Article 51
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Article 52

Article additionnel après l'article 51

M. le président. L'amendement n° II-302, présenté par M. Bel, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Après l'article 51, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Après l'article 1401 du code général des impôts, insérer un article ainsi rédigé :

« Art. ... - À compter de 2010, la taxe foncière sur les propriétés non bâties est acquittée par l'Office national des forêts au titre des terrains mentionnés aux articles L. 121-2 et L. 121-3 du code forestier. »

II. - Les conséquences financières pour l'Office national des forêts résultant du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Gérard Miquel.

M. Gérard Miquel. Cet amendement a pour objet de soumettre l’Office national des forêts au paiement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties au titre des terrains non bâtis de l’État dont il a la charge.

En effet, depuis sa création en 1966, l’Office national des forêts s’acquitte du paiement de cette taxe. Cependant, cette année, l’établissement public a pris la décision de ne pas la payer et n’a donc pas inscrit cette dépense à son budget 2009. Il a, par ailleurs, exprimé son intention de ne plus payer cet impôt à l’avenir.

Le produit de cet impôt pour les forêts domaniales est estimé à 13,8 millions d’euros en 2008. Par conséquent, sa disparition entraînerait une perte financière importante pour les communes forestières.

Nous nous posons donc une première question : alors qu’aucune modification législative ou réglementaire n’est intervenue, sur quelles motivations se base la décision de l’ONF de ne plus paver l’impôt ?

L’Office perçoit, en vertu de l’article L. 123-1 du code forestier, les produits des forêts domaniales de l’État. Par conséquent, en tant qu’usufruitier, il est normalement soumis au paiement de ladite taxe.

Si l’Office devait maintenir sa position, l’État devrait alors s’engager à compenser, à due concurrence, cette perte financière pour les collectivités territoriales. Celles-ci n’ont pas à assumer ni à subir les conséquences, bien que lourdes et brutales pour l’ONF, des mesures prises par l’État dans le cadre de la révision générale des politiques publiques.

Le service public forestier national doit, bien entendu, être sauvegardé et, à ce titre, l’ONF a assurément un rôle à jouer. Si le Gouvernement entend remettre en cause cet organisme, cette décision ne doit en aucune manière se faire au détriment des collectivités territoriales et de la taxe foncière qu’elles perçoivent.

Par souci de ne pas tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution, nous avons dû prévoir que notre amendement ne s’appliquerait qu’à compter de 2010. Donc, vous l’aurez compris, cette proposition est un amendement d’appel afin d’alerter le Gouvernement sur les craintes des communes concernées et d’obtenir une réponse rapide de la part de Mme la ministre.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Comme vous l’imaginez, monsieur le président – parce que je pense que cette situation ne vous est pas complètement indifférente !– la préoccupation exprimée par notre collègue Gérard Miquel est aussi la nôtre. Il faut aller bien au-delà d’un amendement d’appel.

Sur le fond, je ne peux que souscrire mais, si l’on adoptait cet amendement, le dispositif ne s’appliquerait qu’en 2010. Or, il vaudrait mieux qu’il entre en application dès 2009.

Je crois savoir que mon excellent collègue député Charles de Courson, législateur fécond, a d’ores et déjà déposé à l’Assemblée nationale un amendement dont je me suis laissé dire qu’il incorporait une rectification puisée à bonne source. Tout cela est de bon augure.

Nous allons suivre les choses de près. Je vous suggère d’élaborer de concert une version qui pourra être incluse dans le collectif budgétaire dont la discussion est prévue dans quelques jours. Il s’agit de faire en sorte que l’Office national des forêts cesse de se faire justice à lui-même et de traiter les communes dans lesquelles il est implanté comme de simples manants n’ayant pas voix au chapitre !... Rassurez-vous : ce n’est qu’une façon de parler. Cela va de soi, les partenaires que nous sommes apprécient beaucoup l’Office national des forêts.

