M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous avez donné l’exemple !

M. Philippe Bas. Nous désapprouvons également le manque de réflexion sur une réforme structurelle de l’assurance maladie, qui serait pourtant bien nécessaire, notamment pour combattre les déserts médicaux.

Nous ne saurions non plus approuver le démantèlement méthodique de notre politique familiale, qui concerne à la fois le quotient familial et les prestations. Je citerai, à titre d’exemple, la mesure proposée en vue de fiscaliser les avantages familiaux de retraite. Pour nous, elle est inacceptable, car les parents de familles nombreuses n’ont pas les mêmes moyens que les autres pour se constituer un patrimoine alors même que leurs enfants vont contribuer à la retraite de tous. C’est une mesure de justice que vous avez remise en cause, ce qui nous paraît un véritable franchissement de ligne rouge.

Je relève aussi un certain nombre d’insuffisances graves. Dans le secteur médico-social, je n’ai jamais vu de chiffres aussi bas. Pourtant, les besoins de nos personnes handicapées et de nos personnes âgées, ce qui nous ramène à la dépendance, sont souvent criants. Les finances de nos départements, aujourd’hui exsangues, ne peuvent pas compenser le déclin de l’effort de la puissance publique sur le financement médico-social. Être passé, comme vous le faites pour 2014, à un ONDAM médico-social de 2,9 % dans le secteur personnes âgées et de 3,1 % dans le secteur personnes handicapées, ce n’est tout simplement pas bien. Si l’UNIOPSS l’a dénoncé avec tant de vigueur, ce n’est pas sans raison ! Vous auriez intérêt à revoir en toute conscience cet aspect de votre texte.

J’en viens enfin, et ce n’est pas un aspect secondaire, à la question de la loyauté vis-à-vis des Français. Pour ma part, je crois vraiment que la dimension morale doit être prise en compte.

D’abord, vous nous aviez annoncé l’année dernière, vous et le Président de la République, que les prélèvements obligatoires n’augmenteraient plus. Or ils augmentent !

Ensuite, non contents de prononcer la taxation rétroactive de l’épargne, vous réalisez un tour de passe-passe sur la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie : vous demandez aux Français retraités de l’argent pour l’autonomie, argent que vous reversez au Fonds de solidarité vieillesse, qui doit être financé par l’impôt, pour payer des cotisations de retraite des chômeurs. C’est tout bonnement scandaleux ! Vous devez l’entendre, car c’est ce qui se dit sur le terrain. Les Français ne peuvent pas l’admettre !

Après avoir évoqué la fiscalisation des avantages familiaux de retraite, je parlerai du forfait social, qui sera augmenté si les recommandations sur le choix d’un assureur complémentaire dans le cadre d’un accord de travail ne sont pas respectées. Cette mesure, qui bafoue une décision du Conseil constitutionnel, n’est pas acceptable.

Monsieur le ministre, madame la ministre, malgré toute la bonne volonté du monde et au nom de l’amour que je porte à notre sécurité sociale, je considère que ce texte, qui ne fait pas un grand tort à notre sécurité sociale, comporte des mesures totalement inacceptables. Je le répète, nous sommes en désaccord sur l’augmentation des prélèvements obligatoires et sur un certain nombre de vos choix ou de vos non-choix. Nous portons donc une appréciation très négative sur votre texte, insuffisant pour répondre à de vrais besoins. Nous pensons également que vous manquez de loyauté à l’égard des Français en proposant un certain nombre de dispositions qui relèvent de véritables tours de passe-passe ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi avant tout de saluer la qualité du travail de l’ensemble des rapporteurs, en particulier l’investissement de M. le rapporteur général, Yves Daudigny. Je voudrais lui adresser un remerciement particulier, ainsi qu’au rapporteur pour avis Jean-Pierre Caffet, pour avoir rappelé que la priorité de ce texte est la consolidation de la solidarité nationale et le redressement durable de nos comptes.

