2. Des inflexions en cours sur le positionnement de l'État

ï L'organisation de la relation entre l'administration d'État et les établissements fait actuellement l'objet de multiples initiatives de la part du MESR.

Il semble tout d'abord que le renouvellement récent à la tête de la Dgesip ait marqué une inflexion dans le rapport avec les établissements, le directeur général en poste depuis 2024 étant à l'initiative d'un accroissement et d'un approfondissement des échanges globalement salué.

Le MESR a par ailleurs publié, au cours de l'été 2025, deux circulaires relatives respectivement aux missions de la Dgesip et de la DGRI 1 et à la déconcentration en matière d'enseignement supérieur, de recherche et d'innovation 2, témoignant ainsi d'une attention portée à la thématique du pilotage au sommet de l'État. Ces deux textes prévoient un repositionnement marqué des différents services de l'État chargés d'assurer cette mission.

Ce repositionnement est d'abord celui du champ de compétence du ministère dans son ensemble, qui doit se replacer « comme ministère de l'enseignement supérieur, et non plus seulement des universités », dans le contexte de forte progression des effectifs étudiants de l'enseignement supérieur privé. Cette évolution appelle la mise en place d'une « doctrine en matière de régulation de l'enseignement supérieur privé et de positionnements respectifs du privé et du public ».

Les textes clarifient ensuite la répartition de la mission de tutelle des établissements entre les services de l'État. Ils prévoient à ce titre un accroissement du rôle des rectorats, en affirmant de manière corollaire la subsidiarité du recours à l'échelon central :

- la circulaire du 5 septembre rappelle que l'exercice de la tutelle et du pilotage des opérateurs « ne saurait se réduire à un simple suivi administratif », mais constitue « le coeur de la compétence » des directions centrales du ministère, et doit être assurée de manière à la fois « effective, stratégique, étayée et différenciée » ;

- la circulaire du 11 août affirme l'engagement d'une « nouvelle étape de déconcentration » et appelle les recteurs à « assurer désormais un rôle accru et notamment à conduire un dialogue stratégique exigeant avec les établissements [...], en fédérant le plus grand nombre d'acteurs locaux, notamment les collectivités territoriales ». Les rectorats auront en particulier un rôle de

1 Circulaire du 5 septembre 2025, non publiée et communiquée à la mission d'information.

2 Renforcer la déconcentration en matière d'enseignement supérieur, de recherche et d'innovation, circulaire du 11 août 2025, NOR : MENG2523527C.

premier plan dans la préparation, le pilotage et le suivi des nouveaux COMP. Il leur est enfin demandé de préparer pour le 1er octobre 2025 une

« feuille de route régionale » précisant leurs priorités d'accompagnement des établissements.

ï Tout en saluant la volonté d'apporter ainsi un nouveau souffle à l'exercice de la mission de pilotage du MESR, ainsi que l'affirmation claire de la nécessité de mieux y associer les collectivités territoriales, les rapporteurs demeurent interrogatifs quant à la portée concrète de ces instructions.

La mise en lien d'un objectif de déconcentration renforcée avec celui d'un accroissement de l'autonomie des universités ne semble en effet pas aller de soi. Les auditions ont permis de constater que, quel que soit l'échelon territorial de leur tutelle par l'État, les établissements attendent avant tout de pouvoir disposer des marges de manoeuvre réglementaires et financières leur permettant d'exercer véritablement leur autonomie. Si l'inscription de certaines décisions de gestion au plus proche des réalités du terrain est certainement bienvenue, elle ne saurait cependant être confondue avec une évolution de fond sur ce point. Le texte de la circulaire entretient d'ailleurs un certain flou à ce sujet, en prévoyant par exemple que devront être examinés la possibilité et l'intérêt de « déconcentrer » certains actes de gestion en matière de ressources humaines « vers les rectorats ou les établissements ».

La circulaire ne comporte par ailleurs aucune orientation susceptible de lever certaines limites actuelles de l'accompagnement exercé par les rectorats, qui semblent largement tenir à la faiblesse de leurs effectifs, à l'absence de clarification des objectifs assignés à l'enseignement supérieur, ainsi qu'au manque d'expertise des équipes rectorales sur certains sujets techniques telle que la gestion immobilière.

France Universités indique quant à elle accueillir cette circulaire « avec une certaine circonspection », « dans la mesure où les universités ont une dimension qui dépasse l'empan de leur implantation territoriale », qui se déploie notamment à l'échelle internationale. Elle souligne par ailleurs qu'il importe « que les recteurs, en leur qualité de représentants de l'État, aient une ligne claire en phase avec les objectifs nationaux. L'intervention rectorale doit s'inscrire dans une logique de réglages et non dans une politique académique autonome ».

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