Sommaire

Présidence de M. Jean-Claude Carle

Secrétaires :

Mmes Michelle Demessine, Odette Herviaux.

1. Procès-verbal

2. Fin de mission d’une sénatrice

3. Communication du Conseil constitutionnel

4. Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi organique

Mises au point au sujet d’un vote

MM. Claude Dilain, le président.

MM. Michel Vergoz, le président.

Article additionnel après l'article 1er

Amendement n° 56 de Mme Éliane Assassi. – Mme Éliane Assassi, MM. Simon Sutour, rapporteur de la commission des lois ; Manuel Valls, ministre de l'intérieur. – Rejet.

Article 1er bis (nouveau) (supprimé)

Amendement n° 57 rectifié de Mme Éliane Assassi. – Mme Éliane Assassi.

Amendement n° 37 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz.

Amendement n° 61 rectifié de M. François Zocchetto. – M. François Zocchetto.

MM. Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre ; Éric Doligé, Jacques Mézard, Mme Hélène Lipietz. MM. Philippe Dallier, Philippe Bas, Mme Éliane Assassi. – Rejet des amendements nos 57 rectifié, 37 et 61 rectifié.

L’article demeure supprimé.

Article 1er ter A. – Rejet.

Article 1er ter

Amendement n° 10 de M. Alain Fouché. – MM. Rémy Pointereau, Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre ; M. René-Paul Savary.

Rappels au règlement

MM. François Fortassin, le président.

Article 1er ter (suite)

Amendement n° 10 de M. Alain Fouché (suite). – M. Éric Doligé.

Rappels au règlement (suite)

MM. François-Noël Buffet, le président.

Article 1er ter (suite)

Amendement n° 10 de M. Alain Fouché (suite). – Mme Éliane Assassi, M. Jean-François Husson.

Rappels au règlement (suite)

MM. Alain Anziani, David Assouline, Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.

Article 1er ter (suite)

Amendement n° 10 de M. Alain Fouché (suite). – M. Philippe Dallier.

Rappels au règlement (suite)

MM. Jean-Pierre Raffarin, Philippe Bas, Jean-Jacques Mirassou, Mme Corinne Bouchoux.

Article 1er ter (suite)

Amendement n° 10 de M. Alain Fouché (suite). – Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Amendement n° 47 de M. Jacques Mézard. – Devenu sans objet.

Amendement n° 18 rectifié ter de M. Marc Daunis. – Devenu sans objet.

Amendement n° 48 de M. Jacques Mézard. – Devenu sans objet.

Amendement n° 55 de Mme Éliane Assassi. – Devenu sans objet.

Article additionnel après l'article 1er ter

Amendement n° 54 de Mme Éliane Assassi. – Mme Éliane Assassi, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre. – Rejet.

Article 1er quater (nouveau)

Amendement n° 49 de M. Jacques Mézard. – MM. Jacques Mézard, Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre. – Adoption de l'amendement supprimant l'article.

Articles additionnels après l'article 1er quater

Amendements nos 22 rectifié à 25 rectifié de M. Éric Doligé. – M. Éric Doligé.

Amendement n° 62 rectifié de M. François Zocchetto. – M. Yves Détraigne.

MM. Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre ; Mme Sophie Primas, M. Éric Doligé. – Retrait des amendements nos 22 rectifié à 25 rectifié.

Mme Hélène Lipietz, MM. Philippe Dallier, François Zocchetto. – Retrait de l’amendement n° 62 rectifié.

Mise au point au sujet d’un vote

MM. Jean-Pierre Sueur, le président.

Article 2

Amendement n° 26 rectifié de M. Éric Doligé. – M. Éric Doligé. – Devenu sans objet.

Adoption de l'article.

Article 2 bis (nouveau). – Adoption

Article 3

Amendement n° 51 de M. Jacques Mézard. – MM. Jacques Mézard, Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre ; Roger Karoutchi. – Adoption.

Amendements nos 31 rectifié et 32 rectifié de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre. – Retrait des deux amendements.

Mise au point au sujet de votes

Mme Catherine Tasca, M. le président.

Article 3 (suite)

Amendements identiques nos 50 de M. Jacques Mézard, 60 de M. Philippe Bas et 65 de M. François Zocchetto. – MM. Jacques Mézard, Philippe Bas, François Zocchetto, Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre. – Adoption, par scrutin public, des trois amendements.

Adoption, par scrutin public, de l'article.

Mises au point au sujet de votes

MM. François-Noël Buffet, Philippe Adnot, le président.

Article 3 bis (nouveau). – Adoption

Article additionnel après l'article 3 bis

Amendement n° 30 de Mme Virginie Klès. – Mme Virginie Klès, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre. – Rejet.

Article 3 ter A (nouveau)

Amendement n° 35 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz.

Amendement n° 42 rectifié de M. Jacques Mézard. – M. Jacques Mézard.

Amendement n° 64 rectifié de M. François Zocchetto. – M. François Zocchetto.

MM. Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre ; MM. René-Paul Savary, Éric Doligé. – Adoption de l'amendement n° 35 rédigeant l'article, les amendements nos 42 rectifié et 64 rectifié devenant sans objet

Article additionnel après l'article 3 ter A

Amendement n° 38 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre. – Retrait.

Article 3 ter (nouveau)

Amendement n° 70 rectifié de M. Georges Patient. – Mme Karine Claireaux, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre ; Jean-Jacques Hyest. – Rejet.

Adoption de l'article.

Mise au point au sujet de votes

Mme Claudine Lepage, M. le président.

Article 4

Amendements nos 33 et 34 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre. – Rejet des deux amendements.

Adoption de l'article.

Intitulé du projet de loi organique

Amendement n° 52 de M. Jacques Mézard. – MM. Jacques Mézard, Simon Sutour, rapporteur ; Manuel Valls, ministre. – Adoption de l’amendement modifiant l’intitulé.

Vote sur l'ensemble

Mme Éliane Assassi, MM. Philippe Bas, Henri de Raincourt, Philippe Adnot, Jean-Claude Lenoir, Nicolas Alfonsi, Vincent Delahaye, Mme Hélène Lipietz, MM. Éric Doligé, David Assouline, René-Paul Savary, François Rebsamen, Jean-Yves Leconte.

Mise au point au sujet de votes

MM. Alain Anziani, le président.

Vote sur l'ensemble (suite)

MM. Richard Tuheiava, Michel Vergoz.

M. Manuel Valls, ministre.

Mise au point au sujet de votes

MM. Jacques-Bernard Magner, le président.

5. Communication de M. le président du Sénat

Suspension et reprise de la séance

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Raffarin

6. Questions d'actualité au Gouvernement

impôts - fiscalité

MM. Éric Bocquet, Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances.

sécurité (effectifs de police)

MM. Christian Bourquin, Alain Vidalies, ministre chargé des relations avec le Parlement.

retraites

M. Henri de Raincourt, Mme Michèle Delaunay, ministre chargée des personnes âgées et de l’autonomie.

tva artisans

MM. Henri Tandonnet, Bernard Cazeneuve, ministre chargé du budget.

impôt sur le revenu

MM. François Rebsamen, Bernard Cazeneuve, ministre chargé du budget.

aides et subventions accordées aux associations

M. André Gattolin, Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative.

réforme pénale

M. Pierre Charon, Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice.

formation des personnes inscrites à pôle emploi

Mme Christiane Demontès, M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

rentrée scolaire

MM. Jacques-Bernard Magner, Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale.

pression fiscale

MM. Francis Delattre, Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances

Suspension et reprise de la séance

7. Mise au point au sujet d'un vote

MM. Jacky Le Menn, le président.

8. Droits et protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques. – Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Discussion générale : M. Jacky Le Menn, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l'autonomie.

Mmes Laurence Cohen, Muguette Dini, MM. Claude Domeizel, Marc Laménie, Jean Desessard.

Clôture de la discussion générale.

Texte élaboré par la commission mixte paritaire

Vote sur l’ensemble

M. René-Paul Savary.

Adoption de la proposition de loi.

9. Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi organique

Vote sur l’ensemble (suite)

MM. Christian Bourquin, Raymond Vall, François Fortassin, Marc Laménie, Mme Sophie Primas, MM. Jacques Mézard, Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois ; Albéric de Montgolfier.

Adoption, par scrutin public, du projet de loi organique.

10. Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d'un projet de loi

Articles additionnels avant l'article 1er

Amendement n° 18 rectifié de M. François Zocchetto. – MM. Yves Détraigne, Simon Sutour, rapporteur de la commission des lois ; Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement ; Éric Doligé. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 7 rectifié de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz.

Amendement n° 10 de M. Jacques Mézard. – M. Jacques Mézard.

MM. Alain Vidalies, ministre délégué ; Philippe Bas, Raymond Vall, François Rebsamen, René-Paul Savary, Jacques Mézard. – Rejet des amendements nos 7 rectifié et 10.

Amendement n° 11 de M. Jacques Mézard. – MM. Jacques Mézard, Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué. – Rejet.

Amendement n° 5 rectifié de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué. – Rejet.

Amendement n° 8 rectifié de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué. – Rejet.

Amendement n° 9 rectifié de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué. – Rejet.

Amendement n° 12 de M. Jacques Mézard. – MM. Jacques Mézard, Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué. - Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 13 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. Jacques Mézard, Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué ; François Rebsamen, Yves Détraigne, Marc Laménie. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendement n° 14 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. Jacques Mézard, Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué ; Philippe Bas. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.

Amendements identiques nos 6 rectifié de Mme Hélène Lipietz et 15 de M. Jacques Mézard. – Mme Hélène Lipietz, MM. Jacques Mézard, Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué ; Éric Doligé, René-Paul Savary. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.

Article 1er

Amendement n° 17 de Mme Éliane Assassi. – Mme Éliane Assassi.

Amendement n° 3 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz.

MM. Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué. – Rejet des amendements nos 17 et 3.

Amendement n° 1 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué. – Rejet.

Amendement n° 2 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, MM. Simon Sutour, rapporteur. – Retrait.

Adoption de l'article.

Articles 1er bis (nouveau), 2 et 2 bis (nouveau). – Adoption

Article 3

Amendement n° 4 de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz, MM. Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué. – Rejet.

Adoption de l'article.

Intitulé du projet de loi

Amendement n° 16 de M. Jacques Mézard. – MM. Jacques Mézard, Simon Sutour, rapporteur ; Alain Vidalies, ministre délégué. – Rejet.

Vote sur l’ensemble

Mme Hélène Lipietz.

Adoption du projet de loi.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois.

11. Clôture de la session extraordinaire

12. Ordre du jour

compte rendu intégral

Présidence de M. Jean-Claude Carle

vice-président

Secrétaires :

Mme Michelle Demessine,

Mme Odette Herviaux.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Fin de mission d’une sénatrice

M. le président. Par lettre en date du 17 septembre, M. le Premier ministre a annoncé la fin, à compter du 19 septembre 2013, de la mission temporaire sur les améliorations en faveur de l’accès aux soins des personnes en situation de précarité confiée à Mme Aline Archimbaud, sénatrice de la Seine-Saint-Denis, auprès de Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, dans le cadre des dispositions de l’article L.O. 297 du code électoral.

Acte est donné de cette communication.

3

Communication du Conseil constitutionnel

M. le président. M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 19 septembre 2013, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les articles L. 621-2 et L. 622-1 du code de commerce dans leur rédaction applicable en Polynésie française (Faculté du tribunal de se saisir d’office aux fins d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire) (2013-352 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.

Acte est donné de cette communication.

4

Article 1er (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Article additionnel après l'article 1er

Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur

Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi organique

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur (projet n° 734, résultat des travaux de la commission n° 834, rapport n° 832).

Mises au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à M. Claude Dilain.

M. Claude Dilain. Monsieur le président, je souhaiterais faire une mise au point au sujet du scrutin n° 344, qui a eu lieu hier soir : notre collègue Michelle Meunier a été comptabilisée comme votant pour, alors qu’elle voulait voter contre.

M. le président. Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

La parole est à M. Michel Vergoz.

M. Michel Vergoz. Monsieur le président, je souhaite faire une mise au point : lors des scrutins nos 343 et 344, je souhaitais voter contre.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Discussion des articles (suite)

M. le président. Dans la suite de la discussion des articles, nous en sommes parvenus à un amendement portant article additionnel après l’article 1er.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Article 1er bis (nouveau) (supprimé)

Article additionnel après l'article 1er

M. le président. L'amendement n° 56, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 2411-1 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 18° Conseiller municipal ou conseiller général ou conseiller régional ou parlementaire. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos sera bref puisque j’ai longuement développé le sujet lors de mon intervention dans la discussion générale.

Si nous souscrivons, pour notre part, à la limitation du cumul des mandats, nous considérons qu’il faudrait aborder la question de fond, qui est la mise en place d’un véritable statut de l’élu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Cet amendement d’appel a pour objet d’attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de mettre en place un véritable statut de l’élu, souhait que je ne peux que partager, comme beaucoup de nos collègues.

Je saisis cette occasion pour vous interroger à nouveau, monsieur le ministre, sur les intentions du Gouvernement à cet égard, plus particulièrement sur l’avenir de la proposition de loi de nos collègues Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur, adoptée par le Sénat en janvier dernier.

Je crois savoir – M. le ministre chargé des relations avec le Parlement l’a indiqué hier – qu’un rapporteur a été nommé à l’Assemblée nationale. Nous aimerions avoir la certitude que ce texte sera examiné d’ici à la fin de l’année par nos collègues députés.

Madame la sénatrice, je vous invite à retirer cet amendement. A défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 56.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Article 1er ter A

Article 1er bis (nouveau)

(Supprimé)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 57 rectifié, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l’article L. O. 127 du même code, il est inséré un article L. O. 127-1 ainsi rédigé :

« Art. L. O. 127-1. – Nul ne peut exercer plus de deux mandats parlementaires successifs. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet article vise à lutter contre le cumul dans le temps, qui est un frein important au renouvellement de la vie politique. La classe politique française est en effet marquée par un faible renouvellement de ses élus.

Telle est la raison pour laquelle nous proposons que nul ne puisse exercer plus de deux mandats parlementaires successifs.

M. le président. L'amendement n° 37, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l’article L.O. 127 du même code, il est inséré un article L.O. 127-1 ainsi rédigé :

« Art. L.O. 127-1. – Nul ne peut exercer plus de trois mandats successifs. »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Les Verts proposent que nul ne puisse exercer plus de trois mandats successifs. Je vous renvoie aux explications développées par Mme Assassi sur les raisons d’une telle proposition.

M. le président. L'amendement n° 61 rectifié, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

Après l’article L.O. 127 du code électoral, il est inséré un article L.O. 127-… ainsi rédigé :

« Art. L.O. 127-... – Nul ne peut exercer plus de trois mandats de député successifs. 

« Les personnes appelées à remplacer un député dans les conditions prévues par l’article L.O. 176 sont réputées avoir exercé un mandat au sens de l’alinéa précédent si elles ont exercé ce mandat pendant une durée d’au moins trois ans. »

La parole est à M. François Zocchetto.

M. François Zocchetto. Il s’agit là d’un amendement important que nous avons d’ailleurs évoqué lors de la discussion générale. Puisque le Gouvernement veut, par son projet, assurer le renouvellement de la vie politique, nous proposons de commencer par une disposition très simple, qui paraît une évidence : la limitation des mandats dans le temps. Ainsi, au sein d’une des deux chambres, les parlementaires ne pourraient exercer plus de trois mandats successifs. Pour un sénateur, cela ferait trois fois six ans, soit dix-huit ans. Pour un député, cela ferait trois fois cinq ans, soit quinze ans. Cela paraît raisonnable. D’ailleurs, dans les faits, cela ne toucherait pas énormément de nos collègues.

Je n’ai donc toujours pas compris pourquoi le Gouvernement s’était opposé à l’Assemblée nationale à cette demande de la commission des lois. J’attends par conséquent que M. le ministre nous indique les raisons pour lesquelles il s’oppose au renouvellement de la vie politique française que nous proposons par cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. L’amendement n° 57 rectifié vise à limiter à deux mandats successifs le nombre de mandats comme parlementaire. Les amendements nos 37 et 61 rectifié reprennent le même principe en permettant néanmoins l’exercice de trois mandats successifs.

La limitation du cumul des mandats dans le temps soulève, sur le plan constitutionnel, des réserves qui ont conduit l’Assemblée nationale à supprimer, en séance publique, les dispositions similaires adoptées en commission des lois, contre l’avis du rapporteur et du Gouvernement.

En effet, dans sa décision du 18 novembre 1982, le Conseil constitutionnel a estimé que « la qualité de citoyen ouvre le droit de vote et d’éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n’en sont pas exclus pour une raison d’âge, d’incapacité ou de nationalité ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l’électeur ou l’indépendance de l’élu ».

Il convient de relever que la limitation du cumul des mandats dans le temps crée non pas une incompatibilité qui peut être résolue après l’élection, mais une inéligibilité, qui empêche un élu sortant de déposer sa candidature.

La jurisprudence constitutionnelle est donc plus stricte pour encadrer la liberté du législateur dans la fixation de ces règles.

Il ressort de la décision précitée que, à défaut de l’âge, de l’incapacité ou de la nationalité – ce n’est pas en cause dans le cas présent –, seule une raison tendant à préserver la liberté de l’électeur ou l’indépendance de l’élu peut justifier une inéligibilité.

Or, même si d’aucuns jugent cette évolution souhaitable, elle ne semble pas disposer d’un fondement constitutionnel suffisant, car elle n’est pas véritablement de nature à préserver cette liberté de l’électeur ou l’indépendance de l’élu.

Sur ce point, la récente décision du 10 juillet 2013 du Conseil constitutionnel, lequel a refusé de se prononcer sur une disposition similaire relative aux conseillers consulaires et aux conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger, semble indiquer que la jurisprudence du Conseil constitutionnel n’a pas évolué.

Pour ces raisons, la commission des lois sollicite le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, ce débat a en effet eu lieu à l’Assemblée nationale, où un amendement similaire au vôtre a été adopté par la commission des lois. Ce texte n’a cependant pas été voté en séance publique.

M. le rapporteur vient de donner les arguments constitutionnels expliquant ce rejet.

Je dirai que notre texte est déjà très ambitieux en matière de limitation du cumul des mandats, puisqu’il interdit le cumul d’un mandat exécutif et d’un mandat parlementaire.

Nous considérons que, pour ce qui concerne la limitation des mandats dans le temps, c’est au fond à l’électeur qu’il appartient de faire ce choix.

D’autres discussions pourraient d’ailleurs être ouvertes, et l’exemple américain est de ce point de vue intéressant. Il y a aux États-Unis une limitation dans le temps pour les mandats exécutifs – pour le président, comme c’est également le cas désormais en France, pour le gouverneur d’un État ou le maire d’une ville –, mais pas pour les mandats parlementaires. Cette distinction, d’un point de vue politique – et aussi juridique et constitutionnel –, me paraît particulièrement intéressante. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pas pris cette voie. Nous appelons donc au rejet de ces amendements.

Il s’agit, je le reconnais, d’un débat intéressant, porté par plusieurs groupes. Sans doute correspond-il à un questionnement. Pour des raisons politiques, constitutionnelles, de pratique, nous ne suivrons pas les auteurs de ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote sur l'amendement n° 57 rectifié.

M. Éric Doligé. Je voudrais attirer l’attention sur un élément de différence entre les amendements, élément qui a peut-être échappé à certains. En effet, s’agissant des amendements nos 57 rectifié et 37, le cumul des mandats s’entend au sens de « mandat parlementaire » et vise à la fois les mandats de sénateur et de député. On a droit à deux mandats, sans plus.

M. Zocchetto vise, quant à lui, le cumul des mandats dans la même assemblée, les limitant à trois. Il s’agit là d’un point important.

Monsieur le ministre, vous nous expliquez – je l’ai bien noté – qu’il faut faire confiance aux électeurs quand ils choisissent leurs élus dans le temps ; je constate cependant que, s’agissant du cumul, on est très sélectif dans la confiance accordée aux électeurs !

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Nous avons là la démonstration de tout ce que nous disons depuis longtemps. En effet, on fait confiance à l’électeur quand cela arrange, mais on ne lui fait plus confiance quand cela n’arrange pas! (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Il est évident que la modernisation de la vie publique aurait des incidences sur le renouvellement des mandats.

S’opposer au cumul d’un mandat de sénateur et d’un mandat d’exécutif d’une commune de trente habitants et considérer que pouvoir y siéger pendant un demi-siècle, c’est moderniser la vie publique, la démarche est assez originale ! (Sourires sur les travées de l’UMP.) Mais rien ne nous étonne plus !

À un moment, il faut dire les choses ! Surtout quand on voit le traitement médiatique de ce dossier, y compris sur Public Sénat...

M. Christian Cambon. Eh oui ! C’est scandaleux !

M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour explication de vote.

Mme Hélène Lipietz. On nous a dit, hier, que le Conseil constitutionnel avait changé d’avis s’agissant des lois organiques relatives au Sénat.

La décision du Conseil constitutionnel que viennent de citer M. le ministre et M. le rapporteur est ancienne et reflétait, très certainement, une conception de la Constitution voilà un quart de siècle.

On sait bien que les lois sont faites – et c’est heureux ! – pour être relues à la lumière d’une société qui évolue. Rien ne nous prouve, tant que nous ne lui avons pas soumis le présent texte, que le Conseil aurait aujourd’hui la même position qu’il y a un quart de siècle. L’argument fondé sur l’inconstitutionnalité de nos trois amendements me paraît donc quelque peu léger.

Mme Éliane Assassi. Exactement ! Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Je veux souligner un point qui me semble assez étonnant.

La politique serait donc le seul domaine dans lequel l’expérience des uns et des autres finirait par devenir une tare. C’est tout de même extraordinaire !

Dans le domaine professionnel, l’expérience est valorisée. Or l’expérience s’acquiert avec le temps passé à travailler dans un même domaine, à exercer le même métier. En politique, en revanche, il semblerait que, pour certains, l’expérience soit une tare. C’est là une sacrée contradiction !

Vous voulez des assemblées parlementaires qui soient les plus diverses possible. Très bien !

Je rappellerai simplement qu’un salarié, comme je le fus avant d’être élu relativement jeune à des fonctions exécutives, se pose à un moment donné la question de savoir s’il doit privilégier sa carrière professionnelle ou son engagement dans la vie politique.

Ce débat est certes complexe. Mais il paraît délicat de dire à celui qui a été élu à trente ans que, âgé maintenant de quarante-cinq ans, il doit chercher autre chose ! Réfléchissez-y ! L’expérience n’est pas une tare ! Le Sénat est une assemblée de sages, en théorie. Or la sagesse nécessite de l’expérience !

Cessons de nous engager dans des voies qui flattent un certain populisme. Nous finirons, sinon, par dégoûter les Français de la politique ! Nous donnons l’impression de nous auto-flageller en permanence ! Cela finit par m’exaspérer... (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

M. Philippe Bas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous pourrions être tentés, dans un premier temps, de voter ces amendements, inspirés par de très bons sentiments. Ils reposent en effet sur l’idée selon laquelle, au bout d’un certain temps, il faut laisser la place aux jeunes. Les plus jeunes d’entre nous ne peuvent qu’être sensibles à une telle idée.

Dans un second temps cependant, il faut avoir le réflexe d’en revenir aux principes et à la prudence.

M. le ministre, M. le rapporteur et un certain nombre de nos collègues ont rappelé que, pour répondre à cette question, la confiance des électeurs devait être notre premier moteur, comme ce fut le cas lorsque nous avons débattu de la compatibilité d’un mandat exécutif local avec un mandat de député ou de sénateur.

Penchons-nous sur notre histoire : si une telle mesure avait été appliquée, il n’y aurait pas eu Clemenceau pour gagner la Grande Guerre,…

M. Philippe Dallier. C’est sûr !

M. Philippe Bas. … ni Léon Blum,…

M. Philippe Bas. … ni Valéry Giscard d’Estaing, ni Jacques Chirac, ni François Mitterrand.

Et il n’y aurait pas aujourd’hui François Hollande, monsieur le ministre ! (M. le ministre s’exclame.)

Prenons garde de ne pas priver la République de ces personnalités, toutes convictions et familles politiques confondues, qui ont su, au Parlement, forger leurs armes, creuser leur sillon et contribuer à l’avenir de notre pays.

Telle est la raison pour laquelle aucun de ces amendements ne me paraît devoir être adopté par notre assemblée, surtout après le vote intervenu cette nuit dans cet hémicycle sur la compatibilité entre un mandat exécutif local et un mandat de député et de sénateur.

C’est le même principe, cette confiance vis-à-vis des électeurs, qui doit, de mon point de vue, inspirer notre vote sur ces amendements.

M. Manuel Valls, ministre. Et l’Académie française ! Un mandat à vie...

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. J’entends bien vos arguments sur l’expérience, et je ne les remets pas en cause. Cependant, mes chers collègues, si, dans nos assemblées, siégeaient au moins 50 % de jeunes (Protestations sur les travées de l'UMP.) ou au moins 50 % de femmes,...

Mme Corinne Bouchoux. Tout à fait !

M. Christian Cambon. Qu’est-ce que cela veut dire ?

Mme Éliane Assassi. ... et si ces assemblées étaient représentatives de la société, nous ne nous poserions pas cette question !

Si nous nous la posons, c’est précisément parce que, dans nos assemblées, il n’y a pas de jeunes, ni assez de femmes, et parce que notre société n’y est pas représentée dans son entièreté ! Cessons les faux débats !

J’ai également entendu l’argument de l’inconstitutionnalité qui a été invoqué ; mais j’ose vous le dire, mes chers collègues : faites preuve d’un peu de volontarisme et de courage politique pour faire bouger les lignes ! (Mmes Hélène Lipietz et Corinne Bouchoux applaudissent.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 57 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 37.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 61 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. En conséquence, l’article 1er bis demeure supprimé.

Article 1er bis (nouveau) (supprimé)
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Article 1er ter (début)

Article 1er ter A

Le code électoral est ainsi modifié :

1° Le dernier alinéa des articles L.O. 137 et L.O. 137-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il ne perçoit que l’indemnité attachée au dernier mandat acquis. » ;

2° L’article L.O. 141 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Tant qu’il n’est pas mis fin, dans les conditions prévues au I de l’article L.O. 151, à l’incompatibilité mentionnée au premier alinéa du présent article, l’élu concerné ne perçoit que l’indemnité attachée à son mandat parlementaire et l’indemnité attachée à un autre de ses mandats de son choix. » –

Article 1er ter A
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Article 1er ter (suite)

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er ter A.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l'article.)

Article 1er ter (début)
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Article 1er ter (suite)

Article 1er ter

Après l’article L.O. 147 du même code, il est inséré un article L.O. 147-1 ainsi rédigé :

« Art. L.O. 147-1. – Le mandat de député est incompatible avec les fonctions de président, de vice-président et de membre :

« 1° Du conseil d’administration d’un établissement public local ;

« 2° Du conseil d’administration du Centre national de la fonction publique territoriale ou d’un centre de gestion de la fonction publique territoriale ;

« 3° Du conseil d’administration ou du conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale ;

« 4° Du conseil d’administration ou du conseil de surveillance d’une société publique locale ou d’une société publique locale d’aménagement ; 

« 5° (nouveau) D’un organisme d’habitations à loyer modéré. »

M. le président. L’amendement n° 10, présenté par MM. Fouché, Milon et du Luart, Mme Sittler, M. Pointereau, Mlle Joissains, MM. Beaumont, Pintat, Hyest, Doublet et D. Laurent et Mme Des Esgaulx, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Rémy Pointereau.

M. Rémy Pointereau. Hier, je ne suis pas intervenu dans la discussion générale sur le présent texte. Je souhaite simplement rappeler aujourd’hui que, au moment où la France connaît des difficultés économiques sans précédent, vous vous évertuez par pure idéologie à détricoter toutes les lois qui ont été votées par vos prédécesseurs, et dont certaines seront peut-être à nouveau soumises à notre examen. On entend dire en effet qu’un texte sur la défiscalisation des heures supplémentaires pourrait revenir sur le bureau du Sénat et de l’Assemblée nationale.

Puis, par calcul politique ou politicien,...

Mme Hélène Lipietz. Et vous, vous ne faites pas de politique ?

M. Rémy Pointereau. ... vous n’avez eu de cesse, depuis un an, de chercher à modifier méthodiquement tous les modes de scrutin pour tenter de verrouiller les élections les unes après les autres.

Désormais, par calcul « populiste », vous vous attaquez, au sein du Sénat, au cumul des mandats, non pas sous la pression de nos concitoyens, mais sous celle des médias et des sondages, en tombant bien sûr dans la démagogie la plus complète.

Selon moi, ce sont les électeurs qui doivent choisir si leurs élus peuvent cumuler plusieurs mandats : ils renouvellent leur confiance aux élus efficaces.

Là encore – et cela a été dit hier –, les Français sont opposés non au cumul des mandats, mais au cumul des indemnités.

Hier, j’ai volé au secours d’un député socialiste qui figure dans le classement de L’Express parmi les dix premiers « cumulards » et était accusé sur Internet de toucher 50 000 euros d’indemnités par mois ! Chacun sait en effet que, du fait de l’écrêtement, il n’est pas possible de toucher plus de 8 200 ou 8 500 euros par mois ! Il faudrait mieux informer nos concitoyens à cet égard et tenter de leur expliquer que le cumul des indemnités n’existe plus depuis longtemps.

Cet écrêtement, en revanche, n’existe pas pour les élus locaux, puisque ces derniers peuvent cumuler un certain nombre d’indemnités : on peut être à la fois maire, vice-président d’une agglomération, président d’un office d’HLM, président d’un syndicat départemental, président d’un « pays », et j’en passe, et cumuler les indemnités bien au-delà du plafond prévu pour les parlementaires.

Ce texte n’est à mon avis pas équitable. Puisque vous préconisez la justice et l’équité pour tous, vous devriez approuver cet amendement qui tend à permettre aux parlementaires d’exercer des fonctions de président ou de vice-président dans un établissement public, dans un « pays » ou autre.

Il s’agit de rétablir une certaine équité entre le statut de parlementaire et celui d’élu local.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. La suppression de l’article 1er ter mettrait en cause une mesure introduite par l’Assemblée nationale, qui nous semble majeure. C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Même avis !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. On ne peut que soutenir cet amendement.

Il n’est qu’à prendre l’exemple des sociétés publiques locales, les SPL. Ce nouvel outil, qui présente la particularité d’être uniquement composé de collectivités locales, par le biais de représentants, permet à ces dernières de gérer des services intéressants, de bénéficier d’un droit et d’une comptabilité privés pour exercer directement un service public en in house, c’est-à-dire sans appel d’offres. C’est bien le but de ce type de structure.

Pourquoi empêcher les parlementaires de gérer des services dans le cadre de leur mandat local ? Pourquoi une telle discrimination ? Avec cette mesure, ces services seraient confiés à quelqu’un qui ne serait pas membre de la représentation nationale et ne pourrait pas faire l’articulation entre les problèmes locaux et les problèmes nationaux.

Le problème, c’est la rémunération ! Je suis d’accord : il faut des dispositions pour que les élus nationaux ne perçoivent pas de rémunération en tant que membres de ces structures ; mais il ne faut pas leur interdire d’exercer des responsabilités dans des domaines bien précis.

J’ai été élu en jouant la carte du cumul, comme d’ailleurs l’ensemble des sénateurs de mon département. (Mme Hélène Lipietz s’exclame.) Nous avons exposé ensemble pourquoi nous briguions un mandat national en plus de nos fonctions locales. C’est donc en toute connaissance de cause que les électeurs ont choisi. Ma position est toujours restée la même : il s’agit pour moi de savoir si une loi est applicable sur le terrain et supportable sur le plan comptable.

La mesure que vous proposez engendrera un coût supplémentaire, insupportable pour le contribuable, alors même qu’un ras-le-bol fiscal est constaté dans notre pays !

M. René-Paul Savary. Cette année, 1 200 000 foyers supplémentaires vont payer l’impôt sur le revenu ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. François Rebsamen. La faute à qui ?

M. René-Paul Savary. Nous le savons, cette loi sera difficilement applicable. C’est la raison pour laquelle je soutiens pleinement cet amendement de suppression.

Rappels au règlement

 
 
 

M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour un rappel au règlement.

M. François Fortassin. C’est en tant que membre du bureau que je fais ce rappel au règlement.

Ce matin, comme un certain nombre d’entre vous, mes chers collègues, j’ai eu l’occasion de lire un titre particulièrement désagréable…

M. Christian Cambon. Offensant !

M. François Fortassin. … sur une chaîne que, par ailleurs, nous finançons.

M. Alain Anziani. Cela veut dire qu’elle est libre !

M. François Fortassin. Nous exprimons ici des points de vue différents qui, tous, sont respectables. Ceux d’entre nous qui défendent un cumul limité ne doivent pas être traités de « ringards ». Pensons que, au-delà des élus que nous sommes, il y a les électeurs qui nous ont confié ce mandat. La moindre des choses, c’est de les respecter !

Je conçois tout à fait que certains de mes collègues soient favorables au non-cumul. À titre personnel, je ne partage pas ce point de vue : je suis pour un cumul limité à un seul mandat exécutif.

Quoi qu’il en soit, s’il n’est pas question pour nous de dicter d’une manière quelconque notre point de vue à une chaîne que nous avons voulue indépendante,...

M. François Fortassin. … nous pouvons tout de même lui demander de nous respecter ! (Bravo ! et applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

Le bandeau diffusé ce matin sur Public Sénat, c’est de l’irrespect pur et simple !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. La presse est libre !

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Article 1er ter (suite)
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Article 1er ter

Article 1er ter (suite)

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote sur l’amendement n° 10.

M. Éric Doligé. Avec l’article 1er ter, dont nous sommes nombreux à demander la suppression, nous commençons à saisir ce qui se passe au sein du Parlement : par petites touches successives des unes, des uns ou des autres, on commence à enfermer le parlementaire, pour qu’il n’y en ait plus qu’une seule catégorie.

Mme Éliane Assassi. Non, justement !

M. Éric Doligé. On veut limiter la durée du mandat, le cumul et interdire toutes les fonctions quelles qu’elles soient. (Mme Corinne Bouchoux s’exclame.)

Mme Éliane Assassi. On veut des hommes et des femmes qui représentent la société !

M. Éric Doligé. On veut empêcher l’activité professionnelle. (Mme Éliane Assassi s’exclame.) À force, on ne pourra plus rien faire, ni avant, ni pendant, ni après le mandat !

Certes, le Parlement est pour beaucoup composé de personnalités ayant accompli leur carrière au sein de partis ou de structures politiques – le mot « apparatchik » ne me plaît pas –, mais n’oublions pas tous ceux qui étaient dans la vie active : médecins, chefs d’entreprise, ouvriers...

M. Éric Doligé. Au cours de nos mandats, qui auront pu être renouvelés, les entreprises, les métiers, les savoirs auront évolué. Pourtant, on voudrait que nous soyons complètement détachés de la vie et de ce qui se passe en dehors de cet hémicycle !

S’il est interdit aux parlementaires de garder un lien avec leur ancienne activité – il ne s’agit pas seulement de rester en contact avec d’anciens collègues ! –, comment pourront-ils, au terme de leur mandat ou de deux mandats, si c’est cette limite qui est fixée, retourner dans la vie civile ? Ce sera impossible, car ils ne s’y retrouveront pas et auront perdu pied ! Et ce sera le cas de 80 % des parlementaires !

Trouvez-vous normal que la représentation nationale se prive d’individus susceptibles de faire bénéficier notre pays de leur expérience professionnelle ?

Mme Éliane Assassi. C’est déjà le cas !

M. Éric Doligé. Cette mesure aura un autre inconvénient ! Plus aucune profession libérale, plus personne issu du monde de l’entreprise ou du secteur privé ne voudra exercer un mandat ! Souhaite-t-on que les chefs d’entreprise, les cadres, les médecins, etc. soient tous interdits de Parlement ? En effet, ils ne pourront plus exercer à nouveau leur profession au terme de leur mandat ! (Mme Éliane Assassi s’exclame.)

C’est facile quand on est fonctionnaire,…

M. Éric Doligé. … qu’on a la vie devant soi et qu’on est sûr de retrouver son métier à la sortie,…

M. Philippe Dallier. Exactement !

M. Éric Doligé. … qui plus est en ayant connu de l’avancement !

M. Philippe Dallier. Bien sûr !

M. Éric Doligé. Je pourrais vous citer l’exemple de nombreux collègues issus de la fonction publique qui ont été élus au moment où ils occupaient des postes importants et qui, à l’issue de leur mandat, ont bénéficié de promotions assez extraordinaires.

M. Éric Doligé. Je n’ai jamais vu un élu issu du secteur privé quitter son entreprise à un certain niveau et la réintégrer dix ans après en se voyant promu ! Cela n’arrive pas ! Il faut donc être raisonnable.

Là, vous êtes en train de tuer le fonctionnement de la société. Bien pis, vous êtes en train de tuer le Parlement !

Rappels au règlement (suite)

 
 
 

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet, pour un rappel au règlement.

M. François-Noël Buffet. Je reviens sur les propos de M. Fortassin. Il est vrai que le bandeau diffusé par Public Sénat ce matin pose une question fondamentale, celle du respect de l’institution dont nous sommes les représentants.

Il n’est pas question une seule seconde de vouloir tenir la plume des journalistes.

M. François-Noël Buffet. En revanche, il est absolument nécessaire que ceux-ci prennent conscience du respect qu’ils doivent à ceux qui siègent dans cet hémicycle, qui sont élus au suffrage universel et qui se sont hier soir exprimés très largement en faveur de l'amendement de M. Mézard, contre la proposition du Gouvernement.

Monsieur le président, je vous prie de bien vouloir demander au président du Sénat d’exercer un droit de réponse auprès de Public Sénat, de manière à faire prévaloir la défense de notre institution. On ne peut pas dire n’importe quoi, n’importe quand, seulement pour faire des effets d’annonce ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Article 1er ter (suite)
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Article 1er ter

Article 1er ter (suite)

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote sur l’amendement n° 10.

Mme Éliane Assassi. Monsieur Doligé, c’est justement pour les raisons que vous avez avancées que nous demandons un véritable statut de l’élu !

M. Éric Doligé. Vous ne l’aurez pas !

M. Christian Cambon. Ce n’est pas une priorité !

Mme Éliane Assassi. En partant perdant, on n’obtient jamais rien dans la vie !

Vous avez parlé des cadres, des fonctionnaires, des professions libérales. Moi, je vous parlerai des ouvriers et des ouvrières. Certes, il y en a peu dans nos assemblées.

L’une de mes collègues était ouvrière avant de devenir parlementaire. Sans statut de l’élu local, croyez-vous qu’elle retrouvera du travail dans trois ans, au terme de son mandat ?

Mme Hélène Lipietz. Exactement !

Mme Éliane Assassi. Pensez-vous qu’elle pourra réintégrer son poste, d’autant qu’elle exerçait dans son entreprise des fonctions syndicales ?

Mme Éliane Assassi. C'est la raison pour laquelle je ne déroge pas à l’ambition qui est la nôtre, celle de disposer le plus rapidement possible d’un véritable statut de l’élu local. (Mmes Hélène Lipietz et Corinne Bouchoux applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.

M. Jean-François Husson. J’ai bien écouté les différentes interventions depuis le début de nos débats, et je souhaite attirer l’attention de notre assemblée sur les parcours que des femmes et des hommes peuvent avoir dans le cadre de leur engagement, quel qu’il soit. Mais nous sommes ici dans une assemblée d’élus, et je prendrai donc l’exemple d’un parcours d’élu.

Ceux qui souhaitent s’engager dans cette voie viennent d’horizons divers : ils sont ou non héritiers ; ils se battent. Nous pouvons regarder nos parcours respectifs, ils se résument tous ainsi : d’abord, il faut croire, avoir envie et oser ; ensuite, le suffrage universel ou, s’agissant de notre assemblée, le corps des grands électeurs se prononce.

Ce qui me dérange avec ce texte, c’est que l’on nous prive de liberté.

Pour ma part, j’ai souhaité occuper de plus hautes fonctions pour pouvoir agir et travailler sur l’aspect législatif. Avec ce projet de loi, je n’en aurai plus le droit. Entendez que des femmes et des hommes, d’âges et de conditions différentes, siégeant sur les différentes travées de cette assemblée, peuvent avoir encore envie d’agir !

Vous ne me ferez pas croire qu’un conseiller municipal d’une très grande ville ou d’un tout petit village aura le même poids, dans les assemblées départementales ou régionales, qu’un président ou un vice-président, femme ou homme. Il faut tout de même respecter la hiérarchie ! On lui demandera de rester gentiment assis sur son tabouret !

Je vous le dis : je n’en peux plus. Je considère que c’est liberticide. Laissez-nous agir !

Je le démontrerai par un seul exemple, celui de l’inflation normative, sujet qui nous occupe tous, toutes tendances confondues, mais qu’a porté plus particulièrement Éric Doligé ces dernières années.

Voilà quelques mois, j’ai eu l’occasion d’évoquer le début de l’acte de contrition des parlementaires devant l’inflation normative. En effet, c’est bien par des lois, puis par les décrets qu’exigent les dispositions nouvelles votées par le Parlement, que nous ajoutons progressivement des normes.

En toute logique, l’inflation législative et normative se poursuivra demain, puisque nous exercerons nos fonctions à temps complet et que nous aurons chacun envie de faire davantage. Ainsi, sans doute aveuglément, vous allez encourager une forme d’antiparlementarisme et de populisme que la crise ne manquera pas d’exacerber.

Mes chers collègues, je vous en conjure : ressaisissons-nous ! Il est grand temps aujourd’hui de donner de nous une autre image. À la place qui est la mienne aujourd’hui, et dans les conditions actuelles, je considère aujourd’hui que le procès en ringardise est un faux et un mauvais procès. Ressaisissons-nous ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Rappels au règlement (suite)

M. le président. La parole est à M. Alain Anziani.

 
 
 

M. Alain Anziani. Je voudrais faire quelques observations sur des propos qui viennent d’être tenus.

Je comprends l’exaspération, l’indignation, l’agacement, devant ce qui peut être considéré comme une vision caricaturale proposée par la presse. Toutefois, le principe qui doit nous conduire a été rappelé : nous devons respecter toutes les opinions, qu’elles soient émises ici même ou à l’extérieur. Nous devons donc respecter aussi les opinions exprimées par la presse, même si ces dernières ne nous sont pas favorables ou même si nous ne les partageons pas. Il s’agit là d’un premier principe.

J’irai un peu plus loin. N’engageons pas le débat comme nous avons pu le faire nous-mêmes, hier, en opposant d’un côté les charognards, de l’autre les parachutistes. En faisant cette distinction entre cumulards-charognards et parachutistes, nous donnons nous-mêmes le baton pour nous faire battre. Il s’agit là d’un mauvais débat qui n’est pas à la hauteur des enjeux.

Nous savons bien quel est l’enjeu : il s’agit de notre vision des institutions et de la pratique politique. Les questions qui nous sont posées à propos de cette vision – et je répondrai ainsi à l’orateur – sont les suivantes : quel est l’équilibre des pouvoirs ? Comment concevons-nous notre mandat ?

Pour répondre à un autre intervenant, je rappellerai que nous avons eu, avant les vacances – il n’y a donc pas si longtemps –, un débat sur la transparence de la vie publique, au cours duquel nous avons été quelques-uns à poser clairement la question : peut-on être parlementaire et exercer en même temps une activité professionnelle très lourde ? Ainsi, peut-on être en même temps parlementaire et avocat ? J’ai été avocat ; j’ai arrêté. Peut-on être en même temps parlementaire et chef d’entreprise ?