Sur les travées de l’opposition, j’entends – à l’instant M. Bas, précédemment MM. Milon et Cardoux – que nous ne faisons que demander des efforts et procéder à de nouveaux prélèvements, passant sous silence les 4 milliards d’euros d’économies, qui constituent une étape très significative dans le redressement de nos comptes sociaux.

Vos leçons de finances publiques ou de morale – pour reprendre le terme de M. Bas – eussent été plus convaincantes, si, au cours des dernières années, vous nous aviez montré le chemin !

M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Eh oui !

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous vous entendons dire à longueur de débat que vous avez été confrontés à la crise. Je vous rappelle que la crise n’a pas dominé l’ensemble des années 2000.

M. Philippe Bas. Notre manque de vertu autoriserait votre vice ?

Mme Marisol Touraine, ministre Vous avez gaspillé, comme aucun gouvernement, toutes les chances offertes par la croissance au cours des années 2000. On constate que le déficit de la sécurité sociale s’est accru à partir de 2003-2004, à une période où, de crise, il n’était pas question !

Il faut rappeler que l’effort engagé par ce gouvernement pour le rétablissement de nos comptes est très important. Il passe, comme l’ont rappelé M. le rapporteur général et de nombreux intervenants sur les travées de la majorité, par des économies significatives. D’ailleurs, M. Roche l’a lui-même reconnu, l’ONDAM est tenu et respecté, ce qui est le signe d’une politique volontariste.

M. Roland Courteau. Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. J’ai entendu les suggestions de M. Dassault. Je veux lui dire que la volonté du Gouvernement est de rétablir l’équilibre de nos comptes sociaux afin d’assurer la pérennité de notre protection sociale. Nous ne pourrons pas continuer à financer les besoins sociaux si ces derniers venaient à peser trop lourdement sur les entreprises et le coût du travail. Reste que nous affichons nos priorités et que nous ne renonçons pas à nos engagements.

Je salue à nouveau Mme Demontès, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse, dont le travail prolonge celui, intense, qu’elle a accompli à l’occasion de l’examen du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.

Madame Pasquet, nous avons la volonté commune de renforcer, de maintenir et de moderniser notre politique familiale. De ce point de vue, vous avez reconnu que nous prenions en compte l’évolution des attentes, notamment au travers de la création de places. Cependant, nous avons à résoudre la question des déficits, comme vous l’avez vous-même indiqué. Nous le faisons en demandant aux familles un effort mesuré, qui ne remet pas en question l’équilibre de la branche famille.

En revanche, nous avons un désaccord sur le financement de cette branche, qui, selon vous, devrait être exclusivement assuré par les revenus du travail. Nous considérons, pour notre part, que la politique familiale relève aussi de la solidarité nationale ; il n’est donc pas anormal que le budget de l’État y contribue.

Mme Meunier s’est inscrite dans cette perspective lorsqu’elle a souligné l’engagement du Gouvernement de redresser la branche famille en faisant appel à un effort mesuré de la part des familles les plus aisées.

Plusieurs intervenants ont traité de la branche AT-MP, avec des approches différentes.

Madame Alquier, vous avez souligné de façon très juste l’importance de cette branche, que l’on a tendance à sous-estimer. C’est en effet la plus petite, même s’il s’agit de la branche historique de la sécurité sociale. Vous avez indiqué que nous nous engagions dans la voie d’un équilibre dont vous avez souhaité, comme le Gouvernement, qu’il soit durable. Le rétablissement de cet équilibre est lié à la diminution du nombre d’accidents du travail, qui n’est pas simplement conjoncturelle. Nous avons bon espoir que cette baisse soit un phénomène structurel, qui nous permettra d’envisager l’avenir de façon positive.

Monsieur Godefroy, vous avez évoqué, tout comme M. Dériot, la question de la dotation du FIVA. Je tiens à souligner à cette occasion mon engagement, qui est aussi celui du Gouvernement, en faveur des victimes de l’amiante. Comme vous l’avez souligné, l’évolution des dépenses de ce fonds résulte avant tout d’un traitement plus rapide des demandes, que j’ai souhaité et dont je me réjouis.

