actualisation du fonds national de solidarité

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer, auteur de la question n° 296, adressée à M. le secrétaire d’État chargé de l’emploi.

M. Jean Boyer. Madame la secrétaire d’État, je tiens à vous redire la respectueuse et très grande considération que je vous porte depuis que nous avons eu l’occasion de travailler dans cette maison au sein de la même équipe.

Je voudrais évoquer un problème très pénalisant et très grave pour les départements, en particulier en zone rurale.

Le Fonds national de solidarité a été indispensable à toute une génération afin d’atteindre le minimum nécessaire, voire vital, pour vivre rationnellement la troisième partie d’une vie difficile au niveau non seulement des revenus, mais aussi des conditions du travail.

Comme vous le savez, le Fonds national de solidarité permet d’atteindre un minimum dont la référence est, par exemple, l’allocation aux adultes handicapés. Dans tous les territoires, particulièrement en milieu rural, ce complément était, et est encore aujourd’hui, versé lors de la retraite à des allocataires qui, pendant leur vie, ont été des « petits », des modestes, des silencieux. Ils ne bénéficiaient pas du minimum vieillesse et le Fonds national de solidarité représentait la partie différentielle pour leur permettre d’atteindre ce minimum.

Dieu merci, grâce à l’augmentation – certes faible, mais existante – des retraites, le nombre des ayants droit baisse régulièrement. On ne peut que s’en réjouir.

Mais cette allocation de solidarité implique un recours sur la succession. Le seuil de récupération était de 250 000 francs en 1982 ; il est de 39 000 euros aujourd’hui. Certes, il a été actualisé et des abattements sont prévus sur ce que l’on appelle l’outil de travail, à savoir le foncier. Mais ce montant de 39 000 euros correspond au prix plancher de la très modeste ferme où réside un agriculteur ! Alors, faut-il qu’il la vende pour aller habiter ailleurs avant de mourir et pour laisser ses enfants dans la sérénité ?

Une des conceptions du monde agricole a été, et reste encore, le sens de l’économie, afin de pouvoir garantir, en toute indépendance, une sécurité sans avoir à prélever sur les ressources des enfants et des petits-enfants. Nos aînés veulent partir en paix sans que leur famille, qu’ils souhaitent voir rester unie, en subisse les conséquences sur le plan financier. Or, avec l’application du recours sur succession et un seuil insuffisamment actualisé, tel n’est pas le cas.

Pendant plusieurs années, la France a connu une inflation à deux chiffres : le patrimoine bâti a pris de la valeur. Comment nos retraités pourraient-ils faire suspendre le versement lorsqu’ils considéreraient qu’ils deviennent redevables, sachant que le reversement porte également sur la période où leur patrimoine était en dessous du seuil actualisé ?

Prenons le cas d’une personne qui a bénéficié du soutien du Fonds national de solidarité pendant une période de sa vie où il rentrait « dans les clous », c'est-à-dire où il disposait de moins de 39 000 euros. Si le fait de recevoir un héritage annule le bénéfice du dispositif, le recours sur succession vaudra même sur la période où le patrimoine était inférieur au seuil requis. C’est très pénalisant. Il est vraiment choquant que cette règle, et j’ai pu le vérifier encore récemment, soit toujours appliquée.

Je vous remercie par avance de m’indiquer les perspectives envisagées pour l’actualisation de cette référence.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d'État chargée de la solidarité. Monsieur Boyer, je vous prie de bien vouloir excuser M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, qui est retenu par d’autres obligations.

Vous avez appelé son attention sur la situation de certaines personnes âgées en milieu rural, qui n’ont parfois pour vivre qu’une toute petite retraite agricole, inférieure au montant du minimum vieillesse, alors même qu’elles ont travaillé dans des conditions difficiles.

Je souhaite d’abord vous indiquer que le Gouvernement est pleinement conscient de ces situations et qu’il souhaite lutter contre ces « poches de pauvreté » en milieu rural.

