M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Guislain Cambier. Ma question, qui s'adressait à M. le ministre de l'intérieur, porte sur le même sujet que la précédente, et pour cause : il convient d'insister.
Madame la ministre, le ministre de l'intérieur était dans le département du Nord ce lundi. À l'hôtel de police de Lille, il s'est exprimé à la suite du drame survenu samedi dernier. Un chauffard a arraché la vie à un jeune de 19 ans, Mathis, à la suite d'un refus d'obtempérer. J'ajoute que cet individu était sous l'emprise du protoxyde d'azote.
Nous pensons évidemment à la famille de la victime, notamment à ses parents, ainsi qu'à ses nombreux amis. Nous leur adressons nos sincères condoléances.
La justice est saisie et, comme vous, je formule le vœu qu'elle soit particulièrement sévère pour ce chauffard.
Ce drame soulève une nouvelle fois la question de la consommation de cette drogue qu'est le protoxyde d'azote, lorsqu'on en détourne l'usage à des fins psychoactives.
La question est connue depuis près de dix ans. Les parlementaires, aussi bien au Sénat qu'à l'Assemblée nationale, ont pris soin de s'en saisir. Une première proposition de loi a été votée dans cet hémicycle sur l'initiative de Valérie Létard. D'autres textes sont en cours d'examen, mais le Parlement mène seul ce combat. En effet, aucun gouvernement ne s'est emparé du sujet.
C'est d'autant plus choquant que nous parlons d'un fléau de santé publique. La consommation de cette substance cause des carences en vitamine B12, provoquant ainsi des neuropathies et, dans certains cas, une atteinte irréversible de la moelle épinière.
L'usage détourné de ce produit est aussi un fléau pour l'environnement : les cartouches non recyclées explosent dans les incinérateurs, lesquels s'en trouvent fortement endommagés.
Il constitue, surtout, un fléau pour l'ordre public, notamment en matière de sécurité routière : 10 % des moins de 35 ans ont déjà consommé du protoxyde d'azote, dont la moitié en conduisant.
Nous sommes ici au cœur d'une question relevant du pouvoir régalien. Madame la ministre, le Gouvernement va-t-il enfin s'emparer de ce sujet ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur.
Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur. Monsieur le sénateur, vous me donnez l'occasion de préciser un certain nombre d'éléments de ma précédente réponse.
Tout d'abord, je tiens à insister sur les refus d'obtempérer en général. Il me semble très important de lutter contre ce fléau et, je le répète, le Gouvernement sera pleinement mobilisé en ce sens.
Ensuite, je reviendrai plus particulièrement sur le protoxyde d'azote. Vous l'avez rappelé à l'instant, deux propositions de loi ont effectivement été déposées, une dans chaque assemblée du Parlement : celle de votre collègue député Idir Bourmetit, adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture, en janvier dernier ; et celle de votre collègue sénateur Ahmed Laouedj, adoptée en première lecture par votre assemblée en mars dernier.
L'objectif est de pénaliser la consommation détournée du protoxyde d'azote en la punissant d'une peine d'un an d'emprisonnement et de l'amende prévue pour les contraventions de la troisième classe.
Grâce à un amendement voté en séance au Sénat, le texte de M. Laouedj pénalise également la détention et le transport de matériel visant à faciliter l'extraction de ce gaz à des fins psychoactives.
Plus largement, il faut donner aux préfets la possibilité de prononcer la fermeture administrative des débits de boissons et de tabac en cas de non-respect des règles.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement sera pleinement engagé à vos côtés pour lutter contre ce fléau. (Protestations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. le président. Mes chers collègues, s'il vous plaît !
Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée. Pour apporter une réponse aussi précise que possible, nous travaillerons également avec la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)…
M. François Bonhomme. C'est la même fiche !
Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée. C'est une question de santé publique, de sécurité et de respect de nos normes.
M. le président. La parole est à M. Guislain Cambier, pour la réplique.
M. Guislain Cambier. Madame la ministre, il faut aller au bout de cette démarche, car nous devons être à la hauteur des enjeux. C'est pourquoi je vous invite à réunir dans les prochains jours les députés et sénateurs qui ont particulièrement travaillé sur ce sujet – je pense notamment à mes collègues Isabelle Florennes et Jean-François Longeot –, afin de déterminer une stratégie ambitieuse.