Je comprends votre préoccupation concernant la participation de l’État. Je peux vous assurer que celui-ci ne se dérobera pas à ses responsabilités, si cette contribution s’avérait nécessaire. Il ne s’agit donc pas d’un retrait de la part de l’État, mais bien d’une juste appréciation de l’équilibre de cette branche.

Monsieur Labazée, vous avez indiqué que la préservation de l’ONDAM médico-social permettra de soutenir le secteur. Vous avez aussi évoqué les progrès réalisés dans le calendrier de la campagne tarifaire ; là encore, je m’en réjouis. Surtout, vous avez salué les perspectives ouvertes par la future réforme de l’autonomie, qui permettra des avancées fondamentales pour les personnes dépendantes et leurs proches.

Comme vous, je considère que nous n’avons pas de leçons à recevoir de la part de l’opposition : elle nous réclame aujourd’hui un projet de loi sur l’autonomie dont elle nous a annoncé la présentation pendant cinq ans, sans que cela soit jamais suivi d’effet. C’était l’arlésienne du précédent quinquennat !

M. Philippe Bas. Vous n’êtes pas obligés de nous imiter !

Mme Marisol Touraine, ministre. Vous avez donc raison de souligner que ce gouvernement, quant à lui, prend des engagements.

Ce débat nous donne l’occasion d’indiquer quelles sont nos priorités. Parmi celles-ci figure la prise en compte des maladies neurodégénératives, comme la maladie d’Alzheimer, un sujet dont M. Kerdraon a souligné toute l’importance. Je tiens à vous rassurer, monsieur Labazée, les crédits sont d’ores et déjà parfaitement identifiés dans les comptes de la CNSA.

Concernant la politique de santé et la branche maladie, M. Daudigny et Mme Génisson ont évoqué la forte convergence qui existe entre les propositions contenues dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et la stratégie nationale de santé.

Ce texte opère des choix et fixe des priorités. D’aucuns peuvent ne pas les partager, mais ils sont identifiés et justifient que nous accordions des financements pour certaines orientations.

Priorité est ainsi donnée à la politique de prévention au travers d’une série de mesures. Nous considérons en effet que nous devons faire évoluer notre politique de santé vers une meilleure prise en compte de la prévention.

Priorité est également donnée à la politique de réorganisation de notre système de soins en faveur de la proximité et du premier recours, comme l’ont souligné Mme Génisson, M. Tropeano et M. Milon. Même si ce dernier ne partage pas forcément les options que nous présentons, il considère lui aussi que cette réorganisation est nécessaire.

Priorité est donnée, enfin, à l’accès aux soins et à la lutte contre les inégalités. Mme Archimbaud est revenue sur ce sujet, dans le prolongement de son rapport. Ce fil conducteur de la politique que nous menons justifie les mesures que nous proposons en termes d’accès à des complémentaires santé.

Monsieur Watrin, nous pouvons avoir des accords sur certaines mesures de ce texte et des désaccords fondamentaux sur la question du financement. Mais, de grâce, n’érigez pas entre nous de faux sujets de désaccord ! Vous dites que nous encourageons la prise en charge par les organismes complémentaires au détriment de l’assurance maladie obligatoire. Vous ne trouverez rien dans ce projet de loi qui justifie un tel discours. Au contraire, toute la politique de ce gouvernement a précisément pour objet de renforcer le socle de l’assurance maladie obligatoire et de réguler les organismes complémentaires.

J’ai entendu diverses interventions sur le financement de nos hôpitaux.

Vous savez fort bien, monsieur Larcher, que les investissements inconsidérés réalisés au cours des années passées ont creusé la dette des établissements hospitaliers. Dire qu’il faut investir, c’est une chose, mais encore faut-il que les investissements se traduisent par une charge soutenable pour les hôpitaux. Et je ne dirai rien des monceaux d’engagements pris par le précédent gouvernement en faveur d’investissements qui n’ont jamais reçu un kopeck – ou plutôt un euro – de financement !