Pour redevenir tout à fait sérieux, je dirai que vous avez raison de lancer cet appel. Au demeurant, j’ai reçu tout récemment une lettre du nouveau président de la Fédération nationale des communes forestières de France sur ce sujet. Sa demande est tout à fait fondée et il nous appartient de faire en sorte que la continuité soit respectée. Nous ne poursuivons pas d’autre  but.

Je pense que la bonne formule serait que, après avoir entendu Mme le ministre, vous retiriez votre amendement, mon cher collègue, sous réserve de l’engagement que nous y revenions lors de la discussion du collectif budgétaire pour 2008.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement?

Mme Christine Lagarde, ministre. Mesdames et messieurs les sénateurs –  pour un peu, j’allais dire, mesdames et messieurs les forestiers puisque c’est une véritable coalition d’intérêts qui s’exprime et que je respecte infiniment ! (Sourires.) –, je vous propose de travailler avec mes services, puisque c’est, si j’ai bien compris, ce que vous proposez, monsieur le rapporteur général. Nous procéderions ensemble au réexamen de la situation des communes forestières, devenue difficile depuis que l’Office national des forêts a infléchi son attitude.

Vous souhaiteriez que cette disposition puisse être votée à l’occasion du projet de loi de finances rectificative pour 2008 en vue d’une entrée en vigueur en 2009. Cette invitation à travailler de concert, je l’accepte volontiers.

M. le président. Nous nous en réjouissons !

La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote.

M. Yann Gaillard. Permettez-moi de rappeler un point d’histoire, madame le ministre. Toute cette affaire est venue d’une application brutale de la révision générale des politiques publiques à l’ONF. Celui-ci a été soumis à un traitement très difficile : non seulement il a la chance de déménager à Compiègne, ce qui, ne vous en déplaise, monsieur le rapporteur général, n’est peut-être pas du goût de tous ses membres,…

M. Philippe Marini, rapporteur général. Seulement son siège l !

M. Yann Gaillard. … mais voilà qu’en plus, dans le cadre de la RGPP, il se voit retirer la mise à disposition gratuite des maisons forestières et réclamer le paiement de charges sociales auparavant réglées par l’État. Et ainsi de suite ! Tout cela lui est très pénible !

Le conseil d’administration de l’Office national des forêts a eu une réaction peut-être un peu rapide consistant à ne pas acquitter un impôt qui était payé jusque-là sans que personne n’en parle jamais.

En tant qu’ancien président de la Fédération nationale des communes forestières, j’ai si peu entendu parler de cet impôt que je me suis pris à douter de la réalité de son existence ! Après vérification, il est apparu qu’il existait bel et bien, et que l’Office le payait les yeux fermés. Mais, dans les circonstances actuelles, pour se sauver, pour « grappiller quelques sous »,…

M. Philippe Marini, rapporteur général. Beaucoup de sous !

M. Yann Gaillard. … il a décidé de ne plus le payer.

Voilà exactement ce qui s’est passé, et c’est très regrettable, car il y avait jusqu’à présent une entente parfaite entre les communes forestières et l’Office national des forêts, donc l’État.

M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel.

M. Gérard Miquel. La décision de l’ONF est en effet regrettable, d’autant qu’elle ne s’appuie sur aucun texte législatif ou réglementaire.

Je remercie donc M. le rapporteur général de sa compréhension, ne doutant pas qu’avec son soutien nous aboutirons à un résultat positif. Je remercie également Mme la ministre, par avance, de nous aider dans cette démarche.

M. le président. L'amendement n° II-302 est retiré.

Article additionnel après l'article 51
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Articles additionnels après l'article 52 (début)

Article 52

I. – Après l’article 1395 F du code général des impôts, il est inséré un article 1395 G ainsi rédigé :

« Art. 1395 G. – I. – Les conseils municipaux et les organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent, par une délibération prise dans les conditions prévues au I de l’article 1639 A bis, exonérer de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, pendant une durée de cinq ans, les propriétés non bâties classées dans les première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième, sixième, huitième et neuvième catégories définies à l’article 18 de l’instruction ministérielle du 31 décembre 1908 lorsqu’elles sont exploitées selon le mode de production biologique prévu au règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil, du 28 juin 2007, relatif à la production biologique et à l’étiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) n° 2092/91.