Les Pays-Bas l'ont déjà fait : il est temps d'interdire la vente des capsules de protoxyde aux particuliers et de prohiber l'usage de ce produit au volant ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains, INDEP et SER.)
déremboursement des cures thermales
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Marc Boyer. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
La cure thermale n'est pas une pratique de confort ; trois semaines de cure, ce ne sont pas trois semaines de vacances aux frais du contribuable. Les curistes sont des patients qui souffrent.
La médecine thermale est efficace, comme le prouvent plus de soixante études cliniques…
M. Jean-Baptiste Lemoyne. M. Boyer a raison !
M. Jean-Marc Boyer. … validant le service médical rendu de plus de 90 % des prescriptions thérapeutiques.
En 2024, le remboursement des cures représentait 244 millions d'euros, soit moins de 0,1 % des 270 milliards d'euros de la branche maladie de la sécurité sociale.
Vous parlez désormais d'une « révision du niveau de prise en charge » en lieu et place d'un « déremboursement », mais le résultat est le même : le patient ne pourra plus être soigné par la médecine thermale.
En réduisant la prise en charge de 100 % à 65 % pour les patients en affection de longue durée (ALD) et les forfaits thermaux de 65 % à 15 %, on pourrait dégager, selon vous, « 200 millions d'euros d'économies pour nos comptes sociaux ». Mais vous faites un mauvais calcul.
Non seulement ces mesures porteraient une atteinte directe à l'accès aux soins, mais elles fragiliseraient durablement les quatre-vingt-huit stations thermales de notre pays, lesquelles sont essentiellement rurales.
En outre, vous oubliez la réduction du recours aux médicaments obtenue grâce à ces cures, laquelle entraîne une économie substantielle pour nos comptes sociaux. Vous oubliez aussi les 212 millions d'euros de taxes et cotisations sociales reversés à l'État. Là encore, vous faites un mauvais calcul.
Vous êtes loin de faire des économies si vous privez l'État de ces ressources, issues de 25 000 emplois et de 4,8 milliards d'euros de retombées économiques.
La filière tout entière, ainsi que les différents territoires thermaux, sont très inquiets de vos projets. Vous voulez taper sur les patients, vous voulez appauvrir les territoires, et finalement vous allez appauvrir l'État.
Enfin, il est totalement faux d'affirmer que la France est le dernier pays européen à rembourser les cures thermales. De nombreux États d'Europe font de même ; certains assurent d'ailleurs une meilleure prise en charge publique.
Monsieur le Premier ministre, quand allez-vous arrêter de taper, inutilement et injustement, sur les cures thermales ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Hussein Bourgi applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée auprès de la ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargée de l'autonomie et des personnes handicapées. Monsieur le sénateur, vous interrogez le Gouvernement sur le projet de décret revenant sur le remboursement intégral des cures thermales pour les patients souffrant d'une affection de longue durée. Sachez que j'ai répondu à Jean-Claude Anglars sur ce sujet, hier matin, lors d'une séance de questions orales.
La France est aujourd'hui l'un des derniers pays de l'OCDE à rembourser les cures thermales,…
M. Jean-Marc Boyer. C'est faux !
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. …, ce qui représente une dépense de près de 200 millions d'euros pour l'assurance maladie.
Dans son rapport annuel Charges et produits, la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) a préconisé un déremboursement partiel des cures thermales. Ce que propose le Gouvernement, de son côté, n'est pas un déremboursement ; le reste des dépenses pourra être pris en charge par les complémentaires santé.
Votre question s'inscrit dans le contexte de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, qui vient de démarrer à l'Assemblée nationale. Le débat aura bien lieu et permettra d'aborder de façon large et globale le sujet de la prise en charge et du financement des soins. Comme l'a rappelé le Premier ministre, le Gouvernement propose, mais le Parlement débat et votera.
SHEIN
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Hussein Bourgi. Monsieur le Premier ministre, depuis le week-end dernier, les Français découvrent, médusés, estomaqués, scandalisés, outrés, que des entreprises vendent sur le territoire national des poupées à l'effigie d'enfants qui ont une destination pédopornographique. La mondialisation et l'ubérisation du commerce engendrent ce qu'il y a de plus hideux et scabreux : en voilà une nouvelle illustration !
Vous le savez, la pédopornographie est l'antichambre de la pédocriminalité. Ainsi, quelles actions comptez-vous prendre pour sanctionner les différents auteurs de ces infractions, à la fois ceux qui vendent et ceux qui achètent ces poupées ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, du tourisme et du pouvoir d'achat.