C’est la raison pour laquelle, conformément aux engagements du Président de la République, nous avons décidé de mettre en œuvre, sur la durée du quinquennat, un ensemble de mesures pour revaloriser les petites retraites agricoles et apporter notamment une réponse aux veuves, aux conjoints et aux assurés ayant eu une carrière incomplète.

Ces mesures, annoncées par le Premier ministre en septembre, seront votées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 et représentent un effort de l’ordre de 200 millions d’euros et un gain de quelque 80 euros par mois sur la pension des assurés concernés. Elles bénéficieront, à terme, à plus de 200 000 personnes.

Parallèlement, toujours pour apporter une réponse aux plus fragiles, le Gouvernement portera de 54 % à 60 % les pensions de réversion pour les retraités les plus modestes dont la pension totale est inférieure à 800 euros.

Enfin, le minimum vieillesse perçu par les personnes seules sera revalorisé de 25 % : son montant passera ainsi de 633 euros aujourd’hui à 677 euros en 2009, et à 777 euros d’ici à 2012.

Par ailleurs, le Gouvernement n’envisage pas de modifier le seuil de déclenchement de la procédure de récupération des sommes versées sur la succession de l’allocataire décédé, seuil actuellement fixé à 39 000 euros aux termes de l’article D. 815-4 du code de la sécurité sociale.

S’il est tout à fait légitime de faire un effort au titre de la solidarité nationale pour les retraités les plus modestes, le minimum vieillesse est un « filet de sécurité » qui doit intervenir de façon subsidiaire. La récupération des sommes versées sur la fraction de l’actif net successoral dépassant 39 000 euros constitue l’expression de la solidarité familiale et permet de garantir que ce « filet de sécurité » bénéficie réellement à ceux qui en ont le plus besoin.

Toutefois, certaines dispositions permettent de prendre en compte les situations particulières.

Ainsi, le recouvrement des sommes versées au titre du minimum vieillesse sur la part de succession attribuée au conjoint survivant et, le cas échéant, au concubin ou au partenaire survivant lié par un pacte civil de solidarité peut être différé jusqu’au décès de ces derniers. Il en est de même en ce qui concerne les héritiers qui étaient à la charge de l’allocataire à la date de son décès et qui, à cette date, étaient soit âgés d’au moins soixante-cinq ans, soit invalides.

La situation des autres héritiers est appréciée au cas par cas par la commission de recours amiable, qui peut accorder une remise de dette ou un échelonnement de paiement, par exemple lorsque le bien issu de la succession est occupé par le conjoint survivant.

Monsieur le sénateur, tels sont les éléments de réponse que je suis aujourd’hui en mesure de vous apporter sur l’organisation globale du dispositif. Le Gouvernement s’efforce, malgré toutes les difficultés, de revaloriser l’ensemble des ressources des bénéficiaires des prestations les plus faibles, pour faire en sorte qu’en milieu rural aussi le pouvoir d’achat puisse tout de même être maintenu et permette de vivre dans des conditions acceptables.

Il n’en reste pas moins que la situation très concrète que vous avez évoquée mérite sans doute une étude particulière sur les possibilités de recours existantes. Si vous le souhaitez, nous pourrons éventuellement vous apporter des précisions complémentaires.

M. le président. La parole est à M. Jean Boyer.

M. Jean Boyer. Madame la secrétaire d’État, votre réponse était très complète et montre le souci du Gouvernement de prendre en compte toutes les variantes possibles en la matière.

Je connais bien vos qualités humaines et votre détermination à faire tout votre possible pour éviter qu’une famille, frappée par un décès, ne soit déchirée par des problèmes indépendants de sa volonté.

Certes, ici comme ailleurs, il y a le vouloir et le pouvoir. Si je suis bien conscient des difficultés que rencontre notre pays sur le plan budgétaire, je tenais tout de même à vous adresser ce message, à la dimension humaine très importante dans cette France profonde à laquelle je suis si attaché.

M. le président. Madame la secrétaire d’État, nous souscrivons à l’éloge que notre collègue Jean Boyer vient de vous faire.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État. Je vous remercie, monsieur le président.

situation des personnes âgées en perte d’autonomie

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, en remplacement de Mme Bernadette Dupont, auteur de la question n° 274, adressée à Mme la secrétaire d’État chargée de la solidarité.