« L’exonération est applicable à compter de l’année qui suit celle au titre de laquelle une attestation d’engagement d’exploitation suivant le mode de production biologique a été délivrée pour la première fois par un organisme certificateur agréé. Elle cesse définitivement de s’appliquer à compter du 1er janvier de l’année qui suit celle au cours de laquelle les parcelles ne sont plus exploitées selon le mode de production biologique.

« La délibération porte sur la totalité de la part revenant à chaque commune ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.

« II. – Le I ne s’applique pas aux propriétés non bâties qui bénéficient des exonérations totales prévues aux articles 1394 B, aux 1° et 1° bis de l’article 1395, au II des articles 1395 B et 1395 D, aux articles 1395 E et 1395 F ainsi qu’à l’article 1649.

« L’exonération prévue au I s’applique après les exonérations partielles prévues à l’article 1394 B bis, au 1° ter de l’article 1395 et au I de l’article 1395 D.

« Lorsque les conditions requises pour bénéficier de l’exonération prévue à l’article 1394 C et celles prévues au I du présent article sont remplies, l’exonération prévue à l’article 1394 C est applicable. Toutefois, lorsque la délibération prise sur le fondement de ce dernier article est rapportée, le bénéfice des dispositions du I est accordé pour la période restant à courir à compter de l’année au titre de laquelle l’exonération prévue à l’article 1394 C cesse de s’appliquer.

« Lorsque les conditions requises pour bénéficier de l’exonération prévue à l’article 1395 A et celles prévues au I du présent article sont remplies et que la durée d’exonération applicable conformément à l’article 1395 A est inférieure ou égale à cinq ans, l’exonération prévue au I du présent article est applicable. Toutefois, le bénéfice des dispositions du 1395 A est accordé à l’expiration de la période d’application de l’exonération prévue au même I pour la période restant à courir.

« Lorsque les conditions requises pour bénéficier de l’exonération prévue à l’article 1395 A et celles prévues au I du présent article sont remplies et que la durée d’exonération applicable conformément à l’article 1395 A est supérieure à cinq ans, l’exonération prévue à l’article 1395 A est applicable. Toutefois, le bénéfice des dispositions du I du présent article est accordé à l’expiration de la période d’application de l’exonération prévue à l’article 1395 A pour la période restant à courir.

« III. – Pour bénéficier de l’exonération, le propriétaire ou, si les propriétés concernées sont données à bail, le preneur adresse au service des impôts, avant le 1er janvier de chaque année, la liste des parcelles concernées accompagnée du document justificatif annuel délivré par l’organisme certificateur agréé mentionné au deuxième alinéa du I, conformément à l’article 29 du règlement (CE) n° 834/2007 du Conseil, du 28 juin 2007, précité.

« IV. – Le bénéfice de l’exonération prévue au I est subordonné au respect du règlement (CE) n° 1535/2007 de la Commission, du 20 décembre 2007, concernant l’application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de minimis dans le secteur de la production de produits agricoles. »

II. – Au a du 2 du II de l’article 1639 A quater du même code, après la référence : « 1395 B », il est inséré la référence : «, 1395 G ».

III. – L’article L. 415-3 du code rural est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le montant de l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties prévu à l’article 1395 G du code général des impôts doit, lorsque les propriétés concernées sont données à bail, être intégralement rétrocédé aux preneurs des propriétés considérées. À cet effet, le bailleur impute cet avantage sur le montant de la taxe qu’il met à la charge du preneur en application du troisième alinéa. Lorsque ce montant est inférieur à l’avantage, le bailleur déduit du montant du fermage dû par le preneur, le montant qui n’a pu être imputé. »

IV. – Le présent article s’applique à compter des impositions établies au titre de 2010 pour les parcelles qui sont exploitées selon le mode de production biologique à compter du 1er janvier 2009. – (Adopté.)