Ma réponse n’a pas varié. J’affirme, parce que j’en ai fait l’expérience, que c’est impossible. Je soutiens même qu’il est sans doute beaucoup plus redoutable, y compris en termes de conflit d’intérêts, d’être, par exemple, parlementaire et avocat d’affaires que d’être parlementaire et maire. Cette question-là devra un jour être pleinement traitée, vidée, si l’on veut résoudre le problème des conflits d’intérêts.

Je vous rappelle enfin que, de l’autre côté de l’Atlantique, il n’est pas possible d’être parlementaire et d’exercer une autre profession. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

 
 
 

M. David Assouline. Je veux dire un mot sur ce que j’ai entendu afin d’en appeler moi aussi à la responsabilité et à un principe que le Sénat a toujours défendu avec force, dans un passé récent, celui de la liberté de la presse.

M. David Assouline. Lors de l’examen de la réforme constitutionnelle, j’ai eu l’honneur de présenter un amendement visant à introduire dans la Constitution le principe d’indépendance, de pluralisme et de liberté de la presse. Cet amendement a été majoritaire, ce qui signifie que, sur l’ensemble de nos travées, existe une majorité pour inscrire ce principe à l’article 34 de la Constitution.

La liberté de la presse est donc d’abord un mot, mais elle se traduit ensuite en une pratique de tous les jours. Nous devons respecter la liberté de la presse, que nous soyons d’accord ou non avec telle une ou tel bandeau de quelque organe de presse que ce soit. Ainsi, ce matin, je ne peux être d’accord avec la une de Libération : vais-je pour autant demander un droit de réponse ? Il relève de l’honneur du Sénat de ne pas entrer dans ce type de considérations. Il s’agit bien là de liberté de la presse : en effet, Public Sénat n’est pas l’organe officiel du Sénat ; heureusement d’ailleurs pour la minorité sénatoriale, car ce serait alors forcément l’organe de l’exécutif et de son président.

Je veux vraiment vous appeler au sursaut là-dessus : n’entrez pas là-dedans ! Nos débats, dans lesquels chacun dit les choses jusqu’au bout, sont marqués par la liberté d’expression. Quant aux commentaires à l’extérieur de l’hémicycle, ils sont légitimes. À travers eux, l’opinion perçoit ce qui se passe ici.

L’existence de notre assemblée a toujours fait l’objet d’interrogations. La question : pourquoi deux chambres ? est constamment posée. La légitimité du Sénat repose sur l’adhésion du public et de l’opinion publique.

Par conséquent, quand la presse et ceux qui s’expriment à l’extérieur font leurs commentaires, n’en rajoutons pas par nos interventions, nos protestations : du moment que nous ne relevons pas dans la presse d’appel à la violence, de propos racistes ou attentatoires aux personnes, laissons les opinions s’exprimer.

Je vous le dis donc : respectez la liberté de la presse dans cet hémicycle, ce sera à notre honneur ! (Exclamations sur diverses travées.)

Mme Éliane Assassi. Avançons ! Avançons ! On ne va pas y passer la nuit !

M. le président. Acte vous est donné de ces rappels au règlement, mes chers collègues.

La parole est à M. le président de la commission.

 
 
 

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, mes chers collègues, je voudrais, ès qualités de président de la commission des lois, faire quelques remarques.

Premièrement, si des critiques doivent être présentées à l’encontre de propos tenus par un sénateur qui sont rapportés par un organe de presse écrite ou télévisée, il faut les présenter à celui qui a tenu ces propos.

M. Jean-Jacques Mirassou. Bien sûr ! C’est évident !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. On ne peut pas reprocher à des journalistes de rapporter des propos, dès lors qu’ils en indiquent l’auteur.

Deuxièmement, quoi qu’il en coûte – et nous sommes un certain nombre, sur toutes les travées, à savoir ce qu’il peut en coûter –, la liberté de la presse est un principe fondamental, et le Sénat de la République se doit d’en être le garant. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Article 1er ter
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Article 1er ter

Article 1er ter (suite)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote sur l’amendement n° 10.

M. Philippe Dallier. Je voudrais revenir sur le statut de l’élu. En évoquant les limites du cumul dans le temps, on est effectivement au cœur du problème. Cette question du statut de l’élu est vraiment un serpent de mer. On ne peut pas dire qu’il n’y a pas de statut de l’élu, puisque des dispositions existent. La question est de savoir si elles sont suffisantes.

En ce qui concerne les salariés, dont on a parlé tout à l’heure –, je rappelle que les dispositions en vigueur prévoient que la suspension du contrat de travail pendant la durée du premier mandat est de droit. A la fin du premier mandat, la suspension du contrat de travail tombe, et le contrat de travail tombe de droit. C’est cela le problème, aujourd’hui.

En outre, il faut encore bien prendre en considération la différence entre deux types d’entreprises : les très grandes entreprises peuvent effectivement se permettre de conserver parmi leurs salariés un certain nombre de parlementaires ou de maires, tandis que les très petites entreprises et les petites et moyennes entreprises ne peuvent pas faire de même. Même si nous allions vers un allongement de la durée de la suspension du contrat de travail, nous savons bien que la situation serait extrêmement difficile pour certaines entreprises. Il faut prendre ce point en considération.

En termes d’évolution de carrière, il y a bien évidemment une énorme différence entre les fonctionnaires et ceux qui travaillent en entreprise. Si vous êtes fonctionnaire, vous continuez à bénéficier de droits à avancement, et vous retrouvez un emploi lorsque votre mandat est terminé. Dans les TPE et dans les PME, tel n’est absolument pas le cas, et c’est bien là que réside la différence fondamentale.

Par conséquent, si nous voulons que les assemblées soient les plus diverses et les plus représentatives possible, qu’elles comptent des jeunes, des salariés, des fonctionnaires, des moins jeunes, etc., encore faut-il prendre en considération les très grandes différences qui existent sur le terrain. Quelles que soient les dispositions que nous pourrions prendre, nous n’arriverons pas à les atténuer complètement.

Enfin, entrer en politique, c’est forcément prendre un risque et faire un choix. Si vous voulez voir en politique des jeunes et des personnes issues des entreprises, il faut prendre en considération le fait que ces gens-là vont prendre un risque, pour eux, pour leur famille, pour leur carrière et pour leur avenir.

Par conséquent, leur dire de manière abrupte : « Écoutez ! Vous pouvez faire deux mandats, et après deux mandats, vous retournerez sans aménagement particulier sur le marché du travail, et bonne chance pour la suite ! », ce n’est à mon avis pas tout à fait correct ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Rappels au règlement (suite)

 
 
 

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Pierre Raffarin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, qui, ici, est contre la liberté de la presse ? Monsieur Assouline, qu’est-ce que cet amalgame ? Le droit de réponse, la protection des sources dont M. Buffet parlait tout à l’heure font partie du droit républicain et de notre Constitution, tout comme le respect de la liberté de la presse. (Eh oui ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)

Mais quand quelqu’un s’estime atteint dans sa dignité, il peut demander un droit de réponse !

M. Jean-Pierre Raffarin. Quand il s’agit de l’honneur, quand il s’agit de la dignité, le droit de réponse existe ! Nous sommes en droit, comme le faisait remarquer François-Noël Buffet après M. Fortassin, de demander à celui qui préside notre assemblée d’exprimer le fait qu’un certain nombre d’entre nous sont blessés dans leur dignité. (M. Jacques Mézard acquiesce.)

J’ai aimé l’intervention de M. Mézard hier, parce qu’elle avait quelque chose d’assez révoltant.

Monsieur le ministre, je vous parle avec respect. Au cours de ma vie politique, j’ai été dix-huit ans à la tête d’un exécutif régional, exerçant un certain nombre de responsabilités, et je suis maintenant sénateur à plein temps. Pouvant donc comparer plusieurs statuts, je peux vous dire que le statut d’aujourd’hui n’est pas forcément plus efficace que le statut d’hier.

Dans ma vie politique, j’ai eu très souvent besoin de prendre position, quelquefois même contre mon parti. J’ai eu besoin de ma liberté. Or, à qui devais-je ma liberté ? Non pas à ceux qui donnaient les investitures ! Je la devais à mes électeurs du Poitou qui me faisaient confiance ! Je savais que je pouvais parler à Paris parce qu’ils me soutenaient, et que c’était devant eux que je devais rendre des comptes.

M. Jean-Pierre Raffarin. Cet enracinement, c’est notre liberté ! Cet enracinement, c’est la capacité, aujourd’hui, d’assumer nos convictions et de ne pas dépendre d’une investiture, d’un appareil qui, à un moment ou à un autre, finit par imposer sa règle !

À mes jeunes collègues qui sont nouveaux dans cette assemblée et ont la fraîcheur de la jeunesse, je voudrais simplement dire ceci : vous verrez ce qu’est la liberté en politique ! Ne laissez jamais votre liberté être atteinte ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.) Ne laissez jamais les appareils, à un moment ou un autre, prendre possession de votre liberté ! Vous avez la liberté de vous engager, évidemment, mais vous avez aussi le devoir d’être respectés !

C’est pourquoi le droit de réponse, tout à fait dans la ligne de notre droit, est pour nous la façon de dire que notre liberté est aussi notre honneur ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour un rappel au règlement.

 
 
 

M. Philippe Bas. M. Jean-Pierre Raffarin l’a justement souligné, sur aucune des travées de cette assemblée, nous n’aurions supporté d’attendre les débuts du XXIsiècle et un amendement de M. David Assouline pour que la liberté de la presse entre enfin dans la catégorie des principes fondamentaux de notre République ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)

Je rappelle que l’article XI de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen – cela ne date pas d’hier, monsieur Assouline ! – proclame « la libre communication des pensées et des opinions », qui « est un des droits les plus précieux de l’Homme », et dispose que « tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement », ajoutant – et c’est bien clair – : « sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi. » Le débat a donc déjà eu lieu voilà plus de deux siècles.

Nous sommes ici au cœur d’un principe fondamental. Il y a le droit, mais aucun droit n’est absolu ; tous les droits sont limités par la loi en cas d’abus.

Certains se rappellent les abus de la liberté de la presse dans les années trente,…

M. Jean-Jacques Mirassou. On n’en est pas là !

M. Philippe Bas. … des désastres, y compris des désastres intimes, que ces abus ont pu provoquer.

Eh bien non ! l’insulte, l’offense, la mise en cause de la dignité des personnes ne relèvent pas de la liberté de la presse. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Yves Détraigne applaudit également)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour un rappel au règlement.

 
 
 

M. Jean-Jacques Mirassou. J’ai été particulièrement silencieux jusqu’à maintenant, mais j’avoue entendre sur les travées situées à la droite de cet hémicycle une petite musique qui commence à être fatigante. En proclamant à toute force et à jet continu que vous seriez affranchis des partis politiques, vous trahissez considérablement la vérité, tout en vous achetant une forme de bonne conscience à peu de frais.

Ainsi que l’a dit hier l’un de mes camarades et collègues, il n’y a pas de honte à appartenir à une formation politique, et ce d’autant plus que l’utilité des partis politiques en matière de fonctionnement de la démocratie est consacrée dans notre Constitution. Il n’y a donc pas, d’un côté, ceux qui, un peu penauds peut-être d’assumer leur vote, saisiraient l’opportunité de sortir par le haut en stigmatisant les partis politiques, et, de l’autre, des hommes et des femmes qui, parce qu’ils appartiendraient à une formation politique, auraient parfaitement aliéné leur liberté d’individu et de citoyen.

De grâce, mes chers collègues, épargnons-nous ce débat par trop manichéen ! Les arguments avancés de part et d’autre sont recevables, mais, au bout du compte, c’est l’électeur qui choisira ! Que chacun prenne ses responsabilités ! (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour un rappel un règlement.

 
 
 

Mme Corinne Bouchoux. Je ne suis pas certaine que nos débats prennent le tour que nous souhaitons tous, quel que soit notre point de vue.

Je comprends tout à fait que certains aient pu se sentir vexés, peinés, voire agressés, par certains titres de ce matin. Néanmoins, déplacer le débat me semble au mieux maladroit, au pire contreproductif.

Je reconnais que le mot « cumulard » a une connotation franchement négative. Ceux d’entre nous qui cumulent ne sont pas forcément plus experts ou plus légitimes que les autres. C’est une affaire de choix personnel, d’intime conviction.

Dans un bus de la ligne 38, hier soir, j’ai entendu ce que des jeunes disaient de nous après avoir pris connaissance de la teneur de notre débat. Leurs propos m’ont fait prendre conscience du fait que si les arguments en faveur du cumul que certains d’entre nous exposent fort brillamment, avec beaucoup d’éloquence, étaient compris voilà dix ans, ou à tout le moins laissaient nos concitoyens indifférents, tel n’est plus le cas aujourd’hui. À tort ou à raison, ceux-ci considèrent que la Haute Assemblée, en dépit de son immense expertise, leur ressemble de moins en moins ; ils ne se retrouvent pas dans ce que nous faisons. (Brouhaha sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

Mme Éliane Assassi. Laissez-la parler !

M. le président. Veuillez écouter l’oratrice, mes chers collègues.

Mme Corinne Bouchoux. Il serait bon que le débat s’élève d’un cran et que nous puissions discuter de façon constructive et positive. Finissons-en avec les invectives ! L’image du Sénat s’en trouvera rehaussée et nos concitoyens comprendront mieux son rôle. Sinon, nous continuerons à entendre des jeunes se demander à quoi sert le Sénat ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

M. le président. Acte vous est donné de ces rappels au règlement, mes chers collègues.

Article 1er ter
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Article additionnel après l'article 1er ter

Article 1er ter (suite)

M. le président. Nous en revenons à l’examen de l’amendement n° 10.

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 1er ter est supprimé, et les amendements nos 47, 18 rectifié ter, 48 et 55 n'ont plus d'objet.

Pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de ces quatre amendements :

L'amendement n° 47, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, était ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article LO 148 du même code est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Les députés ne peuvent exercer plus d’une des fonctions visées à la phrase précédente. »

2° Le second alinéa est supprimé.

L'amendement n° 18 rectifié ter, présenté par MM. Daunis, Berson, Besson et Kerdraon, Mme Claireaux et M. Domeizel, était ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer le mot :

incompatible

par le mot :

compatible

L'amendement n° 48, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, était ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

, de vice-président et de membre

par les mots :

et de vice-président

L'amendement n° 55, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, était ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

…° Du conseil d’administration ou du conseil de surveillance ou de direction d’une société privée.

Article 1er ter
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Article 1er quater (nouveau)

Article additionnel après l'article 1er ter

M. le président. L'amendement n° 54, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 1er ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Il est interdit à tout député d’exercer une activité professionnelle donnant lieu à rémunération ou gratification, sauf dérogation accordée par la Haute Autorité de la transparence de la vie publique lorsque cette activité est justifiée par des impératifs de continuité de la pratique, de formation professionnelle, ou pour tout autre motif qu’elle jugera pertinent. Ces dérogations motivées sont rendues publiques par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement vise avant tout à affirmer un principe général : le mandat parlementaire est une fonction à temps plein. S’il ne peut être cumulé avec une fonction exécutive locale, il peut encore moins l’être avec certaines fonctions privées.

Dans le même sens, notre amendement n° 55 déposé à l’article 1er ter avait pour objet d’attirer l’attention, non sans une certaine forme de « provocation », sur le cas des « cumulants » – pour ne pas dire « cumulards » ! – du CAC 40.

Dans une autre mesure, un peu plus conciliante, le présent amendement, dont nous avons longuement débattu en juillet dernier lors de l’examen du projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique, a pour objet de rappeler ici que l’absentéisme des élus n’est pas seulement lié au cumul avec un mandat public.

En effet, mes chers collègues, la garantie de la qualité du travail parlementaire passe aussi par la limitation du cumul avec l’activité professionnelle et par l’anéantissement du risque de conflits d’intérêts qui peut en découler. Même si ce n’est parfois qu’une apparence, des fonctions de cadre dans une entreprise peuvent par exemple laisser soupçonner que les parlementaires en cause font passer leur intérêt privé avant l’intérêt général qu’ils représentent.

Nous sommes néanmoins conscients qu’il manque un « tronc » auquel rattacher ce principe. Dans un souci de cohérence, je relie donc ce dernier à la question de l’instauration d’un véritable statut de l’élu, sans lequel rien de tout cela n’est réalisable.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. L’amendement n° 54 vise à étendre les incompatibilités parlementaires professionnelles.

Par sa généralité, cet amendement pourrait poser un problème de constitutionnalité au regard du principe de proportionnalité, puisqu’il vise respectivement toutes les fonctions au sein d’une société privée, quelle qu’elle soit – SARL, SA, etc –, et toute activité professionnelle rémunérée.

En outre, ces questions ont été débattues dans le cadre de l’examen du projet de loi organique relatif à la transparence de la vie publique, qui a été adopté mardi dernier par l’Assemblée nationale. Je propose donc de ne pas ouvrir de nouveau ce débat ici, et je demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer ; à défaut, j’émettrai, au nom de la commission, un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 54.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article additionnel après l'article 1er ter
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Articles additionnels après l'article 1er quater

Article 1er quater (nouveau)

L’article L.O. 148 du même code est abrogé.

M. le président. L'amendement n° 49, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Il s’agit d’un amendement de coordination. Le vote massif exprimé par le Sénat hier soir impose la suppression, par cohérence, de l’article 1er quater.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. L’amendement n° 47 étant tombé, il me semble que cet amendement ne présente plus guère d’intérêt…

M. Jacques Mézard. Vous ne suivez pas.

M. Simon Sutour, rapporteur. L’intolérance permanente que vous manifestez à mon égard commence à me lasser, monsieur Mézard. J’ai gardé mon calme jusqu’à présent, mais je tiens maintenant à vous répondre !

Vous avez été touché par ce que vous avez lu dans la presse, mais vous-même ne vous êtes pas privé de tenir des propos très désagréables à mon endroit. Ainsi, vous avez affirmé que mes fonctions antérieures de directeur des services d’un département ou d’une ville ne me qualifiaient pas forcément pour être un bon sénateur. Je voudrais, à cet instant, remercier les collègues de tous bords qui m’ont témoigné leur solidarité face à vos attaques inacceptables.

Pour ma part, je ne vous ai jamais attaqué ! Je ne me suis jamais demandé si avoir eu un sénateur parmi ses ascendants constituait un avantage ou un inconvénient. Avoir des points de vue différents ne doit pas nous empêcher d’être tolérants et respectueux de l’autre, ce que vous n’êtes pas lorsque vous contestez en permanence ma compétence ! Je suis aussi légitime que vous, monsieur Mézard ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. le président. Essayons de garder notre sérénité, mes chers collègues.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. À tout point de vue, même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 49.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 1er quater est supprimé.

Article 1er quater (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Mise au point au sujet d'un vote

Articles additionnels après l'article 1er quater

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 22 rectifié, présenté par MM. Doligé, Cardoux, Fleming et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 1er quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L.O. 147 du code électoral, il est inséré un article L.O. 147-... ainsi rédigé :

« Art L.O. 147-...- Le mandat de député est incompatible avec un emploi dans la fonction publique d’État, territoriale ou hospitalière.

« Le député doit le jour de son élection ou de la validation de celle-ci démissionner de son emploi. Il ne peut plus cotiser aux caisses de retraite de la fonction publique.

« Il ne peut être mis à disposition d'une collectivité ou d'une administration. »

L'amendement n° 23 rectifié, présenté par MM. Doligé, Cardoux, Fleming et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 1er quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L.O. 147 du code électoral, il est inséré un article L.O. 147-... ainsi rédigé :

« Art L.O. 147-...- Le mandat de député est incompatible avec un emploi dans la fonction publique d’État, territoriale ou hospitalière. »

L'amendement n° 24 rectifié, présenté par MM. Doligé, Cardoux, Fleming et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 1er quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L.O. 147 du code électoral, il est inséré un article L.O. 147-... ainsi rédigé :

« Art L.O. 147-...- Le mandat de député est incompatible avec un emploi autre que la catégorie B ou C dans la fonction publique d’État, territoriale ou hospitalière.

« Le député doit le jour de son élection ou de la validation de celle-ci démissionner de son emploi. Il ne peut plus cotiser aux caisses de retraite de la fonction publique.

« Il ne peut être mis à disposition d'une collectivité ou d'une administration. »

L'amendement n° 25 rectifié, présenté par MM. Doligé, Cardoux, Fleming et Beaumont, est ainsi libellé :

Après l'article 1er quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L.O. 147 du code électoral, il est inséré un article L.O. 147-... ainsi rédigé :

« Art. L.O. 147-...- Le mandat de député est incompatible avec un emploi autre que de catégorie B ou C dans la fonction publique d’État, territoriale ou hospitalière. »

La parole est à M. Éric Doligé, pour présenter ces quatre amendements.

M. Éric Doligé. Je voudrais dire en préambule que je suis tout à fait d’accord avec Mme Assassi sur la nécessité de créer un statut de l’élu. Cela étant, il aurait peut-être mieux valu que la mise en place de ce statut intervienne en amont de la discussion du présent texte, ou à tout le moins concomitamment. Par ailleurs, elle m’a sans doute mal écouté tout à l’heure, car j’ai cité en premier les ouvriers.

Pour en revenir à mes quatre amendements, il me semble anormal d’interdire un certain nombre de professions aux parlementaires alors que l’on autorise les fonctionnaires élus parlementaires à poursuivre leur carrière.

Les quatre amendements s’inscrivent dans cette logique. Les uns, maximalistes, posent une incompatibilité du mandat de député avec tout emploi de la fonction publique, quelle que soit la catégorie, tandis que les autres limitent le champ de l’incompatibilité aux emplois de catégorie A.

Par ailleurs, ces amendements instaurent ou non, selon les cas, l’impossibilité pour les fonctionnaires élus parlementaires de continuer de cotiser aux caisses de retraite de la fonction publique et d’être mis à disposition d’une collectivité ou d’une administration.

Je souligne que, in fine, c’est le citoyen qui financera la retraite d’une personne qui n’aura pas exercé son activité professionnelle pendant dix, vingt, voire trente ans, mais aura continué à progresser dans sa carrière durant tout ce temps.

Il s’agit de mettre fin à une situation tout à fait anormale par rapport à celle des salariés du secteur privé élus parlementaires, qui n’ont pas les mêmes avantages.

M. le président. L'amendement n° 62 rectifié, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Après l’article 1er quater

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L.O. 141 du code électoral, il est inséré un article L.O. 141 -... ainsi rédigé :

« Art. L. O. 141 -... – Est incompatible avec le mandat de député l’appartenance à un corps de catégorie A de la fonction publique dont la liste est fixée par décret pris en Conseil d’État.

« L’incompatibilité prévue à l’alinéa précédent n’est pas applicable à l’exercice d’un premier mandat de député.

« Le député qui se trouve dans le cas d’incompatibilité mentionné au premier alinéa du présent article est tenu de faire cesser cette incompatibilité en choisissant entre son mandat de député et son appartenance à la fonction publique au plus tard le trentième jour qui suit la date de la proclamation des résultats de l’élection qui l’a mis en situation d’incompatibilité ou, en cas de contestation, la date à laquelle le jugement confirmant cette élection est devenu définitif.

« À défaut d’option dans le délai imparti, le député est réputé démissionnaire d’office. »

La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Cet amendement prévoit qu’un parlementaire issu de la haute fonction publique, c’est-à-dire d’un corps de catégorie A, doit démissionner de la fonction publique dès lors qu’il est réélu pour un deuxième mandat.

On reproche souvent à nos assemblées d’être peuplées de fonctionnaires bénéficiant d’un statut particulier et de ne pas vraiment représenter, de ce fait, la diversité de la population française.

Il faut toutefois tenir compte de ce que tous les fonctionnaires élus parlementaires ne sont pas tout à fait égaux. Les fonctionnaires d’exécution ne retrouveront sans doute pas aussi facilement un travail que les fonctionnaires de catégorie A, qui peuvent rentabiliser, si j’ose dire, leurs connaissances et leur expérience.

C’est pourquoi cet amendement ne vise que les fonctionnaires de catégorie A, à l’exclusion de ceux appartenant aux catégories B et C.

Moi qui suis, à l’origine, haut fonctionnaire, je suis très attaché à cette disposition.

Avant de me porter candidat aux élections sénatoriales de 2001 dans mon département, j’avais demandé à la secrétaire générale de la Cour des comptes de me placer en situation de disponibilité. Quelque peu surprise par cette requête, elle m’a répondu que, à sa connaissance, c’était la deuxième fois seulement dans l’histoire de l’institution qu’un magistrat demandait à être mis en disponibilité avant d’être élu. J’ai maintenu ma demande, refusant tout mélange des genres, et j’ai obtenu satisfaction.

Après mon élection, je pensais rester en situation de disponibilité, mais j’ai reçu un arrêté m’apprenant que j’étais placé en situation de détachement, position qui me permettait de continuer à bénéficier des avancements d’échelon et de grade, alors même que je n’exerçais plus ma fonction de magistrat financier.

Je propose que l’on en finisse avec ce genre de privilèges, qui engendrent des inégalités devant le suffrage.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’est fini depuis l’adoption du projet de loi relatif à la transparence de la vie publique !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. La commission des lois est défavorable à ces cinq amendements qui visent les fonctionnaires.

M. Henri de Raincourt. On aimerait bien savoir pourquoi !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Ces amendements tendent à obliger les fonctionnaires à démissionner de leur emploi en cas d’élection à un mandat parlementaire.

Une distinction a été établie entre les fonctionnaires selon la catégorie dont ils relèvent, mais j’observe que la catégorie A inclut l’ensemble des enseignants, soit plus de 1 million de personnes au total. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Il n’y a pas que les énarques dans cette catégorie !

Mme Jacqueline Gourault. Il y a aussi des professionnels de santé.

M. Manuel Valls, ministre. Le régime d’incompatibilités établi par le code électoral permet déjà de garantir l’indépendance des membres du Parlement à l’égard de l’exécutif.

Par ailleurs, la démission ne s’articule pas avec les modalités d’accès à la fonction publique en France, lequel se fait exclusivement par voie de concours.

En outre, comme l’a rappelé le président Sueur, le projet de loi relatif à la transparence de la vie publique, qui vient d’être adopté, a amélioré l’incompatibilité entre l’exercice d’un mandat parlementaire et celui d’un emploi public en prévoyant que les fonctionnaires élus au Parlement seront placés en situation de disponibilité.

Enfin, je formulerai une remarque plus générale, qui renvoie à d’autres débats que j’ai entendu évoquer. À juste titre, vous vous élevez contre les accusations de « ringardise » ou l’emploi de mots tels que « cumulards ». Je ne commenterai pas le choix souverain que vous avez fait hier de rétablir la possibilité, pour les seuls sénateurs, de cumuler leur mandat avec un mandat exécutif local, mais j’observe que vous avez en outre décidé d’autoriser également le cumul d’un mandat de sénateur avec d’autres fonctions, par exemple la présidence d’une société d’économie mixte. Et voilà que, avec ces amendements, que vous le vouliez ou non, vous visez l’ensemble des fonctionnaires… (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

Le message qu’envoie ainsi le Sénat nuira, permettez-moi de vous le dire, à son image. Ne vous étonnez donc pas que, après cela, les commentaires sur vos choix et vos votes soient particulièrement sévères. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.

Mme Sophie Primas. Je ne suis pas du tout contre les fonctionnaires et je ne fais partie de ceux qui pensent que c’est en leur retirant quelque chose que l’on améliorera la représentativité de cette assemblée. Je pense au contraire qu’il est très bien que les fonctionnaires élus au Parlement soient protégés et puissent retrouver leur emploi lorsqu’ils perdent leur mandat.

Comme l’a dit tout à l’heure M. Dallier, le problème est ailleurs : il a trait aux élus issus du secteur privé, qui comme moi ont abandonné leur travail pour s’engager dans la vie politique et y ont, soit dit en passant, perdu un peu en termes de rémunération.

Mme Sophie Primas. Je ne m’en plains pas, mais si demain je perds mon siège au Sénat, je devrai retourner dans le secteur privé. Je travaillais dans un grand groupe, mais depuis cinq ans d’autres ont pris ma place, ce qui est tout à fait normal. Comment s’opérera ma réintégration ?

Il s’agit non pas de stigmatiser les fonctionnaires et de leur retirer la possibilité d’être placés en situation de disponibilité, mais de prendre en compte le cas des salariés du privé élus au Parlement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Raymond Vall applaudit également.)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

M. Éric Doligé. Je ne veux pas laisser dire que je stigmatiserais les fonctionnaires. Ce n’est pas du tout mon objectif : mon objectif, c’est de mettre tout le monde à égalité.

M. David Assouline. Par le haut !

M. Éric Doligé. Créons donc un statut de l’élu pour placer les salariés du privé sur un pied d’égalité avec les fonctionnaires !

M. Éric Doligé. Je ne trouve pas normal de voir un ancien collègue nommé inspecteur général de l’éducation nationale alors qu’il enseignait en collège quelques années plus tôt, au moment de son élection, cela parce que sa carrière a continué de progresser durant son mandat et qu’il a bénéficié de certaines faveurs.

Je le répète, il ne s’agit pas de stigmatiser les fonctionnaires, mais il faut mettre tout le monde à égalité dans la société et donner à chacun les mêmes chances. C’est une question d’équité.

Je retire mes amendements, mais je soutiens celui de M. Détraigne, qui est moins maximaliste, nettement plus souple, puisqu’il ne vise que les fonctionnaires de catégorie A et n’instaure l’incompatibilité qu’à compter du deuxième mandat. À l’heure actuelle, certaines situations sont inadmissibles et inéquitables.

Mme Marie-Annick Duchêne et M. François Trucy. Très bien !

M. le président. Les amendements nos 22 rectifié, 23 rectifié, 24 rectifié et 25 rectifié sont retirés.

La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour explication de vote sur l’amendement n° 62 rectifié.

Mme Hélène Lipietz. Je suis une ancienne fonctionnaire, j’ai exercé une profession libérale et je ne veux qu’un seul mandat. Le président de notre groupe regrette d’ailleurs que je refuse de cumuler. Je ne l’ai jamais fait : j’ai détenu un mandat de conseillère municipale, puis un mandat de conseillère régionale, j’exerce maintenant un mandat de sénatrice, et j’ai déjà mon projet d’avenir… (Marques d’impatience sur diverses travées.) Chacun mène sa carrière comme il l’entend !

Manifestement, il y a une incompréhension concernant les fonctionnaires.

La catégorie A englobe bien sûr les enseignants, dont on ne semble pas avoir le droit de parler – certes, ils sont bien peu nombreux, mais c’est tout de même à eux que nous devons notre vernis de culture et de connaissances ! –, mais on y trouve aussi des infirmières. Si de tels amendements étaient votés, elles devraient démissionner en cas d’élection au Parlement. Elles ne pourraient plus alors retourner ultérieurement dans la fonction publique sans passer à nouveau un concours et recommencer de zéro. En revanche, dans la même situation, une infirmière du privé retrouverait aisément du travail, eu égard à la pénurie d’infirmières.

Les choses sont donc moins simples que certains ne le croient. Le groupe écologiste votera résolument contre l’amendement. (Mme Corinne Bouchoux applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.

M. Philippe Dallier. Je voudrais être certain que l’amendement défendu par M. Détraigne, qui reste donc seul en discussion, vise également les sénateurs, ce qui n’est pas forcément évident. Si tel est bien le cas, il me semblerait souhaitable de prévoir que son dispositif s’appliquera à compter du troisième mandat, et non de la première réélection, ce qui me paraît un peu raide. L’objectif est de parvenir un jour à l’égalité de traitement entre fonctionnaires et salariés du privé.

M. le président. La parole est à M. François Zocchetto, pour explication de vote.

M. François Zocchetto. Nous nous félicitons d’avoir déposé cet amendement, qui a le mérite d’avoir suscité un débat dont je préfère qu’il se tienne dans l’enceinte du Parlement, la question des relations entre celui-ci et la haute fonction publique donnant lieu à toutes sortes d’interprétations, notamment journalistiques.

Il ne fait aucun doute que l’élection d’un haut fonctionnaire au Parlement crée une situation particulière, qui doit être encadrée par des textes. Je sais bien qu’il existe déjà un certain nombre de dispositions en la matière, mais, vous l’aurez compris, notre amendement vise à prévenir les conflits d’intérêts.

Bien évidemment, il ne s’agit nullement pour nous de stigmatiser telle ou telle catégorie de fonctionnaires, y compris les hauts fonctionnaires. Notre objectif est de garantir l’indépendance du Parlement, en prévenant les conflits d’intérêts. Nous avons bien compris que la rédaction de notre amendement ne permettait pas de l’atteindre pleinement. Nous allons donc retirer celui-ci et poursuivre la réflexion, mais soyez certains que le sujet reviendra en débat.

M. le président. L'amendement n° 62 rectifié est retiré.

Mise au point au sujet d’un vote

Articles additionnels après l'article 1er quater
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Article 2

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. M. Jean-Luc Fichet m’a demandé de préciser que, hier soir, il souhaitait voter contre les amendements identiques nos 46, 58 et 63 et contre l’article 1er modifié. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Mise au point au sujet d'un vote
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Article 2 bis (nouveau)

Article 2

L’article L.O. 151 du même code est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) (nouveau) Les mots : « du mandat de son choix » sont remplacés par les mots : « d’un des mandats qu’il détenait antérieurement » ;

c) (nouveau) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :

« En cas d’élections acquises le même jour, le député est tenu, dans les mêmes conditions, de faire cesser l’incompatibilité en démissionnant du mandat acquis dans la circonscription comptant le moins grand nombre d’habitants. » ;

1° bis (nouveau) Au deuxième alinéa, le mot : « local » est supprimé ;

1° ter (nouveau) Après le mot : « jour, », la fin du troisième alinéa est ainsi rédigée : « le mandat qui prend fin de plein droit est celui acquis dans la circonscription comptant le moins grand nombre d’habitants. » ;

2° Le dernier alinéa est remplacé par un II ainsi rédigé :



« II. – Le député qui se trouve dans un des cas d’incompatibilité mentionnés à l’article L.O. 141-1 est tenu de faire cesser cette incompatibilité en démissionnant du mandat ou de la fonction qu’il détenait antérieurement, au plus tard le trentième jour qui suit la date de la proclamation des résultats de l’élection qui l’a mis en situation d’incompatibilité ou, en cas de contestation, la date à laquelle le jugement confirmant cette élection est devenu définitif. En cas d’élections acquises le même jour, le député est tenu, dans les mêmes conditions, de faire cesser l’incompatibilité en démissionnant du mandat ou de la fonction acquis dans la circonscription comptant le moins grand nombre d’habitants.



« À défaut, le mandat ou la fonction acquis à la date la plus ancienne prend fin de plein droit. En cas d’élections acquises le même jour, le mandat ou la fonction qui prend fin de plein droit est celui ou celle acquis dans la circonscription comptant le moins grand nombre d’habitants. »

M. le président. L'amendement n° 26 rectifié, présenté par MM. Doligé, Cardoux, Fleming et Beaumont, est ainsi libellé :

Alinéa 10

Après la référence :

L.O. 141-1

insérer les mots :

et à l'article L.O. 147-2

et après les mots :

ou de la fonction

insérer les mots :

ou de l'emploi

Monsieur Doligé, cet amendement n’a plus d’objet, me semble-t-il.

M. Éric Doligé. Effectivement, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 2
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Article 3

Article 2 bis (nouveau)

Après les mots : « son élection », la fin du dernier alinéa de l’article L.O. 136-3 du même code est supprimée. – (Adopté.)

Article 2 bis (nouveau)
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Mise au point au sujet de votes

Article 3

I. – Le premier alinéa de l’article L.O. 176 du même code est ainsi rédigé :

« Sous réserve du second alinéa du présent article, les députés dont le siège devient vacant pour toute autre cause que l’annulation de l’élection, la démission d’office prononcée par le Conseil constitutionnel en application de l’article L.O. 136-1, la démission intervenue pour tout autre motif qu’une incompatibilité prévue aux articles L.O. 137, L.O. 137-1, L.O. 141 ou L.O. 141-1 ou la déchéance constatée par le Conseil constitutionnel en application de l’article L.O. 136 sont remplacés jusqu’au renouvellement de l’Assemblée nationale par les personnes élues en même temps qu’eux à cet effet. »

II. – Le premier alinéa de l’article L.O. 178 du même code est ainsi rédigé :

« En cas d’annulation des opérations électorales, de vacance causée par la démission d’office prononcée par le Conseil constitutionnel en application de l’article L.O. 136-1, par la démission intervenue pour tout autre motif qu’une incompatibilité prévue aux articles L.O. 137, L.O. 137-1, L.O. 141 ou L.O. 141-1 ou par la déchéance constatée par le Conseil constitutionnel en application de l’article L.O. 136, ou lorsque le remplacement prévu à l’article L.O. 176 ne peut plus être effectué, il est procédé à des élections partielles dans un délai de trois mois. »

III. – Le premier alinéa de l’article L.O. 319 du même code est ainsi rédigé :

« Sous réserve du second alinéa du présent article, les sénateurs élus au scrutin majoritaire dont le siège devient vacant pour toute autre cause que l’annulation de l’élection, la démission d’office prononcée par le Conseil constitutionnel en application de l’article L.O. 136-1, la démission intervenue pour tout autre motif qu’une incompatibilité prévue aux articles L.O. 137, L.O. 137-1, L.O. 141 ou L.O. 141-1 ou la déchéance constatée par le Conseil constitutionnel en application de l’article L.O. 136 sont remplacés par les personnes élues en même temps qu’eux à cet effet. »

IV. – Le premier alinéa de l’article L.O. 322 du même code est ainsi rédigé :

« En cas d’annulation des opérations électorales, de vacance causée par la démission d’office prononcée par le Conseil constitutionnel en application de l’article L.O. 136-1, par la démission intervenue pour tout autre motif qu’une incompatibilité prévue aux articles L.O. 137, L.O. 137-1, L.O. 141 ou L.O. 141-1 ou par la déchéance constatée par le Conseil constitutionnel en application de l’article L.O. 136, ou lorsque le remplacement prévu aux articles L.O. 319 et L.O. 320 ne peut plus être effectué, il est procédé à des élections partielles dans un délai de trois mois. »

M. le président. L'amendement n° 51, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, est ainsi libellé :

Alinéas 2 et 4

Après les mots :

de l’article L.O. 136-1

insérer (deux fois) les mots :

, de prolongation au-delà du délai de six mois d'une mission temporaire confiée par le Gouvernement en application de l’article L.O. 144

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Les missions temporaires confiées par le Gouvernement aux parlementaires ne peuvent excéder six mois, durée au-delà de laquelle le parlementaire en mission est remplacé de droit par son suppléant.

Ce dispositif, qui maintient une subordination du parlementaire au pouvoir exécutif, a été trop souvent détourné de sa finalité ; on a pu le voir encore récemment. Nombre de missions n’ont jamais donné lieu à l’établissement d’un rapport, permettant, au-delà de six mois, une sortie honorable sans élection partielle à risque. L’impératif de souveraineté du peuple impose, à nos yeux, qu’une élection partielle soit, dans un tel cas, organisée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Cet amendement tend à supprimer le remplacement du parlementaire par son suppléant lorsqu’il est renouvelé au-delà de six mois dans ses fonctions de parlementaire chargé d’une mission temporaire auprès du Gouvernement.

Ce cas de remplacement en lieu et place d’une élection partielle existe depuis 1958. Les auteurs de l’amendement considèrent que, dans ce cas où le remplacement est lié à une décision discrétionnaire du Gouvernement, le principe de l’élection partielle devrait prévaloir. La commission des lois a très largement partagé ce point de vue et a donc émis un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Les manœuvres évoquées par l’auteur de l’amendement pour justifier sa proposition ont sans doute existé… (Sourires sur les travées de l’UMP.)

M. Roger Karoutchi. On va dire que oui…

M. Manuel Valls, ministre. Peut-être ! J’ai été un jeune parlementaire, je suis maintenant un jeune ministre : je n’ai jamais vu de pratiques de ce type. Quoi qu’il en soit, je crois très honnêtement qu’elles demeurent circonscrites.

Il s’agirait, pour un gouvernement, de confier à un parlementaire une mission ou la rédaction d’un rapport à seule fin de provoquer son remplacement par son suppléant à l’issue du délai de six mois. Ce n’est pas notre conception de l’action publique : lorsque le Gouvernement confie une mission à parlementaire, l’objectif est d’éclairer un enjeu de politique publique. Dès lors, quand l’accomplissement de la mission requiert un travail substantiel pendant une durée supérieure à six mois, il ne semble pas justifié de procéder à une élection partielle pour pourvoir au remplacement du parlementaire concerné, dont l’investissement au service de la chose publique ne saurait être mis en question, son suppléant étant habilité à reprendre son mandat.

Je crois qu’il faut laisser un peu de souplesse. C'est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre, eu égard à votre opposition affirmée au cumul et à votre souci de rigueur, je pensais vraiment que vous émettriez un avis favorable.

Je ne jette la pierre à personne : à droite comme à gauche, tout le monde a pratiqué le système décrit par Jacques Mézard, pas toujours sur l’initiative du Gouvernement, d'ailleurs. Souvent, en effet, ce sont les formations politiques qui lui demandent de confier une mission à un parlementaire pour faire remplacer celui-ci par son suppléant, sans passer par une élection partielle au résultat incertain… (Eh oui ! sur certaines travées de l'UMP.)

Ce n’est pas une pratique d’une grande élégance à l’égard des électeurs, ni très respectueuse de la démocratie. Accordons-nous tous pour mettre un terme au procédé peu glorieux consistant à organiser le dépassement du délai de six mois imparti au parlementaire pour accomplir la mission confiée par le Gouvernement afin de permettre au suppléant de reprendre son siège sans passer par une élection.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 51.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. L'amendement n° 31 rectifié, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 2

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

... - L'article L.O. 176 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les députées ont le droit de bénéficier d'un congé de maternité défini aux articles L. 1225-17 à L. 1225-23 du code du travail. Les députées qui bénéficient d'un congé de maternité peuvent être remplacées pendant la durée du congé de maternité par les personnes élues en même temps qu'elles à cet effet. Ces suppléants ne bénéficient d'aucune indemnité. »

... - Au début de l'article L.O. 321 du même code, les mots : « Les dispositions de » sont remplacés par les mots : « Le dernier alinéa de l'article L.O. 176 et ».

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement n° 32 rectifié.

M. le président. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 32 rectifié, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, et ainsi libellé :

Après l’alinéa 2

Insérer trois alinéas ainsi rédigés :

... - L’article L.O. 176 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les députés ont le droit de bénéficier d’un congé parental d’éducation défini aux articles L. 1225-47 à L. 1225-53 du code du travail. Les députés qui bénéficient d’un congé parental d’éducation peuvent être remplacés pendant la durée de ce congé par les personnes élues en même temps qu’eux à cet effet. Ces suppléants ne bénéficient d’aucune indemnité. »

... - Au début de l'article L.O. 321 du même code, les mots : « Les dispositions de » sont remplacés par les mots : « Le dernier alinéa de l'article L.O. 176 et ».

