C. LES LIMITES DU DISPOSITIF

Non seulement le dispositif législatif actuel n'est pas exempt de toute critique, mais il semble atteindre ses limites. En effet, les commissions de surendettement sont de plus en plus confrontées à des dossiers dans lesquels la capacité de remboursement des surendettés est très faible, voire nulle. Devant ces cas inextricables, les commissions n'ont pas d'autre alternative que de proposer un moratoire. Or, la multiplication des retours de dossiers risque à moyen terme de provoquer l'asphyxie des commissions de surendettement.

1. Des analyses préoccupantes sur l'évolution de la capacité de remboursement des ménages

Une nouvelle fois, vos rapporteurs regrettent de ne pouvoir fonder leurs constatations sur des statistiques précises au niveau national. Toutefois, les personnes interrogées sur ce sujet lors des auditions ont été unanimes pour souligner la tendance à la diminution de la capacité de financement des ménages.

Par ailleurs, dans son rapport, L'ODAS relève que dans les départements ayant effectué une analyse statistique de la capacité de remboursement, les pronostics de réussite du plan s'avèrent bien plus fragiles que ceux dégagés dans l'étude du CREP effectuée il y a trois ans. Ainsi, dans le département de la Loire, la capacité de remboursement par ménage, telle que définie au plan local, serait en 1995 négative dans 32 % des cas, et inférieure à 500 francs dans 41 % des cas. Seuls 27 % des cas auraient une capacité de remboursement supérieure à 500 francs.

Les chiffres de la Banque de France confirment cette tendance. Ainsi, auprès de la commission du surendettement du Maine et Loire, la part des dossiers dans lesquels la capacité de remboursement est inexistante est passée de 9 % en 1992 à 24 % en 1996.

En outre, l'aggravation de la crise sociale augmente le nombre de situations inextricables auxquelles sont confrontées les commissions. Ainsi, CETELEM, qui représente les professionnels du crédit dans 22 commissions départementales, estime à près de 40 % le nombre de dossiers concernant des particuliers sans ressources.

Par ailleurs, depuis l'enquête menée par le CREP, le nombre de dossiers laissant apparaître un endettement non bancaire (Trésor Public, EDF, France Télécom, loyers...) supérieur à 80 % de l'ensemble des dettes déclarées par les particuliers lors du dépôt de leurs dossiers aurait doublé, passant de 3 % à 6,8 %.

LE DEVENIR DES PLANS

L'étude réalisée par le CREP en 1994 portait sur le caractère réaliste des mesures contenues dans des plans signés en 1992 et 1993. Selon cette étude, dans trois plans sur cinq, les surendettés pouvaient faire face sans difficulté majeure aux dispositions retenues. En revanche, 30 % des plans faisaient ressortir une "morsure" de moins de 10 % du revenu vital. 16 % des surendettés se retrouvaient dans des situations extrêmement difficiles, donnant lieu souvent à des incidents suffisamment graves pour conduire à un passage en contentieux.

L'enquête du CREP sur le devenir des dossiers après la signature des plans doit toutefois être utilisée avec précaution, car elle a été établie à partir d'un nombre très limité de dossiers (204). Elle laisse apparaître que plus de la moitié des enquêtés (54 %) estiment ne pouvoir tenir le plan qu'avec des difficultés, contre 33 % qui déclarent ne pas avoir de difficulté à le respecter. Les incidents relevés chez les créanciers (échantillon de 495 dossiers) traduisent les difficultés déclarées par les surendettés : si, avant le plan, plus de 70 % des débiteurs avaient eu des incidents de paiement, ils sont encore près d'un tiers à en avoir après le plan. Toutefois, pour ceux qui en ont, ces incidents sont nettement moins nombreux que dans la période antérieure au plan.

En outre, il faut évidemment qualifier la gravité des incidents intervenus. Pour un quart d'entre eux, il s'agit d'un seul incident. Pour un tiers, il s'agit de deux à quatre incidents, concentrés dans les tranches de 2.000 à moins de 7.000 francs. Seuls 10 % des surendettés auraient des incidents conduisant à un passage au contentieux dans la phase postérieure au plan. Il semble donc que même si les surendettés rencontrent des difficultés dans l'exécution du plan, peu le remettent en cause, que ce soit par des incidents de paiement graves ou par des demandes de révision de plans. En effet, celles-ci s'élèvent, en données cumulées depuis 1989, à seulement 22.315.

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