Nous avons donc mis en place une politique permettant de déterminer les priorités en matière d’investissements hospitaliers. Ces priorités, elles, sont financées ! Il s’agit non pas d’engager une démarche technocratique, mais tout simplement de garantir que les investissements hospitaliers qui sont annoncés verront bien le jour. Ce qui compte en effet pour nos concitoyens, ce n’est pas que le directeur d’un hôpital brandisse une lettre du ministre s’engageant à verser de l’argent pour son établissement, mais que les hôpitaux fonctionnement mieux et qu’ils répondent à leurs besoins au quotidien.

C’est aussi pour cette raison, madame Cohen, que nous engageons la réforme de la tarification, laquelle a pour objectif non pas de fragiliser l’hôpital public – selon nous, elle n’aura évidemment pas cet effet –, mais au contraire de le conforter dans ses missions en identifiant plus précisément les besoins de financement et de répondre aux situations particulières, notamment celles des établissements isolés.

J’en viens à la politique du médicament, sujet sur lequel nous avons eu un long échange voilà quelques semaines sur votre initiative, monsieur Barbier.

Les mesures qui sont présentées dans ce texte n’ont absolument pas pour objet de compromettre l’innovation ; je le dis à M. Charon, il s’agit de garantir un juste financement des médicaments, de concentrer l’investissement en matière d’innovation dans les secteurs qui le requièrent et de permettre une bonne régulation de la politique du médicament.

Je vous remercie, monsieur Tropeano, de votre soutien à notre politique de santé publique en faveur du sevrage tabagique. Vous avez souhaité que nous allions plus loin. J’en suis d’accord. Nous devons poursuivre ce travail en faisant le bilan des mesures déjà prises et en menant des expérimentations.

Pour conclure, je voudrais aborder la question fondamentale du droit à l’IVG que Mme Rossignol a évoquée. Ce droit ne doit pas être banalisé. Aucun droit d’ailleurs ne peut l’être. C’est pourquoi je veux le dire très fermement : ce droit existe et il doit être défendu par tous dans notre pays. Personne n’a à rendre des comptes sur sa vie privée et ses choix personnels pour pouvoir défendre à la tribune le droit à l’IVG ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

M. Gilbert Barbier. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

Mme Marisol Touraine, ministre. J’espère, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’il y a aussi des hommes pour défendre ce droit !

À quelqu’un qui vient affirmer qu’il faut garantir concrètement, au quotidien, l’effectivité de ce droit, on ne demande pas, pour preuve de sa sincérité, combien de fois elle a demandé à bénéficier de ce droit à titre personnel. C’est une mise en cause de la démocratie et de nos débats ! (M. Roland Courteau opine.)

M. Claude Domeizel. Oui, c’est scandaleux !

M. Jean-Pierre Godefroy. Il faut des excuses !

Mme Marisol Touraine, ministre. Dans ce texte, il y a des dispositions relatives, non pas à l’IVG, mais à la contraception. C’est la précédente loi de financement de la sécurité sociale qui prévoyait des dispositions tendant à augmenter les tarifs des actes d’IVG.

Quoi qu’il en soit, nous devons veiller ensemble à garantir l’effectivité de ces droits ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.

M. Gilbert Barbier. Je ne voudrais pas qu’il y ait de méprise. Je n’ai pas demandé à Mme Rossignol si elle avait eu recours à une IVG. J’ai simplement dit qu’il fallait savoir de quoi l’on parle.

J’ai un petit avantage dans cette affaire : je n’étais pas député en 1974, mais j’ai voté la loi de 1979. Je pense que Mme Veil est une femme courageuse qui a assumé ses responsabilités.

Alors que j’appartenais à la majorité, j’ai pratiqué plus de 300 IVG dans mon hôpital de Dole, ce qui n’était pas facile à une époque où ce genre d’activité vous mettait au ban de la société. Voilà ce que je voulais vous dire, madame Rossignol !