Article 52
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2009
Articles additionnels après l'article 52 (interruption de la discussion)

Articles additionnels après l'article 52

M. le président. L'amendement n° II-102 rectifié, présenté par MM. Milhau, Tropeano, Vall et Miquel, est ainsi libellé :

Après l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - Dans le deuxième alinéa de l'article 1396 du code général des impôts, les mots : « de 0,50 euro, 1 euro, 1,50 euro, 2 euros, 2,50 euros ou 3 euros » sont remplacés par les mots : « comprise entre 0 et 3 euros ».

II. - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La parole est à M. Jean Milhau.

M. Jean Milhau. Cet amendement a pour objet de permettre l’application, dans des conditions que je dirais « raisonnables », de l’article 1396 du code général des impôts.

Cet article ouvre la possibilité à celles des communes dotées d’un document d'urbanisme qui le souhaitent de majorer la valeur locative des terrains constructibles, terrains qui se trouvent ainsi fort justement surtaxés.

Cependant, le montant de la majoration ne peut être fixé que dans une fourchette allant de 0,50 centime d’euro à 3 euros par mètre carré. Or, même au tarif le plus bas et malgré l’abattement portant sur 1 000 mètres carrés que prévoit ce même article, on arrive à des taxes d’un montant aberrant, notamment en milieu rural, ce qui dissuade les communes de mettre en place la mesure alors qu’il ne serait que justice de l’appliquer du fait de l’augmentation de la valeur des terrains devenus constructibles.

Cela les dissuade même souvent de faire classer en zones constructibles des terrains dont ce pourrait ne pas toujours être la vocation !

C'est la raison pour laquelle nous souhaitons élargir vers le bas la fourchette des majorations possibles en prévoyant qu’elle aille de 0 à 3 euros.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement vise, tout à fait légitimement, à régler la situation à laquelle sont confrontées des communes, notamment des communes rurales, dans l’impossibilité de majorer la valeur locative des terrains constructibles du fait du seuil minimal actuellement prévu.

La mesure proposée est une faculté pour les collectivités. Elle n’aurait pas d’incidence sur les finances de l’État. Elle est donc conforme aux principes de la décentralisation.

En outre, les majorations de la valeur des terrains constructibles constituent des incitations à mettre sur le marché ces terrains ; leur plus large application pourrait donc permettre, notamment, d’aller à la rencontre des besoins en matière de création de logements.

Pour toutes ces raisons, la commission des finances a émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

Le régime que nous avons mis en place est fondé sur le principe selon lequel la valeur locative des terrains situés en zones urbaines peut, sur délibération du conseil municipal, être majorée d’une valeur forfaitaire qui varie entre 0,50 centime d’euro et 3 euros par mètre carré, la somme de 0,50 centime constituant un plancher. La majoration est en effet destinée à accélérer les mutations en engageant les propriétaires de terrains constructibles à céder ceux-ci.

Votre amendement, monsieur Milhau, qui a pour objet d’éliminer le plancher en plaçant le seuil à 0 euro – d’où la possibilité de majorations très faibles – tout en maintenant le plafond, ne nous paraît pas opportun, car il ôterait à la mesure son caractère incitatif.

M. le président. La parole est à M. Jean Milhau, pour explication de vote.

M. Jean Milhau. Ce n’est pas parce que le plancher sera abaissé que les taxes sur le foncier non bâti s’en trouveront tellement diminuées !

Pour un terrain de 5 000 mètres carrés, superficie qui n’a rien de rare en zone rurale, la surtaxe s’applique, puisqu’il y a un abattement de 1 000 mètres carrés, sur 4 000 mètres carrés ; avec une majoration fixée à la valeur forfaitaire de 0,50 centime d’euro, on aboutit à une augmentation de la valeur locative de 2 000 euros. Or, dans les communes rurales où la valeur du foncier non bâti est très faible, les taux de la taxe qui s’y applique sont souvent très élevés : ils atteignent couramment 60 %, 70 % ou 80 %. Au taux de 60 %, on arrive déjà à 1200 euros par an de taxe pour un tel terrain, alors qu’à l’heure actuelle son prix au mètre carré s’établit souvent à 30 euros.