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Mme Hélène Lipietz. Ces deux amendements concernent le cas très spécifique, surtout dans notre assemblée, des jeunes femmes qui ont le bonheur d’être à la fois parlementaires et « en chemin de famille », comme l’on dit en Poitou.

L’amendement n° 31 rectifié vise à permettre aux femmes parlementaires de bénéficier d’un congé de maternité et d'être remplacées par leur suppléant durant celui-ci.

Dans le même esprit, l’amendement n° 32 rectifié tend à ouvrir le droit aux parlementaires, hommes et femmes, de bénéficier d’un congé parental d’éducation et d’être remplacés par leur suppléant pendant celui-ci.

Il existe actuellement un manque, dans la mesure où nous n’avons pas encore adopté de véritable statut de l’élu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. La commission pense que ces amendements soulèvent une vraie question. Cependant, ils n’ont aucun lien, même indirect, avec le texte en discussion, qui tend à interdire le cumul de fonctions exécutives locales avec un mandat de parlementaire. J’ajoute que leur rédaction ne mentionnant que les seuls députés, leur dispositif, s’il devait être adopté, ne s’appliquerait pas aux membres de notre assemblée. Je vous demande donc de bien vouloir les retirer, madame Lipietz ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Même avis.

M. le président. Madame Lipietz, les amendements nos 31 rectifié et 32 rectifié sont-ils maintenus ?

Mme Hélène Lipietz. Non, je les retire, monsieur le président. Je compte cependant les redéposer sur le texte qui créera un véritable statut du parlementaire.

M. le président. Les amendements nos 31 rectifié et 32 rectifié sont retirés.

Mise au point au sujet de votes

M. le président. La parole est à Mme Catherine Tasca.

Article 3
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Article 3

Mme Catherine Tasca. Je n’ai pu participer à la séance d’hier, étant retenue dans ma circonscription. J’ai découvert ce matin que j’ai été déclarée comme n’ayant pas pris part aux votes sur les amendements identiques nos 46, 58 et 63, d’une part, et sur l’article 1er modifié, d’autre part. Or je souhaitais voter contre.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique des scrutins.

Mise au point au sujet de votes
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Mises au point au sujet de votes

Article 3 (suite)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.

L'amendement n° 50 est présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen.

L'amendement n° 60 est présenté par M. Bas et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.

L'amendement n° 65 est présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Alinéas 5 et 6

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 50.

M. Jacques Mézard. Il s'agit simplement d’un amendement de coordination avec l’adoption hier des amendements permettant aux sénateurs de cumuler leur mandat avec une fonction exécutive locale. Depuis ce matin, il manque trois voix à la majorité qui a adopté ces amendements ; j’espère que l’hémorragie va s’arrêter ! (M. Roger Karoutchi rit.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour présenter l'amendement n° 60.

M. Philippe Bas. Cet amendement tire la conséquence naturelle de notre vote de cette nuit, qui a rouvert la possibilité de cumuler une fonction exécutive locale avec un mandat parlementaire.

J’ajoute que son adoption constituera un élément supplémentaire pour assurer le retour du projet de loi organique devant le Sénat si le Gouvernement obtient de l’Assemblée nationale le rétablissement de l’interdiction d’un tel cumul. En effet, nous aurons alors rejeté une disposition du texte relative au Sénat. Or, aux termes de l’article 46, alinéa 4, de la Constitution, « les lois organiques relatives au Sénat doivent être votées dans les mêmes termes par les deux assemblées ». Par conséquent, le Gouvernement ne pourra pas passer en force en donnant le dernier mot à l’Assemblée nationale.

Depuis le début de ce débat, nous sommes animés par le souci de rechercher un compromis avec les députés. Nous avons bien compris que le Gouvernement ne partage pas cette orientation et entend imposer en force son point de vue et celui de la majorité de l’Assemblée nationale. Toutefois, nous ne désespérons pas d’aboutir à un compromis, car nous sommes forts de notre droit. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. François Zocchetto, pour présenter l'amendement n° 65.

M. François Zocchetto. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Ces trois amendements identiques tirent la conséquence de l’adoption par le Sénat, hier soir, de trois autres amendements identiques déposés par les mêmes groupes. La commission y est donc favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Ces amendements tirant la conséquence du vote d’hier soir, le Gouvernement, par cohérence avec la position qu’il avait adoptée alors, émet un avis défavorable.

Quant au débat dont les termes viennent d’être exposés par M. Bas, chacun connaît nos divergences sur le sujet.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 50, 60 et 65.

J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public, émanant l'une du groupe de l'UDI-UC, l'autre du groupe UMP.

Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 345 :

Nombre de votants 315
Nombre de suffrages exprimés 307
Pour l’adoption 211
Contre 96

Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur certaines travées de l'UMP.)

Je mets aux voix l'article 3, modifié.

J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public, émanant l'une du groupe de l'UDI-UC, l'autre du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 346 :

Nombre de votants 313
Nombre de suffrages exprimés 305
Pour l’adoption 211
Contre 94

Le Sénat a adopté.

Mises au point au sujet de votes

Article 3
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Article 3 bis (nouveau)

M. le président. La parole est à M. François-Noël Buffet.

M. François-Noël Buffet. Lors des scrutins nos 343 et 344, Mme Fabienne Keller et M. Jean-René Lecerf ont été déclarés comme votant pour, alors qu’ils souhaitaient voter contre. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Lors des scrutins nos 343 et 344, M. Jean Louis Masson a été déclaré comme n’ayant pas pris part au vote, alors qu’il voulait voter contre. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

M. le président. Mes chers collègues, acte vous est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique des scrutins.

Mises au point au sujet de votes
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Article additionnel après l'article 3 bis

Article 3 bis (nouveau)

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Avant le dernier alinéa de l’article L. 2122-18, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les membres du conseil municipal exerçant un mandat de député, de sénateur ou de représentant au Parlement européen ne peuvent recevoir ou conserver de délégation, sauf si celle-ci porte sur les attributions exercées au nom de l’État mentionnées à la sous-section 3 de la présente section. » ;

2° Avant le dernier alinéa de l’article L. 3221-3, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les membres du conseil départemental exerçant un mandat de député, de sénateur ou de représentant au Parlement européen ne peuvent recevoir ou conserver de délégation. » ;

3° Avant le dernier alinéa de l’article L. 4231-3, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les membres du conseil régional exerçant un mandat de député, de sénateur ou de représentant au Parlement européen ne peuvent recevoir ou conserver de délégation. » ;

4° L’article L. 5211-9 est ainsi modifié :

a) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :





« Les membres du bureau exerçant un mandat de député, de sénateur ou de représentant au Parlement européen ne peuvent recevoir ou conserver de délégation. » ;

b) Le début du quatrième alinéa est ainsi rédigé : « Le président est... (le reste sans changement). » – (Adopté.)

Article 3 bis (nouveau)
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Article 3 ter A (nouveau)

Article additionnel après l'article 3 bis

M. le président. L'amendement n° 30, présenté par Mme Klès, est ainsi libellé :

Après l'article 3 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Les sénateurs assistent, sans voix délibérative, aux réunions des commissions et instances consultatives ou délibératives placées, au niveau départemental ou régional, auprès du représentant de l'État ou placées sous la tutelle de ce dernier.

La parole est à Mme Virginie Klès.

Mme Virginie Klès. Cet amendement, dont la rédaction est sans doute perfectible, vise à garantir aux sénateurs de participer ès qualité aux travaux de certaines commissions. Il s’agit non pas de leur attribuer une fonction ou un mandat exécutif supplémentaire, mais de leur permettre de rester en prise avec les préoccupations des élus locaux.

Aujourd’hui, par exemple, les sénateurs ne participent pas ès qualité aux travaux de la commission départementale de l’éducation nationale, au comité départemental de sécurité ou à la commission départementale de coopération intercommunale ; ils ne peuvent y être associés qu’au titre d’un mandat local.

Si cet amendement est adopté, tous les sénateurs pourront entendre les élus locaux s’exprimer sur ces sujets. Leur voix ne sera que consultative, pour ne pas affecter les équilibres politiques locaux au sein des commissions visées, mais il me paraît intéressant qu’ils puissent prendre la parole dans ces instances.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Mme Klès propose de conférer aux sénateurs une présence de droit dans l’ensemble des instances placées auprès du préfet de département ou de région, ou placées sous leur tutelle.

Je ne suis pas totalement sûr que cette disposition doive figurer dans la loi organique. Sur le fond, je suis sceptique quant à la nécessité de convier les sénateurs à l’ensemble des réunions qui peuvent être organisées au sein des services de l’État. Cela présenterait d’ailleurs un risque d’immixtion dans le fonctionnement des services déconcentrés.

Enfin, mes chers collègues, cette nouvelle charge serait peu compatible avec l’objectif affiché de cette réforme, à savoir donner du temps aux parlementaires pour qu’ils puissent mieux exercer leur fonction.

La commission des lois a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Même avis.

M. le président. Madame Klès, maintenez-vous votre amendement ?

Mme Virginie Klès. Oui, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 30.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Jean-Jacques Mirassou. C’est bien dommage !

Article additionnel après l'article 3 bis
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Article additionnel après l'article 3 ter A

Article 3 ter A (nouveau)

Au dernier alinéa de l’article 4 de l’ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l’indemnité des membres du Parlement, les mots : « ou qui préside une telle société » sont supprimés.

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les amendements nos 35 et 39 sont identiques.

L'amendement n° 35 est présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé.

L'amendement n° 39 est présenté par M. Gorce.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Rédiger ainsi cet article :

Après les mots : « d’autres mandats électoraux », la fin du dernier alinéa de l’article 4 de l’ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l’indemnité des membres du Parlement est ainsi rédigée : « ne peut cumuler les rémunérations et indemnités afférentes à ces mandats avec son indemnité parlementaire de base ».

La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour présenter l’amendement n° 35.

Mme Hélène Lipietz. Il s’agit de prévoir que l’indemnité parlementaire soit exclusive de toute autre indemnité de mandat ou de fonction. Si un parlementaire veut exercer d’autres mandats, il devra le faire à titre gracieux.

Je suis tout à fait consciente du caractère diffamatoire, pour ceux qui cumulent plusieurs mandats, des accusations, diffusées notamment sur internet, selon lesquelles ils pourraient toucher jusqu’à 50 000 ou même 100 000 euros d’indemnités par mois. Si cet amendement est adopté, il n’y aura plus de problème à cet égard, puisqu’ils ne toucheront plus que la seule indemnité parlementaire.

M. le président. L’amendement n° 39 n’est pas soutenu.

L'amendement n° 42 rectifié, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le dernier alinéa de l’article 4 de l'ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l'indemnité des membres du Parlement est ainsi modifié :

1° Après les mots : « société d'économie mixte locale », sont insérés les mots : « , d'une société publique locale ou d'une société publique locale d'aménagement » ;

2° Les mots : « que dans la limite d'une fois et demie le montant de cette dernière » sont supprimés.

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. La confusion entre cumul des indemnités et cumul des mandats est tout à fait désagréable.

M. Henri de Raincourt. C’est vrai !

M. Jacques Mézard. Nous aussi, monsieur le rapporteur, tenons à être respectés. Cet amalgame, répandu dans l’opinion, a même été repris sur la chaîne Public Sénat, dans des conditions qui n’étaient pas honorables.

Le groupe RDSE a déposé voilà plus d’un an une proposition de loi sur le sujet, qui a été inscrite à l’ordre du jour de notre assemblée. Malheureusement, la règle des quatre heures qui prévaut pour les niches parlementaires réservées a empêché que la discussion aille à son terme. Je pense que nous n’aurons plus l’occasion de la reprendre, mais nous avons ainsi montré très clairement qu’il ne fallait pas tomber dans ce piège, dans cette caricature qui pousse à assimiler cumul des indemnités et cumul des mandats.

Un sénateur du groupe UMP. Très bien !

M. Jacques Mézard. À cet égard, nous avons considéré, avant les autres, que la modernisation de la vie publique était possible. Malheureusement, ce message n’a pas été entendu, y compris sur la chaîne Public Sénat.

Cet amendement a donc pour objet d’interdire aux députés et aux sénateurs de cumuler leur indemnité parlementaire avec toute autre indemnité découlant d’une fonction élective. Je pense que cette proposition devrait recueillir un large consensus.

M. le président. L'amendement n° 64 rectifié, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Au dernier alinéa de l’article 4 de l’ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l’indemnité des membres du Parlement, les mots : « que dans la limite d’une fois et demie le montant de cette dernière » sont supprimés.

La parole est à M. François Zocchetto.

M. François Zocchetto. L’amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Par cohérence avec la position qu’elle avait adoptée sur la proposition de loi du RDSE, la commission est favorable à ces trois amendements. Cela étant, si le premier est adopté, les deux autres n’auront plus d’objet.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Le Gouvernement comprend l’objet de ces amendements, qui témoignent de l’engagement désintéressé des élus. Il s’en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote sur l’amendement n° 35.

M. René-Paul Savary. Ces amendements montrent la sincérité et la détermination des élus qui veulent cumuler une fonction exécutive locale et leur mandat de parlementaire. Ce ne sont pas les indemnités qui les motivent ; il s’agit d’un vrai choix de vie, opéré dans un esprit de responsabilité. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe CRC.) C’est parce qu’ils sont attachés à leur fonction exécutive locale qu’ils veulent concilier celle-ci avec l’exercice de leur mandat de parlementaire.

Mme Éliane Assassi. Sortez les violons !

M. René-Paul Savary. Je soutiens donc ces amendements, mais il faudrait également, à mon sens, appliquer la mesure au cumul horizontal.

M. René-Paul Savary. En effet, déjà aujourd’hui, avec l’écrêtement applicable aux parlementaires, le président de conseil général et sénateur que je suis n’est pas le mieux rémunéré des conseillers généraux de son département. J’ai en tête le cas d’un conseiller général, maire d’une ville, président d’une agglomération, vice-président d’un syndicat, et j’en passe : toutes ces fonctions font l’objet d’une rémunération, et il continue en outre à exercer une activité professionnelle…

M. Manuel Valls, ministre. Vous réglerez vos comptes ailleurs !

M. René-Paul Savary. Cette forme de cumul horizontal devra également être prise en compte. Le dispositif proposé ne permet pas de régler ce problème. Il nous faut donc pousser plus avant la réflexion.

Dans cette attente, je le répète, je soutiens ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

M. Éric Doligé. Je suis non pas jaloux, mais soucieux d’équité. Il convient que tous les élus soient logés à la même enseigne. Depuis des années, nous, parlementaires, ne cessons de nous flageller et de demander pardon à tout le monde, mais il n’y a pas de raison que d’autres puissent s’exonérer des limites que nous nous appliquons.

Je suis donc d’accord avec les propositions des auteurs des amendements, sous certaines conditions. Hier, M. le rapporteur a critiqué vertement mon amendement portant sur le même sujet – ce dont je ne me suis pas plaint –, en disant qu’il n’était pas bien rédigé… (Sourires.)

M. Simon Sutour, rapporteur. C’est la commission qui s’est prononcée !

M. Éric Doligé. Soit ! Je n’en ai pas pris ombrage, mais pour ma part j’estime qu’il était clair et bien rédigé.

Quoi qu’il en soit, je pense qu’il faut instaurer l’équité entre tous les élus, qu’ils soient nationaux ou locaux.

Par ailleurs, j’aimerais savoir si la mesure prévue sera d’application immédiate, dès la promulgation de la loi, ou entrera en vigueur en 2017. Il faut être précis en la matière, car ce n’est pas tout à fait la même chose.

Enfin, il faut s’atteler sérieusement à la question du statut de l’élu. On est en train d’adopter des dispositions qui créent un véritable brouillard, et l’on nous dira ensuite qu’il n’est pas nécessaire d’élaborer un statut de l’élu, un certain nombre de problèmes ayant déjà été réglés au travers de différentes lois.

Je ne voterai ces amendements qu’à condition d’obtenir des réponses sur les différents points que je viens d’évoquer.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 35.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 3 ter A est ainsi rédigé et les amendements nos 42 rectifié et 64 rectifié n'ont plus d'objet.

Article 3 ter A (nouveau)
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Article 3 ter (nouveau)

Article additionnel après l'article 3 ter A

M. le président. L'amendement n° 38, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Après l’article 3 ter A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l’article L.O. 227-3 du code électoral, la référence : « n° 98-404 du 25 mai 1998 » est remplacée par la référence : « n° … du … relative à l’interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou sénateur. »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Monsieur le ministre, lors de l’examen d’un précédent projet de loi organique, vous aviez refusé de mettre en conformité la loi française avec le droit européen, qui ouvre à tous les ressortissants de l’Union européenne le droit de voter aux élections municipales ou européennes en France. Or, en vertu de notre droit électoral actuel, les personnes sans domicile fixe citoyennes d’un État membre de l’Union européenne ne peuvent pas voter dans notre pays, ce qui est véritablement scandaleux. Ce droit doit leur être reconnu, même s’ils ne l’exercent pas.

Sachant que des élections européennes auront lieu l’an prochain, il est nécessaire de trouver de toute urgence le véhicule législatif adéquat pour permettre à ces personnes d’y participer.

M. Jean-Jacques Mirassou. C’est un cavalier, cette disposition n’a rien à faire dans ce texte !

Mme Hélène Lipietz. J’avais déjà déposé cet amendement sur un texte qui s’y prêtait. Il avait reçu un avis favorable de la commission, mais le Gouvernement s’y était opposé. Je mets aujourd'hui M. le ministre face à ses responsabilités européennes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Cet amendement tient à cœur à Mme Lipietz, qui le présente régulièrement. Cependant, il n’a aucun lien, direct ou indirect,…

M. Jean-Jacques Mirassou. Absolument aucun !

M. Simon Sutour, rapporteur. … avec le projet de loi organique que nous examinons.

C’est pourquoi la commission des lois vous demande, ma chère collègue, de bien vouloir le retirer ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Madame la sénatrice, votre amendement est ce que l’on appelle un cavalier législatif. En conséquence, le Gouvernement y est défavorable.

M. le président. Madame Lipietz, l'amendement n° 38 est-il maintenu ?

Mme Hélène Lipietz. Je le retire, monsieur le président, mais je le redéposerai jusqu’à ce que l’on trouve le bon véhicule législatif. (Mme Corinne Bouchoux applaudit.)

M. le président. L'amendement n° 38 est retiré.

Article additionnel après l'article 3 ter A
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Mise au point au sujet de votes

Article 3 ter (nouveau)

La présente loi organique est applicable sur l’ensemble du territoire de la République.

M. le président. L'amendement n° 70 rectifié, présenté par M. Patient, Mme Claireaux et M. J. Gillot, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Les incompatibilités prévues à l'article L.O. 141-1 du code électoral ne sont pas applicables aux sénateurs élus dans le cadre de circonscriptions comprises au sein de collectivités territoriales relevant de l’article 73 ou de l’article 74 de la Constitution ou en Nouvelle-Calédonie.

La parole est à Mme Karine Claireaux.

Mme Karine Claireaux. La Constitution française reconnaît le caractère spécifique des outre-mer. Bon nombre de dispositions leur sont propres, en raison de leurs caractéristiques et contraintes particulières, notamment leur isolement et leur éloignement de la métropole.

Ainsi, même les collectivités régies par le principe d’identité législative ont des compétences plus larges que les collectivités métropolitaines. Elles ont des pouvoirs spécifiques en matière d’urbanisme, participent au Fonds régional pour le développement et l’emploi, gèrent l’octroi de mer, financent un revenu de solidarité spécifique aux DOM, disposent de compétences étendues en matière maritime et de coopération régionale.

« Autant de dispositions dont l’ampleur et l’acuité nécessitent une meilleure prise en considération par l’État, d’autant qu’elles sont parfois l’expression de l’incapacité de ce dernier à assurer pleinement ses missions régaliennes ou de régulation » : cette phrase est issue du rapport établi par la mission commune d’information sur la situation dans les départements d’outre-mer.

Il faut donc assurer une veille permanente entre le national et le local, ce que le parlementaire ultramarin est mieux à même de faire lorsqu’il détient en outre un mandat de maire ou une fonction exécutive départementale ou régionale.

C’est la situation des outre-mer par rapport à la donne centralisatrice française qui impose cette logique politique : en détenant un mandat de parlementaire, les élus locaux peuvent mieux défendre les intérêts de leurs territoires coupés du pouvoir central. Ainsi, il est plus aisé pour un élu national que pour un conseiller municipal, général ou régional de contacter un ministre afin d’évoquer avec lui un problème local.

C’est une réalité encore plus prégnante pour les outre-mer, eu égard à la nécessité, pour les élus locaux, de maîtriser le processus de mise en œuvre de politiques définies au niveau national.

M. Manuel Valls, ministre. L’amendement n’est-il pas déjà satisfait ?...

Mme Karine Claireaux. Le cumul permet ainsi d’ajuster et d’articuler des politiques nationalement définies aux besoins des territoires. Le prohiber avant la mise en place d’une réelle et effective décentralisation assortie de tous les moyens correspondants serait faire preuve de légèreté et ne ferait que creuser davantage le fossé d’incompréhension qui peut exister entre la France et ses territoires ultramarins.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. À l’instar de nombre de nos collègues, j’ai une sympathie toute particulière pour les outre-mer.

Cependant, cet amendement tend à créer une dérogation au régime des incompatibilités parlementaires pour les sénateurs ultramarins. Aucune justification ne me paraît pouvoir valider une telle exception. Par ailleurs, la constitutionnalité de cette disposition est douteuse.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Même avis.

M. François Zocchetto. Cet amendement est satisfait !

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Hyest, pour explication de vote.

M. Jean-Jacques Hyest. Ma chère collègue, nous avons adopté hier une disposition permettant aux sénateurs d’exercer un mandat exécutif local. Or celle-ci concerne aussi les sénateurs ultramarins. À mon sens, votre amendement est donc satisfait.

M. Manuel Valls, ministre. Tout à fait !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Simon Sutour, rapporteur. En fait, l’amendement de nos collègues vise à permettre le cumul de plusieurs fonctions exécutives locales avec un mandat de sénateur.

M. Jean-Jacques Hyest. Dans ce cas, je ne le voterai pas !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 70 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 3 ter.

(L'article 3 ter est adopté.)

Mise au point au sujet de votes

Article 3 ter (nouveau)
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Article 4

M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage.

Mme Claudine Lepage. Lors du scrutin n° 343 sur les amendements identiques nos 46, 58 et 63 et du scrutin n° 344 sur l’article 1er modifié, je souhaitais voter contre. (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)

M. Philippe Dallier. C’est la commission d’investiture qui se réveille ! (Sourires.)

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique des scrutins.

Mise au point au sujet de votes
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Intitulé du projet de loi organique

Article 4

La présente loi organique s’applique à tout parlementaire à compter du premier renouvellement de l’assemblée à laquelle il appartient suivant le 31 mars 2017.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 33, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Tout parlementaire qui se trouve, à la date de publication de la présente loi organique, dans l’un des cas d’incompatibilité qu’elle institue doit faire cesser cette incompatibilité au plus tard lors du renouvellement de son mandat parlementaire.

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Nous reprenons, par cet amendement, une disposition concernant la date d’application du régime des incompatibilités qui avait été introduite dans la loi organique de 2000 relative aux incompatibilités entre mandats électoraux.

Tout parlementaire qui se trouvera, à la date de la publication de la présente loi organique, dans l’un des cas d’incompatibilité qu’elle institue devra mettre un terme à cette situation au plus tard lors du renouvellement de son mandat parlementaire.

M. le président. L'amendement n° 34, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Tout parlementaire qui se trouve, à la date de la publication de la présente loi organique, dans l'un des cas d'incompatibilité qu'elle institue peut continuer d'exercer les mandats et fonctions qu'il détient jusqu'au terme de celui d'entre eux qui, pour quelque cause que ce soit, prend fin le premier.

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. L’amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Ces amendements tendent à rendre applicable la nouvelle incompatibilité instaurée entre un mandat parlementaire et toute fonction exécutive locale dès le prochain renouvellement sénatorial, en septembre 2014. Son adoption aurait pour conséquence d’instituer une inégalité entre parlementaires, les sénateurs de la série 2 se voyant appliquer les nouvelles règles trois ans avant leurs collègues de la série 1 et les députés.

Introduire une telle inégalité de traitement n’est pas souhaitable. C’est pourquoi la commission vous demande, ma chère collègue, de bien vouloir retirer vos amendements ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 33.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 34.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 4.

(L'article 4 est adopté.)

Intitulé du projet de loi organique

Article 4
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Explications de vote sur l'ensemble

M. le président. L'amendement n° 52, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, est ainsi libellé :

Remplacer les mots :

ou de sénateur

par les mots :

et limitant à une seule fonction exécutive locale le cumul avec le mandat de sénateur

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Il convient, nous semble-t-il, de mettre l’intitulé du texte en concordance avec son contenu. Tel est l’objet de cet amendement de coordination.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Par cohérence, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Manuel Valls, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

Le Sénat a certes adopté une modification qui dénature le texte initial du Gouvernement, mais, en tout état de cause, la loi organique a vocation à s’appliquer non pas aux seuls sénateurs, mais à l’ensemble des parlementaires.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 52.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’intitulé du projet de loi organique est ainsi rédigé : « Projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député et limitant à une seule fonction exécutive locale le cumul avec le mandat de sénateur ».

Vote sur l'ensemble

Intitulé du projet de loi organique
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Mise au point au sujet de votes

M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi organique, je donne la parole à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Mme Éliane Assassi. Le groupe CRC a soutenu le projet de loi organique tel qu’il nous a été présenté. Nous l’avons expliqué tout au long du débat, ce texte, bien qu’incomplet, répondait à l’exigence de démocratisation de la vie politique que nous avons toujours affirmée.

Une majorité des membres du Sénat a vidé ce texte de son contenu, préférant maintenir le principe du cumul ; nous le regrettons. En effet, à nos yeux, c’est en faisant participer notre assemblée au progrès de la démocratie, sans la laisser s’ancrer dans un certain conservatisme qui dessert sa cause, que l’on défend le Sénat de la République et le bicamérisme.

Je peux entendre certains des arguments qui ont été avancés, par exemple celui de la nécessité pour les élus nationaux d’avoir un ancrage local. Sur ce sujet, nous avons ouvert quelques pistes de réflexion : il faut sans doute inventer d’autres formes d’immersion dans la vie locale, en associant la population aux choix qui la concernent.

De fait, je pense que la limitation du cumul des mandats ne peut se concevoir sans le développement de ce que l’on appelle la démocratie participative, même si cette notion ne me plaît guère.

Je souligne que nous sommes des élus de la nation et que nous la représentons dans son intégralité ; en aucun cas les intérêts locaux ne doivent prévaloir sur l’intérêt général.

Au cours de ce débat, ont été présentés des arguments que je trouve dangereux sur le plan des idées. Je pense notamment à la remise en cause des partis politiques. À cet égard, mes chers collègues, je vous rappelle que, dans l’histoire de France, les périodes où les partis politiques ont été le plus attaqués ont toujours été des temps de recul démocratique. Les partis politiques forgent le débat d’idées ; les remettre en cause, c’est préparer le retour à une politique de notables, qui évacue la confrontation d’idées et ne garantit en rien le débat démocratique.

Il existe aujourd’hui une grave crise de la représentation : il faut y apporter de véritables solutions, en particulier en se dirigeant rapidement vers une VIRépublique qui redonne du pouvoir au peuple. (Murmures sur les travées de l'UMP.)

Le présent texte est un prélude, un premier pas vers cet objectif que mon groupe défend. C’est pourquoi nous l’avons d’abord soutenu, mais nous ne pourrons que voter contre, maintenant qu’il est privé de tout contenu. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas.

M. Philippe Bas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout au long de ce débat, le groupe auquel j’appartiens a voulu maintenir le lien entre le Parlement et les citoyens de nos territoires. Il a voulu faire en sorte que la voix des territoires soit portée au Parlement et que l’expérience acquise au service de nos concitoyens dans l’exercice de responsabilités locales, depuis celles de maire de petite commune jusqu’à celles de président de conseil régional, continue à profiter au travail parlementaire. Il a voulu préserver cette expertise si utile à l’élaboration de lois de qualité, ne reposant pas seulement sur une doctrine, sur une idéologie politique, mais également sur une bonne connaissance des réalités que vivent nos compatriotes, fondée sur une expérience de la gestion des services publics locaux.

Mon groupe n’a jamais été fermé à l’actualisation des règles limitant les cumuls de mandats. Ainsi, nous avons, au cours de ce débat, souhaité accomplir de nouvelles avancées dans ce domaine, afin de mieux prendre en compte le poids, encore renforcé par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, des communautés de communes et des communautés d’agglomération. Nous avons également voulu faire en sorte que l’on ne puisse désormais cumuler avec un mandat parlementaire qu’une seule fonction exécutive locale, pour éviter une dispersion trop grande dans l’exercice des mandats publics.

Par ailleurs, mon groupe a souhaité que les mêmes règles s’appliquent aux députés et aux sénateurs. Le Gouvernement l’a refusé ; il n’a pas consenti à faire évoluer d’un millimètre la position qu’il avait arrêtée en conseil des ministres et qu’il a défendue devant l’Assemblée nationale. Dès lors, il nous a semblé impossible d’obtenir de lui qu’il soutienne devant les députés une position de compromis élaborée par la Haute Assemblée et prenant en compte les restrictions nouvelles que nous avons tous acceptées, selon laquelle l’exercice d’un mandat de chef d’exécutif local aurait été permis aux députés et aux sénateurs.

C’est la raison pour laquelle il nous a bien fallu adapter notre position et proposer l’instauration d’une disposition spécifique au Sénat. En vérité, ce qui est souhaitable pour les députés l’est encore plus pour les sénateurs, le Sénat représentant, aux termes de l’article 24 de la Constitution, les collectivités territoriales de la République.

De fait, il y a déjà un grand nombre de différences entre les députés et les sénateurs. Ce n’est pas en alignant systématiquement les règles applicables aux seconds sur celles régissant les premiers que l’on fera progresser notre institution et que l’on défendra son rôle dans le débat parlementaire !

La nuit dernière, le Sénat a adopté cette position à une très large majorité, venue de tous les groupes politiques ; je m’en réjouis. J’attends que ce vote soit confirmé dans quelques instants, avec l’adoption du projet de loi organique. Mes chers collègues, en faisant ce choix, nous maintiendrons le lien entre le Sénat et les collectivités territoriales de la République et nous permettrons un progrès dans l’actualisation des règles limitant le cumul des mandats. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Yves Détraigne applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt.

M. Henri de Raincourt. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voterai le projet de loi organique dans la rédaction qui résulte des travaux du Sénat.

Permettez-moi, à cet instant, de replacer notre débat dans son contexte. En effet, je ne crois pas vraiment que l’examen de ce projet de loi organique intervienne maintenant par hasard, ni qu’il réponde à la volonté, du reste tout à fait légitime, de respecter un engagement pris par le Président de la République. En effet, monsieur le ministre, le fait est que, depuis un an, avec beaucoup de constance et d’acharnement, vous nous avez soumis de nombreux textes qui chamboulent complètement notre organisation territoriale et la vie de nos assemblées locales.

Par ailleurs, je suis tout de même assez étonné que nos collègues de la majorité sénatoriale semblent rester passifs devant les conditions absolument inimaginables dans lesquelles on fait travailler le Parlement. Moi qui ai été ministre chargé des relations avec le Parlement, je puis témoigner que jamais nous n’avions connu une telle situation : la procédure accélérée est devenue la règle, et la navette l’exception. (M. David Assouline proteste.) Jamais on n’avait recouru à la procédure accélérée dans de telles proportions, monsieur Assouline ! À aucun moment !

M. Jean-Jacques Hyest. Sauf sous Rocard !

M. Henri de Raincourt. Il est absolument incroyable que l’on modifie complètement notre paysage politique sans qu’un véritable débat de fond puisse se tenir au Parlement !

En ce qui concerne les élections municipales, la réforme du mode de scrutin entraînera, dans les communes rurales, la politisation des conseils municipaux et, par voie de conséquence, des exécutifs des intercommunalités. L’application du scrutin de liste bloquée dès le seuil de 1 000 habitants conduira inexorablement à cette situation, dont il résultera une transformation très importante dans la vie de nos communes rurales : des tensions et des difficultés supplémentaires apparaîtront, qui n’encourageront d’ailleurs pas les vocations.

En ce qui concerne les élections cantonales, je ne m’appesantirai pas sur l’invention abracadabrantesque du binôme, qui entraînera, à rebours de l’effet recherché, un affaiblissement du département, menant peut-être même, à terme, à sa disparition. Soyez-y attentifs, mes chers collègues !

M. Jean-Jacques Mirassou. Parlez-nous du conseiller territorial !

M. Henri de Raincourt. Quant aux élections sénatoriales, l’application du scrutin proportionnel pour l’élection des trois quarts des sénateurs que l’on nous a imposée changera complètement l’exercice du mandat sénatorial et le fonctionnement de notre institution. Si l’on ajoute à cela les règles nouvelles prévues en matière de cumul, il apparaît clairement que l’on ne va pas vers un renforcement du rôle du Sénat !

Avant 2011, on nous avait assuré que l’alternance politique au Sénat renforcerait notre institution. Hélas, je suis obligé de constater qu’il s’est produit le phénomène inverse ; c’est assez dommage !

S’agissant enfin de la transparence de la vie politique, on fait payer aux parlementaires, dans tous les sens de ce verbe, les fautes commises par un seul homme. (M. le ministre de l’intérieur le conteste.)

Mes chers collègues, toutes ces mesures ne conduiront certainement pas au but, légitime, vers lequel tend M. le ministre : renforcer la confiance entre les élus et les électeurs. Nous aboutirons au résultat inverse, et plus particulièrement à la paupérisation du Parlement français. Au bout du compte, parmi les jeunes hommes et les jeunes femmes de notre pays, de moins en moins de vocations se feront jour pour siéger dans les exécutifs des collectivités territoriales. La démocratie n’en sortira pas grandie ; la France s’enfonce dans une vraie crise de société ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot.

M. Philippe Adnot. Mes chers collègues, je tiens tout d’abord à souligner que, hier, c’est à titre personnel que M. Masson s’est exprimé, et non pas au nom des sénateurs non inscrits. (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.)

M. François Trucy. Très bien !

M. Philippe Adnot. Si nous n’avons rien à dire sur le fond de ses propos, nous pouvons regretter la forme qu’il leur a donnée.

En effet, j’estime que nous pouvons parfaitement, sur ce genre de sujets, avoir des opinions différentes tout en nous respectant et en nous abstenant de porter des jugements de valeur sur la capacité des uns et des autres à remplir leurs missions, selon qu’ils exercent un seul mandat ou plusieurs. L’assiduité ne dépend pas forcément du nombre de mandats détenus.

Je voterai le projet de loi organique tel que modifié par le Sénat, pour deux raisons.

En premier lieu, je considère qu’il faut respecter la liberté de nos concitoyens. Texte après texte, on ne cesse de la réduire, en multipliant les contraintes et les normes. Ainsi, on veut limiter le nombre des mandats pouvant être exercés par une même personne, déterminer à l’avance qui aura le droit d’être candidat… Tout à l’heure, certains collègues ont parlé de la liberté que nous devons conserver par rapport aux appareils ; le sénateur non inscrit que je suis a apprécié d’entendre de tels propos !

Dans cette perspective, il faut selon moi laisser à nos concitoyens des espaces de liberté, au lieu de chercher toujours à les contraindre.

En second lieu, nous devons défendre la diversité. J’estime que des élus d’origines différentes, de professions différentes et d’expériences différentes doivent pouvoir siéger dans nos assemblées. Personne n’est obligé de cumuler plusieurs mandats ! Que ceux qui ne sont pas favorables au cumul s’abstiennent de le pratiquer ; ils n’ont pas besoin d’une loi pour cela ! Je ne comprends pas cette attitude consistant à ne pas s’appliquer à soi-même les principes que l’on défend ! (MM. Jean-François Husson et Jean-Claude Lenoir applaudissent.) Mes chers collègues, depuis quand faut-il attendre les autres pour mettre ses actes en accord avec ses convictions ? (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP et de l’UDI-UC.)

M. Philippe Adnot. J’estime que tous ceux qui s’opposent au cumul doivent s’appliquer leurs principes ; ce serait là de leur part un geste démocratique élégant. Quant à moi, je n’ai pas eu besoin d’une loi pour m’en tenir à l’exercice d’un seul mandat local, celui de président du conseil général. J’aurais pu vouloir aussi présider l’office d’HLM, le service départemental d’incendie et de secours, que sais-je encore… Je figure à la 511ème place dans le classement des élus qui cumulent.

Ce dont je suis sûr, mes chers collègues, c’est que la diversité d’expériences des membres des assemblées, tant sur le plan professionnel que sur celui des responsabilités politiques, est essentielle à la qualité du travail parlementaire ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UDI-UC. – M. Jacques Mézard applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.

M. Jean-Claude Lenoir. À l’unisson de mes collègues, je voterai le projet de loi organique tel que modifié par le Sénat.

Permettez-moi de présenter deux remarques : la première d’ordre politique, la seconde d’ordre institutionnel.

D’un point de vue politique, monsieur le ministre, vous avez pris le risque de nourrir l’antiparlementarisme en France.

On voit une fois de plus fleurir dans la presse locale et nationale des articles s’en prenant à la représentation nationale, dont les membres sont présentés comme des profiteurs attachés à leurs avantages et ne cherchant qu’à accroître leurs pouvoirs. Ce phénomène resurgit de façon récurrente.

Ce risque, vous l’avez pris, monsieur le ministre, sans mesurer à mon avis les retombées qu’aura un tel débat. En effet, une fois la machine lancée, elle produira d’autres effets, qui affecteront l’ensemble de la classe politique.

Je souhaiterais m’adresser, au-delà de cet hémicycle, à ceux qui suivent nos discussions en se disant que, après tout, si les parlementaires sont victimes d’une promesse de François Hollande et du parti socialiste, c’est bien fait pour eux ! Ces personnes manquent de mémoire. En effet, qu’a dit le parti socialiste ?

M. Jean-Jacques Mirassou. David Assouline est son porte-parole !

M. Jean-Claude Lenoir. Ne parlait-il que des parlementaires ? Pas du tout ! Lors du congrès de Toulouse, en octobre 2012, la résolution finale prévoyait l’instauration du mandat unique pour les parlementaires, les membres de l’exécutif régional ou départemental et les membres de l’exécutif des municipalités. C’est donc l’ensemble des élus assumant une fonction exécutive qui sont visés. Certes, tel n’est pas le cas dans le présent texte, mais demain, par souci de cohérence, vous chercherez à appliquer les mêmes règles aux maires et aux présidents de conseil général ou de conseil régional.

M. David Assouline. N’importe quoi !

M. Jean-Claude Lenoir. Toujours sur le plan politique, on voit bien que votre objectif est de modifier de façon importante le paysage de cet hémicycle, en offrant un marchepied à des candidats « hors-sol » et élevés sous serre, qui viendront renforcer les rangs déjà bien garnis de ceux qui sont complètement coupés des réalités de la vie quotidienne, telle que nous la connaissons au travers de l’exercice de nos mandats locaux.

Ma seconde remarque sera d’ordre institutionnel.

Monsieur le ministre, durant tout le débat – même si vous avez un peu changé de ton aujourd’hui, ce dont je me réjouis –, je vous ai entendu donner des coups de rabot à notre institution. Vous avez cherché en permanence à banaliser notre mandat, la fonction de sénateur, en l’identifiant à celle de député. Disant cela, il ne s’agit nullement pour moi de minimiser le rôle des députés ; je fus l’un d’entre eux. Mais ma fonction actuelle est tout à fait différente de celle que j’ai exercée à l’Assemblée nationale. Si j’ose dire, je suis devenu un autre homme ! En effet, au-delà du tronc commun aux deux assemblées, à savoir l’élaboration de la loi, je n’ai pas la même relation avec les personnes qui m’ont élu. Ici, je représente des collectivités, je ne fais pas le même travail. J’ai en tête une autre responsabilité, qui distingue mes fonctions actuelles de celles que j’ai assumées auparavant.

J’estime que c’est l’honneur de notre assemblée de souhaiter maintenir cette différence, voulue par les institutions. Nous ne sommes pas simplement des représentants des Français désignés au suffrage indirect, nous sommes les représentants des collectivités territoriales. Je suis plus que jamais attaché à cette spécificité. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Alfonsi.

M. Nicolas Alfonsi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je m’exprimerai ici à titre personnel.

Je voterai le texte, étant contre le cumul. Cette déclaration pourrait apparaître comme une provocation ou un trait d’humour, de la part d’un élu qui a beaucoup cumulé, même s’il n’a exercé ses mandats locaux que dans de petites communes.

Cela étant, comme le disait un auteur souvent cité au cours de ce débat, « pour peu qu’on considère les choses avec une certaine étendue, les saillies s’évanouissent ». Ainsi, il convient de mettre en perspective l’évolution de nos institutions.

Pour ma part, je suis « debréiste ». J’avais d’ailleurs voté contre la réforme constitutionnelle de 2008. Toutefois, pour modifier les institutions, il est une manière plus insidieuse, plus sournoise, plus subtile que de réunir le Congrès à Versailles, mais qui nous conduit peu à peu à un changement de régime. Je ne peux m’associer à une telle démarche.

Un sénateur ne pourra plus administrer une commune de 100 habitants, nous dit-on. En réalité, ce sera plutôt l’inverse : étant donné l’attachement des maires à leur commune, ils renonceront souvent à devenir sénateur ou député. (Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.)

M. Nicolas Alfonsi. C’est un problème qui pourrait se poser à beaucoup d’entre nous !

Lors de la réforme constitutionnelle de 2008, on a entretenu l’illusion que le Parlement serait doté de pouvoirs supplémentaires grâce à l’instauration de semaines d’initiative parlementaire : à quoi servent-elles donc, sinon à présenter devant un hémicycle vide des propositions de loi qui restent ensuite au placard pendant très longtemps ?

Pour ma part, je suis un fidèle qui souhaiterait revenir à l’esprit des institutions, auquel on porte ici atteinte. Il faut tout de même conserver notre identité. Lors de la discussion du projet de loi instaurant le mariage pour les couples de personnes de même sexe, on est allé chercher des exemples au Paraguay, en Estonie, en Allemagne… Que devient la République dans ce jeu de comparaisons permanentes, visant à démontrer que c’est forcément mieux ailleurs ? Nous avons notre propre identité, notre propre histoire : là est l’essentiel.

Monsieur le ministre, vous nous avez dit hier qu’il fallait redonner des pouvoirs au Sénat. Mais vous avez vous-même ruiné votre propos en ajoutant aussitôt que, de toute façon, c’est l’Assemblée nationale qui déciderait… (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.)

M. Jean-Claude Lenoir. Bonne remarque !

M. Nicolas Alfonsi. Une telle contradiction est d’une très grande portée ! Vous avez également évoqué de nouveaux équilibres, mais vous voulez interdire au maire d’une commune de 100 habitants de devenir sénateur, tandis que, dans certaines grandes villes du Nord, le cumul horizontal perdurera…

Je le répète, il ne s’agit ni d’une provocation ni d’un trait d’humour lorsque j’affirme aujourd’hui, à mon âge, mon opposition au cumul des mandats. Je voterai le texte tel que modifié par le Sénat. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye.

M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous dénonçons une nouvelle fois l’engagement de la procédure accélérée, à notre avis absolument pas justifié s’agissant d’un tel texte, portant sur un sujet majeur.