Si vous remettez en cause le délai de sept jours, c’est parce que vous n’avez pas la pratique de cet examen. Il n’est pas possible de pratiquer une IVG chirurgicale sans avoir effectué un minimum d’examens préalables, notamment afin de connaître les antécédents de la patiente.

À l’époque, on pratiquait cette intervention sous anesthésie générale ; je pense qu’il en est toujours ainsi. Cela suppose une consultation d’anesthésie. Vous ne pouvez donc pas pratiquer une IVG du jour au lendemain ! En tout cas, ce n’est pas ainsi que cela se passe dans les hôpitaux. C’était le cas, en revanche, quand les femmes avortaient sur un coin de table, avant que Mme Veil ait eu le grand courage de présenter sa loi.

Avant de réviser ce délai, il faut réfléchir aux problèmes non seulement éthiques mais aussi pratiques de l’IVG. Par expérience – et j’avais à l’époque contre moi nombre de gens de ma sensibilité politique –, je peux vous dire que cet acte n’est jamais facile à pratiquer pour un médecin. (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UMP et de l'UDI-UC.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol.

Mme Laurence Rossignol. Monsieur Barbier, la question que vous m’aviez posée était ambiguë. Je vous donne acte qu’en me demandant combien d’IVG j’avais pratiquées dans ma vie vous visiez la pratique médicale que j’aurais eue dans ce domaine. N’étant pas médecin, je n’ai évidemment pratiqué aucune IVG.

Cela étant, vous laissez entendre, mon cher collègue, que, pour parler de l’IVG et avoir un point de vue sur la question, il faut être médecin. (Protestations sur les travées de l'UMP.) Sur ce sujet, j’ai un avis de femme, de citoyenne, d’être humain attaché aux libertés individuelles et aux droits des femmes à disposer de leur corps.

Quand au délai de sept jours, ce n’est pas un délai médical : c’est un délai de réflexion spécifique à l’IVG. C’est cela que j’ai contesté. (M. Jean-Pierre Godefroy et Mme Gisèle Printz applaudissent.)

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014
Article 1er

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

Nous allons examiner la première partie du projet de loi concernant les dispositions relatives à l’exercice 2012.

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2012

Première partie
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014
Article 2 et annexe A

Article 1er

Au titre de l’exercice 2012, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

178,8

184,7

-5,9

Vieillesse

203,4

209,5

-6,1

Famille

54,1

56,6

-2,5

Accidents du travail et maladies professionnelles

13,1

13,7

-0,6

Toutes branches (hors transferts entre branches)

436,3

451,4

-15,1

 ;

 

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

154,9

160,8

-5,9

Vieillesse

105,4

110,2

-4,8

Famille

53,8

56,3

-2,5

Accidents du travail et maladies professionnelles

11,5

11,7

-0,2

Toutes branches (hors transferts entre branches)

314,0

327,3

-13,3

 ;

 

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

(En milliards d’euros)

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

14,7

18,9

-4,1

 ;

 

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 170,1 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;



6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, s’élevant à 0,4 milliard d’euros ;



7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 11,9 milliards d’euros.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, sur l'article.

M. Alain Milon. Mon intervention vaudra également pour l’article 2.

Comme à chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale, conformément à la loi organique du 2 août 2005, nous examinons les comptes du dernier exercice clos.

Pour 2012, le régime général affiche un déficit global de 13,3 milliards d’euros, en diminution de 4,1 milliards d'euros par rapport à l’exercice précédent dont le déficit atteignait 17,4 milliards d’euros. La réduction du déficit ainsi opérée entre 2011 et 2012 est surtout visible dans la branche maladie, ce déficit étant passé de 8,6 milliards d'euros à 5,9 milliards d’euros. Ce résultat est à mettre au crédit des efforts considérables assumés aussi bien sur le volet de la médecine ambulatoire que sur celui du médicament.