M. Christian Cambon. Madame la secrétaire d’État, ma collègue Bernadette Dupont, retenue par un engagement de dernière minute, ne peut être présente parmi nous. Elle vous prie donc de bien vouloir l’excuser et m’a demandé de porter sa question à votre connaissance.

Je souhaite ainsi attirer votre attention sur les conséquences, pour les personnes âgées malades et en perte d’autonomie, de l’instauration de franchises médicales dans le but de financer en partie le plan Alzheimer.

De nombreuses personnes âgées ne disposent que du minimum vieillesse, ou à peine plus. Le cumul de toutes ces franchises, s’appliquant sur les médicaments, les actes médicaux et paramédicaux, les consultations ou les séjours hospitaliers, auquel s’ajoutent le déremboursement de nombreux médicaments et les dépassements d’honoraires des médecins et des chirurgiens, qui ne sont pas toujours pris en charge par les mutuelles, compromettent de plus en plus leur accès aux soins et leur capacité à faire face au poids financier de leur perte d’autonomie.

La revalorisation des pensions n’est que de 2 % par an, alors que l’évolution des tarifs d’hébergement en établissement est de l’ordre de 5 % à 6 % par an.

Pour les personnes qui, malgré leur dépendance, ont fait le choix de rester à leur domicile, il est de plus en plus difficile de bénéficier d’une prise en charge de qualité, faute de moyens suffisants, d’autant qu’une diminution de l’exonération patronale sur les aides à domicile a pour conséquence d’augmenter de 3,7 % les sommes dues à l’URSSAF.

Que va devenir le plan Solidarité-Grand âge, annoncé en 2006 par M. Philippe Bas, alors ministre délégué à la sécurité sociale, aux personnes âgées, aux personnes handicapées et à la famille, qui prévoyait la création d’une filière gériatrique, l’amélioration de l’accueil des personnes dépendantes en établissement et le développement de l’offre de soins à domicile ?

Madame la secrétaire d’État, je souhaiterais donc connaître les dispositions que le Gouvernement entend prendre pour assurer une meilleure prise en charge de nos aînés les plus fragiles et mettre en cohérence toutes les décisions prises.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.

Mme Valérie Létard, secrétaire d’État chargée de la solidarité. Monsieur le sénateur, que ce soient en termes de maintien à domicile ou d’accueil en établissement, de très importants efforts ont été réalisés par le Gouvernement ces cinq dernières années pour améliorer la prise en charge des soins des personnes âgées dépendantes.

Vous rappelez le plan Solidarité-Grand âge et le plan Alzheimer, respectivement présentés en 2006 et en 2008. Cela a été souligné par le Président de la République au moment de l’annonce du plan Alzheimer : celui-ci va, à bien des égards, plus loin que le premier, qui a tout de même eu le mérite de fixer des objectifs et de soulever des questions nouvelles dans le domaine des politiques à mener en direction des personnes âgées.

Le plan Alzheimer, en s’intéressant aux exigences de prise en charge liées à la dépendance, va donc plus loin, et s’inscrit dans le champ du qualitatif : formation des personnels, évaluation, innovation, aide aux aidants, c’est-à-dire aux familles, développement des techniques de prise en charge non médicamenteuses, recherche.

De façon très concrète, le plan Alzheimer assure à la fois le financement des mesures, au travers notamment de la mobilisation des franchises médicales, et l’orientation des moyens nouveaux vers une prise en charge adaptée à la spécificité d’une telle maladie.

Parmi les mesures prises, la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer par les services de soins infirmiers à domicile a été renforcée et permettra, d’ici à 2012, de créer 500 équipes pluridisciplinaires sur tout le territoire, composées d’ergothérapeutes, de psychomotriciens et d’assistants en gérontologie, qui viendront renforcer les personnels paramédicaux actuels pour permettre le maintien à domicile de ces personnes et leur apporter une prestation réellement adaptée à leur cas. Cela représente un engagement financier de 169 millions d’euros sur la durée du plan.