Sur le fond, M. le ministre a évoqué une « révolution démocratique ». À mon avis, c’en est bien une, et nos compatriotes ne s’en rendent pas forcément compte.

Deux questions majeures sous-tendent le texte proposé par le Gouvernement : quel type d’élus les Français souhaitent-ils ? Quel doit être le rôle du Sénat, celui-ci doit-il continuer à exister ou disparaître ?

En ce qui concerne les élus, si les partis sont nécessaires à la démocratie, il est également indispensable d’avoir des élus indépendants, fondant un parcours politique les menant jusqu’au Parlement sur une base électorale solide. Selon moi, nombre de nos compatriotes partagent ce point de vue. Or le texte proposé par le Gouvernement vise à restreindre encore les possibilités de voir émerger de telles personnalités indépendantes.

J’en viens au rôle du Sénat, qui a, cela a été amplement souligné, vocation à représenter les territoires. À cet égard, si l’on affaiblit l’ancrage local des sénateurs, notre assemblée perdra beaucoup de sa richesse d’expertise et de sa diversité. Si le Sénat doit devenir le clone de l’Assemblée nationale, alors il n’aura plus d’utilité ni de raison d’être et, personnellement, je militerai pour sa suppression. Pour ma part, j’estime que notre assemblée doit conserver une nature spécifique, un rôle de représentation des territoires, grâce à la présence en son sein de personnalités indépendantes, s’étant construites sur le terrain. Cela me paraît essentiel.

Certains, se fondant sur des sondages, affirment que la démarche du Gouvernement est populaire. J’estime pour ma part qu’elle est surtout populiste. Comment arbitrer ? Le Gouvernement ne semble pas vouloir bouger, mais personnellement je serais favorable à la tenue d’un référendum. Puisqu’il s’agit d’une révolution démocratique, il serait normal que les citoyens aient la possibilité de s’exprimer ! Le Président de la République, qui n’a pas beaucoup de motifs de satisfaction par les temps qui courent, pourrait peut-être en trouver un dans la réussite d’un référendum sur ce sujet ! Je suis en tout cas partisan de l’organisation d’un débat dans le pays. Pour l’heure, il n’a pas eu lieu. Présumer de l’opinion des Français n’est pas raisonnable.

Le groupe UDI-UC a entendu adopter une attitude constructive dans ce débat. Nous avons montré que nous n’étions pas contre la restriction des possibilités de cumul, en proposant une alternative au projet du Gouvernement. De plus, sur le plan financier, nous avons voté en faveur de l’instauration d’une règle rendant l’indemnité parlementaire exclusive de toute autre indemnité. Nous avons prouvé que nous étions ouverts au dialogue.

Le Gouvernement aurait grand tort de choisir de passer en force, sans tenir compte de l’avis du Sénat ni consulter les Français, sur un sujet d’une grande importance pour l’avenir de notre démocratie.

Tel que le Sénat l’a modifié, le texte nous satisfait. Nous le voterons, en espérant qu’il permettra l’ouverture d’un véritable dialogue avec l’Assemblée nationale et le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur certaines travées de l’UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Le groupe écologiste votera avec regret contre ce texte, profondément dénaturé par les votes intervenus dans notre assemblée.

Nous voterons contre ce texte, parce que nous croyons que notre société, nos concitoyens ne veulent plus du cumul des mandats. Peut-être l’ont-ils accepté dans le passé, mais tel n’est plus le cas aujourd’hui ; c’est du moins ce que nous croyons profondément.

Nous voterons contre ce texte, parce que nous croyons qu’un sénateur sans mandat local est à même de représenter toutes les collectivités territoriales de sa circonscription sans aucune exception, et pas simplement celles dont il est ou a été l’élu.

Nous voterons contre ce texte, parce que nous croyons que la connaissance des collectivités territoriales s’acquiert semaine après semaine sur le terrain, auprès des maires et de la société civile. Mener ce travail est possible aussi lorsque l’on est un sénateur « hors-sol » !

Nous voterons contre ce texte, parce que nous pensons que l’égalité des chances électorales tient à la limitation du cumul des mandats, tant dans le temps que dans l’espace.

Nous voterons contre ce texte, parce que nous pensons que notre expérience de simple citoyen sans mandat exécutif local ou de simple élu a autant de poids, au sein de cet hémicycle, que l’expérience de ceux qui ne savent pas ou plus ce que c’est que d’être un simple élu ou un simple citoyen.

Nous voterons contre ce texte, même si nous avons bien pris acte du vote de l’écrêtement – je vous remercie, mes chers collègues, de m’avoir suivie sur ce point –, ainsi que d’une prise de conscience de la nécessité de mettre en place un véritable statut de l’élu. À cet égard, j’espère que le Gouvernement nous soumettra très rapidement un texte créant un tel statut, qui bien entendu ne devra pas se bâtir contre celui des élus fonctionnaires : il faut instaurer une égalité de statut pour tous les élus, quelle que soit leur origine professionnelle.

Notre groupe, attaché à la limitation du cumul horizontal et dans le temps, votera contre cet ersatz de modification de nos politiques électives. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé.

M. Éric Doligé. Je tiens avant tout chose à dire que je ne vais pas revenir sur mon vote d’hier. (Sourires sur les travées de l’UMP.) Le fait que tant de nos collègues aient tenu à faire une mise au point au sujet de leur vote montre bien que nos conditions de travail ne sont pas satisfaisantes. Nombre de ceux qui ont voté hier directement ou indirectement ne savaient pas ce qu’ils votaient ou, plus exactement, ceux de nos collègues qui avaient reçu une délégation ignoraient ce que pensait leur délégant. Pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Parce que tout s’est fait de manière précipitée, parce que nous n’avons pas eu la possibilité d’examiner ce texte suffisamment longtemps. De fait, seuls les membres de la commission des lois savaient à peu près quel était son contenu.

Aussi, j’aimerais avoir des précisions, si tant est qu’on puisse me les donner, précisions que j’ai tenté d’obtenir tant auprès de nos collègues députés qu’auprès de nos collègues sénateurs. Je signale d’emblée que je ne suis pas particulièrement concerné puisque j’ai décidé d’abandonner progressivement mes mandats. Mes questions n’ont donc d’autre but que de clarifier tout ce qui se dit dans les couloirs sur ce sujet important.

En 2017, en théorie, tout cumul sera interdit, sauf, bien évidemment, si la disposition qu’a fait adopter notre collègue Mézard, à laquelle je suis tout à fait favorable, perdure.

M. Jean-Claude Lenoir. Elle va perdurer !

M. Éric Doligé. Certains pensent que, une fois élus sénateur et maire en 2014, ou conseiller départemental ou conseiller régional en 2015, ils pourront cumuler leur mandat parlementaire avec leur mandat local jusqu’en 2020. Aussi, j’aimerais bien qu’on me dise très précisément ce qui va se passer en 2017. Contrairement à ce que peuvent penser M. le ministre ou d’autres éminentes personnalités, ce n’est pas clair, à telle enseigne que chacun a sa propre interprétation.

Il est également important que nos collègues sachent quelles dispositions seront applicables au moment de la promulgation du projet de loi organique et quelles dispositions seront applicables aux échéances mentionnées dans le texte. Quand on est amené à se prononcer sur une réforme, il faut que ce soit en toute connaissance de cause.

Si l’on faisait un sondage anonyme auprès de nos collègues, je ne suis pas persuadé que les questions que je viens de poser recueilleraient des réponses identiques. C’est pourquoi il faut être précis.

M. le président. La parole est à M. David Assouline.

M. David Assouline. N’étant pas membre de la commission des lois et n’étant pas prioritaire pour prendre la parole, je me suis peu exprimé jusqu’à présent, mais mes collègues l’ont fort bien fait au cours de ce débat. Toujours est-il que je tiens à faire connaître ma position.

Je ne voterai pas le projet de loi organique tel qu’il ressort des travaux du Sénat. L’introduction d’une exception pour les sénateurs dénature le texte initial du Gouvernement, que je soutiens, et qui est celui du parti socialiste.

Il était évidemment légitime qu’un débat spécifique s’engage ici. En effet, la Constitution dispose non pas que le Sénat « représente les collectivités » mais qu’il « assure la représentation des collectivités territoriales de la République ».

M. Jean-François Husson. C’est encore plus fort !

M. David Assouline. Cela signifie que c’est le corps électoral des sénateurs, avant tout des élus locaux, qui assure cette représentation.

J’étais favorable au texte initialement présenté par le Gouvernement, au nom de l’efficacité du travail parlementaire. J’en ai fait moi-même l’expérience : une fois élu sénateur, j’ai démissionné de l’exécutif local dont j’étais membre parce que cet engagement dans ma collectivité nécessitait déjà une disponibilité supérieure à un plein temps. Vous le savez tous, dans ces fonctions, on travaille plus que huit heures par jour, on travaille également tard la nuit. Pour ma part, j’ai considéré qu’il me serait très difficile de concilier cette fonction avec mon mandat parlementaire. Bien sûr, il est toujours possible de déléguer,…

M. David Assouline. … mais si l’on veut rester à la tête d’une collectivité locale, pourquoi ne pas renoncer à son mandat de sénateur, le déléguer, en choisissant celui qui pourrait le mieux la représenter ?

Plus fondamentalement, ce non-cumul, qu’il s’agisse des sénateurs ou des députés, c’est l’assurance d’un travail parlementaire efficace et donc d’un renforcement de la fonction de parlementaire. Plus nous aurons le temps de nous y consacrer, plus nous réussirons à faire bouger les lignes et à faire en sorte que l’exécutif, quel qu’il soit, respecte notre travail. Je précise bien « quel qu’il soit », car on sait bien que l’exécutif a toujours la tentation de vouloir aller vite. En face, tout parlementaire a à cœur que son travail soit respecté, que le temps pour la délibération soit observé. C’est d’ailleurs ce qui justifie la séparation des pouvoirs.

Par ailleurs, la fin du cumul permettra, dans chacune de nos circonscriptions, à un plus grand nombre de femmes d’accéder aux fonctions électives, d’assurer un plus grand renouvellement et une meilleure représentation de la diversité sociale de notre pays – même si ce combat continue et qu’il n’est pas gagné d’avance.

En tant que sénateurs, nous faisons la loi, à égalité avec un député. C’est notre force ! Nous examinons tous les textes,…

M. René-Paul Savary. Pas longtemps !

Mme Hélène Lipietz. Les députés non plus !

M. David Assouline. … en ayant à cœur l’intérêt général. Dès lors que nous établissons une distinction, que nous introduisons une inégalité entre députés et sénateurs, cela signifie que, finalement, nous ne sommes plus l’émanation de la République une et indivisible, que nous ne représentons plus l’intérêt général, qui dépasse celui de telle ou telle collectivité. Par la création d’un tel précédent, on supposera forcément que nous appréhendons les lois à l’aune des intérêts du territoire dont nous sommes l’élu. Bien entendu, nous devons tenir compte de ce territoire, parce que c’est la base du corps électoral qui nous a désignés, mais gardons-nous de jamais nous considérer comme les représentants de collectivités, car nous sommes avant tout les représentants de la République et les défenseurs de l’intérêt national dans son ensemble.

Pour toutes ces raisons, et afin que le Sénat conserve tout ce qui fait sa force, n’établissons pas cette distinction. C’est un débat de fond, et il n’était pas nécessaire de procéder à des attaques personnelles, de mettre en cause les positions des uns et des autres, qui, toutes, sont absolument légitimes et dont l’exposé nous a permis de rehausser le débat.

M. David Assouline. Beaucoup ont évoqué un possible affaiblissement du Sénat eu égard à cette question de représentation. J’ai évoqué ce point tout à l’heure, cela fait longtemps que notre assemblée est questionnée ; c’est pourquoi elle doit montrer qu’elle est en phase non pas avec tel ou tel populisme, mais avec le mouvement de rénovation de la vie politique que souhaite une majorité de nos concitoyens.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. David Assouline. Je conclus, monsieur le président.

Plus cette rénovation progressera, plus le Sénat aura de l’influence et sera respecté, non seulement par les autres pouvoirs, mais aussi et surtout par le peuple. Soutenons les efforts du président du Sénat pour rénover notre institution au lieu d’introduire le doute. (Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.)

Bravo à Jean-Pierre Bel de continuer dans cette voie et bravo à tous ceux qui, ici, quelle que soit leur position, ont bien voulu débattre du rôle du Sénat !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary.

M. René-Paul Savary. Les propos tenus sur l’égalité entre députés et sénateurs me laissent dubitatif puisque, l’Assemblée nationale ayant le dernier mot – et elle l’aura, nous dit-on, y compris sur le projet de loi organique –, le fruit de nos débats est inexorablement soumis à la décision de nos collègues députés.

Cette affaire de cumul, comme l’a dit Jacques Mézard, suscite véritablement une confrontation d’intérêts, et non pas un conflit d’intérêts. De ma courte expérience de sénateur, je retiens que, dans des domaines bien particuliers, cette confrontation d’idées revêt toute son importance et permet à chacun de faire part de son expérience. Preuve en est, monsieur le ministre, que vos propres services se tournent vers ceux qui sont à la fois parlementaires et représentants d’exécutif pour faire avancer un certain nombre de dispositions.

Tout le monde a bien compris que l’enracinement local est tout à fait déterminant. Or le texte sur lequel nous nous apprêtons à nous prononcer contient une véritable avancée puisqu’il limite à une seule fonction exécutive locale le cumul avec le mandat de sénateur.

Il n’est pas question ici d’histoire d’argent puisque ce texte écrête désormais les indemnités perçues au titre des mandats électifs. De fait, il aurait été plus exact de modifier l’intitulé du projet de loi organique en spécifiant que celui-ci a pour objet non seulement de limiter à une seule fonction exécutive locale le cumul avec le mandat de sénateur, mais également d’interdire le cumul de plusieurs indemnités. Après tout, si j’en juge par les propos des uns et des autres, c’est bien ce que nous reprochent nos concitoyens, eux qui ont l’impression que nos mandats électifs, parlementaire ou autre, n’auraient d’autre but que de nous permettre de toucher des indemnités.

Dans le cas présent, nous avons véritablement fait preuve de responsabilité et avons démontré que, par le maintien de cette possibilité de cumul, l’important pour nous était de pouvoir porter les affaires locales au niveau national et de traiter les affaires nationales en prenant en compte les situations locales, et ce en dehors de toute considération indemnitaire.

M. le président. La parole est à M. François Rebsamen.

M. François Rebsamen. Ma position n’est pas facile,…

M. Raymond Vall. En effet !

M. François Rebsamen. … mais je dois dire que je suis fier de la diversité qui s’exprime au sein du parti socialiste, et plus encore au sein du groupe socialiste du Sénat. Pourquoi ? Parce qu’il fut un temps où nous entendions beaucoup de critiques sur le caractère monolithique de nos décisions. Or ce débat aura permis de démontrer, comme l’atteste l’intervention de David Assouline, que la liberté de parole existe au groupe socialiste.

Une majorité des membres de mon groupe, je veux le dire, aurait voté ce texte dans sa rédaction initiale et une forte minorité se trouvait sur une autre position. Pourquoi ? Parce que nos histoires sont différentes aux uns et aux autres. Certains se sont construits – ce n’est en rien critiquable – à travers un parcours au sein d’une formation politique. Je respecte celles et ceux qui se sont ainsi construits par un engagement militant au départ. C’est aussi respectable que de se construire à travers un parcours électif. Il ne faut jeter l’opprobre sur aucun parcours, quel qu’il soit.

Quoi qu’il en soit, toutes celles et tous ceux qui siègent dans cet hémicycle représentent une partie du territoire de notre République. À cet égard, je ne peux laisser Henri de Raincourt dire que le Gouvernement, que je soutiens, a profondément modifié l’organisation territoriale de la République. Qui, au départ, s’est attelé à ce travail, sinon vous, mes chers collègues de l’UMP, avec le fameux conseiller territorial ?

M. Jean-Claude Lenoir. Maintenant, c’est le binôme !

M. François Rebsamen. Vous le savez pertinemment, c’est aussi vous qui avez abaissé à 500 habitants le seuil à partir duquel devait s’appliquer le scrutin de liste pour les municipales. Et c’est nous, au Sénat, qui l’avons relevé à 1 000 !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’est la vérité !

M. François Rebsamen. Je souhaite que nous soyons de bonne foi dans l’échange de nos arguments. C’est pourquoi la vérité mérite d’être rappelée.

M. Jean-Claude Lenoir. La vérité, c’est que c’était un projet ! Le texte n’a jamais été voté !

M. François Rebsamen. Cette proposition avait été formulée par l’Association des maires ruraux de France, qui voulait même abaisser le seuil à zéro, car elle était contre le « tir au pigeon » dans les petites communes.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Absolument !

M. François Rebsamen. Il n’y a donc pas ceux qui défendent les petites communes – en votant d’ailleurs le contraire quand ils sont dans la majorité gouvernementale – et les autres. S’il vous plaît, respectons-nous ! Pour cela, le mieux est de dire la vérité.

Le Gouvernement souhaite rénover la vie publique. On ne peut pas lui en vouloir, même si cela heurte certaines positions acquises : il met en œuvre un engagement du Président de la République.

Pour ma part, je le dis à titre personnel, ce qui ne m’est pas souvent arrivé, je considère que le Sénat a une place particulière dans le bicamérisme liée à sa fonction de représentation des collectivités territoriales. Ce serait donc l’affaiblir, je le dis comme je le pense, d’interdire aux grands élus d’y siéger. Voyez ce qui s’est passé pour le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles.

M. Jacques Mézard. Tout à fait !

M. François Rebsamen. Si l’article du projet de loi est passé pour Marseille, c’est parce que le maire de cette ville est un sénateur influent. Si la métropole lyonnaise voit le jour, c’est parce qu’un sénateur influent, le maire de Lyon, et un président de conseil général ont pu faire avancer les choses.

M. Christian Cambon. Absolument !

M. François Rebsamen. Si nous n’arrivons pas à créer cette métropole à Paris, ce que je regrette, c’est parce qu’il manque un sénateur influent, un leader qui pourrait tirer ce projet vers le haut. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP. – M. Jean-Pierre Caffet s’en amuse.) Je dois dire que je compte beaucoup sur M. Caffet. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Caffet. Comme quoi je ne suis pas influent ! (Nouveaux sourires.)

M. François Rebsamen. Quant à l’antiparlementarisme, il est profond dans notre pays, et il ne date pas d’hier. Ne nous le jetons pas au visage et essayons de lutter contre ce que Jaurès appelait « la loi du mensonge triomphant qui passe » en rétablissant tous ensemble la vérité !

Oui, nous travaillons ! Que nous cumulions ou pas, nous faisons la loi, et ce grâce à l’expertise particulière qui est la nôtre. Notre connaissance des collectivités locales a d’ailleurs bien souvent permis d’éviter des erreurs sur le terrain.

Je veux dire aussi que nombre de mes collègues ont modifié leur vote entre hier et aujourd’hui. Tout le monde sait que la nuit porte conseil… (Rires sur les travées de l’UMP.) Qu’ils sachent que j’ai tenu compte de toutes les demandes de rectification qui m’ont été adressées.

Pour conclure, je voudrais rappeler que le cumul des fonctions est parfois obligatoire de par la loi. Songez aux maires ! On ne peut pas remettre en cause cela.

Je voudrais aussi rappeler qu’il y a des fonctions non électives qui prennent beaucoup de temps. Je veux parler de celles que l’on occupe dans un parti politique. Je citerai à mon tour mon cas personnel : quand j’étais numéro 2 du parti socialiste, je n’avais pas le temps d’être parlementaire, et je n’exerçais d’ailleurs aucune autre fonction. Le parti socialiste réclame beaucoup de temps !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Eh oui !

M. François Rebsamen. Il faudrait peut-être un jour, comme l’avait fait un Président que j’appréciais, François Mitterrand, considérer avec respect ceux qui exercent ces fonctions. C’est nécessaire si l’on veut rétablir la noblesse des partis politiques, qui concourent, selon la Constitution, à l’expression du suffrage. (Applaudissements sur de nombreuses travées.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Le projet de loi organique tel qu’issu des travaux de l’Assemblée nationale permettait une clarification en prévoyant une séparation entre le pouvoir législatif et les pouvoirs exécutifs locaux. Ainsi, il participait à une meilleure séparation des pouvoirs. Il assurait au Parlement d’être plus indépendant du pouvoir exécutif pour exercer son pouvoir de contrôle. Il participait ainsi au renforcement du poids du Parlement.

Faire une exception pour la Haute Assemblée, comme cela a été proposé au travers de l’amendement n° 46, dénature le texte initial et conduit à ne pas garantir au Sénat la même indépendance que celle de l’Assemblée nationale. C’est donc une menace contre un bicamérisme équilibré.

Tout en comprenant certaines inquiétudes exprimées ici, je propose à chacun de dépasser à la fois ses habitudes et ses inquiétudes, car, à la fin, ce qui compte, c’est que les électeurs issus des collectivités, eux, ne changent pas. Ce sont eux, en définitive, qui décident de la composition et de la qualité de notre chambre.

Pour cette raison et compte tenu de l’adoption de l’amendement n° 46, qui dénature le projet de loi organique, je voterai contre le texte qui nous est soumis. (Mmes Corinne Bouchoux et Hélène Lipietz applaudissent.)

Mise au point au sujet de votes

Explications de vote sur l'ensemble
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Explications de vote sur l'ensemble

M. le président. La parole est à M. Alain Anziani.

M. Alain Anziani. Mme Bariza Khiari sollicite la rectification de son vote d’hier (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.) sur les amendements identiques nos 46, 58 et 63 et sur l’article 1er, modifié. Elle souhaitait voter contre.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Vote sur l'ensemble (suite)

Mise au point au sujet de votes
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Mise au point au sujet de votes (début)

M. le président. Dans la suite des explications de vote sur l’ensemble du projet de loi organique, la parole est à M. Richard Tuheiava.

M. Richard Tuheiava. Je souhaite aussi vous faire part de ma position personnelle, qui n’est pas non plus aisée pour un représentant d’une collectivité ultra-marine.

Le texte sur le non-cumul des mandats nous renvoie à la question de la représentation des habitants de ma circonscription dans les assemblées centrales, qui avait été tranchée au cours des années 1947-1948. Le droit avait notamment été ouvert aux ressortissants de Polynésie française de participer à la vie politique nationale sur des bases identiques à celles des départements d’outre-mer, et donc de faire valoir leurs intérêts au sein de la Haute Assemblée et de l’Assemblée nationale, de façon plus ou moins efficace selon leur appartenance ou non à la majorité politique au Parlement.

Le cadre institutionnel instauré par l’article 74 de notre Constitution, qui est issu d’une succession de textes – une ancienne loi-cadre de 1957, puis quatre statuts successifs de 1977, 1984, 1996 et 2004, modifiés par la suite –, a permis a posteriori aux habitants de ma circonscription d’exercer aussi des fonctions exécutives locales, indépendamment de la question des mandats électifs nationaux, qu’il s’agisse de celui de sénateur ou de député.

Bien qu’à titre personnel je sois extrêmement sensible aux arguments du Gouvernement et que je sois plutôt orienté vers la philosophie déclinée à travers le projet de loi organique, je n’ai pas pris part au vote hier, car j’ai estimé que cette faculté pour les habitants de la circonscription que je représente d’être élus et de s’exprimer au Parlement national participe d’une vision dynamique de la relation historique entre l’Hexagone et les collectivités d’outre-mer. Or ce texte apporte un aménagement de fond à cet équilibre historique encore fragile concernant la Polynésie française – je ne me permettrais pas de parler des autres collectivités –, et je ne me sens pas à l’aise pour me prononcer dans notre hémicycle sur ce point, en dépit de toute l’amitié que j’éprouve pour mes collègues et de la forte sympathie que m’inspire le Gouvernement.

Par cohérence avec les convictions politiques que je porte et par respect pour notre institution, je me vois donc contraint de m’abstenir publiquement lors du vote du projet de loi organique, qu’il s’agisse du texte issu des travaux de l’Assemblée nationale ou du texte sous sa forme actuelle, qui exonère les sénateurs des dispositions relatives au non-cumul des mandats.

M. le président. La parole est à M. Michel Vergoz.

M. Michel Vergoz. Je voterai contre le projet de loi organique tel qu’il résulte des travaux du Sénat.

Je voudrais faire deux remarques.

La première concerne les arguments que j’ai entendus du côté de l’UMP. Rassurez-moi, cette procédure accélérée est bien légale ? Ceux-là mêmes qui crient haro sur la procédure oublient que M. Raffarin, alors Premier ministre en 2003, avait recouru à l’article 49-3, c’est-à-dire à un vote sans débat, sur un projet de loi de révision de constitutionnelle. Vous le voyez, ma mémoire efface difficilement certains faits historiques. C’est pourquoi je veux bien recevoir des leçons, à condition qu’elles soient crédibles.

Ma seconde remarque est pour regretter que le Sénat bloque cette nouvelle étape – c’en est une, après 1985, 1995 et 2000 – sur le non-cumul des mandats.

Pour ma part, j’ai abordé ce débat dans un esprit ouvert, mais j’ai été extrêmement déçu en entendant certains arguments. Celui qui concerne l’élu « hors sol », par exemple, n’est pas sérieux. Je suis « hors sol », et cela ne m’empêche pas d’avoir tous les jours les pieds bien ancrés sur nos territoires, dans ma République. Voilà quinze jours, les présidents de collectivité me recevaient en audience pour discuter d’un texte de loi que je leur présentais et qui sera examiné dans cet hémicycle dans deux ou trois semaines. Le sénateur « hors sol » que je suis a été reçu par les trois présidents des chambres consulaires de la Réunion, par le président de la région, par la présidente du département, par des associations, par des entreprises !

Lorsque ma grand-mère m’a dit voilà quelques années – elle est décédée depuis : « Michel, tu te donnes trop à la tâche », j’ai pensé au cumul des mandats, et je me suis écarté de certaines responsabilités politiques pour n’en garder qu’une seule. Maintenant, c’est ma mère qui me dit : « Attention, mon fiston, tu n’équilibres pas ta vie ». Et elle ajoute, espiègle : « Les cimetières sont remplis de gens irremplaçables. » (Mme Corinne Bouchoux applaudit.)

J’ai le sentiment que le Sénat rate aujourd’hui une marche, dont le franchissement aurait permis à la démocratie de mieux respirer. J’espère que les prochaines marches que nous aurons à gravir ensemble seront celles de la réussite. Je fais allusion aux futures lois incontournables sur le cumul des indemnités, sur le cumul des fonctions locales, les « cumuls horizontaux » comme on les appelle, et sur un vrai statut de l’élu. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – Mme Gisèle Printz applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Manuel Valls, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne vais pas répondre aux explications de vote. Je n’ai pas à le faire et, de toute façon, elles ne sont pas terminées. Je tiens simplement à remercier chacune et chacun d’entre vous pour les débats qui ont été menés. Les désaccords affirmés entre le Gouvernement et une majorité de la Haute Assemblée n’enlèvent rien, je le répète, au respect que le Gouvernement a pour le Sénat, qui, j’en reste persuadé, verra son rôle renforcé par l’adoption du projet de loi organique.

Je remercie également M. le président de la commission des lois et M. le rapporteur, mon ami Simon Sutour.

Je ne pourrai assister à la reprise de vos débats, et je vous prie de bien vouloir m’en excuser. Il se trouve que, cet après-midi, je préside la cérémonie annuelle d’hommage aux victimes du terrorisme. Ensuite, j’ai des obligations. Toutefois, Alain Vidalies représentera le Gouvernement lors du vote du projet de loi organique, puis lors de l’examen des articles du projet de loi ordinaire. Le ministre chargé des relations avec le Parlement sera présent, à cette place, avec le sérieux que vous lui connaissez.

Mise au point au sujet de votes

Explications de vote sur l'ensemble
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Mise au point au sujet de votes (interruption de la discussion)

M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner.

M. Jacques-Bernard Magner. Monsieur le président, j’indique que M. Dominique Bailly, sénateur-maire d’Orchies, dans le Nord, souhaitait voter contre les amendements identiques nos 46, 58 et 63.

J’ajoute que, pour ma part, je voterai contre le projet de loi organique, qui, à mon sens, a été dénaturé par l’adoption de ces amendements.

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera, comme les précédentes, publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Mise au point au sujet de votes (début)
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Discussion générale

5

Communication de M. le président du Sénat

M. le président. Mes chers collègues, le président du Sénat vient de m’informer que le président de Public Sénat lui a indiqué que le titre affiché sur cette chaîne hier au soir résultait d’une maladresse dépourvue d’intentions critiques, mais qui, sortie de son contexte, pouvait effectivement susciter des réactions.

M. Christian Cambon. Tiens donc !

M. le président. Le président de Public Sénat n’entend pas laisser sans suite ce regrettable incident.

Le président du Sénat souligne qu’il désapprouve formellement toute expression ou présentation qui aboutit à stigmatiser les propos et positions des sénateurs, ces positions devant toutes, quelles qu’elles soient, faire l’objet du même respect.

M. Christian Cambon. Monsieur Assouline, écoutez !

M. le président. M. Jean-Pierre Bel précise que le bureau du Sénat pourra, le cas échéant, évoquer cette question lors de sa prochaine réunion.

M. le président. Les représentants du Sénat au conseil d’administration de la chaîne Public Sénat – dont je suis membre – pourront également traiter de ce sujet lors de la prochaine réunion de cette instance.

Mme Sophie Primas. Très bien !

M. François Fortassin. Merci, monsieur le président !

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Raffarin.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Raffarin

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

6

Questions d'actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que l’auteur de la question dispose de deux minutes trente, de même que la ou le ministre pour sa réponse.

impôts - fiscalité

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet.

M. Éric Bocquet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances et porte sur le débat qui se développe ces dernières semaines au sujet des questions fiscales et sociales.

M. Éric Doligé. Tout va bien !

M. Éric Bocquet. Alors que plus d’un million de nos concitoyens se trouvent imposés cette année à la suite du maintien du gel du barème, le vrai débat ne doit pas porter selon nous sur la notion de pause fiscale mais sur la mise en chantier, dès aujourd’hui, de la grande réforme fiscale annoncée, qui doit être juste et progressive.

La réforme fiscale, ce n’est pas la hausse de la TVA, le gel du barème de l’impôt sur le revenu ou la mise en cause du quotient familial ! On a, depuis le printemps 2012, beaucoup exigé, beaucoup demandé aux salariés du public comme du privé. On a augmenté les impôts et les taxes, notamment parce qu’il fallait éponger la facture laissée par les gouvernements précédents…

M. Éric Bocquet. … et le « triple 500 » de M. Nicolas Sarkozy. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. C’est la vérité !

M. Éric Bocquet. En cinq ans, on a enregistré 500 000 chômeurs de plus, plus de 500 milliards d’euros de dette publique supplémentaire et plus de 500 milliards d’euros de déficits cumulés !

Comment peut-on augmenter la TVA – comme cela va se produire le 1er janvier prochain – après avoir décidé fin 2012 d’accorder, sans contrepartie véritable ni contrôle, 20 milliards d’euros de crédit d’impôt aux entreprises et qu’on espère, en 2014, en tirer 0,9 % de croissance, c’est-à-dire 18 milliards d’euros ? Il s’agit là d’une opération coûteuse s’il en est, injuste et inefficace sur le plan économique.

C’est dans les comptes de bilan des grandes entreprises, dans leurs « trésors de guerre »,…

M. Roger Karoutchi. Allons donc !

M. Éric Bocquet. … dans leurs filiales implantées dans les paradis fiscaux qu’il faut aujourd’hui aller chercher l’argent qui nous manque tant.

La presse économique annonçait triomphalement la semaine dernière que les groupes du CAC 40 s’apprêtaient à verser 40 milliards d’euros de dividendes. Le magazine Challenge du mois de juillet dernier publiait quant à lui le palmarès des 500 premières fortunes professionnelles de France, en indiquant qu’elles avaient augmenté de 25 % pour atteindre – dixit le magazine – un sommet historique.

Monsieur le ministre, quelles mesures allez-vous prendre pour mener le combat de la justice fiscale et donner à cette réforme sa pleine efficacité ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le sénateur, en matière de finances publiques, nous avons une stratégie et un cap.

Cette stratégie, personne ici ne la découvre, nous l’avons énoncée à de nombreuses reprises…

M. Gérard Cornu. Augmenter les impôts !

M. Pierre Moscovici, ministre. … et confirmée chaque fois que nous avons été appelés à le faire.

Premièrement, nous devions, et nous devons encore, redresser nos finances publiques. En effet, une économie qui s’endette, c’est une économie qui s’appauvrit et qui s’affaiblit. Cette politique passe par des réductions de dépenses.

Nous avons également dû, l’année dernière, demander un effort particulier aux Français.

Comme vous l’avez souligné, nous avons hérité d’une situation budgétaire préoccupante, avec un endettement insupportable et des déficits qu’il fallait impérativement réduire.

M. Éric Doligé. La pause !

M. Pierre Moscovici, ministre. Deuxièmement, nous devons et nous voulons choisir le bon rythme pour ne pas pénaliser la croissance,…

M. Gérard Cornu. À quand la pause ?

M. Pierre Moscovici, ministre. … car tel est l’objectif que nous devons tous viser : la croissance et l’emploi !

C’est pourquoi nous avons choisi, en accord avec la Commission européenne, de ne pas ajouter l’austérité aux difficultés économiques, et donc de repousser de deux ans, jusqu’en 2015, la date de retour sous les 3 % de déficit.

Cette politique porte ses fruits, puisque notre pays est sorti de la récession…

M. Christian Cambon. Ben voyons !

M. Pierre Moscovici, ministre. … et qu’il commence à entrer dans une reprise que nous souhaitons, comme vous, conforter et pérenniser.

Dès lors, quelle stratégie fiscale élaborer dans cette perspective ?

M. Alain Gournac. La stratégie, c’est « j’avance et je recule » !

M. Pierre Moscovici, ministre. C’est pour la croissance, l’emploi et le pouvoir d’achat que nous agissons.

À cet égard, je le répète, hormis la simplification des taux de TVA, il n’y aura pas de hausse générale des impôts pesant sur les ménages. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

M. Roger Karoutchi. Comme c’est drôle !

M. Éric Doligé. C’est la République des mots !

M. Pierre Moscovici, ministre. Quant au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, que nous avons mis en œuvre il y a un an, il s’agit d’un dispositif utile. Je l’ai encore constaté à Vierzon, il y a trois jours.

Nous voulons agir pour le pouvoir d’achat. Nous réindexerons le barème de l’impôt sur le revenu en 2014. Nous prendrons des mesures de soutien au pouvoir d’achat des classes populaires et modestes,…

M. Christian Cambon. Et les classes moyennes ?

M. Pierre Moscovici, ministre. … notamment avec la décote annoncée par le Président de la République, qui touchera des millions de personnes.

De manière générale, nous serons très attentifs au pouvoir d’achat des Français.

M. Francis Delattre. Plus personne ne vous croit !

M. Pierre Moscovici, ministre. Monsieur Bocquet, vous le savez, puisque vous avez évoqué cette notion à la fin de votre intervention, nous sommes attachés à la progressivité de l’impôt.

M. Alain Gournac. Ah oui, et à la progressivité rapide !

M. Gérard Cornu. Avec deux millions de contribuables supplémentaires !

M. Pierre Moscovici, ministre. Je rappelle que, l’an passé, nous avons créé une tranche supplémentaire d’impôt sur le revenu. De même, nous allons, dans le prochain projet de loi de finances, mettre en œuvre la taxe à 75 % prévue par le Président de la République.

Il s’agit là d’une stratégie globale, cohérente, tournée vers la croissance et l’emploi, et nous espérons que vous la soutiendrez. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

sécurité (effectifs de police)

M. le président. La parole est à M. Christian Bourquin.

M. Christian Bourquin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, une étude publiée le 12 septembre dernier par l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales a montré une forte augmentation du sentiment d’insécurité chez nos concitoyens, avec – fait inédit – une forte montée de ce ressenti parmi les classes moyennes, dans les zones pavillonnaires et dans les zones rurales.

De fait, entre 2009 et 2012, les zones couvertes par la gendarmerie nationale ont vu le nombre de cambriolages multiplié par deux, alimentant la peur et le sentiment d’abandon par l’État de ces territoires déjà éprouvés par les effets dévastateurs de la fameuse RGPP. Plus largement, on constate depuis un an la hausse de certains délits, comme les vols à main armée contre les commerces ou les atteintes aux biens.

Notre pays paie aujourd’hui les frais de cinq ans d’une politique de sécurité qui a été incantatoire (Protestations sur les travées de l'UMP.),…

M. Alain Fouché. Comme par hasard !

M. Gérard Cornu. Mais c’est vous qui êtes au pouvoir !

M. le président. Mes chers collègues, un peu de calme !

M. Christian Bourquin. … inefficace, et qui s’est surtout traduite par la suppression de près de 14 000 postes dans la police et la gendarmerie.

Monsieur le ministre, vous avez annoncé l’arrêt de cette hémorragie, en recrutant cette année 6 000 policiers et gendarmes,…

M. Alain Gournac. C’est pour cela que ça va mieux…

M. Christian Bourquin. … et en revoyant l’organisation des forces de l’ordre sur le terrain.

Le maintien de l’ordre public est un impératif de notre République. Nous avons pris acte du fait que le Gouvernement faisait de la contrainte pénale la principale réponse à la lutte contre la récidive,…

M. Gérard Cornu. Avec Taubira,…

M. Alain Gournac. … vous videz les prisons !

M. Christian Bourquin. … bien que la discussion du projet de loi relatif à la réforme pénale ne semble pas, à ce jour, prioritaire.

La contrainte pénale ne peut soutenir, à elle seule, une politique de lutte contre l’insécurité et la récidive, une politique qui soit à la fois ferme, efficace et respectueuse des valeurs de la République. Je note d’ailleurs qu’elle ne prend pas en compte la prévention de la primo-délinquance et de la délinquance juvénile, qui sont pourtant très préoccupantes.

Au-delà du maintien des postes des forces de police, d’autres moyens s’imposent. Ces moyens doivent, évidemment, être à la hauteur des enjeux.

Ma question est donc la suivante : quelles sont vos propositions pour aller encore plus loin dans cette politique de l’efficacité que nous observons aujourd’hui ? Cette réponse est importante, à la veille des municipales,…

M. Christian Bourquin. … quand on sait que le camp de la droite souhaite municipaliser ce dossier de l’insécurité. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser le ministre de l’intérieur, retenu par la cérémonie d’hommage aux victimes du terrorisme.

La question des effectifs est l’une clef de la réussite de la politique menée en faveur de la sécurité.

Vous l’avez dit, la présence effective des policiers et des gendarmes sur le terrain est essentielle. Ce n’est évidemment pas la seule réponse, mais sans forces de l’ordre en nombre suffisant dans nos villes, nos quartiers et nos villages, on ne peut lutter efficacement contre la délinquance, les trafics et les violences. On ne peut lutter contre le sentiment d’insécurité.

Le précédent gouvernement doit assumer ses responsabilités. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Gournac. Mais c’est vous qui êtes au pouvoir !

M. Alain Fouché. Que se passe-t-il à Marseille ? Et en Corse ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le choix avait été fait de couper dans les effectifs. (Mêmes mouvements sur les mêmes travées.) Au total, ce sont 13 700 emplois de policiers et de gendarmes qui ont été supprimés entre 2007 et 2012. Dans la police, ce sont les directions présentes sur la voie publique qui ont le plus souffert de cette réduction de postes.

M. Alain Gournac. Nous, nous n’avons pas vidé les prisons !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le mal est fait !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Aujourd’hui, le Gouvernement veut redonner aux forces de l’ordre les moyens d’être efficaces, présentes sur le terrain aux côtés de la population. Il a donc mis fin à une véritable hémorragie dans les effectifs.

Le Gouvernement a tout d’abord sauvé 3 200 emplois qui devaient disparaître en 2013.

M. François Rebsamen. C’est vrai !

M. Gérard Cornu. À coup d’impôts !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Nous avons ensuite fait le choix de remplacer tous les départs à la retraite et de créer 480 emplois supplémentaires de policiers et de gendarmes.

M. Alain Fouché. Ça marche bien…

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Ces hausses d’effectifs se poursuivront chaque année au même rythme pendant le quinquennat. Les policiers recrutés terminent actuellement leur formation et seront sur le terrain à l’issue de celle-ci.

Monsieur le sénateur, vous le constatez, le Gouvernement a inversé le mouvement de réduction des effectifs et a fait de leur présence auprès de la population une priorité.

M. Alain Gournac. Plus d’insécurité, alors ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Outre ces questions, c’est une politique globale de lutte contre l’insécurité qui est menée.

Des zones de sécurité prioritaires ont été créées. Ce sont des réponses adaptées aux besoins de chaque territoire qui sont proposées. Ce sont de nouvelles méthodes de travail qui ont été testées, fondées sur le dialogue entre tous les acteurs, et les résultats sont déjà significatifs. (Rires sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je peux également citer les dispositifs spécifiques mis en œuvre pour lutter contre les cambriolages qui touchent les commerçants ou encore le démantèlement des trafics de drogue, qui s’accélère.

Mme Sophie Primas. N’exagérons rien !

M. Éric Doligé. Et l’immigration ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le partenariat avec les collectivités territoriales est au cœur de cette stratégie, que ce soit par la vidéoprotection, par la coopération entre police nationale et polices municipales, ou par les nombreuses actions de prévention. Ces sujets méritent un travail en commun et un rassemblement contre l’insécurité, plutôt que l’exploitation politique. Cette politique globale et déterminée porte d’ores et déjà ses fruits,…

M. Alain Vidalies, ministre délégué. … et les Français le savent ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE – Exclamations sur les travées de l’UMP.)

retraites

M. le président. La parole est à M. Henri de Raincourt. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Henri de Raincourt. Ma question s'adressait à Mme le ministre des affaires sociales et de la santé, mais je crois que c’est Mme Delaunay qui me répondra.

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. J’aurai cet honneur !

M. Henri de Raincourt. Madame le ministre, les projections établies par le Conseil d’orientation des retraites à la fin de 2012 indiquent que notre système pourrait atteindre un déficit de 40 milliards d’euros en 2020.

Je rappelle que, dès que la conjoncture l’a exigé, les majorités que nous avons soutenues en 1993, en 2003, en 2007, en 2010 et en 2011 – face à la crise ! – ont engagé des réformes permettant, en 2011, d’économiser 4,4 milliards d’euros supplémentaires.

Ces réformes, vous les avez toutes combattues ! Dès votre arrivée aux responsabilités en 2012, vous avez partiellement rétabli la possibilité d’un départ à la retraite à soixante ans, engendrant un coût supplémentaire de 1,1 milliard d’euros.

Lorsque vous étiez dans l’opposition, vous promettiez de revenir sur les réformes que nous avions menées.

M. Alain Gournac. C’est vrai !

M. Henri de Raincourt. Vous déclariez ainsi, au mois de novembre 2010 : « L’âge légal de départ en retraite reviendra à soixante ans et l’âge légal de départ sans décote à soixante-cinq ans. »

Aujourd’hui, le Gouvernement nous propose l’allongement de la durée de cotisations et le maintien des soixante-deux ans. Sa conversion nous réjouit, mais elle nous rappelle que vous êtes toujours, malgré tout, en retard d’une réforme.

M. Henri de Raincourt. Et ce n’est pas celle que le Conseil des ministres a adoptée hier qui nous permettra de combler le déficit !