En outre, nous constatons que l’ONDAM a été respecté ces trois dernières années, notamment grâce à l’action de la précédente majorité. Les derniers efforts sont à signaler, mais n’oublions pas le rôle de notre majorité : elle a réussi à inciter l’ensemble du corps médical à respecter l’ONDAM. Nous devons aujourd’hui saluer leur responsabilité.

Reste que nous devons consentir encore plus d’efforts afin de maîtriser nos comptes sociaux et de réduire ce déficit, qui reste l’un des plus élevés d’Europe.

L’exercice 2012 retrace aussi les mesures prises par la nouvelle majorité, notamment dans le cadre de la loi de finances rectificative. Je pense à la hausse de 0,2 point du taux des cotisations vieillesse, qui pèse 150 millions d’euros sur les deux derniers mois de 2012. Je pense également à la hausse de 8 % à 20 % du taux du forfait social sur la branche vieillesse et le FSV. Je pense encore à la suppression de l’exonération des heures supplémentaires et complémentaires.

Nous ne soutenons pas cette politique qui consiste à alourdir le coût du travail et à augmenter les prélèvements tous azimuts. C'est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons sur les articles 1er et 2.

M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.

M. Roland Courteau. Si, depuis 2012, nous avons cherché à endiguer les dérives qui menaçaient le fonctionnement de notre protection sociale, j’apprécie que, désormais, nous puissions nous engager dans des réformes structurelles qui poursuivront son redressement. Moderniser ce système qui nous est si cher, en assurer la pérennité sans léser le périmètre de la protection sociale, telle est, selon nous, la seule voie qui vaille.

Au cours des dix-huit derniers mois, avec le Gouvernement, malgré la crise et son impact sur la conjoncture économique, les mesures nécessaires à l’inversion et à la diminution des déficits sociaux ont été prises. Madame la ministre, je tiens à vous féliciter de poursuivre dans cette voie et de mener un travail responsable. En effet, la responsabilité, ce n’est pas forcément de faire ce qui est populaire, c’est de faire ce qui est juste pour l’intérêt général.

Bref, les résultats sont d’autant plus remarquables qu’ils interviennent, je le répète, dans un contexte économique difficile.

Force est de constater que ces mesures justes et nécessaires n’ont pas été prises à l’époque. Nous le déplorons, parce que nous en subissons aujourd’hui les conséquences... Toutefois, nous ne fuirons pas nos responsabilités…

M. Pierre Charon. Vous aimeriez bien !

M. Roland Courteau. … et nous assumerons pleinement cette tâche qui nous incombe désormais. C’est pourquoi, grâce à l’ensemble des réformes engagées, nous pourrons voir à l’horizon de 2017 se profiler une trajectoire crédible de retour à l’équilibre des comptes sociaux.

Il est évident que cette bataille n’est pas aisée. Elle nécessite du courage et des efforts, mais elle en vaut la peine. Ce qui se joue ici, c’est le sauvetage de notre modèle social, un modèle fondateur de notre pacte républicain.

Aussi, bénéficiant des effets financiers des mesures structurelles que vous avez mises en place jusqu’à présent, madame la ministre, le déficit de l’ensemble des régimes de base et du FSV est fixé à 13,2 milliards d’euros pour 2014. Celui du régime général repasserait sous la barre des 10 milliards d'euros pour avoisiner le seuil de 9,6 milliards d'euros et revenir ainsi au niveau que nous avons connu avant la crise. C’est plus qu’encourageant, et cela justifie et légitime la politique que vous conduisez et que nous soutenons.

Les réformes engagées jusqu’à présent par le Gouvernement vont permettre d’adapter notre système à la réalité de la société. Nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre ; nous ne pouvons plus laisser filer les déficits en espérant que, un jour, les choses s’arrangeront d’elles-mêmes. Non, il faut agir ! Il faut du courage et de la volonté ; vous en avez, madame la ministre, et nous vous soutiendrons dans cette entreprise.

Les comptes de la branche vieillesse se redressent, parce que des mesures ont été prises en ce sens. Si le déficit passe de 4,8 milliards d'euros en 2012 à 3,3 milliards d'euros aujourd'hui, ce n’est pas par magie : c’est grâce aux mesures adoptées l’année dernière, à savoir la hausse du forfait social et des prélèvements sur les revenus du capital.