De la même façon, pour ce qui concerne les établissements, nous avons pris la décision, toujours sur la durée du plan, de créer 12 000 places en unités Alzheimer et de transformer 18 000 places existantes en unités de ce type. Nous donnons ainsi les moyens aux établissements de s’adapter à la prise en charge de cette pathologie, qui nécessite, bien sûr, des moyens particuliers et une organisation différente.

Le plan Alzheimer comprend aussi plusieurs mesures radicalement nouvelles au regard du plan Solidarité-Grand âge : la plus emblématique est sans doute la création des MAIA, les maisons pour l’autonomie et l’intégration des malades Alzheimer, destinées à assurer la coordination de la prise en charge de ces patients, depuis l’identification de la maladie jusqu’à la fin de leur parcours de vie. Ainsi, le recrutement de mille coordinateurs de cas complexes permettra d’assurer un véritable suivi des aidants et des malades chaque fois que le besoin s’en fera sentir ; ce suivi comprendra une évaluation personnalisée, l’orientation de la personne entre les différents services, l’accès au droit, la formation et le soutien des aidants.

Enfin, limiter le « reste à charge » des personnes âgées et adapter au plus près l’évolution des tarifs hébergement et dépendance à celle des ressources des personnes dépendantes est un objectif essentiel pour le Gouvernement, qui entend l’atteindre par la mise en place du cinquième risque. À l’heure actuelle, on estime que 70 % à 80 % des personnes âgées entrant en établissement ne peuvent pas couvrir le reste à charge avec le montant de leur retraite. Cette question concerne donc la plupart des familles.

Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, ces différents chantiers sont autant d’outils d’une même politique, qui vise à faire de la France un pays exemplaire en 2012 en termes de prise en charge des personnes âgées dépendantes, notamment celles qui sont atteintes de la maladie d’Alzheimer.

Cela étant, nous en sommes tous convaincus, il nous faudra, en plus de ces moyens quantitatifs et qualitatifs, mettre en œuvre une véritable politique de formation renforcée, à destination tant des professionnels travaillant déjà dans les établissements ou à domicile que des personnes susceptibles d’être recrutées.

Notre pays va subir une forte évolution démographique, avec, entre autres conséquences, l’augmentation du nombre des personnes dépendantes, atteintes notamment de la maladie d’Alzheimer. Il nous faut donc, plus que jamais, nous efforcer d’assurer la mise en œuvre efficace de cette partie précise du plan : la qualité de la prise en charge dépendra évidemment du niveau de qualification des professionnels que nous aurons formés. Or, aujourd’hui, de gros efforts restent à faire dans ce domaine.

M. le président. La parole est à M. Christian Cambon.

M. Christian Cambon. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie des éléments de réponse très complets que vous venez de nous fournir. Je les transmettrai à ma collègue Bernadette Dupont, qui en sera certainement satisfaite.

Comme vous l’avez indiqué, la formation des personnels est un sujet très important, surtout pour les maires, dont je suis, qui accueillent des établissements de ce type sur le territoire de leur commune. Nous sommes notamment préoccupés par la nécessité de mieux faire circuler l’information auprès des personnes âgées concernées et de leurs familles, lesquelles se trouvent très souvent aussi, vous l’avez dit, dans une grande détresse.

M. le président. Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à seize heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à seize heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.)

PRÉSIDENCE DE M. Gérard Larcher

M. le président. La séance est reprise.

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Scrutins pour l'élection de membres représentant la France à l'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe et à l’Assemblée de l’Union de l’Europe occidentale

M. le président. L’ordre du jour appelle les scrutins pour l’élection de six membres titulaires et de six membres suppléants représentant la France à l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et à l’assemblée de l’Union de l’Europe occidentale.

En application des articles 2 et 3 de la loi n° 49-984 du 23 juillet 1949, la majorité absolue des votants est requise pour l’élection des titulaires et des suppléants.

Il va être procédé simultanément à ces deux scrutins qui auront lieu dans la salle des conférences, en application de l’article 61 du règlement.