Pourtant, le Gouvernement n’avait pas été avare dans sa communication. Des réunions solennelles avec les partenaires sociaux au rapport du groupe de travail présidé par Mme Moreau, on attendait un projet courageux et ambitieux. Patatras ! Le choix du Gouvernement nous enseigne qu’il ne faut pas confondre communication et action.

M. Henri de Raincourt. Ce projet annonce, à l’horizon de 2020, une économie de 7,3 milliards d’euros, tandis que le scénario retenu par le Conseil d’orientation des retraites prévoit au minimum 20,7 milliards d’euros à combler. Or, dans la situation actuelle, reconnaissons que la réforme présentée hier se résume surtout à une augmentation des cotisations et qu’elle constitue une véritable usine à gaz pour ce qui concerne la pénibilité.

Les distorsions entre le public et le privé perdurent ! Les régimes spéciaux sont sanctuarisés ! Si les mots ont un sens, il s’agit non pas d’une réforme, mais bien d’une hausse des prélèvements, qui s’ajoute aux précédentes.

Le Président de la République annonçait dimanche dernier une pause fiscale en 2014 (M. Jean-Louis Carrère tape sur son pupitre pour signifier à l’orateur qu’il a épuisé son temps de parole.), le Premier ministre corrigeait lundi, en l’annonçant pour 2015, et M. Moscovici nage un peu entre les deux. (Même mouvement.)

M. le président. S’il vous plaît, cher collègue !

M. Henri de Raincourt. Dans cette cacophonie, comment s’y retrouver et qui faut-il croire ?

Madame le ministre, je voudrais vous demander (Marques d’impatience sur les travées du groupe socialiste.),… Qu’est-ce que vous êtes intolérants ! C’est incroyable ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Madame le ministre, je voudrais vous demander, avant que ne s’ouvre un nouveau débat parlementaire…

M. le président. Concluez, mon cher collègue !

M. Henri de Raincourt. … bâclé par l’application de la procédure accélérée,…

M. Vincent Peillon, ministre. Accélérez ! Accélérez !

M. Henri de Raincourt. … si le Gouvernement envisage la survie des régimes de retraite…

M. le président. Concluez, s’il vous plaît !

M. Henri de Raincourt. … autrement qu’en se délestant du problème sur les entreprises, les actifs et les retraités. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes âgées et de l’autonomie.

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Mesdames, messieurs les députés (Exclamations sur les travées de l'UMP.),…

M. Dominique de Legge. Ça y est, le Sénat n’existe plus !

M. Alain Fouché. Rayé de la carte !

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. … mesdames, messieurs les sénateurs, pardonnez-moi, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Mme Touraine, retenue hors de cette enceinte, qui m’a priée de vous communiquer sa réponse.

Dès notre arrivée aux responsabilités, comme vous le savez, nous avons dû engager les concertations pour réformer et pour apporter à nos concitoyens des garanties sur l’avenir de leurs régimes de retraite et, parmi celles-ci, la possibilité de partir à soixante ans pour ceux qui ont commencé à travailler tôt.

Ce sont là des garanties nécessaires, alors que vous aviez vous-mêmes apporté l’inquiétude et le manque de confiance. Vous avez ouvert en grand les portes à la capitalisation et à la privatisation. Là où vous aviez fait le choix de la brutalité et du passage en force, nous avons fait celui de la concertation et de la discussion.

Nous avons besoin de garantir à nos concitoyens que, demain, la retraite par répartition sera sauvegardée. Nous avons besoin d’apporter des garanties en termes de financement, puisque vous avez fait porter l’effort sur celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes. Or nous avons besoin d’un effort réparti, mesuré, équitable.

Nous avons surtout besoin de mettre en place une réforme de justice. Vous n’avez jamais reconnu la vérité des carrières pénibles de celles et ceux qui, pendant toute leur vie, travaillent la nuit ou portent des charges lourdes.

M. Alain Fouché. C’est dans la loi, il ne faut pas exagérer !

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. Vous n’avez jamais reconnu la réalité de ces femmes qui connaissent des carrières heurtées…

M. Alain Gournac. C’est dans la loi !

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. … et le travail à temps partiel.

Vous n’avez jamais reconnu la réalité de ces hommes et de ces femmes qui sont confrontés au chômage et à la précarité de la vie professionnelle. (Protestations sur les travées de l'UMP.)

Quant à nous, monsieur le sénateur, nous faisons preuve de détermination, de responsabilité, et de justice. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste – Exclamations sur les travées de l'UMP.)

tva artisans

M. le président. La parole est à M. Henri Tandonnet.

M. Henri Tandonnet. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé du budget.

Vendredi dernier, les artisans se sont mobilisés sur tout le territoire pour alerter le Gouvernement sur leur situation. Ils sont au bord du gouffre ! Tous les jours, des entreprises artisanales disparaissent, et leurs emplois de proximité avec elles. Cela démontre que le pacte pour l’artisanat, présenté en janvier dernier, n’a pas porté ses fruits.

Le crédit d’impôt pour la compétitivité est inadapté au tissu artisanal, avec son million d’entreprises et ses trois millions d’actifs. En outre, les mesures prises par le Gouvernement ne permettent pas aujourd’hui d’atteindre l’objectif de construction de 500 000 logements par an. Cela pénalise le secteur, comme les Français, pour qui le logement est un sujet de préoccupation majeur.

Comme tous les Français, les artisans sont confrontés aux contraintes administratives, à une fiscalité décourageante et à des charges sociales pénalisantes.

Trois revendications légitimes n’ont pas été entendues : premièrement, celle concernant la concurrence déloyale des entreprises étrangères offrant une main-d’œuvre sous-payée ne respectant pas les garanties sociales françaises ; deuxièmement, celle touchant à l’inadaptation du statut des auto-entrepreneurs au secteur du bâtiment. En effet, les artisans supportent des charges très lourdes et apportent des garanties solides aux propriétaires, dont sont déchargés les auto-entrepreneurs. Troisièmement, cella ayant trait à la hausse de TVA, qui a déjà été portée de 5,5 % à 7 % en janvier 2012 et que vous envisagez de porter à 10 %.

Le Gouvernement dévoile aujourd’hui un plan de relance pour la rénovation énergétique des logements. Le bénéfice des subventions que vous évoquez sera effacé par cette hausse de la TVA.

M. Henri Tandonnet. Rien ne sert d’augmenter ce taux si cela a pour effet de réduire la base d’imposition.

Aujourd’hui, le champ de la rénovation est immense et concerne tout le territoire. La baisse de la TVA à 5,5 % en 1999 avait donné des résultats extrêmement positifs sur l’emploi et la compétitivité des entreprises.

Allez-vous enfin, monsieur le ministre, entendre le désespoir de l’artisanat et du bâtiment et rétablir une TVA à 5,5 % ?

M. François Rebsamen. C’est incroyable, d’entendre ça !

M. Henri Tandonnet. Cela constituerait un signe fort à l’adresse d’un secteur au bord de l’asphyxie. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. André Reichardt. Très bien !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Je vous remercie infiniment de m’avoir posé cette question, monsieur le sénateur, qui va me permettre de faire un point précis sur le dispositif fiscal applicable au secteur de l’artisanat.

Tout d’abord, je souhaite rappeler que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, qui a vocation à restaurer la compétitivité de l’économie française et qui représente un allégement de charges de 20 milliards d’euros pour les entreprises, bénéficiera aussi au secteur de l’artisanat. Comme vous le savez, ce dispositif est adossé à la masse salariale des entreprises, et un certain nombre d’entreprises de l’artisanat emploient, fort heureusement, une main-d’œuvre de qualité, qualifiée et nombreuse.

Ensuite, je voudrais souligner que le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi n’est pas financé par un transfert intégral sur la TVA, contrairement à d'autres mesures qui ont pu être envisagées par le passé et qui auraient eu des effets beaucoup plus pernicieux que ceux que vous avez pointés dans votre question.

Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, le taux de TVA était de 21,2 %. Après notre décision, il a été ramené à 20 %.

Nous avons effectivement décidé d’appliquer trois taux de TVA, dans un contexte où l’artisanat se trouvera accompagné. Je souhaite ainsi rappeler quelques mesures fortes, qui, d’ailleurs, font écho aux questions très légitimes que vous avez posées.

Premièrement, nous avons d'ores et déjà décidé de mettre en place un taux réduit de TVA non seulement pour la construction de logements sociaux, mais aussi pour les travaux de petite réparation, qui pourront bénéficier au secteur de l’artisanat.

Deuxièmement, nous avons décidé de mettre en place le crédit d’impôt pour le développement durable, qui a vocation à accompagner, de façon ambitieuse et significative, les familles qui procèdent à des travaux de rénovation technique, avec un bouquet de travaux dont l’assiette est large. Cela bénéficiera aux artisans.

Vous avez entendu le Président de la République indiquer dimanche soir qu’il procéderait à de nouvelles annonces concernant ce crédit d’impôt, comme d’autres dispositions destinées à accompagner l’artisanat.

Comme vous pouvez le constater, à travers la liste de ces mesures, nous n’avons pas oublié l’artisanat en mettant en place des dispositions favorables aux entreprises, destinées à restaurer leur compétitivité.

En outre, vous avez évoqué deux sujets complémentaires sur lesquels je veux conclure.

Sur la directive concernant les salariés en Europe, nous tenons à Bruxelles des positions extrêmement fortes, parce qu’il s’agit du droit social, de la reconnaissance d’acquis sociaux et des distorsions de concurrence susceptibles d’exister entre pays de l’Union européenne.

De la même manière, nous sommes très fermes à Bruxelles quant à la fraude à la TVA, qui peut conduire un certain nombre de sous-traitants du bâtiment à casser les prix, au détriment du secteur de l’artisanat. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

impôt sur le revenu

M. le président. La parole est à M. François Rebsamen.

M. François Rebsamen. Ma question s'adresse à M. le ministre délégué chargé du budget.

Au cœur du programme sur lequel il a été élu, le Président de la République avait fixé comme objectif non seulement l’emploi, bien sûr, mais également deux autres priorités : le redressement des comptes publics ainsi que le rétablissement de la justice et de l’équité fiscales.

L’orientation suivie par la droite, notamment durant le dernier quinquennat, était claire. À cet égard, je voudrais rappeler trois dispositions adoptées par le gouvernement de M. Fillon.

Depuis 1969, tout le monde le sait, le barème de l’impôt sur le revenu était indexé sur l’inflation. En 2011, la droite a gelé ce barème.

M. Christian Cambon. Pourquoi ne l’avez-vous pas dégelé ?

M. François Rebsamen. Ainsi, des centaines de milliers de Français qui ne payaient pas l’impôt sur le revenu sont devenus imposables.

M. Gérard Cornu. Et vous, qu’avez-vous fait ?

M. François Rebsamen. Cette mesure a représenté une véritable injustice (Exclamations sur les travées de l'UMP.), dès lors que les plus aisés des Français ont été protégés et leur contribution à la solidarité nationale, allégée. Inutile de revenir sur le bouclier fiscal, cela vous ferait beaucoup de mal…

M. Francis Delattre. Et la défiscalisation des heures supplémentaires, ça nous ferait beaucoup de mal ?

M. François Rebsamen. Je voudrais évoquer aussi la quasi-disparition de l’impôt de solidarité sur la fortune, votée par la droite en 2011.

Monsieur le ministre, une chatte n’y retrouverait pas ses petits ! Notre priorité a donc été de remettre de la justice dans un système fiscal duquel elle avait disparu.

M. Alain Gournac. Et d’ajouter des impôts, aussi !

M. François Rebsamen. À cette fin, nous avons, dès juillet 2012, demandé aux plus aisés de contribuer à la solidarité nationale. Une tranche supplémentaire à 45 %, a été mise en place pour les revenus élevés et a touché les 50 000 contribuables les plus aisés, cela a été rappelé par le ministre de l’économie.

L’impôt de solidarité, qui avait été liquidé, a été rétabli à l’automne dernier.

Résoudre l’équation de la justice fiscale, de l’équité et de la protection du pouvoir d’achat dans la période économique actuelle est un exercice difficile,…

M. Francis Delattre. Très difficile !

M. François Rebsamen. … compte tenu de la situation catastrophique dans laquelle nous avons trouvé les comptes de notre pays en mai 2012 ! (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

M. Francis Delattre. Et les comptes de la Corrèze, comment vont-ils ?

M. François Rebsamen. Nous le savons, tout ne peut pas être réglé en quinze mois, surtout pas après dix ans d’abandon. Les réformes vont donc se poursuivre dans ce domaine.

En quelques mois, beaucoup a été fait. Nous sommes conscients du travail qu’il reste à faire et de la nécessité de ne pas s’arrêter en chemin, afin de préserver l’indépendance budgétaire et économique de notre pays.

Monsieur le ministre, ma question est donc la suivante : quelles mesures comptez-vous prendre pour que l’impôt sur le revenu, auquel la gauche est très attachée,…

M. Gérard Cornu. Ça, on peut le dire !

M. François Rebsamen. … soit l’outil de redistribution et de justice fiscale que nous avons toujours défendu ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Monsieur Rebsamen, vous m’interrogez sur les mesures que nous pourrions prendre pour 2014, en écho à celles que nous avons déjà prises en loi de finances, de manière à restaurer la progressivité de l’impôt sur le revenu et à ne pas perdre de vue l’objectif de justice, qui constitue le fil rouge de l’action du Gouvernement.

M. Francis Delattre. C’est cela, oui…

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Je voudrais profiter de votre question pour apporter des précisions sur des informations véhiculées par voie de presse et destinées à faire peur, là où il serait important d’informer.

Mme Sophie Primas. Maintenant, c’est la faute de la presse !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Il était indiqué ce matin que 1,2 million de contribuables supplémentaires ont payé l’impôt sur le revenu. Cette information est fausse.

M. Gérard Cornu. C’est 1 million ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Ce chiffre n’est pas exact, parce que, en cette période de l’année, durant laquelle nous rapprochons les avis d’imposition de ceux de l’an dernier afin d’établir précisément ces données statistiques, nous ne sommes pas en mesure de les communiquer précisément.

Sur ces questions, il est important que la transparence prévale. Je m’engage donc à les annoncer, avec Pierre Moscovici, devant les commissions des finances du Sénat et de l’Assemblée nationale dans quelques jours, dès que nous en disposerons.

Je peux en revanche vous donner les chiffres de 2011 et de 2012. En 2011, 2 620 000 Français sont devenus redevables de l’impôt sur le revenu et 2 910 000 en 2012.

L’explication recoupe votre question : en 2011, décision a été prise de mettre fin à l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu sur l’inflation. Cela signifie que des Français, dont le revenu n’augmentait pas mais se trouvait érodé par l’inflation, sont entrés dans le barème de façon extrêmement injuste. La mise à l’écart de la demi-part des veuves a provoqué exactement le même résultat.

Nous avons décidé l’an dernier de commencer à remédier à cette injustice. Comment ? En mettant en place une décote de 9 %, qui a engagé la correction des effets de ces dispositions, ainsi qu’une augmentation du revenu fiscal de référence. Ainsi, 7,4 millions de Français ne sont pas devenus imposables sur le revenu en 2013. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Éric Doligé. Mais alors, pourquoi sont-ils mécontents ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Quelles mesures allons-nous prendre pour 2014, monsieur Rebsamen ?

Nous allons prendre une nouvelle mesure de décote, ainsi qu’une nouvelle mesure concernant le revenu fiscal de référence et nous allons réindexer le barème. Cela nous permettra de réinjecter 700 millions d’euros de pouvoir d’achat, témoignant ainsi de notre volonté de mettre de la justice là où l’injustice s’est accumulée durant de longs mois. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

aides et subventions accordées aux associations

M. le président. La parole est à M. André Gattolin.

M. André Gattolin. Ma question s'adresse à Mme la ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative.

Madame la ministre, le changement voulu par la majorité élue l’an passé a besoin des associations et de leur engagement au quotidien. Elles sont en effet l’un des piliers de notre vie démocratique, sociale, civique et culturelle. Elles rendent des services, produisent du lien social, enrichissent les savoirs et créent des emplois durables. Elles sont pourtant malmenées, à l’image du Rassemblement pour la planète, qui regroupe de nombreux lanceurs d’alerte et qui, assez étonnamment, vient de se voir refuser l’entrée à la conférence environnementale.

D’autres associations sont de plus en plus souvent soumises à des appels d’offres qui les mettent en concurrence, sous prétexte que l’Union européenne exigerait la fin des subventions aux associations. C’est faux ou, en tout cas, c’est une interprétation abusive du droit communautaire. En effet, les subventions publiques restent un mode légal et pertinent de soutien dans la très grande majorité des cas. C’est aussi l’un des modes de financement qui contribue à garantir toute leur autonomie aux associations.

Aujourd’hui, presque toutes voient leurs subventions rognées pour 2013 et annoncées à la baisse pour 2014. Plusieurs ministères sont, dans les faits, confrontés à des difficultés et à des arbitrages budgétaires. Sans méconnaître la tension qui affecte nos finances publiques, les écologistes considèrent que le bénéfice social, culturel, environnemental et économique de l’action associative est infiniment supérieur à la maigre moisson qu’apporteraient les restrictions sur leurs modestes moyens.

Nous considérons que ces lignes budgétaires, assez anecdotiques dans les budgets de ministères comme ceux de l’environnement, de l’éducation, de la recherche ou de la santé, sont l’indispensable condition de la qualité de l’action publique dans nos territoires.

Alors qu’une proposition de charte qualitative d’engagement réciproque entre État, associations et collectivités vous a été remise en juillet dernier par le préfet Duport et notre excellent collègue Claude Dilain, charte toujours en attente d’engagement solennel de la part du Premier ministre et des associations de collectivités, les écologistes souhaitent savoir, madame la ministre, quelle ligne tiendra le Gouvernement pour garder vivantes la richesse de notre tissu associatif et la force de ses actions. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative.

Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative. Monsieur le sénateur, vous avez raison de le rappeler, les seize millions de bénévoles du monde associatif apportent une contribution indispensable à la vie démocratique, culturelle et sociale de notre pays.

Comme vous l’avez souligné, le monde associatif représente également des emplois, à hauteur d’un emploi sur dix dans le secteur privé. Or, entre 2010 et 2012, pour la première fois dans l’histoire de la vie associative de notre pays, ce secteur a perdu 11 000 emplois.

À la suite de la rencontre, en juillet dernier, entre le Président de la République et la Conférence permanente des coordinations associatives, le Gouvernement travaille avec les associations à l’élaboration d’un pacte pour l’emploi des jeunes. Car les associations sont pleinement engagées dans la réussite des emplois d’avenir, du service civique, de la réforme des rythmes éducatifs ! Et le Gouvernement est pleinement mobilisé pour soutenir le développement de l’activité et de l’emploi associatifs ! Nous y consacrons 1,2 milliard d’euros par an et 2,7 milliards d’euros de dépenses fiscales leur sont directement affectées.

Le Gouvernement n’oublie pas les associations dans le cadre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Elles ont fait l’objet d’une mesure spécifique d’abattement supplémentaire de la taxe sur les salaires de 6 000 à 20 000 euros, ce qui représente un effort budgétaire de 314 millions d’euros. Cette mesure entrera en vigueur le 1er janvier 2014.

Au sein de mon ministère, l’ensemble des soutiens à la vie associative et, surtout, ceux qui sont consacrés à l’emploi, ont été totalement préservés en cette période de redressement des comptes publics.

Mais le soutien financier n’est pas tout. En tant que ministre de la vie associative, je me suis également engagée à restaurer la confiance entre les associations, les collectivités territoriales et l’État.

La nouvelle charte des engagements partagés, qui a été portée par le sénateur Claude Dilain et qui sera signée par le Premier ministre avant la fin de cette année, prend, pour la première fois, les collectivités en compte.

Nous avons aussi engagé un chantier très attendu, celui de la sécurisation juridique des relations contractuelles avec les pouvoirs publics. En effet, les derniers travaux du CNRS nous montrent que, sur une période de six ans, la commande publique a progressé de 8 points, tandis que les subventions aux associations ont baissé de 10 points.

Pour la première fois, à l’occasion du projet de loi relatif à l’économie sociale et solidaire, qui sera porté par mon collègue Benoît Hamon, une subvention sera reconnue par la loi. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Vous le voyez, un nouveau chapitre s’ouvre dans les relations entre les pouvoirs publics, l’État et le monde associatif. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du RDSE.)

réforme pénale

M. le président. La parole est à M. Pierre Charon.

M. Pierre Charon. Ma question s'adresse à Mme le garde des sceaux.

Madame le garde des sceaux, la remise en liberté d’un détenu en raison de conditions de détention jugées insalubres à Bois-d’Arcy, la libération de trois délinquants en Eure-et-Loir faute de places en prison, le régime de semi-liberté dont a bénéficié le présumé auteur récidiviste de viols sous la menace d’une arme à Colombes cet été ou l’attaque de trains en toute impunité sont autant d’exemples récents qui témoignent de la cacophonie du système pénal, de l’incurie, par faute de moyens, des services de contrôle et de l’ineptie, comme de l’inefficience, des mesures d’aménagements de peine pour des cas d’une telle gravité.

Nous sommes, je le pense, unanimement d’accord sur ces travées pour déplorer le manque cruel de places dans nos établissements pénitentiaires. Au 1er septembre, on comptait en effet 67 088 détenus pour 57 238 places opérationnelles. Ce sont des conditions de détention inadmissibles.

Nous divergeons en revanche sur la manière de traiter la question, tant nos visions de la société s’opposent.

M. David Assouline. Ça, c’est vrai !

M. Pierre Charon. Laxisme, angélisme, dogmatisme président à toutes vos décisions (Protestations sur les travées du groupe socialiste.), prises sous la haute surveillance du syndicat de la magistrature.

M. David Assouline. C’est totalement faux !

M. Pierre Charon. Vous êtes garde des sceaux, pas la gardienne du « mur des cons » ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

M. Simon Sutour. Toujours aussi nuancé !

M. Pierre Charon. Ce sont 100 000 places qu’il faut atteindre pour avoir une politique pénale qui fonctionne à peu près, avec une exécution des peines sans délais. Il est irresponsable de savoir que 100 000 peines de prison ferme sont actuellement en attente d’exécution. Il est tout aussi irresponsable d’interrompre le programme immobilier de construction.

Vous préférez pourtant traiter l’engorgement des prisons par la suppression des peines plancher ou innover avec votre projet de contrainte pénale, qui n’est autre qu’une variation du sursis de mise à l’épreuve. De la com, toujours de la com, encore de la com !

M. Jean-Pierre Sueur. C’est vous qui en faites en parlant de laxisme !

M. Pierre Charon. Vous préférez bannir la peine elle-même du vocabulaire pénal, installant, par là même, dans notre pays une situation d’impunité, signal désastreux pour les délinquants et méprisant pour nos forces de police. C’est une manière dangereuse, mais très sûre de nourrir les extrêmes !

M. Pierre Laurent. Dites-le à François Fillon !

M. Pierre Charon. Quelles suites comptez-vous donner aux travaux conduits par l’administration pénitentiaire en 2009 et 2010, travaux qui fixaient, en tenant compte des aménagements de peine, un chiffre optimum du nombre de places de prison nécessaires ? C’était pourtant un exercice de prospective fort intéressant, mais déjà dépassé, malheureusement, dont il serait utile de s’inspirer pour ne pas voir la situation devenir ingérable.

Pourquoi ne pas poursuivre un vrai programme de construction de places de prison ? Les syndicats du personnel pénitentiaire le souhaitent, les forces de l’ordre et même les avocats et les détenus le souhaitent pour des raisons de dignité humaine.

M. Jean-Pierre Sueur. Cela va être fait !

M. Pierre Charon. Je ne vous parle pas du Conseil de l’Europe, qui a pointé dans son rapport de mai dernier la surpopulation de nos prisons.

Ce que la surpopulation carcérale démontre, c’est qu’il n’y a pas assez de prisons, pas qu’il y a trop de condamnés !

Madame le garde des sceaux, ma question se résume en une phrase : pensez-vous pouvoir avoir longtemps raison contre la société française ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur Charon, manifestement, il faut vous rafraîchir la mémoire sur les politiques conduites par les gouvernements que vous ne vous êtes pas contenté de soutenir, mais que vous avez accompagnés au jour le jour…

Le Gouvernement a le courage moral et politique d’attaquer les vrais problèmes, d’affronter les réalités et de tirer constat des résultats désastreux produits par ces politiques pénales et carcérales – je dis bien « politiques » au pluriel, tant elles furent disparates et divergentes - conduites par l’ancien gouvernement.

Ces politiques pénales, monsieur le sénateur, étaient notamment marquées par une exécution de la peine absolument confuse et inefficace. Elles étaient marquées par des injonctions contradictoires puisqu’il fallait tout à la fois incarcérer de plus en plus et, dans le même temps, aménager les peines de plus en plus. Voilà une capacité illogique de désarticuler la société pour laquelle vous avez fait des miracles !

Ces politiques pénales étaient également marquées par une gestion calamiteuse des flux carcéraux. Vous avez introduit dans le code de procédure pénale des mécanismes qui n’ont jamais fonctionné, la surveillance de fin de peine, par exemple. Et à quoi ont abouti vos résultats désastreux ? À un taux de condamnation en récidive légale qui a presque triplé en dix ans ! À un taux exorbitant et dangereux de sorties sèches de nos établissements pénitentiaires ! Dans toute l’Europe et en Amérique du Nord, on sait que les sorties sèches sont des facteurs d’aggravation de la récidive. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Joël Guerriau. Ce n’est pas une réponse !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Alors, oui, nous avons le courage moral et politique d’affronter cette réalité, de mettre un terme aux facteurs d’aggravation de la récidive, de préserver la sécurité des Français !

Nous le faisons à partir de travaux de recherche, de rapports parlementaires, dont certains ont été cosignés par des élus de votre sensibilité.

M. David Assouline. M. Lecerf !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous le faisons à partir des conclusions de la conférence de consensus à laquelle ont participé certains élus de votre sensibilité.

Nous le faisons après une large concertation.

Nous avons le courage, nous, d’affronter la lutte contre la récidive !

Nous allons construire des places de prison. Nous avons commencé à le faire. (Exclamations sur les travées de l'UMP.) Nous avons des financements, là où vous affichez des places de prison avec zéro euro de financement. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste.)

Le temps de la démagogie est terminé ! Le temps du courage politique, du courage moral, et le temps de l’efficacité sont advenus, ne vous en déplaise ! (Vifs applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

formation des personnes inscrites à pôle emploi

M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès.

Mme Christiane Demontès. Il est difficile de passer après Mme la garde des sceaux…

M. Alain Fouché. Passez votre tour !

Mme Christiane Demontès. Ma question s'adresse à M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

Le Président de la République et le Gouvernement ont fait de l’emploi leur première priorité (Exclamations sur les travées de l'UMP.), et chacun sait que cette question est le premier sujet d’inquiétude de nos concitoyens.

Depuis la rentrée de septembre 2012, nous avons examiné et voté, ici, au Sénat, un certain nombre de lois permettant d’agir pour l’emploi. Je citerai, à titre d’exemple, les emplois d’avenir, les contrats de génération ou la sécurisation de l’emploi.

M. Gérard Cornu. Et les heures supplémentaires ?

Mme Christiane Demontès. Je veux revenir en quelques mots sur les emplois d’avenir.

Certains, sur les travées mêmes de cette assemblée, n’hésitent pas à dire que ces emplois sont de faux emplois.

M. Joël Billard. Ils ne sont pas pérennisés !

Mme Christiane Demontès. Quel déni de réalité ! Oui, ces emplois publics et associatifs sont utiles ! Il suffit, pour s’en convaincre, d’aller voir sur leur lieu de travail les jeunes qui les occupent.

L’objectif de 100 000 emplois d’avenir en 2013 sera atteint, et c’est tant mieux ! Le nombre de contrats de génération augmente régulièrement.

M. Alain Gournac. Qui paie ?

Mme Christiane Demontès. Mais, nous le savons tous, monsieur le ministre, accéder à l’emploi nécessite souvent le passage par une formation. Vous êtes en train de préparer un projet de loi sur la formation professionnelle et l’apprentissage. L’enjeu est bien de permettre à tous d’accéder à la formation professionnelle, en particulier ceux parmi nos concitoyens qui sont le moins formés.

Monsieur le ministre, vous avez lancé, conformément à ce qui a été annoncé à la conférence sociale de juillet, un plan de 30 000 formations prioritaires destiné à orienter les chômeurs vers des offres d’emploi ne trouvant pas preneur. Pouvez-vous nous indiquer comment et quand ces formations vont pouvoir se mettre en place dans les territoires, au plus près des besoins des chômeurs et au plus près des besoins des entreprises ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail.

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Madame la sénatrice, la bataille pour l’emploi, c’est un ensemble : c’est bien entendu le soutien à l’activité économique pour que se créent – dans le tissu commercial, dans le tissu agricole, dans le tissu artisanal –des emplois durables dans les entreprises ; c’est aussi, en attendant les effets de la reprise, la réussite d’un certain nombre de politiques que vous venez de nommer.

Avant d’évoquer la formation, je veux juste dire quelques mots sur les emplois d’avenir, qui sont une grande réussite aujourd’hui.

M. Dominique de Legge. À condition qu’ils soient pérennisés !

M. Michel Sapin, ministre. Votés ici, sur des travées beaucoup plus larges que les seules travées de la majorité sénatoriale, les emplois d’avenir ont permis d’offrir des solutions à des jeunes qui étaient extrêmement loin de l’emploi, extrêmement loin de la formation. Aujourd’hui, il y en a plus de 56 000, soit autant de solutions pour ces jeunes en difficulté à qui on redonne un avenir.

Ces contrats sont accompagnés d’une formation, ce qui fait toute la différence avec un certain nombre de plans d’urgence mis en œuvre auparavant…

M. Alain Gournac. Les emplois-jeunes ?

M. Michel Sapin, ministre. … et qui n’ont fait qu’occuper des jeunes pendant six mois – étrangement, avant le mois de juin 2012 – dans l’unique objectif de faire tomber artificiellement les chiffres du chômage.

La formation est au cœur de tout. Il nous faut donc profondément la réformer, non parce que nous pensons du mal du dispositif issu de la grande loi Delors du 16 juillet 1971, mais parce que, aujourd’hui, les choses ont changé.

M. Christian Cambon. Compétence régionale !

M. Michel Sapin, ministre. Ceux qui ont désormais besoin de la formation professionnelle, ce sont les jeunes sans formation, les chômeurs qui n’ont pas la formation adéquate pour pouvoir retrouver un emploi et les salariés les moins formés, qui sont souvent les plus fragiles dès qu’une crise menace leur emploi.

Parce qu’il est urgent de préparer l’avenir, nous réformons la formation professionnelle, nous ouvrons une négociation et nous vous soumettrons un texte au début de l’année prochaine.

Plus de 30 000 emplois – 32 000 exactement – ont été identifiés par les partenaires sociaux, les entreprises et les salariés. Ce sont donc 30 000 chômeurs qui ont été identifiés grâce au travail de Pôle emploi ou des missions locales et 30 000 formations qui sont concrètement mises en œuvre sur l’ensemble du territoire français. Dans toutes les régions, nous assistons à un véritable engouement.

Ces formations sont en marche ! Il s’agit non pas de former pour former, mais de créer de véritables emplois, pour augmenter la capacité de production des entreprises et pour permettre aux chômeurs de retrouver un avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

rentrée scolaire

M. le président. La parole est à M. Jacques-Bernard Magner.

M. Jacques-Bernard Magner. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale.

Monsieur le ministre, nous venons de vivre la première rentrée scolaire entièrement préparée par le Gouvernement en place depuis mai 2012.

Cette rentrée 2013, qui a concerné près de 12 millions d’élèves et 842 000 professeurs, vous l’avez qualifiée d’« apaisée ».

M. Alain Fouché. Et les rythmes scolaires ?

M. Jacques-Bernard Magner. Il est vrai que, après la suppression de 80 000 postes dans l’éducation nationale entre 2007 et 2012, la création de 7 500 postes d’enseignants dans le primaire et le secondaire a enfin stoppé l’hémorragie qui mettait à mal notre système éducatif.

M. Alain Gournac. C’est la faute aux autres !

M. Jacques-Bernard Magner. Le vote de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République a posé les fondements d’une école juste, exigeante, bienveillante et inclusive.

Une école juste qui accueille sans discrimination tous les enfants de nos villages, de nos villes et de nos quartiers dès leur plus jeune âge,...

M. Alain Gournac. Que c’est beau !

M. Jacques-Bernard Magner. ... en mettant en œuvre une coéducation associant les enseignants, les parents d’élèves, les collectivités et le monde associatif de l’éducation populaire.

Une école exigeante dans les valeurs qu’elle inculque, portées par une charte de la laïcité, véritable garant des valeurs de la République.

M. Joël Billard. C’est du violon !

M. Jacques-Bernard Magner. Une école bienveillante qui s’attache non seulement aux apprentissages fondamentaux, mais aussi à la réussite de chacun et à la construction des citoyens de demain.

Une école inclusive, enfin, avec l’intégration de tous les enfants et avec des moyens considérables en personnels supplémentaires pour assurer l’accompagnement des élèves porteurs de handicaps.

Cette rentrée a aussi comporté une grande nouveauté pour l’école primaire avec le retour à la semaine de quatre jours et demi.

M. Joël Billard. Qui paye ?

M. Jacques-Bernard Magner. Cette nouvelle organisation favorisera une meilleure répartition du temps favorable aux acquisitions et créera enfin un temps périscolaire permettant aux élèves de s’épanouir dans la découverte et la pratique d’activités sportives, artistiques et culturelles.

Par ailleurs, trente écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, ont été ouvertes. Ces écoles vont enfin offrir aux futurs enseignants une véritable formation pédagogique, trop délaissée ces dernières années. Les jeunes professeurs ne se retrouveront plus devant leurs élèves sans expérience pratique, sans avoir jamais vu d’élèves.

M. Philippe Dallier. Il y a une question ?

M. Jacques-Bernard Magner. Dans nos départements, nous avons tous constaté que la rentrée s’était bien passée. Nous aussi, nous avons apprécié le climat « apaisé ».

M. Alain Gournac. La question !

M. Jacques-Bernard Magner. Quelle est (Ah ! sur les travées de l'UMP.) la perception par le ministre de l’éducation nationale de cette rentrée scolaire que je qualifierai d’historique ? (Exclamations sur les travées de l'UMP.)

M. Alain Fouché. C’est nul !

M. Jacques-Bernard Magner. Comment envisagez-vous désormais l’avenir de notre école et les futures étapes de sa refondation ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Philippe Dallier. Donnez-lui une médaille !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale. Monsieur le sénateur, je vais vous répondre en trois points et vous apporter quelques éléments d’information supplémentaires.

L’attention se concentre, parfois trop, sur la question des moyens. Je le regrette, car un pays a aussi besoin d’une Constitution morale et de réformes. Ce sera mon premier point.

Le deuxième point concernera ces réformes dont nous avons tant besoin.

Le troisième point portera sur les valeurs.

S’agissant des moyens, les 7 500 postes que vous avez évoqués ont bénéficié lors de cette rentrée pour moitié au primaire et pour moitié au secondaire. Ce n’était pas tout à fait prévu, car nous comptions au départ consacrer davantage de moyens à l’école primaire.

De ce point de vue, les nouveaux dispositifs pédagogiques – l’accueil des enfants de moins de trois ans, le « plus de maîtres que de classes » – ont finalement emporté moins de postes que la reconstitution des viviers de remplaçants ou l’ouverture de classes dans des proportions importantes.

Dans le même temps, nous disposions lors de cette rentrée d’un contingent de 10 000 emplois d’avenir, contre 4 000 l’année dernière. Le rapport de vos collègues parlementaires a montré que 3 500 personnes occupaient ces emplois. Nous redonnons ainsi son sens à la promesse républicaine, puisque ces emplois s’adressent à des élèves boursiers de deuxième année, tout en reconstituant nos viviers d’emplois.

Sur ces 10 000 emplois d’avenir, nous en avons déjà recruté 6 000 lors de cette rentrée, et nous pouvons espérer atteindre rapidement l’effectif de 10 000.

Sont créés par ailleurs 30 000 emplois aidés, dont nous avons changé la nature puisqu’il s’agit pour une grande part de contrats de deux ans accompagnés d’une formation. Parmi eux, 10 000 emplois sont dédiés à l’accompagnement des enfants en situation de handicap et s’ajoutent aux 12 000 emplois qui ont déjà été reconduits.

Cet effort est sans précédent : 10 000 emplois pour le climat scolaire et 10 000 pour la reconstitution, en un an, de l’accompagnement des directeurs d’école, qui avait été détruit en l’espace de cinq ans.

J’en viens maintenant à la question des réformes. Celles-ci, vous l’avez mentionné, sont engagées. Les écoles supérieures du professorat et de l’éducation sont ouvertes. Nous avons pu accueillir 40 % de professeurs recrutés supplémentaires et remettre en place un début d’année de stage. Je citerai également la réforme des rythmes scolaires, le service public du numérique éducatif et la professionnalisation des auxiliaires de vie scolaire.

Nous avons encore devant nous de grands efforts à accomplir : la réforme du collège, celle de l’éducation prioritaire, le conseil supérieur des programmes, qui sera installé dans une semaine, et la révision du métier d’enseignant.

C’est un travail de longue haleine qui nous attend. Nous devons l’accomplir en profondeur, au-delà des atermoiements, voire des déchirements, qui minent actuellement notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

pression fiscale

M. le président. La parole est à M. Francis Delattre.

M. Francis Delattre. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances.

Monsieur le ministre, votre incurie budgétaire et fiscale (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), que nous dénonçons depuis seize mois sans relâche, apparaît aujourd’hui crûment aux yeux des millions de Français qui reçoivent leur feuille d’impôt.

Tous les records d’imposition, de taxation et de prélèvement divers sont battus.

M. David Assouline. Ce n’est pas vrai !

M. Francis Delattre. Avec 46,5 % du PIB de prélèvements obligatoires, nous sommes sur le toit de l’Europe, en compagnie d’un pays nordique, le Danemark.

Les Français étouffent et vous font part de leur ras-le-bol fiscal, qui vous a également atteint, monsieur le ministre, en pleine torpeur estivale. Depuis lors, quel florilège sur la pause fiscale !

Le Président Hollande, après avoir dit tout au long de l’été que « l’idéal serait de ne pas augmenter les impôts en 2014 », nous présente désormais une pause qui ne serait qu’un ralentissement... La fin de la récréation vient d’être sifflée par le Premier ministre, qui annonce très clairement : « La pause fiscale, c’est pour 2015. »

Ainsi, le message présidentiel, qui était déjà doctement passé de l’indicatif au conditionnel devant la très compréhensive Mme Chazal, se trouve clairement désavoué. Je ne puis que conseiller au Président de retourner à la télévision dès le week-end prochain.

II n’est pas utile de savoir qui dit la vérité, monsieur le ministre : les Français ne vous croient plus ! Ils ne croient ni en la pause fiscale, ni aux 15 milliards d’euros d’économies, ni à l’inversion de la courbe du chômage avant la fin de l’année, car ils constatent que, dans leurs villes et leurs villages, le secteur marchand, accablé de taxes, continue de perdre des emplois.

Quant au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et à la Banque publique d’investissement, ils ne sont aujourd’hui que les oripeaux médiatiques de bonnes intentions non abouties. Et lorsque le ministre nous parle de 20 milliards d’euros pour cette année, il s’agit en réalité de 2 milliards ! Et encore…

Dans ce fatras de contradictions, où est la justice fiscale tant annoncée et illustrée par l’engagement n° 14 du candidat-président, préconisant la fusion de l’impôt sur le revenu avec la CSG ? Telle est la question qu’aurait dû poser le président du groupe socialiste au Sénat !

En réalité, vous avez été élus dans le déni des réalités économiques et sociales du pays, et vos difficultés à tenir un cap n’en sont que les nocifs prolongements.

Vous deviez faire payer les riches, mais, par vos décisions – et non celles du gouvernement Fillon ! –, un ménage de smicards paiera un impôt sur le revenu équivalent à la moitié d’un traitement.

MM. David Assouline et François Rebsamen. C’était comment, avant ?

M. Francis Delattre. Mes chers collègues, nous ne sommes plus dans le couac sémantique, mais dans le mensonge. Quand allez-vous cesser, monsieur le ministre, de mentir aux Français ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l'économie et des finances. Monsieur Delattre, votre question brille par sa finesse, par son sens de la nuance et par son intelligence... (Rires sur les travées du groupe socialiste.) Je vous en remercie vraiment, car vous devez en être félicité ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

Je vous le dis franchement, l’invective n’a jamais fait partie du dialogue démocratique.

Pour le reste, puisque vous m’interrogez, je vais vous répondre en vous rappelant que vous n’avez aucune leçon à nous donner, vous qui avez augmenté les prélèvements obligatoires de 35 milliards d’euros durant les deux dernières années de la législature précédente (Eh oui ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.), vous qui avez voté l’augmentation de la TVA de 19,6 % à 21,2 %. Si vous étiez restés au pouvoir, les Français paieraient en la matière 12 milliards d’euros de plus !

Vous n’avez vraiment aucune leçon à nous donner sur les prélèvements !

Vous n’avez pas non plus de leçon économique à donner, vous qui avez endetté le pays de 600 milliards d’euros en cinq ans, vous qui avez fait exploser les déficits, vous qui avez vu le chômage s’accroître, vous qui avez vu les emplois industriels disparaître, vous qui avez vu notre compétitivité reculer non pas sur cinq ans, mais sur dix ans !

M. Francis Delattre. Et la crise ?

M. Pierre Moscovici, ministre. En vérité, monsieur Delattre, les choses sont assez simples, et même très simples : le Président de la République et le Premier ministre ont une volonté commune. (Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.)

Avec le ministre chargé du budget, nous avons préparé le projet de loi de finances avec une intention forte : stabiliser les prélèvements obligatoires. (Rires sur les travées de l’UMP.) Nous le faisons dès 2014 avec une quasi-stabilité – 0,05 % du PIB –, et ce sera confirmé et amplifié en 2015. Voilà la vérité !

Pour le reste, emporté par votre volonté de nuire et vos médisances, vous racontez n’importe quoi sur le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.

Je me suis rendu lundi à Bourges et à Vierzon, dans le Cher, où j’ai rencontré des chefs d’entreprise pour qui le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi est extrêmement utile. C’est une aide puissante pour leur trésorerie, qui les aide à embaucher et à investir.

M. Francis Delattre. Ne dites pas qu’il s’agit de 20 milliards quand c’est seulement 2 milliards !

M. Pierre Moscovici, ministre. Vous êtes dans la polémique ; ils sont dans la réalité. Eux savent ce qu’il en est ! Il fallait rendre cette économie plus compétitive.

Par ailleurs, vous faites une confusion,…

M. Francis Delattre. Nous sommes des imbéciles !

M. Pierre Moscovici, ministre. ... sans doute volontaire,...

M. Francis Delattre. C’est cela, oui…

M. Pierre Moscovici, ministre. … entre le préfinancement, qui est pour cette année à hauteur de 2 milliards d’euros, et le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi lui-même, qui va toucher toutes les entreprises.

