'échelle des établissements.
Le sous-calibrage de leurs fonctions support constitue un obstacle majeur. La gestion financière des universités ainsi que la mobilisation des financements compétitifs appellent des compétences de plus en plus spécialisées, au regard desquelles les conditions d'emploi des universités présentent une attractivité limitée.
La dévolution du patrimoine immobilier, qui peut constituer un levier d'autonomie important, a fait l'objet d'un pilotage hésitant, qui a obéré son attractivité et n'a pas permis sa généralisation. Le financement de ce dispositif, qui porte sur un parc dégradé et appelant un effort de réhabilitation colossal, a été réévalué en cours d'application, de sorte que seuls les bénéficiaires de la première vague bénéficient des moyens d'assurer la gestion du patrimoine transféré.