En 2014, le déficit continuera à se résorber, pour atteindre 1,3 milliard d’euros, grâce aux mesures proposées dans la réforme.

Enfin, l’augmentation nécessaire, mais modérée, de la durée de cotisation après 2020 permettra à la branche de retrouver l’équilibre à long terme. Désormais, cet équilibre sera assuré en cas de variations conjoncturelles grâce au recours au Fonds de réserve pour les retraites, qui retrouve ainsi sa vocation originelle : soutenir les régimes après 2020.

Nous ne stigmatisons personne, car l’effort devra être partagé : jeunes, plus âgés, employés, employeurs, entreprises. La protection sociale et les retraites sont l’affaire de tous !

M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.

M. Dominique Watrin. L’examen par le Sénat des premiers articles des projets de loi de financement de la sécurité sociale est un exercice des plus intéressants. Ces articles concernent traditionnellement les dispositions relatives aux exercices précédents, et c’est pour nous l’occasion de mesurer les effets réels des lois de financement de la sécurité sociale adoptées.

Ainsi, à l’occasion de l’examen de cet article 1er, il nous est proposé d’approuver les tableaux d’équilibre par branche du dernier exercice clos des régimes obligatoires de base de sécurité sociale. Nous prenons acte du fait qu’en 2012 le déficit du régime général a baissé, de l’ordre de 4 milliards d’euros par rapport à 2011. Pour autant, les déficits restent importants et continuent à hypothéquer l’avenir de notre protection sociale. Nous sommes donc, tout comme vous, sensibles à la résorption des déficits sociaux.

Reste que nous ne pouvons pas adhérer aux orientations de la droite mises en œuvre dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, puisque la réduction des déficits s’est opérée quasi exclusivement sur le compte des assurés. D’ailleurs, force est de constater que ces solutions sont mauvaises, puisque, même si les déficits baissent, passant de 25 milliards d'euros en 2010 à 19 milliards d'euros en 2011, puis à 15 milliards d'euros en 2012, le rythme de résorption décélère d’année en année. Nous y voyons la démonstration de ce que nous ne cessons de rappeler depuis plusieurs années : les mesures de réduction des dépenses adoptées sont insuffisantes et inefficaces pour renouer durablement avec l’équilibre. En outre, certaines d’entre elles sont tout simplement injustes. Je pense par exemple aux franchises médicales qui s’appliquent à tous, notamment aux victimes d’accidents du travail ou de maladies professionnelles.

De la même manière, nous ne pouvons que regretter la réduction du déficit de la branche vieillesse, ramené de 6 milliards d’euros en 2011 à 4,8 milliards d’euros en 2012. Elle n’est que le fruit de mesures injustes imposées aux salariés par la réforme Woerth-Sarkozy, telles que le report de l’âge légal de départ à la retraite ou celui de la date de revalorisation des pensions.

Enfin, je veux dire mon inquiétude quant à la situation du Fonds de solidarité vieillesse. Déficitaire depuis 2009, le FSV a connu en 2012 une aggravation notable de son déficit : environ 4 milliards d’euros, contre 3,4 milliards d'euros en 2011. Cet accroissement des déficits résulte principalement de l’augmentation de la prise en charge du minimum contributif qu’il finance, puisque son coût est passé de 3,5 milliards d’euros en 2011 à 3,9 milliards d'euros en 2012.

Tout cela traduit le creusement des inégalités sociales. Et la stagnation des salaires et des pensions a entraîné l’explosion du nombre de travailleurs pauvres !

Les conséquences de ces politiques, nous les mesurons à l’aune du nombre de retraités qui, au final, ne disposent plus pour survivre que du minimum contributif.

Face à un tel constat, nous appelons à des réformes courageuses en matière de répartition des richesses et, bien sûr, nous ne voterons ni l'article 1er ni l'article 2.