M. Christian Cambon. N’importe quoi !

M. Pierre Moscovici, ministre. Franchement, je vous le dis, la médisance ne fait pas une politique ! Nous avons une stratégie pour les finances publiques, pour la croissance, pour l’emploi dans ce pays. Cette stratégie est en train de porter ses fruits avec le rebond de l’activité. Vous devriez plutôt le reconnaître et cesser ce genre d’insinuations et de faux procès ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

7

Mise au point au sujet d'un vote

M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn.

M. Jacky Le Menn. Monsieur le président, lors du scrutin public n° 343 sur l'amendement n° 46 du projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur, intervenu hier, M. Jeanny Lorgeoux a été déclaré comme ne prenant pas part au vote, alors qu’il souhaitait voter pour. (MM. Henri de Raincourt et François Trucy s’esclaffent.)

M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

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Dossier législatif : proposition de loi visant à modifier certaines dispositions issues de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge
Discussion générale (suite)

Droits et protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques

Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Discussion générale (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à modifier certaines dispositions issues de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge
Article 1er

M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à modifier certaines dispositions issues de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge (texte de la commission n° 845, rapport n° 844).

Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.

M. Jacky Le Menn, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire réunie le 17 septembre dernier est arrivée sans difficulté à un accord complet sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi modifiant certaines dispositions de la loi du 5 juillet 2011.

À l’issue des travaux du Sénat, onze des quatorze articles du texte restaient en discussion. La commission mixte paritaire en a adopté six dans la rédaction de l’Assemblée nationale et cinq dans une rédaction issue du texte de compromis proposé par les rapporteurs. Plusieurs dispositions adoptées par le Sénat, dont la suppression du recours à la visioconférence pour les audiences des malades, ont été maintenues.

Entre nos deux assemblées il n’y avait, à vrai dire, aucune divergence de fond, tant sur la réponse à la censure prononcée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 20 avril 2012 que sur les autres propositions de réforme. La position des députés, appuyée sur le travail approfondi qu’ils ont pu conduire dans le cadre de leur mission d’information sur la santé mentale et l’avenir de la psychiatrie, rejoint largement la position de plusieurs de nos collègues lors du débat de 2011. Ainsi, la plupart des retours au texte de l’Assemblée nationale reposent sur une simple clarification de l’interprétation à donner des dispositions. De même, certaines des rédactions communes que nous avons adoptées servent à expliciter l’intention du législateur.

La loi que nous votons doit être lue, comprise et appliquée non seulement par des professionnels du droit, magistrats et avocats, mais aussi, au quotidien, par les personnels soignants et par les malades, qui doivent y trouver la garantie de leurs droits. Il nous faut donc veiller à être, comme nous y oblige d’ailleurs le Conseil constitutionnel, les plus clairs et les plus intelligibles possible.

Ainsi que je l’ai souligné lors de notre débat en séance publique, ce texte n’apporte pas toutes les réponses à la situation des personnes atteintes de troubles mentaux. Dans le cadre restreint et, je dois le dire, dans le temps qui nous était imparti, nous n’avons pas pu remettre à plat plusieurs questions essentielles qu’il nous faudra pourtant traiter à brève échéance. Je pense à la question des avis médicaux donnés, dans des situations d’urgence, sans examen du patient. Quelle garantie apportent-ils réellement ? Dans l’impossibilité d’approfondir cette question et face à la réalité des fugues, qui obligent à des mesures d’urgence et empêchent tout examen, nous avons rétabli les dispositions qui sont visées par ce texte.

Une autre question fondamentale est celle du rôle du préfet. Tout comme nos collègues députés, nous estimons que ce débat est essentiel. Le texte préserve la possibilité pour le préfet d’imposer, dans les conditions prévues par le code de la santé publique, des soins sans consentement. Il faudra que nous examinions avec attention les fondements de ces dispositions anciennes, puisqu’elles remontent à 1838, et leur adaptation à notre époque.

Les rédactions communes adoptées par la commission mixte paritaire apportent déjà des réponses sur des points importants. Dans le cas des personnes déclarées pénalement irresponsables et qui sont soumises à des mesures particulières pour la modification ou la sortie des soins sans consentement, nous avons décidé de confier le dernier mot au juge au cas où le préfet maintiendrait les mesures les plus contraignantes en s’appuyant sur un désaccord entre psychiatres. Cet alignement sur le droit commun nous paraît une garantie importante pour la protection des libertés. À la demande de l’Assemblée nationale, nous avons en revanche rétabli l’obligation d’une double expertise psychiatrique, en plus de celui du collège pluri-professionnel, pour ces personnes. Cette mesure n’apporte pas à mes yeux de garantie supplémentaire pour le malade ou pour le juge, mais elle peut apaiser les inquiétudes de l’opinion publique.

Sur un autre point essentiel, la question des salles d’audience mutualisées entre établissements de santé, nous avons également trouvé une rédaction qui nous permet de garantir que l’exception ne deviendra pas la règle. Ces salles ne pourront être mises en œuvre qu’en cas de nécessité, selon des modalités définies par convention entre l’agence régionale de santé et le tribunal de grande instance. Dès lors, la réalité devrait correspondre au principe selon lequel les audiences se tiennent au sein de chaque établissement d’accueil.

Au total, le texte proposé par la commission mixte paritaire me semble préserver l’essentiel des apports de notre assemblée au texte très attendu proposé par l’Assemblée nationale. Dans l’attente des débats à venir, mes chers collègues, nous vous demandons donc d’adopter les conclusions de la commission mixte paritaire, qui permettront, dès le 1er octobre prochain, d’améliorer grandement la situation des personnes faisant l’objet de soins sans consentement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC. – Mme Muguette Dini applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les débats parlementaires qui ont conduit à l’élaboration de cette proposition de loi permettront de faire progresser encore les soins sans consentement. Malgré les difficultés posées par un calendrier très contraint, et dont chacun a parfaitement conscience, vous avez su mener, avec les députés, un travail de grande qualité. Je souhaite de nouveau saluer l’engagement de la Haute Assemblée, en particulier celui de la présidente de la commission des affaires sociales et du rapporteur.

Ce texte rend non seulement la loi conforme à notre Constitution, mais il permet aussi d'en finir avec l'inspiration sécuritaire qui a marqué la loi du 5 juillet 2011. La priorité, c’est d’abord de considérer celles et ceux qui souffrent comme des personnes malades. Cette ambition, le Gouvernement la soutient pleinement.

En premier lieu, la révision des deux dispositions qui ont été jugées contraires à la Constitution replace le patient au cœur de la démarche de soins. En effet, cette proposition de loi vise d’abord à limiter l’application du régime plus strict de levée des soins sans consentement ; désormais, il ne devra concerner que les irresponsables pénaux encourant un certain niveau de peine. Ensuite, le texte a pour objectif de replacer les patients hospitalisés en unité pour malades difficiles, ou UMD, dans le droit commun.

En second lieu, cette proposition de loi améliore considérablement le déroulement de l’audience. Elle répond aussi à des attentes très fortes.

Les personnes victimes de troubles psychiques ne sont pas des justiciables comme les autres. Il est donc indispensable que l’établissement de santé devienne le lieu de l’audience du juge. C’est ce que prévoit cette proposition de loi. Les conditions de l’audience seront améliorées pour le patient, tout en assurant le bon fonctionnement et la bonne organisation des établissements et des juridictions.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez sur ce point encore amélioré les conditions de l’audience pour le patient, en supprimant totalement le recours à la visioconférence, dont on sait qu’il est parfaitement inadapté, et en encadrant strictement la possibilité pour des établissements de santé de mutualiser leurs salles d’audience.

La proposition de loi rend également obligatoire la présence de l’avocat, ainsi que la possibilité pour la personne de demander à ce que son audience ne soit pas publique.

Enfin, un compromis a été trouvé quant au délai d’intervention du juge : celui-ci a été fixé à douze jours. Ce temps permet que le recueil des avis médicaux et l’organisation satisfaisante de la procédure soient assurés.

Le dernier pilier de ce texte, c’est l’amélioration de la procédure de soins. Je pense notamment à la réintroduction des sorties de courte durée. Lorsque l’état de santé le permet, elles sont partie intégrante du processus thérapeutique : ces sorties avaient été rendues impossibles par la loi du 5 juillet 2011.

Par ailleurs, le nombre de certificats médicaux a été réduit, puisque le certificat du huitième jour a été supprimé. En parallèle, l’avis conjoint, jusque-là nécessaire pour saisir le juge, deviendra un avis simple.

Vous aviez initialement proposé de supprimer la double expertise psychiatrique exigée pour la levée des mesures de soins sans consentement des irresponsables pénaux.

Le travail entre les deux assemblées a conduit à réintroduire cette double expertise. Ces expertises extérieures sont indispensables pour les autorités qui ont la responsabilité de contrôler et de lever les mesures. L’analyse des psychiatres, réalisée en qualité d’experts, ne saurait en effet être assimilée à celui du collège, qui a une tout autre vocation.

Dans le même temps, vos travaux conjoints ont permis de clarifier la loi et de faire progresser les droits des irresponsables pénaux : ils prévoient ainsi une procédure de règlement des différends entre les psychiatres et le préfet. Ainsi, lorsque leurs avis ne vont pas dans le même sens, le juge peut intervenir. Nous pouvons nous réjouir du résultat obtenu.

Mesdames, messieurs les sénateurs, dans quelques instants, vous serez amenés à vous prononcer sur un texte décisif, dont nous pouvons être fiers. Décisif, ce texte l’est pour améliorer encore les soins sans consentement. Il l’est également pour répondre, enfin, aux attentes des malades, de leur famille et des professionnels de santé. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, au terme de ce débat portant sur les soins sans consentement, le groupe communiste républicain et citoyen maintiendra la position qui était la sienne en première lecture, ainsi que l’a confirmé notre collègue Annie David lors de la réunion de la commission mixte paritaire. Nous émettrons donc un vote favorable, mais avec réserves, réserves considérablement accrues à l’issue des travaux de la commission mixte paritaire.

En effet, l’adoption d’amendements sur l’initiative de M. Robiliard permet de revenir sur la rédaction élaborée par le Sénat, réduisant de fait les avancées que la Haute Assemblée avait obtenues, sous l’égide de notre rapporteur, Jacky Le Menn, que je souhaite une nouvelle fois remercier.

Ainsi, je regrette qu’à l’article 1er, qui concerne les soins ambulatoires sans consentement, dont nous demandions la suppression, un amendement ait réintroduit l’idée que les programmes de soins soient définis dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État. Si les programmes de soins ont une vocation thérapeutique, alors un décret est inutile, sauf à considérer que, demain, tous les protocoles de soins devront être, pour toutes les maladies et tous les traitements somatiques, définis par décret.

Cet ajout nous conforte dans notre idée selon laquelle les programmes de soins sont d’abord et avant tout des mesures de contrainte. Ils constituent l’extension de la contrainte au domicile du patient, ainsi qu’un transfert de responsabilité des équipes médicales aux familles qui, par définition, ne sont pas formées. Ils instituent surtout la limitation des programmes de soins à des traitements médicamenteux, puisque seuls ces derniers peuvent être définis par protocole, tout comme le seront certainement les conditions dans lesquelles le non-respect du programme entrainera la ré-hospitalisation de la personne atteinte de troubles mentaux.

De la même manière, il me semble que la rédaction de l’article 4 issue des travaux de la CMP, qui réintroduit le principe d’une double expertise, pour la procédure de mainlevée d’une mesure de soins sans consentement, durcit inutilement la procédure.

Nous ne voulons pas y voir une réaction émotionnelle au crime commis il y a quelques jours par un patient de nationalité belge à l’occasion d’une sortie d’essai. Nous sommes cependant contraints d’observer une certaine concomitance entre cet événement et cette nouvelle rédaction. C’était le propre de l’ancien gouvernement que de réagir sous le coup de l’émotion… Le discours d’Anthony qui a précédé l’adoption de la loi du 5 juillet 2011 est le symbole de ce qu’il ne faut plus reproduire en la matière. La position retenue par le Sénat nous paraissait plus sage et plus à même de respecter les garanties individuelles.

En outre, bien que nous nous réjouissions de la confirmation de la suppression de la vidéo-audience, le groupe CRC est plus que réservé sur la rédaction de l’alinéa 4 de l’article 6 de ce texte, telle qu’elle est issue des travaux de la CMP, car elle réintroduit la possibilité de mutualiser certaines salles d’audience. Si nous n’ignorons pas les contraintes économiques et financières qui pèsent sur le ministère de la justice, nous ne pouvons admettre que ces dernières puissent avoir des conséquences directes sur les patients.

C’est cette même volonté de veiller au respect du droit commun et de réduire autant que possible le champ des régimes dérogatoires aux seuls cas où celui-ci est plus protecteur pour les personnes atteintes de troubles mentaux qui nous conduit à regretter que la CMP ait, sur l’initiative de M. Robiliard, réintroduit la disposition qui autorise un psychiatre à se prononcer sur la poursuite des soins, en l’occurrence l’hospitalisation sans consentement, sur la base du seul dossier médical, sans examiner le patient.

L’exemple avancé par Mme la ministre Marisol Touraine comme par notre collègue M. Robiliard pour justifier cette disposition mérite toute notre attention. Toutefois, il nous semble que si un patient fugue alors qu’une mesure privative de liberté a été prononcée à son encontre, le psychiatre n’a pas besoin de se prononcer sur le maintien en hospitalisation. La mesure continue en effet à courir. Il appartient aux autorités compétentes de rechercher le patient et de le conduire de nouveau dans l’établissement où il est accueilli, de sorte que, à son retour, les équipes médicales puissent, comme s’il n’avait pas fugué, statuer sur la nécessité ou non de prolonger les soins.

Nous aurions même pu imaginer une rédaction qui fasse explicitement référence au cas où le patient se serait soustrait à son obligation de soins sans consentement.

En l’absence d’une telle précision, à moins que celle-ci n’intervienne par décret, nous sommes fondés à penser que, dans tous les cas, les psychiatres pourraient se prononcer sur la seule base du dossier médical. Cela ne peut évidemment pas nous satisfaire, étant donné que la nature médicale de la mesure privative de liberté doit justifier une procédure également médicale, à laquelle nous souhaitons que soient faites le moins possible de dérogations.

Toutefois, bien que le groupe CRC ne soit pas pleinement satisfait de la rédaction de l’article 8, il nous semble que la réintroduction du juge des libertés dans le cas où le préfet déciderait contre l’avis du collège d’experts de maintenir ou de transformer des soins va dans le sens d’un renforcement du droit des patients.

Cette rédaction, bien qu’elle soit moins ambitieuse que celle que nous proposions – faut-il le préciser ? –, tend tout de même à renforcer le champ d’intervention du juge des libertés et de la détention.

Je tiens toutefois à rappeler notre opposition à la disposition prévoyant qu’il appartient au préfet de demander l’expertise de deux psychiatres extérieurs. La rédaction actuelle laisse d’ailleurs penser qu’en cas d’impossibilité pour les psychiatres de rendre leur avis, le préfet pourrait décider seul de lever ou non la mesure d’hospitalisation. Le préfet, qui – je tiens à le rappeler – ne constitue pas une autorité indépendante, ne peut par conséquent pas décider du maintien d’une mesure privative de liberté.

En séance publique, notre amendement avait été écarté au motif que la question de l’articulation entre préfet et juge des libertés ne pouvait être tranchée par le biais d’un simple amendement. Force est de constater que le sujet demeure, même si nous avons été partiellement entendus en CMP.

Malgré le durcissement du texte, le groupe CRC, qui ne souhaite pas mettre en difficulté au regard de la décision du Conseil constitutionnel les patients admis en soins sans consentement ni les équipes médicales, votera ce texte, convaincu qu’il faudra nécessairement le parfaire prochainement, dans le cadre de la loi de santé publique que nous appelons de nos vœux. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini.

Mme Muguette Dini. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme j’ai eu l’occasion de le souligner lors de la discussion générale de ce texte la semaine dernière, je suis heureuse que cette proposition de loi me conforte dans les convictions que j’avais exprimées à l’occasion de l’examen de la loi du 5 juillet 2011 : on ne peut pas imposer de soins sans consentement en ambulatoire, car ces deux concepts sont totalement antinomiques.

À ce stade du parcours législatif du présent texte, je souhaite évoquer quelques points particuliers. Je pense que le délai de douze jours pour l’intervention du juge va dans le sens d’un plus grand respect de la liberté individuelle, mais je m’inquiète, d’une part, de la surcharge de travail pour les juges de la liberté et de la détention, et, d’autre part, d’un risque – léger, je le concède – pour le malade.

En effet, dans la situation précédente, de nombreux malades pouvaient avoir quitté les soins sans consentement dans un délai inférieur à quinze jours. Cela leur évitait de rencontrer le juge, mais ils étaient libres. Les médecins ne seront-ils pas tentés, dans le souci de simplifier les procédures, de prendre des dispositions dans un délai plus court, au risque de rendre à la liberté des malades qui ne sont pas tout à fait prêts à en profiter ?

Je me félicite en revanche de ce que nous ayons pu supprimer la visioconférence qui, pour des malades en crise, pouvait être très préjudiciable. Je me réjouis aussi que nous ayons pu trouver un équilibre entre la nécessité de tenir des audiences dans une pièce dédiée au sein d’un hôpital et la possibilité de regrouper celles-ci dans un seul établissement quand cela se révèle plus commode ou plus efficace.

Je ne vous cache pas que la modification du statut des unités pour malades difficiles, ou UMD, et surtout la présence dans ces dernières de malades pénalement irresponsables m’a inquiétée. Après examen du texte et des modifications qui lui ont été apportées en CMP, je suis plutôt rassurée.

En effet, la mise en place d’un véritable protocole est nécessaire pour qu’un malade pénalement irresponsable puisse quitter l’unité pour malades difficiles. Après l’avis du psychiatre traitant et celui du collège compétent, il doit aussi être examiné par deux autres psychiatres indépendants. À la suite de tous ces avis, si le préfet refuse cette sortie, le directeur d’établissement peut saisir le juge.

Au vu de ces précautions, le risque, qui est un objet d’inquiétude pour nos concitoyens, de laisser sortir quelqu’un de potentiellement dangereux pour lui-même, pour sa famille ou pour la société, me paraît extrêmement réduit.

Il est à noter d’ailleurs que les dramatiques assassinats à l’origine de la loi de 2011 n’avaient pas été commis par des personnes déclarées pénalement irresponsables, mais par des malades soignés dans des services traditionnels et ayant, le plus souvent, abandonné leur traitement. En matière psychiatrique, il n’y a pas de risque nul, mais le risque me semble ici encadré au maximum.

L’ensemble de ces remarques me conduit à affirmer que ce texte rénové semble aller dans le bon sens. Toutefois, madame la ministre, il ne règle pas pour autant toutes les questions posées par la santé mentale et par la nécessaire évolution de la prise en charge et du suivi des malades. Il ne répond pas non plus de manière satisfaisante à la grande inquiétude des familles confrontées à des malades en crise violente et dangereuse. Nous appelons tous de nos vœux une loi complète sur la santé mentale et j’aimerais connaître le calendrier que vous envisagez pour présenter cette loi au Sénat.

Vous l’aurez compris, madame la ministre, le groupe UDI-UC votera ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – M. François Trucy applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je serai bref, l’essentiel ayant été dit, en particulier par le rapporteur, M. Jacky Le Menn, et plus généralement par les uns et par les autres lors de la discussion en première lecture.

Cette proposition de loi relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques est d’abord une réponse à la censure du Conseil constitutionnel de la loi de 2011, laquelle avait été proposée et votée sous le coup de l’émotion, à la suite du décès d’un jeune étudiant à Grenoble. En effet, celui-ci avait été poignardé par un malade issu de l’hôpital psychiatrique de l’Isère.

Nous ne nous sommes toutefois pas contentés de répondre à la sanction du Conseil constitutionnel puisque cette proposition de loi améliore celle de 2011. Elle revient sur les sorties d’essai, les déplacements du juge dans les établissements d’accord et surtout améliore les conditions pour les soins sans consentement.

La discussion de cette proposition de loi n’était pas facile, parce que nous sommes à la limite du médical, de la sécurité et du judiciaire. Je voudrais tout simplement dire que le groupe socialiste votera cette proposition de loi issue de la commission mixte paritaire qui, comme l’a dit le rapporteur, s’est déroulée dans de très bonnes conditions.

Je voudrais également saluer la forte implication de Mme la présidente de la commission, et surtout de notre rapporteur et de ses collaborateurs, qui ont dû, en quelques jours, réagir très rapidement afin de préparer le rapport et des propositions. Ils doivent être tous félicités.

Le groupe socialiste votera donc cette proposition de loi, mais en la considérant comme l’amorce d’une loi plus large sur la santé publique et sur les soins psychiatriques. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. Jean Desessard. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, mon intervention portera, d’une part, sur les méthodes, et, d’autre part, sur les mesures de cette proposition de loi, particulièrement sur l’une d’entre elles qui conduira le groupe UMP à voter contre ce texte.

Lorsque le Gouvernement a modifié le décret de la session extraordinaire, le 30 août 2013, pour ajouter à l’ordre du jour l’examen de cette proposition de loi, la commission des affaires sociales du Sénat n’avait pas encore désigné de rapporteur. Notre commission des affaires sociales s’est réunie mercredi 11 septembre dernier, et la séance publique s’est tenue le vendredi 13 septembre. La CMP a été convoquée mardi dernier, et nous voilà, quarante-huit heures après, réunis pour la lecture de ses conclusions.

Ce texte a donc été débattu dans des délais très contraints, alors qu’il traite d’un sujet particulièrement difficile et complexe. En effet, cette proposition de loi est d’une importance capitale, comme les intervenants qui se sont exprimés avant moi l’ont rappelé, car les soins psychiatriques sans consentement s’articulent autour de trois exigences : soigner les malades, garantir la sécurité des citoyens face à des comportements potentiellement dangereux et protéger les droits et libertés fondamentaux des patients hospitalisés sous contrainte.

Mes chers collègues, nous pouvons nous rejoindre sur certaines dispositions de ce texte.

Je pense à la réduction à douze jours du délai dont disposera le juge des libertés et de la détention pour exercer son contrôle sur les mesures d’hospitalisation, contre quinze jours prévus dans la loi du 5 juillet 2011.

Je pense aussi à la possibilité pour les personnes de faire des sorties de courte durée – quarante-huit heures – non accompagnées, alors que la loi de 2011 ne prévoyait que des sorties de douze heures maximum. Dans son rapport d’information, notre collègue Guy Lefrand a constaté que ces sorties non programmées et exceptionnelles peuvent être utiles dans un traitement psychiatrique.

Nous regrettons en revanche la suppression de la précision insérée, à l’article 3, sur l’initiative de notre rapporteur. En raison de la fin du statut légal des unités pour malades difficiles qui est prévue à l’article 9, il nous paraissait nécessaire de préciser dans la loi que le degré de contrainte renforcée dans ces unités est fondé sur la nécessité de la prise en charge thérapeutique des malades qui y sont placés.

En revanche, la suppression pure et simple de la possibilité de recours à la visioconférence ne nous satisfait pas. Le Sénat avait, en 2011, encadré le recours à la visioconférence en prévoyant, d’une part, l’aménagement spécifique de la salle d’audience, et, d’autre part, un avis médical attestant que l’état mental du patient n’y faisait pas obstacle.

Enfin, notre vote négatif sur ce texte a été motivé par le retrait d’une base législative aux unités pour malades difficiles. En effet, il nous semble difficilement compréhensible, en termes de hiérarchie des normes, que des dispositions réglementaires sur les unités pour malades difficiles soient dépourvues de base légale, ce qui est le cas actuellement.

Vous aurez donc compris, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, que notre vote n’a pas changé depuis la première lecture.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard.

M. Jean Desessard. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous achevons aujourd’hui l’examen d’une proposition de loi qui vise à redéfinir les droits et la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques, après les excès sécuritaires de la loi du 5 juillet 2011.

Comme je l’ai rappelé en première lecture, il s’agissait d’une loi d’affichage, qui flattait l’opinion publique dans ses peurs plus qu’elle ne s’intéressait à la santé et à la prise en charge des malades.

Le texte que nous allons voter aujourd’hui rappelle la décision du Conseil constitutionnel, à savoir que le législateur est le seul à pouvoir encadrer la mise en œuvre du régime des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques sous contrainte, car priver une personne de sa liberté est une décision lourde de conséquences, qui ne peut être arbitraire.

Madame la ministre, nous avons déjà déploré les conditions d’examen de ce texte. Encore une fois, je confirme mon désaccord sur l’obligation de l’examiner dans des délais réduits, qui a été imposée sans notre consentement.

Je me réjouis toutefois du contenu de la loi, qui permet plusieurs avancées : réintroduction de la possibilité de sorties de courte durée, adaptation des audiences aux personnes souffrant de troubles mentaux, ouverture des UHSA – unités hospitalières spécialement aménagées – aux détenus consentants et suppression de la visioconférence pour l’audience avec le juge des libertés et de la détention sont autant de mesures de justice dont nous nous félicitons.

Je rappelle aussi la disposition introduite par mes collègues députés écologistes tendant à autoriser les parlementaires à visiter les établissements de santé habilités à recevoir des patients hospitalisés sans leur consentement.

La plupart de ces dispositions ont été maintenues par la commission mixte paritaire, ce qui n’était pas acquis. Je tiens donc à saluer le travail du rapporteur, Jacky Le Menn, qui a introduit de nombreuses dispositions au sein de ce texte en première lecture, et qui a bataillé pour les conserver lors de la CMP. (Mme Gisèle Printz applaudit.)

En conclusion, le groupe écologiste votera pour cette proposition de loi, qui met fin aux effets les plus négatifs de la loi de 2011 et permet d’améliorer sensiblement la condition des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat, lorsqu’il examine après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :

proposition de loi visant à modifier certaines dispositions issues de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge

TITRE IER

RENFORCEMENT DES DROITS ET GARANTIES ACCORDÉS AUX PERSONNES EN SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

Chapitre IER

Amélioration de la prise en charge des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement

Discussion générale (suite)
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Article 2

Article 1er

(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)

Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 3211-2-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3211-2-1. – I. – Une personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est dite en soins psychiatriques sans consentement.

« La personne est prise en charge :

« 1° Soit sous la forme d’une hospitalisation complète dans un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 du présent code ;

« 2° Soit sous toute autre forme, pouvant comporter des soins ambulatoires, des soins à domicile dispensés par un établissement mentionné au même article L. 3222-1 et, le cas échéant, une hospitalisation à domicile, des séjours à temps partiel ou des séjours de courte durée à temps complet effectués dans un établissement mentionné audit article L. 3222-1.

« II. – Lorsque les soins prennent la forme prévue au 2° du I, un programme de soins est établi par un psychiatre de l’établissement d’accueil et ne peut être modifié, afin de tenir compte de l’évolution de l’état de santé du patient, que dans les mêmes conditions. Le programme de soins définit les types de soins, leur périodicité et les lieux de leur réalisation, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.

« Pour l’établissement et la modification du programme de soins, le psychiatre de l’établissement d’accueil recueille l’avis du patient lors d’un entretien au cours duquel il donne au patient l’information prévue à l’article L. 3211-3 et l’avise des dispositions du III du présent article et de celles de l’article L. 3211-11.

« III. – Aucune mesure de contrainte ne peut être mise en œuvre à l’égard d’un patient pris en charge sous la forme prévue au 2° du I. » ;

2° Le dernier alinéa de l’article L. 3211-2-2 est ainsi rédigé :

« Lorsque les deux certificats médicaux ont conclu à la nécessité de maintenir les soins psychiatriques, le psychiatre propose dans le certificat mentionné au troisième alinéa du présent article la forme de la prise en charge mentionnée aux 1° et 2° du I de l’article L. 3211-2-1 et, le cas échéant, le programme de soins. Cette proposition est motivée au regard de l’état de santé du patient et de l’expression de ses troubles mentaux. » ;

3° Au deuxième alinéa de l’article L. 3211-3, la première occurrence de la référence : « , L. 3213-1 » est supprimée ;

4° Au premier alinéa de l’article L. 3211-12-5, au 2° du I de l’article L. 3212-1 et à la première phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 3222-1-2, après la référence : « 2° », est insérée la référence : « du I ».

Article 1er
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Article 3

Article 2

(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)

L’article L. 3211-11-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 3211-11-1. – Afin de favoriser leur guérison, leur réadaptation ou leur réinsertion sociale ou si des démarches extérieures sont nécessaires, les personnes faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale sous la forme d’une hospitalisation complète peuvent bénéficier d’autorisations de sortie de courte durée :

« 1° Sous la forme de sorties accompagnées n’excédant pas douze heures. Les personnes malades sont accompagnées par un ou plusieurs membres du personnel de l’établissement d’accueil, par un membre de leur famille ou par la personne de confiance qu’elles ont désignée en application de l’article L. 1111-6 du présent code, pendant toute la durée de la sortie ;

« 2° Sous la forme de sorties non accompagnées d’une durée maximale de quarante-huit heures.

« L’autorisation de sortie de courte durée est accordée par le directeur de l’établissement d’accueil, après avis favorable d’un psychiatre de cet établissement.

« Dans le cas où la mesure de soins psychiatriques a été prise en application du chapitre III du présent titre, le directeur de l’établissement d’accueil transmet au représentant de l’État dans le département les éléments d’information relatifs à la demande d’autorisation, comportant notamment l’avis favorable du psychiatre mentionné au quatrième alinéa du présent article, au plus tard quarante-huit heures avant la date prévue pour la sortie. Sauf opposition écrite du représentant de l’État dans le département, notifiée au plus tard douze heures avant la date prévue, la sortie peut avoir lieu. Le représentant de l’État ne peut imposer aucune mesure complémentaire.

« Lorsque la mesure de soins psychiatriques fait suite à la demande d’un tiers, le directeur de l’établissement d’accueil informe celui-ci, préalablement, de l’autorisation de sortie non accompagnée et de sa durée. »

Article 2
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Article 4

Article 3

(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)

Le chapitre II du titre II du livre II de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le second alinéa de l’article L. 3222-1-1 A est complété par les mots : « , notamment en cas de nécessité de retour en hospitalisation complète dans les conditions prévues au second alinéa de l’article L. 3211-1. » ;

1° bis Le premier alinéa de l’article L. 3222-1-1 est ainsi rédigé :

« Les personnes admises en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète, en application des chapitres II et III du titre Ier du présent livre, peuvent être prises en charge et transportées dans un établissement de santé mentionné à l'article L. 3222-1 sans leur consentement lorsque cela est strictement nécessaire et par des moyens adaptés à leur état. » ;

2° Le dernier alinéa de l’article L. 3222-1-2 est supprimé ;

3° Après l’article L. 3222-4, il est inséré un article L. 3222-4-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 3222-4-1. – Les députés et les sénateurs ainsi que les représentants au Parlement européen élus en France sont autorisés à visiter à tout moment les établissements de santé mentionnés à l’article L. 3222-1. »

Chapitre II

Amélioration du contrôle du juge des libertés et de la détention sur les mesures de soins psychiatriques sans consentement

Article 3
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Article 5

Article 4

(Texte de l’Assemblée nationale)

Le II de l’article L. 3211-12 du code de la santé publique est ainsi rétabli :

« II. – Le juge des libertés et de la détention ne peut statuer qu’après avoir recueilli l’avis du collège mentionné à l’article L. 3211-9 du présent code lorsque la personne fait l’objet d’une mesure de soins ordonnée en application de l’article L. 3213-7 du même code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale à la suite d’un classement sans suite, d’une décision d’irresponsabilité pénale ou d’un jugement ou arrêt de déclaration d’irresponsabilité pénale prononcés sur le fondement du premier alinéa de l’article 122-1 du code pénal et concernant des faits punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement en cas d’atteinte aux personnes ou d’au moins dix ans d’emprisonnement en cas d’atteinte aux biens.

« Le juge ne peut en outre décider la mainlevée de la mesure qu’après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à l’article L. 3213-5-1 du présent code.

« Le juge fixe les délais dans lesquels l’avis du collège et les deux expertises prévus au présent II doivent être produits, dans une limite maximale fixée par décret en Conseil d’État. Passés ces délais, il statue immédiatement. »

Article 4
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Article 6

Article 5

(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)

L’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 3211-12-1. – I. – L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement lorsque l’hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre ou par le représentant de l’État dans le département lorsqu’elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l’article L. 3214-3 du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale, ait statué sur cette mesure :

« 1° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 du présent code. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette admission ;

« 2° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète en application, respectivement, du dernier alinéa de l’article L. 3212-4 ou du III de l’article L. 3213-3. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette décision ;

« 3° Avant l’expiration d’un délai de six mois à compter soit de toute décision judiciaire prononçant l’hospitalisation en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale, soit de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application du présent I ou des articles L. 3211-12 ou L. 3213-9-1 du présent code, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision. Toute décision du juge des libertés et de la détention prise avant l’expiration de ce délai en application du 2° du présent I ou de l’un des mêmes articles L. 3211-12 ou L. 3213-9-1 du présent code, ou toute nouvelle décision judiciaire prononçant l’hospitalisation en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale fait courir à nouveau ce délai. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi quinze jours au moins avant l’expiration du délai de six mois prévu au présent 3°.

« Toutefois, lorsque le juge des libertés et de la détention a ordonné, avant l’expiration de l’un des délais mentionnés aux 1° à 3° du présent I, une expertise, soit en application du III du présent article, soit, à titre exceptionnel, en considération de l’avis mentionné au II, ce délai est prolongé d’une durée qui ne peut excéder quatorze jours à compter de la date de cette ordonnance. L’hospitalisation complète du patient est alors maintenue jusqu’à la décision du juge, sauf s’il y est mis fin en application des chapitres II ou III du présent titre. L’ordonnance mentionnée au présent alinéa peut être prise sans audience préalable.

« Le juge fixe les délais dans lesquels l’expertise mentionnée à l’avant-dernier alinéa du présent I doit être produite, dans une limite maximale fixée par décret en Conseil d’État. Passés ces délais, il statue immédiatement.

« II. – La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée de l’avis motivé d’un psychiatre de l’établissement d’accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète.

« Lorsque le patient relève de l’un des cas mentionnés au II de l’article L. 3211-12, l’avis prévu au premier alinéa du présent II est rendu par le collège mentionné à l’article L. 3211-9.

« III. – Le juge des libertés et de la détention ordonne, s’il y a lieu, la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète.

« Lorsqu’il ordonne cette mainlevée, il peut, au vu des éléments du dossier et par décision motivée, décider que la mainlevée prend effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures, afin qu’un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application du II de l’article L. 3211-2-1. Dès l’établissement de ce programme ou à l’issue du délai mentionné à la première phrase du présent alinéa, la mesure d’hospitalisation complète prend fin.

« Toutefois, lorsque le patient relève de l’un des cas mentionnés au II de l’article L. 3211-12, le juge ne peut décider la mainlevée de la mesure qu’après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à l’article L. 3213-5-1.

« IV. – Lorsque le juge des libertés et de la détention n’a pas statué avant l’expiration du délai de douze jours prévu aux 1° et 2° du I ou du délai de six mois prévu au 3° du même I, la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète est acquise à l’issue de chacun de ces délais.

« Si le juge des libertés et de la détention est saisi après l’expiration du délai de huit jours prévu aux 1° et 2° du I ou du délai de quinze jours prévu au 3° du même I, il constate sans débat que la mainlevée de l’hospitalisation complète est acquise, à moins qu’il ne soit justifié de circonstances exceptionnelles à l’origine de la saisine tardive et que le débat puisse avoir lieu dans le respect des droits de la défense. »

Article 5
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Article 7

Article 6

(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)

L’article L. 3211-12-2 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 3211-12-2. – I. – Lorsqu’il est saisi en application des articles L. 3211-12 ou L. 3211-12-1, le juge, après débat contradictoire, statue publiquement. Il peut décider que les débats ont lieu ou se poursuivent en chambre du conseil s’il doit résulter de leur publicité une atteinte à l’intimité de la vie privée, s’il survient des désordres de nature à troubler la sérénité de la justice ou si l’une des parties le demande. Il est fait droit à cette demande lorsqu’elle émane de la personne faisant l’objet de soins psychiatriques.

« À l’audience, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est entendue, assistée ou représentée par un avocat choisi, désigné au titre de l’aide juridictionnelle ou commis d’office. Si, au vu d’un avis médical motivé, des motifs médicaux font obstacle, dans son intérêt, à son audition, la personne est représentée par un avocat dans les conditions prévues au présent alinéa.

« Le juge des libertés et de la détention statue dans une salle d’audience attribuée au ministère de la justice, spécialement aménagée sur l’emprise de l’établissement d’accueil ou, en cas de nécessité, sur l’emprise d’un autre établissement de santé situé dans le ressort du tribunal de grande instance, dans les circonstances et selon les modalités prévues par une convention conclue entre le tribunal de grande instance et l’agence régionale de santé. Cette salle doit permettre d'assurer la clarté, la sécurité et la sincérité des débats ainsi que l'accès du public. Lorsque ces conditions ne sont pas satisfaites, le juge, soit d'office, soit sur demande de l'une des parties, statue au siège du tribunal de grande instance.

« II. – (Suppression maintenue)

« III. – Lorsque le juge des libertés et de la détention statue dans la salle mentionnée au dernier alinéa du I, le président du tribunal de grande instance peut, en cas de nécessité, autoriser qu’une seconde audience soit tenue le même jour au siège du tribunal de grande instance. »

…………………………………………………………………….

TITRE II

CONSOLIDATION DES PROCÉDURES APPLICABLES AUX MESURES DE SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

Chapitre IER

Rationalisation du nombre de certificats médicaux produits dans le cadre d’une mesure de soins à la demande d’un tiers ou en cas de péril imminent

Article 6
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Article 7 bis

Article 7

(Texte de l’Assemblée nationale)

Le chapitre II du titre Ier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 3212-4, après la seconde occurrence du mot : « soins », sont insérés les mots : « pour une durée d’un mois, » ;

2° L’article L. 3212-7 est ainsi modifié :

a) Au début, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« À l’issue de la première période de soins psychiatriques prononcée en application du deuxième alinéa de l’article L. 3212-4, les soins peuvent être maintenus par le directeur de l’établissement pour des périodes d’un mois, renouvelables selon les modalités prévues au présent article. » ;

b) Le début de la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigé : « Dans les trois derniers jours de chacune des périodes mentionnées au premier alinéa, un psychiatre... (le reste sans changement). » ;

c) Le deuxième alinéa est supprimé ;

c bis) Le troisième alinéa est ainsi modifié :

– à la première phrase, après le mot : « évaluation », il est inséré le mot : « médicale » ;

– après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : 

« Cette évaluation est renouvelée tous les ans. » ;

d) La seconde phrase du dernier alinéa est supprimée ;

3° Au dernier alinéa de l’article L. 3212-9, après le mot : « certificat », sont insérés les mots : « médical ou, en cas d’impossibilité d’examiner le patient, un avis médical ».

Article 7
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Article 8

Article 7 bis

(Texte de l’Assemblée nationale)

Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la dématérialisation du registre prévu à l’article L. 3212-11 du code de la santé publique, examinant sa faisabilité technique et détaillant les modalités de consultation et de recueil des observations des autorités chargées du contrôle des établissements de santé accueillant des personnes en soins psychiatriques sans consentement susceptibles d’être mises en œuvre ainsi que les adaptations législatives ou réglementaires qu’elle rendrait nécessaires.

Chapitre II

Rationalisation du nombre de certificats médicaux produits et clarification des procédures applicables dans le cadre d’une mesure de soins sur décision du représentant de l’État

Article 7 bis
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Article 10

Article 8

(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)

Le chapitre III du titre Ier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 3213-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3213-1. – I. – Le représentant de l’État dans le département prononce par arrêté, au vu d’un certificat médical circonstancié ne pouvant émaner d’un psychiatre exerçant dans l’établissement d’accueil, l’admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l’admission en soins nécessaire. Ils désignent l’établissement mentionné à l’article L. 3222-1 qui assure la prise en charge de la personne malade.

« Le directeur de l’établissement d’accueil transmet sans délai au représentant de l’État dans le département et à la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l’article L. 3222-5 :

« 1° Le certificat médical mentionné au deuxième alinéa de l’article L. 3211-2-2 ;

« 2° Le certificat médical et, le cas échéant, la proposition mentionnés aux deux derniers alinéas du même article L. 3211-2-2.

« II. – Dans un délai de trois jours francs suivant la réception du certificat médical mentionné à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 3211-2-2, le représentant de l’État dans le département décide de la forme de prise en charge prévue à l’article L. 3211-2-1, en tenant compte de la proposition établie, le cas échéant, par le psychiatre en application du dernier alinéa de l’article L. 3211-2-2 et des exigences liées à la sûreté des personnes et à l’ordre public. Il joint à sa décision, le cas échéant, le programme de soins établi par le psychiatre.

« Dans l’attente de la décision du représentant de l’État, la personne malade est prise en charge sous la forme d’une hospitalisation complète.

« III. – Lorsque la proposition établie par le psychiatre en application de l’article L. 3211-2-1 recommande une prise en charge sous une autre forme que l’hospitalisation complète, le représentant de l’État ne peut modifier la forme de prise en charge des personnes mentionnées au II de l’article L. 3211-12 qu’après avoir recueilli l’avis du collège mentionné à l’article L. 3211-9. 

« IV. – Les mesures provisoires, les décisions, les avis et les certificats médicaux mentionnés au présent chapitre figurent sur le registre mentionné à l’article L. 3212-11. » ;

2° L’article L. 3213-3 est ainsi modifié :

a) Le début de la première phrase du I est ainsi rédigé : « Dans le mois qui suit l’admission en soins psychiatriques décidée en application du présent chapitre ou résultant de la décision mentionnée à l’article 706-135 du code de procédure pénale et ensuite... (le reste sans changement). » ;

a bis) À la deuxième phrase du même alinéa, après la référence : « L. 3211-2-1 », sont insérés les mots : « du présent code » ;

b) La seconde phrase du II est supprimée ;

c) La deuxième et la dernière phrase du III sont supprimées ;

d) Il est complété par trois alinéas ainsi rédigés :

« IV. – Lorsque le représentant de l’État décide de ne pas suivre l’avis du collège mentionné à l’article L. 3211-9 recommandant la prise en charge d’une personne mentionnée au II de l’article L. 3211-12 sous une autre forme que l’hospitalisation complète, il ordonne une expertise dans les conditions prévues à l’article L. 3213-5-1.

« Lorsque l’expertise confirme la recommandation de prise en charge sous une autre forme que l’hospitalisation complète, le préfet décide d’une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l’article L. 3211-2-1, conformément à la proposition mentionnée au premier alinéa du présent article.

« Lorsque l’expertise préconise le maintien de l’hospitalisation complète et que le représentant de l’État maintient l’hospitalisation complète, il en informe le directeur de l’établissement d’accueil, qui saisit le juge des libertés et de la détention afin que ce dernier statue à bref délai sur cette mesure dans les conditions prévues à l’article L. 3211-12. Le présent alinéa n’est pas applicable lorsque la décision du représentant de l’État intervient dans les délais mentionnés aux 1° et 2° du I de l’article L. 3211-12-1. » ;

2° bis Après le mot : « mentionnées », la fin du dernier alinéa de l’article L. 3213-4 est ainsi rédigée : « au II de l’article L. 3211-12. » ;

3° L’article L. 3213-5 est abrogé ;

4° L’article L. 3213-7 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toutefois, si la personne concernée fait déjà l’objet d’une mesure de soins psychiatriques en application de l’article L. 3213-1, la production de ce certificat n’est pas requise pour modifier le fondement de la mesure en cours. » ;

b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Si l’état de la personne mentionnée au premier alinéa le permet, celle-ci est informée par les autorités judiciaires de l’avis dont elle fait l’objet ainsi que des suites que peut y donner le représentant de l’État dans le département. Cette information lui est transmise par tout moyen et de manière appropriée à son état.