Je prie MM. Marc Massion et François Fortassin, secrétaires du Sénat, de bien vouloir surveiller les opérations de vote et de dépouillement.

Il va être procédé au tirage au sort de quatre scrutateurs titulaires et de deux scrutateurs suppléants qui se répartiront entre deux tables pour opérer le dépouillement des deux scrutins.

(Le tirage au sort a lieu.)

M. le président. Le sort a désigné :

Scrutateurs titulaires : MM. Alain Fauconnier, Jean-Claude Frécon, Joël Bourdin et Pierre Bordier.

Scrutateurs suppléants : MM. Jean-Etienne Antoinette et Gérard Miquel.

Je déclare ouverts les scrutins pour l’élection de six membres titulaires et de six membres suppléants de l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe et de l’assemblée de l’Union de l’Europe occidentale.

Je vous indique que, pour être valables, les bulletins de vote ne doivent pas comporter, pour chacun des scrutins, plus de six noms, sous peine de nullité.

Les scrutins seront clos dans une heure.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

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Article 3 (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi en faveur des revenus du travail
Articles additionnels après l'article 3

Revenus du travail

Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi déclaré d'urgence

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence, en faveur des revenus du travail (n° 502, 2007-2008 ; nos 43, 48).

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’amendement n° 54 tendant à insérer un article additionnel après l’article 3.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi en faveur des revenus du travail
Article additionnel avant l'article 4

Articles additionnels après l'article 3

M. le président. L’amendement n° 54, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle, Le Texier, Printz, Alquier, Bricq, Chevé et Demontès, MM. Desessard, Godefroy et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article L. 3231-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le salaire minimum de croissance s'applique de manière uniforme sur l'ensemble du territoire national, dans toutes les branches professionnelles et les professions, quel que soit le mode de rémunération, sans condition d'âge, à l'ensemble des salariés dont les rémunérations sont les plus faibles. »

La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.

Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Cet amendement de précision répond au principe de précaution. Les intentions des représentants du patronat depuis plus de vingt ans sont connues : annualiser, régionaliser, moduler le SMIC par tranches d’âge et par branches.

Annualiser, nous en avons déjà les prémices dans ce projet de loi.

Régionaliser, c’est l’idée selon laquelle le coût de la vie n’est pas le même à la campagne et en Île-de-France. Il est vrai que le coût du logement n’est pas le même, mais celui du transport peut être plus élevé en raison de l’absence de transports en commun.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Gouvernement, contre l’avis du patronat, accepte le principe du chèque transport. Si le coût de la vie n’est pas le même a priori, une analyse plus fine montre que ce sont en réalité les postes budgétaires qui ne sont pas au même niveau.

Il n’y a donc pas lieu de différencier le coût du travail, selon la terminologie patronale, en fonction de préjugés erronés.

Moduler par branches, nous en avons déjà l’exemple avec le SMIC hôtelier. Cela n’a pas empêché vos gouvernements d’offrir au patronat de cette branche, sous prétexte de compensation du taux de TVA, 700 millions d’euros, ce qui n’a diminué en rien le travail illégal et n’a provoqué aucune augmentation de rémunération. Cet exemple est éclairant, même si d’autres branches appliquent des procédés analogues.

Quant au SMIC par tranche d’âge, nous connaissons déjà les effets explosifs du SMIC jeune et du contrat jeune. Mais nous craignons de voir apparaître bientôt un SMIC senior après l’échec du CDD senior. Que deviendront notamment les chômeurs âgés en fin de droits qui ne seront plus dispensés de recherche d’emploi ?

Aussi, nous tenons à dire avec la plus grande fermeté que nous sommes contre tout démembrement du SMIC, qui doit demeurer un socle salarial inamovible.

Nous rappelons simplement l’engagement de notre nouveau président du Sénat, Gérard Larcher, pour la mise au niveau du SMIC des minima conventionnels.