C’est dire que cette disposition est inapplicable, comme l’a constaté, après simulations, le conseil municipal auquel j’appartiens, qui voulait la mettre en œuvre précisément pour que des terrains se libèrent.

C’est pourquoi, je le répète, je souhaite que l’on puisse appliquer des valeurs inférieures à 0,50 centime d’euro par mètre carré.

M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel.

M. Gérard Miquel. Il s’agit d’un amendement de bon sens, car les situations sont très diverses. Si j’interviens, madame la ministre, ce n’est pas parce que je suis un élu du Lot comme mon collègue et ami Jean Milhau, mais parce que cet amendement correspond vraiment à un besoin des territoires ruraux.

Ainsi, dans notre département, les communes mettent en place des plans locaux d’urbanisme et classent en zones constructibles des terrains, mais elles sont dans l’impossibilité d’appliquer la majoration de la valeur locative du fait de ce que vient d’expliquer M. Milhau : une majoration de 0,50 centime d’euros, cela conduit à faire payer des sommes très importantes aux propriétaires pour toute la durée pendant laquelle ils gardent leurs terrains, en général de faible valeur. Ce n’est pas supportable eux !

En adoptant l’amendement de M. Milhau, on ne priverait pas les communes comme celles de mon département et des départements ruraux en général de la faculté de mettre en œuvre cette disposition, laquelle ne perdrait pas son caractère d’incitation à mettre sur le marché des terrains pour la construction, mais on leur permettrait de l’appliquer de façon raisonnable, les prix des terrains n’y étant, bien sûr, pas ceux de la région parisienne.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Christine Lagarde, ministre. J’ai écouté attentivement les arguments qui viennent d’être développés, en particulier par M. Milhau, et j’y ai été sensible.

Comme le dispositif n’est pas prévu pour les terrains situés en région parisienne et que, bien entendu, le Gouvernement souhaite faciliter les délibérations des conseils municipaux, dans le cadre de leurs prérogatives et à l’aune des spécificités de leur territoire, je cède devant vos arguments, mesdames, messieurs les sénateurs, et, en définitive, je m’en remets à la sagesse du Sénat.

M. Philippe Marini, rapporteur général. Très bien !

Mme Christine Lagarde, ministre. Ce que nous souhaitons absolument, c’est limiter dans toute la mesure du possible les impositions sur les cessions de foncier et que ces dernières se déroulent avec le plus d’efficacité et de rapidité possible, dans les conditions les plus légères tant pour le cédant que pour le cessionnaire.

En conséquence, je lève le gage, monsieur le président.

M. André Dulait. Très bien !

M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° II-102 rectifié bis.

Je le mets aux voix.

(L'amendement est adopté à l’unanimité.)

M. le président. Belle unanimité, qui est le signe de la sagesse ! (Sourires.)

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances, après l'article 52.

L'amendement n° II-368, présenté par Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :

Après l'article 52, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la première phrase du septième aliéna du 1 de l'article 1584 du code général des impôts, est insérée une phrase ainsi rédigée :

« Le conseil municipal peut, sur délibération, augmenter le taux de cette taxe jusqu'à 2 %. »

La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Le taux de la taxe additionnelle aux droits d'enregistrement ou à la taxe de publicité foncière exigibles sur les mutations à titre onéreux et perçues par les communes de plus de 5 000 habitants est aujourd'hui fixé à 1,2 %. Le conseil municipal peut déjà, sur délibération et dans certaines conditions, réduire ce taux jusqu'à 0,5 %.

Cet amendement tend à laisser aux communes la possibilité d’ajuster leur politique fiscale en fonction de la situation locale, en pleine responsabilité. La mesure proposée est donc un outil de régulation grâce auxquels les communes auront toute liberté de choisir si elles en éprouvent le besoin. C’est donc au nom de la responsabilisation des collectivités locales que je défends cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Marini, rapporteur général. En répondant tout à l’heure à M. Milhau, je me référais au principe de décentralisation. Amendement lotois ou amendement bordelais, peu importe, c’est exactement le même raisonnement qui s’applique ici. L’essentiel est en effet de s’adapter aux situations rencontrées.