« L’avis mentionné au premier alinéa indique si la procédure concerne des faits punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement en cas d’atteinte aux personnes ou d’au moins dix ans d’emprisonnement en cas d’atteinte aux biens. Dans ce cas, la personne est également informée des conditions dans lesquelles il peut être mis fin à la mesure de soins psychiatriques en application des articles L. 3211-12, L. 3211-12-1 et L. 3213-8. » ;

5° L’article L. 3213-8 est ainsi rétabli :

« Art. L. 3213-8. – I. – Si le collège mentionné à l’article L. 3211-9 émet un avis selon lequel la mesure de soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète dont fait l’objet une personne mentionnée au II de l’article L. 3211-12 n’est plus nécessaire et que la mesure de soins sans consentement peut être levée, le représentant de l’État dans le département ordonne une expertise de l’état mental de la personne par deux psychiatres choisis dans les conditions fixées à l’article L. 3213-5-1. Ces derniers se prononcent dans un délai maximal de soixante-douze heures à compter de leur désignation sur la nécessité du maintien de la mesure de soins psychiatriques.

« II. – Lorsque les deux avis des psychiatres prévus au I confirment l’absence de nécessité de l’hospitalisation complète, le représentant de l’État ordonne la levée de la mesure de soins psychiatriques.

« Lorsque ces avis divergent ou préconisent le maintien de la mesure de soins psychiatriques et que le représentant de l’État la maintient, il en informe le directeur de l’établissement d’accueil, qui saisit le juge des libertés et de la détention afin que ce dernier statue à bref délai sur cette mesure dans les conditions prévues à l’article L. 3211-12. Le présent alinéa n’est pas applicable lorsque la décision du représentant de l’État intervient dans les délais mentionnés aux 1° et 2° du I de l’article L. 3211-12-1. » ;

6° L’article L. 3213-9-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3213-9-1. – I. – Si un psychiatre participant à la prise en charge du patient atteste par un certificat médical qu’une mesure de soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète n’est plus nécessaire et que la mesure de soins sans consentement peut être levée ou que le patient peut être pris en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l’article L. 3211-2-1, le directeur de l’établissement d’accueil en réfère dans les vingt-quatre heures au représentant de l’État dans le département, qui statue dans un délai de trois jours francs après la réception du certificat médical.

« II. – Lorsque le représentant de l’État décide de ne pas suivre l’avis du psychiatre participant à la prise en charge du patient, il en informe sans délai le directeur de l’établissement d’accueil, qui demande immédiatement l’examen du patient par un deuxième psychiatre. Celui-ci rend, dans un délai maximal de soixante-douze heures à compter de la décision du représentant de l’État, un avis sur la nécessité de l’hospitalisation complète.

« III. – Lorsque l’avis du deuxième psychiatre prévu au II confirme l’absence de nécessité de l’hospitalisation complète, le représentant de l’État ordonne la levée de la mesure de soins sans consentement ou décide d’une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l’article L. 3211-2-1, conformément à la proposition figurant dans le certificat médical mentionné au I du présent article.

« Lorsque l’avis du deuxième psychiatre prévu au II préconise le maintien de l’hospitalisation complète et que le représentant de l’État maintient l’hospitalisation complète, il en informe le directeur de l’établissement d’accueil, qui saisit le juge des libertés et de la détention afin que ce dernier statue à bref délai sur cette mesure dans les conditions prévues à l’article L. 3211-12. Le présent alinéa n’est pas applicable lorsque la décision du représentant de l’État intervient dans les délais mentionnés aux 1° et 2° du I de l’article L. 3211-12-1.

« IV. – (Suppression maintenue) »

…………………………………………………………………….

TITRE III

MODALITÉS DE PRISE EN CHARGE DES PERSONNES DÉTENUES ATTEINTES DE TROUBLES MENTAUX

Article 8
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Article 11

Article 10

(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)

Le chapitre IV du titre Ier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° L’article L. 3214-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3214-1. – I. – Les personnes détenues souffrant de troubles mentaux font l’objet de soins psychiatriques avec leur consentement. Lorsque les personnes détenues en soins psychiatriques libres requièrent une hospitalisation à temps complet, celle-ci est réalisée dans un établissement de santé mentionné à l’article L. 3222-1 au sein d’une unité hospitalière spécialement aménagée.

« II. – Lorsque leurs troubles mentaux rendent impossible leur consentement, les personnes détenues peuvent faire l’objet de soins psychiatriques sans consentement en application de l’article L. 3214-3. Les personnes détenues admises en soins psychiatriques sans consentement sont uniquement prises en charge sous la forme mentionnée au 1° du II de l’article L. 3211-2-1. Leur hospitalisation est réalisée dans un établissement de santé mentionné à l’article L. 3222-1 au sein d’une unité hospitalière spécialement aménagée ou, sur la base d’un certificat médical, au sein d’une unité adaptée.

« III. – Lorsque leur intérêt le justifie, les personnes mineures détenues peuvent être hospitalisées au sein d’un service adapté dans un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 en dehors des unités prévues aux I et II du présent article. » ;

2° L’article L. 3214-2 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les références : « et L. 3211-12 à L. 3211-12-4 » sont remplacées par les références : « , L. 3211-12 à L. 3211-12-4 et L. 3211-12-6 » ;

a bis) Le deuxième alinéa est supprimé ; 

b) La seconde phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : « , sauf si la personne détenue est hospitalisée au sein d’une unité hospitalière spécialement aménagée en consentant à ses soins ».

TITRE IV

DISPOSITIONS FINALES ET TRANSITOIRES

Article 10
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 11

(Texte élaboré par la commission mixte paritaire)

I. – Au 6° de l'article L. 3215-2 du code de la santé publique, la référence : « L. 3213-5 » est remplacée par la référence : « L. 3213-9-1 ».

II. – L’article L. 3844-1 du même code est ainsi modifié :

1° Au 4°, après la référence : « 2° », est insérée la référence : « du I » et, après la première occurrence de la référence : « L. 3222-1 », sont insérés les mots : « du présent code » ;

2° Le 7° est ainsi modifié :

a) Au début, les références : « Au dernier alinéa des articles L. 3211-2-1 et L. 3211-9, au 2° et à l’avant-dernier alinéa du II de l’article L. 3211-12, au dernier alinéa des I et IV » sont remplacées par les références : « Au premier alinéa du II de l’article L. 3211-2-1, au dernier alinéa de l’article L. 3211-9, au dernier alinéa du II de l’article L. 3211-12, à la première phrase du dernier alinéa du I » ;

b) Les références : « à la première phrase du deuxième alinéa du I et au 2° du III de l’article L. 3213-1, » et « , deux fois, au dernier alinéa de l’article L. 3213-8 » sont supprimées ;

3° Au 9°, les deux dernières occurrences des mots : « à la première phrase du » sont remplacées par le mot : « au » ;

4° Au b du 11°, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « deuxième » ;

5° Le 13° est ainsi rédigé :

« 13° L’article L. 3214-1 est ainsi rédigé : 

« “Art. L. 3214-1. – I. – Les personnes détenues souffrant de troubles mentaux font l’objet de soins psychiatriques avec leur consentement. Lorsque les personnes détenues en soins psychiatriques libres requièrent une hospitalisation à temps complet, celle-ci est réalisée dans un établissement de santé au sein d’une structure adaptée.

« “II. – Lorsque leurs troubles mentaux rendent impossible leur consentement, les personnes détenues peuvent faire l’objet de soins psychiatriques sans consentement en application de l’article L. 3214-3. Les personnes détenues admises en soins psychiatriques sans consentement sont uniquement prises en charge sous la forme mentionnée au 1° du II de l’article L. 3211-2-1. Leur hospitalisation est réalisée dans un établissement de santé au sein d’une structure adaptée ou, sur la base d’un certificat médical, au sein d’une unité adaptée.

« “III. – Lorsque leur intérêt le justifie, les personnes mineures détenues peuvent être hospitalisées au sein d’un service adapté dans un établissement de santé en dehors des unités prévues aux I et II du présent article.” ; ».

III. – L’article L. 3844-2 du même code est ainsi modifié :

1° Le 1° est abrogé ;

2° Au début du 5°, la référence : « À la fin du second alinéa de l’article L. 3222-3, » est supprimée. 

…………………………………………………………………….

M. le président. Sur les articles du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je ne suis saisi d’aucun amendement.

Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...

Le vote est réservé.

Vote sur l’ensemble

Article 11
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je souhaite intervenir à la suite des propos de M. Desessard, qui a évoqué les « excès sécuritaires » de la loi de 2011 et le droit des libertés.

Il faut aussi se mettre à la place des professionnels de santé, qui sont de l’autre côté de la barrière ! Mon expérience de médecin généraliste de garde m’a conduit à être confronté à des personnes en plein délire, qui vous menacent à coup de chaîne de vélo. L’un de mes confrères s’est également retrouvé sous la menace d’un couteau de cuisine alors qu’il se trouvait au chevet d’une malade. Il venait de la sauver après qu’elle eut tenté de se jeter par la fenêtre du douzième étage dans un moment de délire !

Il faut donc veiller à trouver le juste milieu entre le droit à la liberté et le droit à la vie du professionnel de santé qui prend des responsabilités et des initiatives.

Je souscris, comme souvent, aux propos de Muguette Dini sur les soins sans consentement en ambulatoire : ce n’est pas réalisable ! Il faut prendre des mesures rapides pour sauver ces personnes et se prémunir contre le danger qu’elles peuvent représenter pour autrui.

On entraperçoit dans ce texte une petite partie du dispositif, mais il convient d’approfondir la réflexion, afin que tout le monde puisse, en toute sécurité, y trouver son compte.

Ma seconde remarque concerne les unités pour malades difficiles, dont on supprime le statut légal. En effet, je suis inquiet pour ces structures.

D’une part, le problème, essentiel, de la formation des personnels n’est toujours pas abordé. Comme nous l’avons dit, ce type d’établissements nécessite un personnel très spécialisé, formé aux problématiques de santé, de sécurité et de justice.

D’autre part, nous devons tenir compte de l’impact budgétaire des modifications de procédure. Je veux bien que l’on apporte quelques changements, mais l’équilibre budgétaire de ces UMD peut être remis en cause par les décisions que nous prenons. Pour assurer la survie de ces unités particulièrement budgétivores en raison de la complexité des réponses qu’elles doivent apporter, il est impératif d’examiner l’impact budgétaire et financier de toute mesure les concernant. En l’occurrence, cette évaluation nous paraît insuffisante.

C’est la raison pour laquelle le groupe UMP ne votera pas ce texte.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

(La proposition de loi est adoptée définitivement.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : proposition de loi visant à modifier certaines dispositions issues de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge
 

9

Mise au point au sujet de votes (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur

Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d'un projet de loi organique

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur.

Nous poursuivons les explications de vote sur l’ensemble du texte.

Vote sur l’ensemble (suite)

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. La parole est à M. Christian Bourquin, pour explication de vote.

M. Christian Bourquin. Je me présente à vous, mes chers collègues : oui, je suis « cumulard », et je l’assume, humblement ! « Ringard » ? « C’est celui qui dit qui est », s’exclament les enfants de ma région dans les cours d’école… Je me contenterai de cette réponse.

Si je m’oppose à ce projet de loi organique, je suis ravi qu’il ait été modifié par le Sénat, et je le voterai donc en l’état.

La base électorale fournie par le terrain est bien représentée dans cette assemblée. Certes, le Sénat compte déjà des apparatchiks, mais le mélange est bon. En revanche, si d’aventure on rendait le mandat de sénateur exclusif de tout mandat local, cela voudrait dire, demain, une assemblée exclusivement composée d’apparatchiks, après-demain, un Sénat qui se confondrait avec l’Assemblée nationale et, peu de temps après, la suppression pure et simple du Sénat, puisqu’il y aurait une chambre de trop. Ce texte forme l’acte Ier de cette mort lente et programmée.

Une autre menace, si ce texte était adopté, serait de voir s’accroître le poids des lobbys, que nous avons tant combattus dans la République.

J’ai entendu mes collègues favorables au projet de loi organique, dans sa rédaction initiale, promettre pour bientôt un statut de l’élu… Finalement, on a mis la charrue avant les bœufs.

Il aurait fallu commencer par faire une bonne décentralisation, grâce à laquelle il ne serait plus utile de venir à Paris chercher la décision pour pouvoir l’appliquer en région. Il aurait fallu aussi s’atteler à la définition d’un vrai statut de l’élu. Il aurait fallu enfin dissoudre par la loi les 624 hauts commissariats, comités et autres hautes autorités créés au détriment du pouvoir des parlementaires. Le non-cumul se serait imposé tout naturellement au terme de ces réformes, comme au Royaume-Uni, où il n’a pas été besoin d’une loi pour parvenir à ce résultat.

Par ailleurs, ce texte est incomplet. Dans sa mouture initiale, la relation entre le parlementaire et le chef d’entreprise, l’avocat ou le professeur d’université est omise. Je considère pour ma part avoir un métier, celui d’élu, et deux fonctions, celles de président de région et de sénateur.

En revanche, celui qui est avocat exerce deux métiers : avocat d’une part, élu d’autre part. Dans sa tête, c’est bien plus compliqué que pour moi ! Je tenais à faire part de ces remarques, car elles n’ont pas été prises en compte.

Je me réjouis de la « révolution » – pour reprendre le mot de M. le ministre Valls – qui s’est produite cette nuit, c'est-à-dire de cette rébellion du Sénat, qui a affirmé sa différence en réécrivant cette proposition de loi jusque dans son titre. Cette révolution-là a toutes mes faveurs ! (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Raymond Vall.

M. Raymond Vall. Je veux tout d’abord saluer la richesse de nos débats, qui sont tout à l’honneur des sénateurs. Ils ont apporté la preuve que la Haute Assemblée détient un niveau de compétence dont nous avons pu mesurer hier soir l’étendue et la qualité. Nous avons pu également mesurer combien l’expérience de terrain des sénateurs a été profitable pour discuter et améliorer ce texte, même lorsque nous nous sommes trouvés en désaccord.

Je voudrais m’appuyer sur les propos de M. Rebsamen, qui a évoqué ce « plus » qu’a apporté le Sénat sur des textes soumis il y a peu à son examen. Il a pris l’exemple du récent projet de loi relatif aux Métropoles et à l’action publique territoriale0. À ce propos, permettez à l’élu rural que je suis de prendre l’exemple de la ruralité, un sujet dont a peu parlé.

Outre les risques encourus par la ruralité si nous ne modifions pas le présent texte, je rappelle qu’il est revenu au Sénat d’avoir intégré ce problème au projet de loi sur les métropoles, qui les avait oubliés.

Sur ces sujets, en effet, ce texte ne disait pas un mot ! Ce sont les sénateurs, avec cette sensibilité issue de leur travail de terrain, qui ont pratiquement rédigé le texte de loi portant sur la ruralité et les territoires péri-urbains. Pourquoi ? Parce que ce sont les mêmes qui ont mis sur pied les structures de l’intercommunalité dans les territoires ruraux, en recourant à des procédures difficiles, en créant des pays ou des syndicats, toutes structures au sein desquelles d’ailleurs, cela a été souligné, le sénateur du département doit être capable de créer du consensus, ce qui est toujours très difficile.

C’est donc grâce à ces sénateurs de terrain que ce texte a été préparé par notre Haute Assemblée, puis approuvé, certes avec quelques modifications, par les députés, qui ont d’ailleurs reconnu au début de leur examen qu’il n’y avait pas lieu pour eux de traiter de ce sujet. Et ce texte sera de nouveau discuté à partir du 3 octobre prochain par le Sénat, qui s’efforcera toujours d’apporter ce « plus ».

Je crois donc que preuve a été faite que la spécificité du Sénat existe bel et bien et que sa diversité, sa richesse et sa connaissance du terrain sont des plus indispensables.

Pour conclure, mes chers collègues, sans surprise je voterai ce texte. Je tiens toutefois à saluer également le travail considérable accompli par le président de notre groupe Jacques Mézard. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. François Fortassin.

M. François Fortassin. Mon intervention sera relativement brève, puisque de très nombreux points ont déjà été abordés. Certes, le non-cumul présente des mérites incontestables, puisque, somme toute, on peut considérer que les parlementaires qui ne cumulent pas ont plus de temps à consacrer à leur action. Néanmoins, si nous regardons autour de nous, est-il bien vrai que ceux qui ne cumulent pas aujourd’hui sont davantage présents dans notre hémicycle que ceux qui cumulent ? Cela n’a rien d’évident.

En outre, si l’on coupe le lien avec le territoire, les élus vont tout naturellement avoir tendance à solliciter l’appui des médias. D’ailleurs, en cherchant bien, on doit pouvoir trouver dans cet hémicycle quelques spécialistes qui ont tendance à confondre la politique avec le music-hall… Cela ne me paraît pas sain.

De surcroît, qui peut contester que le Sénat possède de réelles spécificités ? L’âge d’éligibilité des sénateurs est plus élevé que celui des députés, leur mode d’élection diffère, puisque nous sommes élus au second degré et non pas au suffrage universel direct, et notre assemblée ne peut être dissoute. Il existe une complémentarité entre l’Assemblée nationale, qui représente essentiellement les populations, et le Sénat, qui représente les territoires.

Je suis bien entendu favorable à un cumul limité. Néanmoins, je voterai ce texte avec enthousiasme, parce que le Sénat a accompli un travail extrêmement important, ne serait-ce qu’en limitant le nombre de mandats et en interdisant le cumul des indemnités. Les sénateurs qui voteront ce texte montreront ainsi que les problèmes en jeu ne sont pas de nature matérielle.

Enfin, n’oublions jamais l’histoire : le Sénat a été créé pour servir de contrepoids à l’Assemblée nationale, notamment en étant beaucoup moins sous l’influence de l’exécutif. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Nous arrivons au terme de débats passionnés et passionnants. Nous avons d'ailleurs en mémoire certaines interventions prononcées hier, au moment de la discussion générale, qui ont brillé par leur grande qualité, sur toutes les travées, de même que nous nous souvenons de certains témoignages empreints de passion, de sincérité et de franchise.

Je veux souligner l’excellent travail réalisé par la commission des lois, qui a eu beaucoup de mérite sur un texte aussi difficile. Même s’ils n’en sont pas membres, nombre d’entre nous se sont associés à son travail en tant qu’élus de territoires ruraux.

Pour ma part, maire d’une petite commune de 170 habitants et conseiller général du plus petit canton des Ardennes, qui d’ailleurs fondra comme neige au soleil à cause du redécoupage en cours, je puis témoigner en toute sincérité et défendre l’attachement que nous portons à nos territoires ruraux, à l’ensemble des 36 700 communes françaises et bien sûr au Sénat, qui représente les collectivités territoriales avec force et conviction, passion et respect.

On peut s’interroger sur la notion de cumul, et même sur l’idée de pouvoir. Certains cumulent… Et alors ? À la vérité, chacun d’entre nous assume conjointement son mandat parlementaire et ses mandats locaux en son âme en conscience et en y consacrant beaucoup de temps. Et comme de nombreux collègues, j’estime qu’il y a cumul et cumul.

Ma conviction, c’est que ce ne sont pas les considérations matérielles qui nous animent, mais la passion, le respect des autres, l’engagement au service des collectivités, des petites communes, d’une nation, d’un pays – un engagement pour lequel nous donnons beaucoup de nous-mêmes. Chacun, sur toutes les travées de cet hémicycle, peut en témoigner, me semble-t-il.

Un travail de fond a été accompli par la commission des lois et au sein de cet hémicycle, un travail nourri de dialogue, de concertation, de témoignage. Cela nous conduit à nous remettre en question, ce qui est toujours positif selon moi, car nous nous efforçons tous d’exercer nos mandats au mieux, sans compter notre temps. Certes, l’entreprise est difficile. Elle exige l’instauration d’une relation de confiance avec les citoyens. Il faut également faire comprendre, faire partager et faire œuvre de pédagogie.

L’élaboration de ce texte a donné une belle leçon de courage et d’humilité. Il permet une évolution positive et de bon sens, et c’est pourquoi nous le voterons. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. Philippe Bas. Très beau témoignage !

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas.

Mme Sophie Primas. Au terme de ce débat, je tiens à dire que, contrairement à tout ce que lis et entends, c’est un texte résolument hostile au cumul des mandats que nous voterons.

Ce qui est en cause, c’est le cumul excessif de mandats nationaux et locaux, de responsabilités politiques dans nos partis respectifs et parfois de responsabilités professionnelles, comme l’a souligné notre collègue François Rebsamen.

Le procès en « ringardise » qui est fait à notre assemblée, toutes travées confondues, est donc parfaitement injustifié. Il est bien sûr politisé. Il est même, j’oserai le dire, populiste.

Mettre fin à des situations abusives de cumul des mandats ne doit pas pour autant conduire à fragiliser nos institutions, en les déconnectant totalement du terrain et des réalités territoriales. Celles-ci font la France, elles font la richesse de nos débats et de nos réflexions. Cela vaut pour notre assemblée, mais également, je le crois, pour nos collègues députés. Je regrette donc que l’amendement rétablissant un seul mandat exécutif local pour les parlementaires des deux assemblées ait été rejeté. (M. David Assouline s’exclame.)

Couper ce lien entre nos territoires, nos citoyens et nos assemblées, modifier les modes de scrutin, modifier notre Constitution, comme il fut fait d’ailleurs en 2008 contre l’avis de certains d’entre nous, c’est fragiliser durablement l’équilibre de nos institutions.

On peut d’ailleurs s’interroger sur l’avenir d’un Sénat dépossédé de ses spécificités et de ses compétences dans le domaine des collectivités territoriales. À cet égard, la création d’un Haut Conseil aux collectivités territoriales est bien la preuve du travail lent, diffus, mais déterminé qui est mené en ce sens par le Gouvernement.

Enfin, que dire des arguments selon lesquels la loi permettra l’arrivée massive de femmes, de jeunes, de citoyens issus de la diversité ? Bel objectif, mais qui, là encore, me semble empreint de populisme. (Exclamations sur les travées du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe socialiste.)

Mme Éliane Assassi. C’est scandaleux !

Mme Sophie Primas. Quelque 577 députés et 348 sénateurs font au total moins de 1 000 élus, mes chers collègues, soit moins de 0,2 % des quelque 400 000 mandats électifs que compte notre pays. On voit bien toute la démagogie de l’argumentation qui nous est opposée !

M. Simon Sutour, rapporteur. Anathème et intolérance !

Mme Sophie Primas. Je salue donc les avancées réalisées par le Sénat. Je souhaite qu’un maire d’une petite comme d’une grande commune puisse être député ou sénateur, qu’il puisse avoir accès aux institutions nationales et apporter toute son expérience et sa compétence. Pour ses raisons, je voterai ce texte modifié par le Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Au moment de conclure ce débat et d’exprimer l’opinion unanime des dix-huit membres de mon groupe, toutes sensibilités confondues, je veux rappeler l’importance de la décision que nous allons prendre. M. le ministre a parlé de « révolution ». Oui, c’est bien une révolution dans nos institutions !

Certaines révolutions emportent des effets positifs, nous en avons connu une grande dans notre histoire ; d’autres ont des effets dévastateurs. Je suis convaincu que si, par impossible, le texte final correspondait aux souhaits du Gouvernement, ses effets seraient funestes et dévastateurs pour les institutions de la République.

Je suis heureux que le Sénat, dans sa grande et même dans sa très grande majorité, qui est composée de différentes sensibilités, ait adressé – par plus de deux cent dix voix contre quatre-vingt-deux, me semble-t-il – un message très fort à l’exécutif, au Président de la République, pour lequel j’ai voté, et au Gouvernement, que j’ai la plupart du temps soutenu. Nous allons maintenant savoir si l’exécutif est sensible au message de la grande majorité des sénateurs. La réponse sera importante, car elle aura un sens institutionnel.

D’aucuns ont remis en cause l’existence du Sénat. Le général de Gaulle l’a fait par le référendum de 1969. Il l’a annoncé loyalement et en a appelé au peuple, qui a répondu. Les uns ont estimé que le peuple avait donné une mauvaise réponse, les autres qu’il en avait donné une bonne. Si, aujourd'hui, le Président de la République et le Gouvernement avaient choisi la voie du référendum, s’ils s’étaient adressés au peuple, nous nous serions inclinés, les uns et les autres, devant la voix du peuple. Je note qu’on a désormais peur de s’adresser au peuple, même quand on en appelle tous les jours à la démocratie participative... C’est une constatation.

Le projet de loi tel qu’il a été modifié par le Sénat est un texte de modernité, un texte novateur. Il est regrettable que les mots entendus depuis deux mois pour nous qualifier aient été réutilisés ces dernières semaines, ces derniers jours et ces dernières heures. Ce n’est pas bien de donner une telle image du Sénat, parce que ce n’est pas l’image de la vérité.

En adoptant un texte qui limite le cumul à un seul mandat exécutif local, conformément à ce que nous souhaitions depuis longtemps, et en votant finalement la suppression du cumul des indemnités, que nous avions été les premiers à proposer et à mettre en discussion, le Sénat a œuvré pour le progrès et fait preuve de modernité.

Telle est le vrai message du Sénat. Il ne correspond pas à la caricature qui en a été faite, y compris, malheureusement, en son sein. Il y a quelque chose de fort dans ce message. Il y a notamment la volonté de préserver l’équilibre de nos institutions.

Les malheureuses réformes de 2002 – le passage au quinquennat et l’inversion du calendrier électoral, dont on voit aujourd'hui les conséquences – ont abouti à un système d’hyperprésidence, le pouvoir trop fort du Président de la République n’étant plus compensé par celui du Parlement. Or les réformes proposées par le Gouvernement aggraveraient cette situation : le Président de la République serait encore plus fort, et les parlementaires seraient – il faut le dire, sans que ce soit péjoratif – trop soumis au pouvoir présidentiel. Le résultat serait un déséquilibre catastrophique pour nos institutions.

Je l’assume, j’estime qu’une deuxième chambre doit assurer la représentation des territoires, et en particulier, comme l’a très bien dit Raymond Vall, des territoires les plus fragiles. Si cette réforme aboutissait, ce ne serait plus le cas.

Je conclurai en citant un homme auquel se réfère sans cesse, et à juste titre, le ministre de l’intérieur. Clemenceau disait : « Les événements m’ont appris qu’il fallait donner au peuple le temps de la réflexion. Le temps de la réflexion, c’est le Sénat. » (Vifs applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je n’avais pas prévu de prendre la parole à cet instant,… (Rires et exclamations ironiques sur plusieurs travées.)

Mme Éliane Assassi. Il dit cela à chaque fois !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. … mais le discours que je viens d’entendre m’en a donné l’idée.

J’estime que nous avons eu, en bien des moments de ces deux derniers jours, un débat riche. Je me réjouis en particulier que, au sein de mon groupe, présidé par François Rebsamen, chacun ait pu défendre ses positions dans la clarté, la sérénité et l’écoute réciproque. Je dois d'ailleurs dire qu’il en fut de même pour beaucoup de nos collègues.

Je veux réagir aux propos de Jacques Mézard, qui devrait recevoir la palme de l’emphase. (Exclamations sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. François Fortassin. Vous n’êtes pas mal non plus dans le genre !

M. Alain Gournac. Où est-elle, l’emphase ?

M. Ladislas Poniatowski. De quel côté est l’emphase ?

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Mes chers collègues, pour ma part, je suis très calme.

M. Henri de Raincourt. Vos propos ne sont pas très aimables…

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Jacques Mézard a qualifié le texte du Gouvernement de « funeste », « dévastateur » et « catastrophique ».

M. Alain Gournac. C’est très juste !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Mes chers collègues, êtes-vous sûrs que le choix de faire appel à tous les talents pour exercer les différents mandats, d’amorcer cette évolution dans les mœurs de la République, soit funeste, dévastateur et catastrophique ?

Plusieurs sénateurs du groupe UMP. Oui !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Vous dites que oui, mais, très franchement, êtes-vous sûrs qu’il soit opportun de parler, comme Jacques Mézard vient de le faire, d’élus « soumis » ? Y a-t-il ici un seul élu qui soit soumis ?

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Je suis sénateur depuis quelque temps déjà et j’ai constaté que, sur toutes les travées, on affirmait souvent des positions différentes de celles de l’exécutif. Vous en savez quelque chose, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement.

Raymond Vall a eu des mots très justes au sujet de l’amendement par lequel nous avons rétabli les pôles ruraux. Cet amendement a été voté par la commission que je préside. Nous y avons travaillé tous ensemble. Cet amendement a été soutenu aussi bien par les adversaires que par les partisans du cumul.

M. Alain Gournac. Par les partisans d’un certain cumul !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Je fais partie de la seconde catégorie, je ne cumule pas, mais je suis très attaché à cet amendement, que nous avons défendu tous ensemble.

M. Raymond Vall. Je vous en remercie, monsieur le président de la commission.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Je dis cela pour laisser une place – et ce sera mon dernier mot – à ceux qui pensent que cette rénovation des mœurs politiques voulue par le Président de la République et défendue par le Gouvernement est une chance, un atout pour améliorer le fonctionnement de la politique dans ce pays et réconcilier les citoyens avec la politique.

M. Alain Gournac. On verra !

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’est un point de vue, et il est légitime de le défendre, de même qu’ont été défendus des points de vue catastrophistes.

De toute façon, l’Histoire tranchera, mes chers collègues. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier.

M. Albéric de Montgolfier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’adhère pleinement au texte, tel qu’il a été amendé par le Sénat, même si je regrette que certaines des dispositions que nous avons introduites ne s’appliquent pas aussi à nos collègues députés.

On a souvent avancé, pour justifier l’interdiction de tout cumul, l’argument de l’absentéisme qui règnerait dans nos assemblées. Il est vrai que, parfois, à certaines heures, sur certains textes, il est difficile de regarder les images de l’hémicycle diffusées par la télévision. Toutefois, il ne faut pas oublier que la révision constitutionnelle de 2008 a déplacé le centre de la décision vers les commissions.

Je participe assez régulièrement, je crois, aux réunions de commission. Qui voyons-nous lors de ces réunions ? Des collègues, dont plusieurs sont présents aujourd'hui, qui, tout en étant présidents de conseil général, pour certains, présidents de conseil régional, pour d’autres, maires, pour d’autres encore, sont parmi les plus assidus. Il n’existe aucun lien entre l’exercice d’une fonction exécutive locale et l’absentéisme, bien au contraire : ce sont souvent les sénateurs qui ont des responsabilités locales qui apportent le plus aux travaux de la commission.

M. Philippe Bas. Exactement !

M. Albéric de Montgolfier. Si le projet du Gouvernement entrait en vigueur – heureusement, le Sénat est intervenu –, nous nous priverions de cette expérience qui enrichit nos travaux et permet à notre assemblée d’apporter une réelle amélioration aux textes qu’elle examine.

C'est la raison pour laquelle je me réjouis profondément de la solution trouvée par le Sénat. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique dont l’intitulé est ainsi rédigé : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député et limitant à une seule fonction exécutive locale le cumul avec le mandat de sénateur.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 347 :

Nombre de votants 327
Nombre de suffrages exprimés 315
Pour l’adoption 208
Contre 107

Le Sénat a adopté. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi organique interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de député ou de sénateur
 

10

 
Dossier législatif : projet de loi interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen
Articles additionnels avant l'article 1er

Interdiction du cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen

Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d'un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen (projet n° 733, résultat des travaux de la commission n° 833, rapport n° 832).

Nous en sommes parvenus à la discussion des articles.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen
Article 1er

Articles additionnels avant l'article 1er

M. le président. L'amendement n° 18 rectifié, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article L. 46-1 du code électoral, les mots : « conseiller municipal » sont remplacés par les mots : « maire, adjoint au maire, conseiller municipal bénéficiant d’une délégation, ou président, vice-président, délégué communautaire bénéficiant d’une délégation, d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 30 000 habitants ».

La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Lorsque que l’on interroge l’opinion sur le sujet du cumul, réagit-elle seulement sur celui qui est pratiqué par les parlementaires ? Évidemment non : il faut songer également au cumul entre mandats locaux. Et là, étrangement, ce qui est inadmissible pour un parlementaire, du moins aux yeux du Gouvernement, devient acceptable pour un élu local.

Nous avons déposé un amendement de bon sens, me semble-t-il. Comme nous souhaitons faire progresser de manière cohérente la législation sur les incompatibilités, nous vous proposons, mes chers collègues, de faire évoluer aussi les règles applicables en matière de cumul horizontal, en intégrant les fonctions exécutives au sein d’un établissement public de coopération intercommunale de plus de 30 000 habitants, c’est-à-dire les fonctions de président, de vice-président ou de conseiller délégué.

Le renforcement du rôle des structures intercommunales nécessite en effet, dans un souci de réalisme et d’efficacité, que celles-ci soient prises en compte dans le cumul des mandats.

A contrario, seraient exclus du dispositif les mandats des conseillers municipaux qui ne sont ni maire, ni adjoint, ni conseiller municipal délégué. En effet, chacun s’accorde à reconnaître que leurs fonctions sont largement moins prenantes que les fonctions exécutives au sein d’un EPCI.

Cet amendement est dans le droit fil des dispositions que nous avons défendues hier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. L’avis de la commission sur l’amendement n° 18 rectifié vaudra également pour les amendements nos 7 rectifié, 10, 11, 5 rectifié, 8 rectifié et 9 rectifié : toutes ces propositions ont pour objet de limiter le cumul entre mandats et fonctions locales, comme cela a été souligné pendant notre réunion de commission.

À titre personnel, je considère que ce sujet, dont je ne minore pas l’importance, mériterait une proposition de loi spécifique, avec un débat approfondi : la pluralité des solutions proposées, parfois contradictoires, en est la meilleure preuve.

Aussi, tout en comprenant sur le fond certains de ces amendements, je solliciterai leur retrait afin de débattre du projet de loi selon le périmètre retenu par le Gouvernement et l’Assemblée nationale, à savoir l’incompatibilité entre le mandat de représentant au Parlement européen et une fonction exécutive locale.

La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle y serait défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Cet amendement tend à élargir considérablement le champ de nos réflexions, puisque, à propos d’un texte qui traite du cumul entre un mandat de représentant au Parlement européen et des fonctions exécutives locales, nous en venons à parler du cumul transversal.

Nous avons beaucoup entendu dire depuis hier que nous n’avions pas pris assez de temps pour traiter de la première question ; il serait assez singulier qu’en si peu de temps et subrepticement, à l’occasion de la discussion d’un amendement, nous traitions de la seconde, même si je n’en nie pas l’intérêt !

Ce problème n’est pas totalement étranger au débat que nous venons d’avoir, mais probablement pas dans le sens que vous pensez, monsieur Détraigne. En réalité, au moment où il y aura interdiction du cumul, malgré nos désaccords, la question du cumul horizontal pourra se poser d’une autre manière.

Le Gouvernement n’est pas jusqu’au-boutiste sur le sujet, car il peut y avoir des réalités locales différentes. En tout cas, cela supposerait un débat. C’est pourquoi nous avons la même position que la commission : élargir de cette façon le périmètre de ce texte ne nous paraît pas raisonnable aujourd’hui.

Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Monsieur Détraigne, l'amendement n° 18 rectifié est-il maintenu ?

M. Yves Détraigne. J’ai bien noté que, selon M. le ministre, il ne serait pas « raisonnable » de voter cet amendement. Pourtant, hier, nous avons proposé, voire voté, des dispositions bien plus déraisonnables.

Je maintiens donc mon amendement, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

M. Éric Doligé. M. le ministre nous a affirmé qu’il n’y avait pas d’urgence et que nous avions eu le temps de réfléchir. Toutefois, nous sommes bien dans l’urgence, puisque vous nous proposez deux textes que nous n’avons même pas eu le temps d’examiner. Je suis désolé, mais c’est la vérité, notamment pour les sénateurs qui ne font pas partie de la commission des lois, laquelle a dû travailler de nuit en raison des délais très courts pour rendre le rapport. J’en félicite d’ailleurs M. le rapporteur !

Cet amendement est donc également discuté dans l’urgence, mais il me semble nécessaire de l’adopter.

Comme souvent, le Gouvernement nous propose de renvoyer l’examen de ces dispositions à plus tard. Depuis le temps que nous sommes parlementaires et que nous cumulons des mandats, nous avons très souvent entendu cette formule. Nous savons ce qu’elle veut dire : l’amendement est enterré et on ne le reverra jamais !

J’accompagnerai donc bien volontiers la plupart des amendements présentés aujourd’hui, car je connais par cœur le fond du problème qui nous est présenté par nos collègues. Je suis donc tout à fait partisan de cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 18 rectifié.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 7 rectifié, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le sixième alinéa de l’article L. 5211-9 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La fonction de président d’une communauté urbaine, d’une communauté d’agglomération ou d’une métropole est incompatible avec la fonction de maire d’une des communes membres de cet établissement public de coopération intercommunale. »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Je souhaite tout d’abord faire une remarque d’ordre général : comme nous allons encore avoir à discuter du projet de loi sur les métropoles, lequel tend à créer de nouvelles fonctions, il faudra faire en sorte d’éviter toute possibilité de cumul. Les limitations dont nous parlons doivent aussi valoir pour les lois à venir.

S’agissant de la situation actuelle, nous proposons qu’il y ait incompatibilité entre la fonction de président d’une communauté urbaine, d’une communauté d’agglomération ou d’une métropole et la fonction de maire de l’une des communes membres de cet EPCI.

M. le président. L'amendement n° 10, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le premier alinéa de l’article L. 46-1 du code électoral, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le mandat de maire d’une commune de plus de 30 000 habitants est incompatible avec celui de président d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants. »

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Tout d'abord, pour répondre gentiment aux propos de M. Sueur de tout à l'heure, je dirais que, s’il y a eu au moins un bon moment au cours de nos débats, c’est lorsqu’il a parlé à mon sujet d’emphase. Je crois que, en la matière, il est un véritable spécialiste ! (Rires.)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Je ne cultive pas l’emphase, mais votre discours restera dans les annales du genre !

M. Jacques Mézard. Ce qui nous sépare, surtout, monsieur le président de la commission, c’est que je considère que le meilleur moyen d’aller d’un point à un autre, c’est la ligne droite – et je vous le dis gentiment et sans emphase.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Je ne crois pas. Cette affirmation est gratuite.

M. Jacques Mézard. Notre amendement est en cohérence avec le projet de loi initial, comme cela vient d’être rappelé. Nous avons assez dit qu’il était curieux d’interdire tout cumul vertical – nous avons heureusement rétabli la situation à cet égard – mais de ne pas le faire pour l’accumulation des mandats horizontaux. On en connaît les raisons ; je me suis plusieurs fois exprimé sur ce point.

Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, en nous répondant que vous n’avez pas eu le temps de réfléchir, vous renversez les arguments. En effet, vous n’avez eu de cesse de répéter pendant deux jours que les positions des uns et des autres étaient connues depuis longtemps. En l’occurrence, c’est la même chose : notre opinion est connue depuis longtemps.

Vous regrettez qu’il n’y ait pas eu de réflexion, mais, pour ma part, je déplore que vous soyez toujours dans la contradiction et dans l’incohérence.

Nous proposons donc d’empêcher les maires de communes de plus de 30 000 habitants de présider un EPCI à fiscalité propre de plus de 50 000 habitants. En deçà de ce dernier seuil, le cumul resterait possible. Une telle solution, mesurée, est tout à fait acceptable, me semble-t-il.

M. le président. M. le rapporteur a déjà donné l’avis de la commission sur ces deux amendements.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je ne vais pas reprendre toute l’argumentation : la démarche commune de M. Mézard et de Mme Lipietz…

M. François Rebsamen. C’est assez rare ! (Sourires.)

M. Alain Vidalies, ministre délégué. … étant la même que celle de M. Détraigne, il n’y a pas lieu de les traiter différemment.

Ma réponse précédente vaut donc pour ces deux amendements, dont je vois bien les conséquences qu’entraînerait leur adoption.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous me reprochez les conditions de discussion de cette réforme, mais il faut savoir que ce projet de loi a été examiné en conseil des ministres le 3 avril 2013 ; il a été voté par l’Assemblée nationale et déposé sur le bureau du Sénat le 4 juillet dernier ; les travaux en séance ont commencé le 18 septembre. Je puis vous dire que le ministre des relations avec le Parlement que je suis souhaiterait, sur de nombreux textes, bénéficier d’un calendrier avec de tels délais, compte tenu des exigences posées par la Constitution.

M. Éric Doligé. Sur les retraites, par exemple !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Oui, entre autres sujets, monsieur Doligé.

Vous savez que la procédure accélérée a deux conséquences : raccourcir les délais et convoquer plus rapidement une CMP. Vous conviendrez avec moi que, pour cette réforme, bien que la procédure accélérée ait été décidée, nous n’avons pas tiré les conséquences de cette possibilité de réduction des délais. En réalité, nous avons plutôt respecté les procédures ordinaires.

Peut-être avez-vous d’autres griefs à nous faire à ce titre, mais, en tout cas, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

M. Philippe Bas. Monsieur le ministre, vous avez été assez longtemps député pour avoir une bonne connaissance des travaux parlementaires. Aussi, vous ne devriez pas tenir de tels propos.

Ce n’est pas parce qu’un texte a été adopté en conseil des ministres en avril de cette année ou à n’importe quelle date auparavant que les délais ont été longs pour l’examiner ! Vous le savez très bien, l’examen d’un texte commence à partir du moment où la commission est libérée pour pouvoir s’en occuper.

Depuis le mois d’avril dernier, il ne vous aura pas échappé que nous avons été très occupés par beaucoup d’autres textes, que nous avons examinés de manière approfondie. Nous avons eu de très longs débats, auxquels vous avez d'ailleurs participé.

Par conséquent, vous ne pouvez pas tirer argument de ce que le texte soit passé en conseil des ministres au mois d’avril pour affirmer que nous avons largement eu le temps d’y réfléchir et nous dénier le droit de nous plaindre de la procédure accélérée !

Nos travaux ont tout de même été très acrobatiques : M. le rapporteur a été soumis à une forte pression pour commencer les auditions avant même l’ouverture officielle de la session extraordinaire, pour les terminer le lendemain. Il a dû passer la nuit sur son rapport afin que celui-ci puisse être examiné par des commissaires qui n’avaient pas eu le temps matériel, depuis l’ouverture de la session, de réfléchir à ce texte.

On peut nous faire bien des reproches, mais nous sommes tolérants. Nous acceptons un certain rythme de travail, qui est parfois un peu forcé.

Toutefois, affirmer que la procédure accélérée s’imposait pour un texte dont l’application – en témoigne le dernier article du projet de loi ! – est fixée au premier renouvellement de chacune des assemblées à compter de mars 2017, c’est tout simplement se moquer du monde ! Veuillez m’en excuser, monsieur le ministre – je ne suis pas sûr que vous ayez agi ainsi consciemment –, mais cette expression est celle qui me vient le plus naturellement à l’esprit. C'est la raison pour laquelle je tenais à ne pas laisser votre intervention sans réponse.