M. le président. C’était dans une vie antérieure ! (Sourires.)

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Debré, rapporteur de la commission des affaires sociales. Cet amendement est présenté comme un amendement de précision, mais on ne voit pas très bien quelle précision il apporte. En effet, tous les salariés bénéficient d’une rémunération au moins égale au SMIC, en tous points du territoire national, quelles que soient leurs professions.

M. Guy Fischer. Mais non ! Que faites-vous du temps partiel ?

Mme Isabelle Debré, rapporteur. Le SMIC est un taux horaire, ce qui n’a rien à voir avec le temps partiel, monsieur Fischer !

Cet amendement ne nous a pas paru utile. L’avis est donc défavorable.

M. Guy Fischer. C’est un peu facile comme réponse !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l'emploi. Avis défavorable.

Par ailleurs, sur la question de l’annualisation, Xavier Bertrand a été très clair dans sa réponse.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote.

M. Guy Fischer. Mme Jarraud-Vergnolle a entièrement raison d’avoir présenté cet amendement. J’ai beaucoup insisté, hier, sur la mort annoncée du SMIC.

Quelles que soient les protestations de la majorité, on y arrive, de fait : ramené au contexte européen, le SMIC n’est-il pas considéré comme trop élevé ? En termes de salaire minimum, d’aucuns lui préfèreraient volontiers une référence moins contraignante, voire plus faible.

Actuellement, le salaire minimum, relativement élevé, est complété par une multiplicité des prestations dont la complexité et le reprofilage selon le revenu d’activités aboutissent à une absence de visibilité : c’est vous qui le dites.

Pour l’avenir, il m’apparaît absolument nécessaire de définir dès aujourd’hui un véritable salaire minimum. Quelles seront les nouvelles références ? Le salaire minimum, plus le RSA ? C’est l’un des points d’interrogation.

Le SMIC senior fait l’objet d’un procès d’intention. Encore faut-il penser à toutes les personnes qui, compte tenu de leur âge, ne pourront pas retrouver un emploi.

Notre crainte, nous ne cesserons de le dire, c’est que la référence salariale soit le RSA, c’est-à-dire entre 500 et 800 euros, ce qui ne pourrait que continuer à nourrir une précarité galopante.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)

M. le président. L'amendement n° 67 rectifié, présenté par Mmes Kammermann, Procaccia et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article 19 de l'ordonnance n° 67-830 du 27 septembre 1967 relative à l'aménagement des conditions du travail en ce qui concerne le régime des conventions collectives, le travail des jeunes et les titres-restaurant, il est inséré un article 19-1 ainsi rédigé :

« Art. 19-1. - Les associations caritatives reconnues d'utilité publique fournissant une aide alimentaire sont autorisées à percevoir des dons sous forme de titres restaurant de la part des salariés. »

La parole est à Mme Catherine Procaccia.

Mme Catherine Procaccia. Cet amendement vise à apporter une sécurité juridique à un certain nombre d’associations comme Action contre la Faim, les Restos du Cœur, la Croix-Rouge, la Fondation de l’Abbé Pierre, dans l’utilisation et le remboursement des titres-restaurant.

En effet, un certain nombre de salariés souhaitent donner une part de leurs titres-restaurant à des associations caritatives. Ils le faisaient, mais, juridiquement, il est nécessaire de conforter cette situation. Le présent amendement tend donc à donner le droit légal aux associations caritatives de percevoir des dons sous forme de titres-restaurant.

À l’approche de l’hiver, j’ose insister sur l’intérêt de cette disposition.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Isabelle Debré, rapporteur. Cet amendement a pour objet d’autoriser les associations caritatives qui reçoivent des dons sous forme de titres-restaurant à en obtenir le remboursement auprès de la Centrale de règlement des titres. Cette disposition donnerait, si elle était adoptée, une base légale incontestable à une pratique qui s’est développée en marge des textes.

La mesure proposée est bienvenue. Elle faciliterait la vie des associations caritatives.

C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Cet amendement va nous permettre de pérenniser une dérogation aujourd’hui accordée à des associations caritatives en lui donnant une base légale.

L’avis du Gouvernement est favorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 67 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 3.