En l’occurrence, il convient de rappeler que le code général des impôts permet aux communes de réduire le taux de la taxe additionnelle aux droits de mutation jusqu’à 0,5 %, mais rien n’est prévu dans le sens de l’augmentation.

Mme Des Esgaulx, qui vise la situation actuelle des transactions et du marché immobiliers, sollicite l’autorisation pour un conseil municipal de relever le taux de cette taxe additionnelle.

Je considère, pour ma part, que le conseil municipal et le maire ont tous les éléments en main pour prendre une telle décision. S’ils souhaitent compenser un tant soit peu la baisse du marché par le relèvement du taux, il faut les laisser prendre cette responsabilité. Ils sont les mieux placés – en tout cas mieux placés que nous ici, au Palais du Luxembourg – pour savoir comment fonctionne le marché immobilier sur le territoire qui les intéresse directement et dont ils ont la responsabilité.

Nous sommes vraiment là dans la ligne du principe de décentralisation. Nous avons eu ce même débat avec Éric Woerth, quoique dans une vision plus centralisatrice, mais présentement, en conscience et après discussion au sein de la commission des finances, je dois vous dire, madame la ministre, que nous sommes favorables à l’amendement qui vient d’être présenté.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christine Lagarde, ministre. Le Gouvernement applique la même logique que celle que j’ai exposée tout à l’heure et qui m’a amenée à changer d’avis pour m’en remettre à la sagesse du Sénat.

Nous souhaitons donner un signal très clair à nos compatriotes pour encourager les transactions, ce qui passe par la diminution de la pression fiscale et la stabilité des prélèvements obligatoires.

Dans ce contexte, avec tout le respect que j’ai pour le principe de décentralisation que vous évoquiez, monsieur le rapporteur général, et qui me paraît un bon principe – en effet, on n’est jamais aussi bien informé que lorsque l’on est sur le terrain – je tiens à invoquer un autre principe, celui de l’harmonisation des messages.

Or la commission des finances envoie, en se prononçant en faveur de cet amendement, le message suivant : une collectivité locale dont le budget subit, en raison de la baisse du marché et du nombre de transactions, une diminution du volume des droits de transactions et donc de ses recettes peut se réserver la possibilité – je sais bien qu’il s’agit d’une option – de faire remonter celles-ci en faisant porter le coût sur ses administrés, c'est-à-dire sur nos concitoyens, qui procèdent à des cessions de biens immobiliers.

Personnellement, je ne suis pas sûre que ce soit le bon message ! C’est pourquoi le gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Madame la ministre, je crois que la décentralisation pose un principe de liberté et de responsabilité. Dans un tel contexte, il appartient à chaque maire, à chaque conseil municipal de mesurer les conséquences des décisions qu’il a prises. Il est de sa responsabilité d’augmenter, s’il le souhaite, le taux de la taxe additionnelle aux droits d’enregistrement et il doit pouvoir anticiper les conséquences d’une telle décision. C’est cela aussi la liberté !

La décentralisation permet justement de ne pas prescrire le même taux partout, dans les mêmes conditions, et de laisser chacun assumer pleinement ses responsabilités.

Voilà pourquoi, madame la ministre, nous attachons beaucoup de prix au vote de cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, pour explication de vote.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. La question immobilière n’est pas au cœur de cet amendement. Si elle devait l’être, ce serait simplement pour rappeler que la croissance de l’assiette de ces taxes a occulté, à un moment donné, les problématiques liées à leur taux.

Mais le sujet n’est pas celui-là. Il s’agit en fait de la liberté que devrait avoir chaque conseil municipal d’ajuster au mieux sa fiscalité en tenant compte de certains éléments, et ces éléments vont bien au-delà de ce qui a été évoqué jusqu’à présent. Je pense, par exemple, à l’importance de l’investissement public local dans l’investissement public total. Je pense aux demandes des citoyens en matière de services. Je pense aussi, et peut-être avant tout, à la valeur intrinsèque des travaux publics antérieurement réalisés et à leur impact sur la valorisation des biens échangés.

Pour toutes ces raisons, je maintiens cet amendement.