Pour ma part, je vois avant tout dans la procédure accélérée une menace que vous avez voulu faire peser sur les travaux du Sénat, en l’assortissant de la possibilité d’un passage en force de l'Assemblée nationale, après l’échec d’une commission mixte paritaire.

Pour en revenir aux deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune, je voterai contre l’amendement n° 7 rectifié et pour l’amendement n° 10.

En effet, le champ d’application du premier amendement me paraît trop large. On ne peut mesurer toutes les conséquences qui s’ensuivront. Aussi, je ne veux pas voter en sa faveur à l’aveugle.

Quant au second, il me semble pouvoir être adopté par notre assemblée, dans la mesure où il est raisonnable.

M. le président. La parole est à M. Raymond Vall, pour explication de vote.

M. Raymond Vall. Je ne veux pas revenir sur les polémiques relatives aux délais de l’examen de ce texte. Dans cette enceinte, certains ont fait preuve d’un tel talent que je ne saurais minimiser celui de quiconque !

À cet égard, je tiens à remercier le président Sueur d’avoir contribué à rendre espoir à la ruralité lors de l’examen du texte sur les métropoles.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Merci !

M. Raymond Vall. Du reste, pourquoi les territoires ruraux et périurbains éprouvent-ils ce sentiment de catastrophe ? Depuis près de dix ans, notre pays n’a pas de véritable ministère de l’aménagement du territoire. De ce fait, nous nous bousculons tous pour savoir qui nous allons missionner à Paris afin de rencontrer un ministre ou des fonctionnaires ayant le pouvoir de nous aider, parce que nous sommes confrontés à la centralisation. On ne sait toujours pas qui fait quoi dans ce pays !

Il nous faut donc aussi considérer ce projet de loi dans son actualité : aujourd'hui, dans le contexte que nous connaissons, le texte qui nous est proposé pourrait être catastrophique pour un certain nombre de territoires.

J’en reviens à l’amendement n° 10. Actuellement, dans le domaine de l’aménagement du territoire, il existe deux étages décisionnels. Les régions, que nous avons désignées comme chefs de file, ont des compétences essentielles pour ce qui concerne le développement économique, les transports, les infrastructures. Ce n’est plus le maire qui décide ! Concernant ces compétences essentielles, nous fléchons d’ailleurs dans nos bulletins de vote l’élu qui aura le véritable pouvoir. C’est pour cette raison que le seuil de moins de 50 000 habitants me paraît très important.

Je vous rappelle qu’un certain nombre de départements comptent moins de 200 000 habitants. Combien de temps faudra-t-il pour réunir une intercommunalité de 50 000 habitants, soit le quart ou le tiers d’un département comme le Gers, par exemple ? C’est pratiquement impossible.

Qui ira porter l’espoir de ce territoire ? Le président de cette intercommunalité, qui frisera les 50 000 ou les 30 000 habitants, mandaté par nos électeurs – à nous qui revendiquons la représentation de ces territoires –, sera véritablement le plus compétent pour engager les démarches nécessaires, qui sont parfois décourageantes.

M. le président. La parole est à M. François Rebsamen, pour explication de vote.

M. François Rebsamen. Je ne sais pas de quelle manière considérer l’amendement n° 7 rectifié de Mme Lipietz.

N’y voyez aucune agression verbale, ma chère collègue, mais c’est franchement mal connaître la vie locale que d’imaginer a priori qu’on ne puisse pas être président d’un EPCI et maire de l’une de ses communes membres !

Mme Éliane Assassi. C’est sûr !

M. François Rebsamen. L’EPCI est, en réalité, la communauté des maires. Comment peut-on donc tenir de tels propos ?

Pour ma part, j’ai voté en faveur du maintien d’une fonction exécutive locale avec un mandat de parlementaire, car je considère que c’est une mesure juste. Toutefois, ce n’est pas notre rôle de légiférer pour empêcher les élus locaux de bien gérer leur territoire.

On ne peut pas tout à la fois se réclamer du fait urbain ou de la ruralité et intervenir pour empêcher des maires de gérer correctement leur territoire ! Tout le monde ici, sur toutes les travées, me semble-t-il, a poussé à la création des établissements publics de coopération intercommunale. On sait bien que c’est par ce niveau que passe l’avenir de l’investissement au niveau local.

En conséquence, je voterai contre l’amendement n° 7 rectifié.

Concernant l’amendement n° 10, ma réflexion est légèrement différente de la vôtre, monsieur Mézard. Là encore, la bonne gestion dont jouissent aujourd'hui nombre d’EPCI, quelle que soit leur taille, tient à la mutualisation des moyens des communes, avec des services communs d’information ou un service financier à leur disposition de l’ensemble des communes. Aussi, je ne vois pas pourquoi on imposerait une limite démographique.

C'est la raison pour laquelle je voterai contre ces deux amendements. On porte là atteinte à la liberté communale. Pour avoir défendu avec certains d’entre vous la liberté des communes, à laquelle nous sommes attachés, nous ne pouvons interdire à un maire d’être président d’un établissement public de coopération intercommunale, alors même que nous avons obligé quasiment toutes les communes sur l’ensemble du territoire à créer des EPCI.

Les sénateurs demandent à être respectés ; respectons les élus locaux !

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je souscris entièrement aux propos de M. Rebsamen.

On le voit bien dans les territoires, les intercommunalités qui ne sont pas présidées par un maire posent un certain nombre de difficultés, surtout quand une commune bourg-centre représente la majorité des recettes qui doivent être déléguées, au sein de l’intercommunalité, à d’autres communes, lesquelles ne peuvent assumer les mêmes responsabilités. Ce système reviendrait à pénaliser la coopération intercommunale.

Cependant, il nous faut réfléchir, comme nous l’avons fait en proposant le cumul du mandat de sénateur avec une seule fonction exécutive locale, au cumul des indemnités. Cette réalité est insoutenable pour nos concitoyens. Il y a cumul des indemnités de maire, de président d’une intercommunalité et, parfois, je le répète, de vice-président ou président d’un syndicat ou d’autres organismes intercommunaux – parc naturel régional, syndicat mixte d’aménagement, et j’en passe.

Le Gouvernement doit véritablement se pencher sur cette question pour fixer un plafond des indemnités en fonction de la complémentarité des mandats. C’est ainsi que l’on répondra aux préoccupations de nos concitoyens. En effet, il s’agit d’argent public.

Le Sénat a montré l’exemple au travers de ses différents amendements visant à ne pas cumuler les indemnités. Il s'agit d’une réelle volonté d’assumer deux mandats. Il faudra décliner cette position pour les structures intercommunales. Cette question mérite donc une réflexion approfondie.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. Je vous remercie, monsieur le ministre, d’avoir rappelé le calendrier précis de ce projet de loi.

Le Gouvernement a transmis le texte au Sénat le 4 juillet dernier ; cette précision m’avait d’ailleurs été apportée par le Premier ministre en personne. Dès lors, pourquoi avoir attendu le 24 juillet, soit la veille de la fin de la session extraordinaire, pour désigner un rapporteur ? Nous connaissons tous la réponse – point n’est besoin d’en dire davantage… Je le dis sans emphase aucune, ce choix politique n’est pas d’un très haut niveau.

Pour ma part, je ne voterai pas l’amendement n° 7 rectifié, car le champ d’application de la mesure proposée est bien trop large.

Concernant le cumul du mandat de maire avec la fonction de président d’une intercommunalité, on ne peut pas dire à la fois qu’un parlementaire ne peut être adjoint au maire d’une commune de 30 habitants et considérer qu’un maire peut être président d’une intercommunalité importante – j’ai souvent cité l’exemple des métropoles et des communautés urbaines. C’est une évidence.

Pour ce qui me concerne, je préside une agglomération. Si j’étais en même temps maire de la ville-centre, cela me donnerait, je le sais, deux fois plus de travail. Il faut donc que vous teniez un discours logique et cohérent.

Vous nous objectez que cette question devra être réexaminée ultérieurement parce qu’elle mérite réflexion. Mais c’est tout réfléchi ! On sait parfaitement que vous ne la traiterez pas, pour des raisons que l’on connaît tous !

Pourtant, il importe de poser ce débat et de dire les choses. Tel est aussi l’objet de cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 10.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n'adopte pas l'amendement.)

M. le président. L'amendement n° 11, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l'article L. 46-2 du code électoral, il est inséré un article L. 46-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 46-3 - Le mandat de maire, de président d'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, de président de conseil départemental, de président de conseil régional, de président de l'assemblée de Corse, de président de l'assemblée de Guyane et de président de l'assemblée de Martinique est incompatible avec les fonctions ci-après énumérées : président ou vice-président du conseil d'administration d'un établissement public local à l'exception du centre communal ou intercommunal d'action sociale, du centre national de la fonction publique territoriale, d'un centre départemental ou interdépartemental de gestion de la fonction publique territoriale, du conseil d'administration ou du conseil de surveillance d'une société d'économie mixte locale. »

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. La cohérence du projet de loi aurait dû imposer d’aller au bout de la logique qui le sous-tend en s’attaquant à la question cruciale, pour la démocratie locale, du cumul horizontal.

Au travers de cet amendement, nous proposons que le mandat de maire, de président d’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, de président de conseil départemental, de président de conseil régional soit incompatible avec les fonctions de président ou vice-président du conseil d’administration d’un établissement public local à l’exception – nous connaissons la réalité du travail de terrain – du centre communal ou intercommunal d’action sociale, du centre national de la fonction publique territoriale, d’un centre départemental ou interdépartemental de gestion de la fonction publique territoriale, du conseil d’administration ou du conseil de surveillance d’une société d’économie mixte locale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 11.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 5 rectifié, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

I. – Le premier alinéa de l’article L. 3122-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 3122-3. – Les fonctions de président d’un conseil général et de vice-président d’un conseil général sont incompatibles avec les fonctions suivantes : président d’un conseil régional, vice-président d’un conseil régional, maire, président d’un établissement public de coopération intercommunale, vice-président d’un établissement public de coopération intercommunale. »

II. – Le premier alinéa de l’article L. 4133-3 est ainsi rédigé :

« Art. L. 4133-3. – Les fonctions de président d’un conseil régional ou de vice-président d’un conseil régional sont incompatibles avec les fonctions suivantes : président d’un conseil général, vice-président d’un conseil général, maire, président d’un établissement public de coopération intercommunale, vice-président d’un établissement public de coopération intercommunale. »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Cet amendement vise à insérer, avant l’article 1er du projet de loi, un article additionnel rendant impossible le cumul d’une fonction exécutive dans un conseil général ou dans un conseil régional avec une autre fonction exécutive au sein d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public de coopération intercommunale. En effet, de tels cumuls posent des problèmes évidents de répartition des pouvoirs et des compétences.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. La commission demande le retrait de cet amendement ; s’il est maintenu, elle y sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Madame Lipietz, l'amendement n° 5 rectifié est-il maintenu ?

Mme Hélène Lipietz. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 5 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 8 rectifié, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le cinquième alinéa de l’article L. 5211-10 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les fonctions de président de la métropole et de membre du bureau sont incompatibles avec les fonctions suivantes : président d’un conseil régional, président d’un conseil général, vice-président d’un conseil général, vice-président d’un conseil régional. »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Les fonctions de président et de membre du bureau d’une métropole, qui concentre de nombreuses compétences, doivent être rendues incompatibles avec toute autre fonction exécutive au sein d’un conseil régional ou d’un conseil général.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable également.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 8 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 9 rectifié, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 5215-10 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 5215-11 ainsi rédigé :

« Art. L. 5215-11. – Les fonctions de président et de membre du bureau sont incompatibles avec les fonctions suivantes : président d’un conseil régional, président d’un conseil général, vice-président d’un conseil général, vice-président d’un conseil régional. »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Cet amendement vise les mêmes incompatibilités que le précédent s’agissant des fonctions de président et de membre du bureau d’une communauté urbaine.

Mes chers collègues, je vous signale que cette série d’amendements illustre toute la complexité de l’empilement des fonctions locales dans notre pays !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable également.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 12, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social européen, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 231 du code électoral est ainsi modifié :

I. – Au deuxième alinéa, les mots : « de six mois » sont remplacés par les mots : « d’un an ».

II. – Le dixième alinéa est ainsi rédigé :

« 8° Les personnes exerçant, au sein du conseil régional, du conseil départemental, de la collectivité territoriale de Corse, de Guyane ou de Martinique, d’un établissement public de coopération intercommunale ou de leurs établissements publics, les fonctions de directeur général des services, directeur général adjoint des services, directeur des services, directeur adjoint des services ou chef de service, ainsi que les fonctions de membres du cabinet du président, du président de l’assemblée, du président du conseil exécutif, du maire ou du président d’un établissement public de coopération intercommunale ; ».

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Les dispositions de cet amendement, importantes à nos yeux, ont déjà été adoptées par le Sénat le 14 mars dernier, sur notre initiative, dans la discussion du projet de loi relatif à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers intercommunaux, et modifiant le calendrier électoral.

Nous considérons qu’une véritable modernisation de notre démocratie suppose de traiter aussi la question de l’égalité d’accès aux fonctions électives.

C’est pourquoi nous souhaitons étendre aux collaborateurs de cabinet des exécutifs locaux les règles d’inéligibilité aux élections locales dans le ressort où ils travaillent ou ont travaillé. Cette mesure nous paraît tout à fait essentielle, dans la mesure où, en pareils cas, il n’y a pas d’égalité entre les candidats.

Dans ces conditions, il nous paraît tout à fait raisonnable d’allonger le délai d’inéligibilité de six mois à un an pour les collaborateurs de cabinet des exécutifs locaux et pour les cadres de l’administration territoriale – je vous rappelle que, pour les préfets, ce délai est de trois ans. C’est même la moindre des choses, et du reste le Sénat a déjà adopté cette mesure. Nous souhaitons qu’il confirme sa position.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Cet amendement vise à créer de nouvelles inéligibilités aux élections locales. Indépendamment des réserves qu’il m’inspire sur le fond, je considère que des mesures relatives à des inéligibilités, et non à des incompatibilités, n’ont pas leur place dans ce projet de loi.

La commission des lois a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Trois arguments peuvent être opposés aux auteurs de cet amendement.

Premièrement, cette disposition, comme d’autres qui sont présentées aujourd'hui, déborde le périmètre du projet de loi présenté par le Gouvernement.

Deuxièmement, ce débat a déjà eu lieu ; je vous rappelle, monsieur Mézard, que l’Assemblée nationale, qui avait une position différente de celle du Sénat, a adopté le projet de loi dont vous avez parlé en lecture définitive au mois d’avril dernier.

Troisièmement, à supposer que nous allongions de six mois à un an le délai d’inéligibilité, comme nous sommes à moins d’un an des élections municipales, nous serions dans une configuration singulière. On ne change pas les chevaux au milieu du gué !

Monsieur Mézard, ce dernier argument, même s’il n’est que de circonstance, suffirait à justifier que vous retiriez votre amendement ; si vous le maintenez, le Gouvernement y sera défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 12.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.

L'amendement n° 13, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 46 du code électoral, il est inséré un article L. 46-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 46-1-… – Les fonctions de membre d’un cabinet ministériel sont incompatibles avec les mandats qui font l’objet des titres III et IV du livre I. »

II. – À l’article L. 342 du même code, les mots : « à l’article L. 46 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 46 et L. 46-1-… ».

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Cet amendement a lui aussi une forte signification ; son adoption me paraît tout à fait indispensable pour notre vie politique. Il a pour objet d’interdire à tout membre d’un cabinet ministériel d’exercer un mandat électif local, de quelque nature qu’il soit.

En effet, au vu de l’évolution des choses, l’exercice d’un mandat issu du suffrage universel ne nous paraît pas compatible avec l’exercice de fonctions qui placent nécessairement leurs titulaires, quelque respectables et compétentes que soient les personnes, dans une position avantagée, compte tenu de l’importance de leurs responsabilités.

Mes chers collègues, nous connaissons tous des exemples de maires, parfois de villes importantes, qui appartiennent à des cabinets ministériels. Ce sont des personnes de qualité, mais, de fait, leur cumul de fonctions pose un certain nombre de problèmes.

Certains orateurs ont affirmé que les parlementaires devaient représenter la nation, et pas leur territoire – ce dont on peut douter en ce qui concerne les sénateurs. Dans ces conditions, quand le maire d’une ville, souvent importante, est en même temps membre d’un cabinet ministériel, on se demande s’il n’y a pas des errements tout à fait regrettables.

En tout cas, il est indiscutable que ces positions procurent des avantages considérables, quels que soient le Gouvernement et la sensibilité des personnes concernées.

Monsieur le ministre, puisque vous voulez moderniser, modernisons ! (Sourires sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Cet amendement vise à instaurer, pour les membres des cabinets ministériels, une inéligibilité à l’ensemble des élections locales. La commission des lois souscrit à la volonté d’interdire aux collaborateurs de membres du Gouvernement de se présenter à des élections locales. Aussi a-t-elle émis un avis favorable sur l’amendement n° 13.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Monsieur Mézard, nous avons déjà débattu de cette question, et je vous reconnais le mérite de la constance. Du reste, il est légitime de s’interroger sur ce point et vous avez le soutien de la commission des lois.

Néanmoins, j’ai du mal à comprendre la cohérence de votre position. De fait, on peut jouer à fronts renversés : alors que vous arriviez progressivement à convaincre le Sénat que c’est du lien entre le terrain et les décideurs que tout dépend, voilà que, tout à coup, vous renversez complètement votre raisonnement et soutenez la position inverse !

Faute de bien vous comprendre, je ne peux qu’émettre un avis défavorable sur votre amendement.

M. le président. La parole est à M. François Rebsamen, pour explication de vote.

M. François Rebsamen. Je comprends bien l’intention de M. Mézard, ainsi que la position de la commission des lois.

Toutefois, mes chers collègues, je me permets de vous faire remarquer que les membres de cabinet ministériel sont souvent simples conseillers municipaux dans leur village ou dans leur petite commune, sans exercer de fonctions exécutives ; nous en connaissons tous des exemples. Faut-il vraiment le leur interdire ?

Si nous examinions l’histoire de nos communes, nous constaterions que nombre d’entre elles ont eu, parmi leurs conseillers municipaux, des membres de cabinet ministériel. Souvent, du reste, ils ont répondu à une demande du maire, qui sollicitait leurs connaissances ; il s’agissait de rendre service dans la petite commune où ils habitaient.

M. Éric Doligé. C’est un marchepied pour devenir sénateur !

M. François Rebsamen. Dès lors, si je peux comprendre une interdiction portant sur les fonctions exécutives, je trouve que la mesure proposée évoque, sinon la section des piques, du moins la commission de la hache !

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

M. Yves Détraigne. Je désire obtenir une précision : alors que l’amendement tend à instaurer une incompatibilité, M. le rapporteur a employé le terme d’inéligibilité. Or ces deux notions ne sont pas tout à fait équivalentes.

En effet, une incompatibilité n’interdirait pas au membre d’un cabinet ministériel de se présenter à une élection locale ; seulement, en cas d’élection, il devrait choisir. En revanche, une inéligibilité l’empêcherait de se présenter. (Mme Corinne Bouchoux acquiesce.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.

M. Jacques Mézard. J’accepte volontiers que l’amendement n° 13 soit rectifié de sorte qu’il vise seulement les fonctions exécutives locales. Qu’un membre de cabinet ministériel soit conseiller municipal d’une petite commune, ma foi, si cela peut lui donner une idée du terrain… Il y en a à qui cela ferait beaucoup de bien ! (Sourires.)

M. Jacques Mézard. D’ailleurs, cette situation s’accorderait tout à fait avec les principes que je défends constamment.

En revanche, monsieur le ministre, je ne peux pas vous suivre lorsque vous comparez la situation d’un membre de cabinet ministériel avec celle d’un parlementaire.

En effet, lorsqu’il s’agit de débloquer un dossier ou d’attirer l’attention du Gouvernement sur une question, nous connaissons malheureusement le peu de considération que le pouvoir exécutif – pour ne pas dire les princes qui nous gouvernent ! – accorde aux parlementaires que nous sommes, surtout lorsqu’ils sont dans l’opposition, ce qui a longtemps été mon cas, mais aussi lorsqu’ils sont dans la majorité d'ailleurs.

Au contraire, le membre d’un cabinet ministériel a directement la main sur le téléphone qu’il faut utiliser et sur les moyens nécessaires pour faire avancer les dossiers.

Cet amendement me paraît donc non seulement opportun, mais même tout à fait nécessaire ; son adoption découragera un certain nombre de mauvaises intentions.

M. le président. Je suis donc saisi d'un amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, et qui est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 46 du code électoral, il est inséré un article L. 46-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 46-1-… – Les fonctions de membre d’un cabinet ministériel sont incompatibles avec les fonctions exécutives qui font l’objet des titres III et IV du livre I. »

II. – À l’article L. 342 du même code, les mots : « à l’article L. 46 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 46 et L. 46-1-… ».

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. La restriction apportée au champ de cet amendement en modifie la nature et la portée. Après la rectification, le problème nous semble posé d’une manière raisonnable, même si le Gouvernement n’a pas préalablement arrêté de position.

Je m’en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Les interventions que je viens d’entendre, notamment celle de M. Rebsamen, ont fait évoluer ma position. Pour un membre de cabinet ministériel, je trouve qu’il est en effet intéressant et formateur d’être conseiller municipal dans une petite commune. Dans sa première version, l’amendement de M. Mézard était donc peut-être un peu sévère.

Du reste, les personnes que j’ai connues qui se sont trouvées dans cette situation, tout en apportant leur contribution au sein du conseil municipal, sont restées tout à fait neutres et objectives. Je pense que d’autres pourraient aussi témoigner que ces situations ne contreviennent pas à l’éthique et à la morale en politique, auxquelles nous sommes tous attachés.

Par ailleurs, la richesse des conseils municipaux repose sur la diversité de leur composition et des expériences, notamment professionnelles, de leurs membres.

Enfin, les communes qui ont un membre de cabinet au sein de leur conseil municipal ne seront pas forcément les mieux servies. Les cordonniers sont parfois les plus mal chaussés !

L’amendement n° 13 rectifié me semble donc excellent.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 13 rectifié.

Mme Éliane Assassi. Le groupe CRC s’abstient !

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.

L'amendement n° 14, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 46 du code électoral, il est inséré un article L. 46-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 46-1-… – Les fonctions de membre du cabinet du Président de la République sont incompatibles avec les mandats qui font l’objet des titres III et IV du livre I. »

II. – À l’article L. 342 du même code, les mots : « à l’article L. 46 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 46 et L. 46-1-… ».

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Nous y allons crescendo ! Par cet amendement, nous visons les membres du cabinet du Président de la République, qui se verront interdits d’exercer un mandat électif local.

Vous l’avez tous compris, mes chers collègues, il ne s’agit pas d’un amendement ad hominem. Je ne voudrais surtout pas qu’il soit interprété en ce sens, certaines des personnes concernées étant d’excellents élus, compétents, qui ne devraient pas, du moins je l’espère, se sentir visés.

Parce que c’est juste et logique, je suis prêt à rectifier cet amendement, comme je l’ai fait pour l’amendement n° 13.

L’adoption de cette disposition permettrait de renouveler les élus lors des élections municipales, en tout cas après 2017, ce qui serait une excellente chose. En effet, quand on est près de l’Olympe (Sourires.), on a, surtout dans le cadre de la Ve République, pratiquement tous les pouvoirs. Si on est maire d’une commune ou président de conseil général et qu’on se retrouve « là-haut », on peut pratiquement tout faire. La rupture de l’égalité est alors tout à fait évidente.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 14 rectifié, présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, et qui est ainsi libellé :

Avant l’article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article L. 46 du code électoral, il est inséré un article L. 46-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 46-1-… – Les fonctions de membre du cabinet du Président de la République sont incompatibles avec les fonctions exécutives qui font l’objet des titres III et IV du livre I. »

II. – À l’article L. 342 du même code, les mots : « à l’article L. 46 » sont remplacés par les mots : « aux articles L. 46 et L. 46-1-… ».

Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Sagesse.

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

M. Philippe Bas. Pour avoir bien connu de nombreux collaborateurs de Présidents de la République, je veux ici en témoigner, le fait d’être élu maire de leur commune n’aurait fait aucun tort à la majorité d’entre eux. Au contraire, je crois que la qualité des avis qu’ils donnaient au chef de l’État aurait ainsi pu s’améliorer. (Sourires.)

On se place ici uniquement du point de vue de la commune, en imaginant que ces hommes et ces femmes ont beaucoup de pouvoir et peuvent ainsi impressionner les électeurs et se faire élire plus facilement, tandis que les pauvres citoyens de la commune de Saint-Martin dans le pays de Bray, par exemple, sont pénalisés dans la compétition électorale.

Or ce n’est pas si sûr ! J’ai remarqué que, parmi les collaborateurs du Président de la République, on rencontrait beaucoup d’énarques. Or, très souvent, nos concitoyens ont une certaine méfiance à leur égard, lorsqu’ils se présentent aux élections. (Nouveaux sourires.)

Ne croyez pas que leur parcours leur procure forcément un avantage ! Il faut savoir aussi montrer d’autres qualités, avant de pouvoir faire valoir les quelques compétences qu’ils ont peut-être acquises au cours d’une formation à l’ENA et d’une expérience professionnelle.

Face à l’amendement qui nous est proposé, j’ai deux analyses. D’un côté, si nous voulons que le Président de la République soit bien servi, entouré d’un certain nombre de collaborateurs également maires ou conseillers généraux, il ne faut pas adopter cet amendement. De l’autre, si l’on souhaite intégrer dans nos communes et nos conseils généraux des personnalités formées au service de l’État, dans une grande école républicaine à laquelle on accède par concours, l’adoption d’une telle disposition pourrait être négative.

C’est la raison pour laquelle je ne peux pas, en ce qui me concerne, me résoudre à voter cet amendement, malgré toutes les qualités que je lui trouve par ailleurs.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 14 rectifié.

Mme Éliane Assassi. Le groupe CRC s’abstient !

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.

Je suis saisi de deux amendements identiques.

L'amendement n° 6 rectifié est présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé.

L'amendement n° 15 est présenté par MM. Mézard, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Avant l'article 1er

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du II de l’article L. 2123-20, du premier alinéa des articles L. 3123-18 et L. 4135-18 et de l'avant-dernier alinéa de l’article L. 5211-12 du code général des collectivités territoriales, les mots : « à une fois et demie le » sont remplacés par le mot : « au ».

La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour présenter l'amendement n° 6 rectifié.

Mme Hélène Lipietz. Cet amendement tend à s’inscrire dans la droite ligne de celui, adopté ce matin, qui était relatif à l’écrêtement de la rémunération des parlementaires au niveau de l’indemnité parlementaire.

Ici, il s’agit d’écrêter la rémunération de tous les élus au niveau de l’indemnité parlementaire. En effet, il n’est pas acceptable d’encourager au cumul des mandats des élus locaux, en permettant le cumul des rémunérations, lesquelles ne doivent pas dépasser l’indemnité parlementaire.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 15.

M. Jacques Mézard. Non, ce n’est pas la nuit du 4 août : c’est la soirée du 19 septembre ! (Sourires.)

Nous proposons également cette mesure juste, équitable et cohérente. On ne peut pas prendre des dispositions visant uniquement les parlementaires et permettre, dans le cadre des cumuls horizontaux, dont nous avons condamné la multiplication, le cumul des indemnités.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Éric Doligé a accepté hier de retirer un amendement semblable, après que je lui ai indiqué que ces deux amendements identiques, qui satisfaisaient ses desiderata, avaient reçu un avis favorable de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Sagesse.

M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.

M. Éric Doligé. Monsieur le rapporteur, je ne trouve pas que ces amendements identiques soient mieux rédigés que le mien, qui était très compréhensible ! (Sourires.)

Je m’apprête néanmoins à voter ces deux amendements identiques, ne serait-ce que pour faire plaisir à Mme Lipietz ! (Nouveaux sourires.)

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Mes chers collègues, permettez-moi de vous lire l’intitulé d’une rubrique du Figaro en ligne, parue voilà dix-huit minutes : « Non-cumul des mandats : les sénateurs adoptent le texte en s’excluant du dispositif ».

Véritablement, il s’agit d’une interprétation erronée,…

M. René-Paul Savary. … puisque nous avons proposé une règle bien précise de cumul – un mandat accompagné d’une fonction –, en nous excluant du cumul des indemnités.

Ainsi, ces amendements identiques, qui visent à prendre en compte les indemnités de l’ensemble des élus, doivent, par cohérence, être soutenus. Il me semble que nous montrons là l’exemple.

C’est véritablement ne pas être ringard que de soutenir cette proposition ! Il s’agit d’un élan de modernité, témoignant d’un souci de la dépense publique. Le mandat parlementaire devient pratiquement une vocation, puisque l’on accomplit deux mandats pour le prix d’un ! Cette théorie peut être déclinée sur le plan local.

C’est la raison pour laquelle, par cohérence, nous devons soutenir ces amendements identiques.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 6 rectifié et 15.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er.

Articles additionnels avant l'article 1er
Dossier législatif : projet de loi interdisant le cumul de fonctions exécutives locales avec le mandat de représentant au Parlement européen
Article 1er bis (nouveau)

Article 1er

L’article 6-3 de la loi n° 77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen est ainsi rédigé :

« Art. 6-3. – I. – Le mandat de représentant au Parlement européen est incompatible avec l’exercice de plus d’un des mandats électoraux énumérés ci-après : conseiller régional, conseiller à l’assemblée de Corse, conseiller départemental, conseiller de Paris, conseiller à l’assemblée de Guyane, conseiller à l’assemblée de Martinique, conseiller municipal d’une commune soumise au mode de scrutin prévu au chapitre III du titre IV du livre Ier du code électoral.

« Le représentant au Parlement européen qui se trouve dans un des cas d’incompatibilité mentionnés au premier alinéa est tenu de faire cesser cette incompatibilité en démissionnant d’un des mandats qu’il détenait antérieurement, au plus tard le trentième jour qui suit la date de la proclamation des résultats de l’élection qui l’a mis en situation d’incompatibilité ou, en cas de contestation, la date à laquelle le jugement confirmant cette élection est devenu définitif. En cas d’élections acquises le même jour, le représentant au Parlement européen est tenu, dans les mêmes conditions, de faire cesser l’incompatibilité en démissionnant du mandat acquis dans la circonscription comptant le moins grand nombre d’habitants.

« À défaut, le mandat acquis ou renouvelé à la date la plus ancienne prend fin de plein droit. En cas d’élections acquises le même jour, le mandat qui prend fin de plein droit est celui acquis dans la circonscription comptant le moins grand nombre d’habitants.

« Tant qu’il n’est pas mis fin, dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas du présent I, à l’incompatibilité mentionnée au premier alinéa, l’élu concerné ne perçoit que l’indemnité attachée à son mandat de représentant au Parlement européen et l’indemnité attachée à un autre de ses mandats de son choix.

« II. – Le mandat de représentant au Parlement européen est incompatible avec les fonctions mentionnées aux articles L.O. 141-1 et L.O. 147-1 du code électoral.

« Le représentant au Parlement européen qui se trouve dans un des cas d’incompatibilité mentionnés aux mêmes articles L.O. 141-1 et L.O. 147-1 est tenu de faire cesser cette incompatibilité en démissionnant du mandat ou de la fonction qu’il détenait antérieurement, au plus tard le trentième jour qui suit la date de la proclamation des résultats de l’élection qui l’a mis en situation d’incompatibilité ou, en cas de contestation, la date à laquelle le jugement confirmant cette élection est devenu définitif. En cas d’élections acquises le même jour, le représentant au Parlement européen est tenu, dans les mêmes conditions, de faire cesser l’incompatibilité en démissionnant du mandat ou de la fonction acquis dans la circonscription comptant le moins grand nombre d’habitants.

« À défaut, le mandat ou la fonction acquis à la date la plus ancienne prend fin de plein droit. En cas d’élections acquises le même jour, le mandat ou la fonction qui prend fin de plein droit est celui ou celle acquis dans la circonscription comptant le moins grand nombre d’habitants.

« Tant qu’il n’est pas mis fin, dans les conditions prévues aux deuxième et troisième alinéas du présent II, à l’incompatibilité mentionnée au premier alinéa, l’élu concerné ne perçoit que l’indemnité attachée à son mandat de représentant au Parlement européen. »

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 17, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

« III. – Un parlementaire européen ne peut exercer plus de deux mandats successifs. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cette disposition, qui vise à lutter contre le cumul des mandats dans le temps, reprend les termes d’un précédent amendement déposé sur le projet de loi organique.

Je ne reviens donc pas sur l’explication que j’avais développée à ce moment-là.

M. le président. L'amendement n° 3, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. - Un parlementaire européen ne peut exercer plus de trois mandats successifs. »

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Je suis plus généreuse, puisque je prévois au maximum trois mandats. (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Ces deux amendements identiques visent à limiter les mandats successifs dans le temps.

L’amendement n° 17 tend à limiter à deux mandats successifs le nombre de mandats en tant que représentant au Parlement européen.

L’amendement n° 3 vise à reprendre le même principe en permettant néanmoins l’exercice de trois mandats successifs.

La limitation du cumul des mandats dans le temps soulève des réserves sur le plan constitutionnel, qui ont conduit l’Assemblée nationale à supprimer, en séance publique, une disposition similaire adoptée en commission des lois contre l’avis du rapporteur et du Gouvernement.

En effet, dans sa décision du 18 novembre 1982, le Conseil constitutionnel a estimé que « la qualité de citoyen ouvre le droit de vote et d’éligibilité dans des conditions identiques à tous ceux qui n’en sont pas exclus pour une raison d’âge, d’incapacité ou de nationalité, ou pour une raison tendant à préserver la liberté de l’électeur ou l’indépendance de l’élu ».

Il convient de relever que la limitation du cumul des mandats dans le temps crée non pas une incompatibilité, qui peut être résolue après l’élection, mais une inéligibilité, qui empêche un élu sortant de déposer sa candidature. La jurisprudence constitutionnelle est donc plus stricte pour encadrer la liberté du législateur dans la fixation des règles afférentes.

Il ressort de la décision précitée que, si l’on excepte les critères liés à l’âge, à l’incapacité ou à la nationalité, qui ne sont pas en cause dans le cas présent, seule une décision fondée sur la préservation de la liberté de l’électeur ou l’indépendance de l’élu peut justifier une inéligibilité.

Or, même si d’aucuns jugent souhaitable une telle évolution, elle ne me semble pas disposer d’un fondement constitutionnel suffisant, car elle n’est pas véritablement de nature à préserver la liberté de l’électeur ou l’indépendance de l’élu.

Sur ce point, la récente décision du 18 juillet 2013 du Conseil constitutionnel, qui a refusé de se prononcer sur une disposition similaire relative aux conseillers consulaires et aux conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger, semble indiquer que la jurisprudence, en la matière, n’a pas été modifiée.

Pour ces raisons, la commission sollicite donc le retrait de ces amendements. À défaut, elle se verra contrainte d’émettre un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Sur la question de la limitation des mandats dans le temps, nous avons eu, M. le rapporteur vient de le rappeler, un long débat à l’Assemblée nationale. Je rappelle pour mémoire qu’un texte en ce sens avait été voté en commission. Il avait plus tard été rejeté, à la suite d’un débat mené dans l’hémicycle.

Au regard des raisons évoquées à l’instant, qui sont d’ordre constitutionnel, mais aussi pour des raisons de fond, le Gouvernement, qui soutenait le texte que vous avez rejeté, mesdames, messieurs les sénateurs, estime que l’adoption d’une telle disposition soulèverait un problème de cohérence. Il lui semble en effet que la limitation dans le temps ne présente pas, finalement, tant d’avantages que l’on puisse aujourd’hui se priver des expériences acquises, notamment dans un souci d’équilibre des pouvoirs.

Au demeurant, c’est un sujet qui reste naturellement posé. Le Gouvernement, qui s’efforce d’avoir une position unique et cohérente, n’est pas favorable, en l’état, au principe de la limitation dans le temps des mandats.

Pour cette raison, j’émets donc un avis défavorable sur ces amendements.

Mme la présidente. Madame Assassi, l’amendement n° 17 est-il maintenu ?

Mme Éliane Assassi. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Madame Lipietz, l’amendement n° 3 est-il maintenu ?

Mme Hélène Lipietz. Oui, je le maintiens, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 17.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Supprimer les mots :

de plus

et les mots :

, conseiller municipal d’une commune soumise au mode de scrutin prévu au chapitre III du titre IV du livre Ier du code électoral

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Cet amendement de repli vise à limiter le nombre de mandats des parlementaires européens, dans la mesure où il s’agit de mandats à temps plein.

Seul serait possible le cumul avec un mandat de conseiller municipal.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Cette disposition nécessite un éclairage un peu plus précis.

Elle vise en réalité à supprimer le seuil démographique de 1 000 habitants, qui exclut du champ de l’incompatibilité, pour le mandat de député européen, les communes ayant une population inférieure à ce seuil.

Ce seuil existe pour les parlementaires nationaux à l’article L.O. 141 du code électoral. Par souci de cohérence et d’égalité entre députés européens et parlementaires nationaux, la commission propose de ne pas revenir sur cette modification introduite par l’Assemblée nationale et émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après les mots :

l’indemnité attachée à un autre de ses mandats

insérer les mots :

non incompatible

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. La situation du parlementaire européen qui vient d’être élu à un nouveau mandat local et se trouve, de ce fait, en situation de cumul soulève une difficulté dès lors que son élection est remise en cause. En effet, en cas d’annulation, il ne sera plus en situation de cumul, puisque l’annulation prend effet ab initio.

Par conséquent, nous proposons de limiter le cumul des rémunérations versées au bénéfice des représentants au Parlement européen, lorsque l’élection de ces derniers à un mandat local a fait l’objet d’un recours ou lorsqu’ils n’ont pas encore démissionné de leur mandat incompatible, afin d’éviter qu’ils ne restent en situation de cumul pendant la durée du recours.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Cet amendement est satisfait, comme je l’ai indiqué à Mme Lipietz lors des deux dernières réunions de notre commission.

En effet, le dernier alinéa de l’article 1er du projet de loi dispose que « tant qu’il n’est pas mis fin […] à l’incompatibilité mentionnée au premier alinéa, l’élu concerné ne perçoit que l’indemnité attachée à son mandat de représentant au Parlement européen ».

La commission demande donc le retrait de cet amendement, sans quoi elle émettra un avis défavorable.

M. le président. Madame Lipietz, l’amendement n° 2 est-il maintenu ?

Mme Hélène Lipietz. Je le retire, monsieur le président. Je m’étais en effet engagée auprès de M. le rapporteur à le retirer avant la séance et je le prie de m’excuser de cet oubli.

M. le président. L’amendement n° 2 est retiré.

Je mets aux voix l’article 1er.

(L’article 1er est adopté.)

Article 1er
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Article 2

Article 1er bis (nouveau)

Au cinquième alinéa de l’article 24 de la même loi, les mots : « ou la prolongation de missions mentionnées aux articles L.O. 176 et L.O. 319 du code électoral et autres que des fonctions gouvernementales peut, lorsque ces fonctions ou missions » sont remplacés par les mots : « de membre du Conseil constitutionnel ou de Défenseur des droits ou la prolongation au-delà de six mois d’une mission temporaire confiée par le Gouvernement peut, lorsque ces fonctions ou cette mission ». – (Adopté.)

Article 1er bis (nouveau)
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Article 2 bis (nouveau)

Article 2

L’article L. 46-2 du code électoral est abrogé. – (Adopté.)

Article 2
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Article 3

Article 2 bis (nouveau)

La présente loi est applicable sur l’ensemble du territoire de la République. – (Adopté.)

Article 2 bis (nouveau)
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Intitulé du projet de loi

Article 3

La présente loi entre en vigueur à compter du premier renouvellement du Parlement européen suivant le 31 mars 2017.

M. le président. L’amendement n° 4, présenté par Mmes Lipietz, Aïchi, Ango Ela, Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Desessard, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :

Remplacer la date :

le 31 mars 2017

par les mots :

sa promulgation

La parole est à Mme Hélène Lipietz.

Mme Hélène Lipietz. Nous proposons que le présent projet de loi entre en vigueur dès sa promulgation, c’est-à-dire, compte tenu du calendrier électoral, dès les élections européennes de 2014.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Les auteurs de cet amendement proposent que la présente loi entre en vigueur dès sa promulgation. La commission émet un avis défavorable, puisqu’elle soutient, sur ce point, la position du Gouvernement, à savoir une entrée en vigueur à partir de 2017.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 3.

(L’article 3 est adopté.)

Article 3
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Explications de vote sur l'ensemble (début)

Intitulé du projet de loi

M. le président. L’amendement n° 16, présenté par M. Mézard et les membres du groupe du Rassemblement démocratique et social européen, est ainsi libellé :

Compléter cet intitulé par les mots :

et visant à renforcer l’encadrement du cumul des fonctions exécutives locales

La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Cet amendement est similaire à un amendement que le Sénat a adopté lors de la discussion du projet de loi organique. Pour la cohérence des deux textes, il est nécessaire de modifier l’intitulé du présent projet de loi en le complétant par les termes : « et visant à renforcer l’encadrement du cumul des fonctions exécutives locales ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Simon Sutour, rapporteur. Les amendements qui auraient pu justifier un changement de l’intitulé de ce projet de loi ont tous été rejetés, en commission comme en séance publique. Dans un souci de cohérence, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 16.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Vote sur l’ensemble

Intitulé du projet de loi
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Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à Mme Hélène Lipietz, pour explication de vote.

Mme Hélène Lipietz. Je voudrais exposer la raison pour laquelle mon groupe politique s’abstiendra de voter en faveur de ce texte, quand bien même certains amendements que j’ai présentés ont été adoptés – et j’en remercie mes collègues.

En effet, nous ne pouvons pas voter en faveur d’un texte qui allonge exagérément le délai pendant lequel nos collaborateurs se voient interdire la possibilité de se présenter à une élection. On nous dit que les élus doivent être proches du terrain, mais nos collaborateurs ne sont pas « hors sol », ils sont présents sur le sol sinon de cet hémicycle, du moins à proximité ! L’allongement de leur délai d’inéligibilité à un an nous paraît extrêmement grave.

C’est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons de voter en faveur de ce texte qui, par ailleurs, nous paraît en l’état très en deçà de ce que nous aurions souhaité, même s’il va dans la bonne direction.

M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.

(Le projet de loi est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Monsieur le président, je souhaitais simplement annoncer à M. le ministre que la commission des lois se réunira immédiatement après la séance afin de poursuivre l’examen du rapport de notre collègue René Vandierendonck sur le projet de loi relatif aux métropoles.

Explications de vote sur l'ensemble (début)
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11

Clôture de la session extraordinaire

M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je constate que le Sénat a épuisé son ordre du jour pour la session extraordinaire.

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le Président de la République portant clôture de la troisième session extraordinaire du Parlement pour l’année 2012-2013.

En conséquence, il est pris acte de la clôture de la session extraordinaire.

12

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 1er octobre 2013 :

À neuf heures trente :

1. Ouverture de la session ordinaire 2013-2014.

2. Questions orales.

(Le texte des questions figure en annexe.)

À quatorze heures trente et le soir ;

3. Projet de loi et projet de loi organique, adoptés par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatifs à l’indépendance de l’audiovisuel public (nos 816 et 815, 2012-2013) ;

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures quarante.)

Le Directeur du Compte rendu intégral

FRANÇOISE WIART