M. Serge Papin, ministre des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l'artisanat, du tourisme et du pouvoir d'achat. Monsieur le sénateur Hussein Bourgi, vous avez raison et nous ne les laisserons pas faire ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme Sophie Primas. Très bien !
M. Serge Papin, ministre. Après des poupées à caractère pédopornographique, ce sont désormais des armes qui sont mises en vente sur la plateforme Shein. Le ministre de l'intérieur m'a d'ailleurs confirmé que l'une de ces armes a servi à l'assassinat du jeune Élias, le 26 janvier dernier, dans le XIVe arrondissement de Paris.
Si une plateforme veut vendre en France, elle doit respecter nos règles, nos normes, nos valeurs. Il faut dire non au Far West numérique, parce que ces pratiques sont devenues systémiques et constituent aujourd'hui un modèle.
Face à ce phénomène, nous agissons, mesdames, messieurs les sénateurs. Ainsi, sur instruction du Premier ministre, le Gouvernement a engagé la procédure de suspension de Shein. (Bravo ! et applaudissements.)
Nous allons, bien sûr, mesurer le temps nécessaire pour que la plateforme démontre aux pouvoirs publics que l'ensemble de ses contenus ont enfin été mis aux normes.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Quelles sont les actions sur le plan judiciaire ?
M. Serge Papin, ministre. Nous ferons un premier point d'étape dans quarante-huit heures avec les ministres concernés, en particulier le ministre de l'économie et des finances. Je peux vous certifier que, à cette heure, tous les services de l'État sont mobilisés pour amplifier et augmenter le nombre de contrôles. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Hussein Bourgi, pour la réplique.
M. Hussein Bourgi. Monsieur le ministre, j'attendais de votre part trois réponses. Vous avez apporté la première d'entre elles : j'en prends acte.
J'avoue avoir été troublé lorsque j'ai entendu, hier, les premières déclarations du ministre de l'économie et des finances, qui semblait hésiter, tergiverser. Il disait notamment vouloir attendre, pour voir si l'entreprise Shein allait persister et renouveler l'infraction.
M. Hussein Bourgi. Monsieur le Premier ministre, nous sommes pour la tolérance zéro en matière de pédopornographie et de pédocriminalité ! (Applaudissements.) Vous suspendez enfin le site : je prends acte de cette mesure avec satisfaction.
La deuxième réponse que j'attendais de votre part concerne les actions engagées sur les volets policier et judiciaire. Avez-vous demandé communication de l'identité de tous les clients ? Nous savons, grâce aux premières enquêtes en cours, que certains acheteurs ont déjà été condamnés, ce sont donc des récidivistes.
En troisième lieu, j'aurais souhaité que vous précisiez les initiatives que le ministre de l'Europe et des affaires étrangères compte prendre avec ses homologues pour conduire une action à l'échelle de l'Union européenne.
Pour conclure, je rappelle que chaque société se construit sur un socle de principes et d'interdits, ceux-là mêmes qui nous permettent de protéger les plus fragiles d'entre nous. Le droit, dans ces circonstances-là, doit être le bouclier qui protège les enfants et le glaive qui combat leurs prédateurs. (Applaudissements.)
programmation pluriannuelle de l'énergie
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour le groupe Les Républicains.
M. Daniel Gremillet. Monsieur le Premier ministre, la loi portant programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) aurait dû être adoptée il y a deux ans déjà. Face aux retards pris par l'exécutif, le Sénat a déposé une proposition de loi sur le sujet, en avril 2024. Aujourd'hui, nous attendons toujours qu'elle soit examinée en deuxième lecture à l'Assemblée nationale.
Le ministre de l'économie et des finances a déclaré hier que ce dossier était « au sommet de la pile ». Or, d'après le courrier adressé la semaine dernière par la ministre des relations avec le Parlement à la présidente de l'Assemblée nationale, la PPE ne figure pas sur la liste des priorités du Gouvernement pour les quatre prochains mois.
Monsieur le Premier ministre, vos prédécesseurs Michel Barnier et François Bayrou avaient pris l'engagement de ne pas légiférer sur la PPE par voie réglementaire et de laisser la navette parlementaire se poursuivre. Ils ont tenu leurs promesses.
Qu'en est-il de votre côté ? Quelles sont vos intentions sur ce sujet important pour notre souveraineté énergétique et les investissements dans nos territoires ? Quel calendrier envisagez-vous et quelles méthodes allez-vous choisir ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.
M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Monsieur le sénateur Daniel Gremillet, je veux d'abord vous remercier pour le travail que vous accomplissez sur ce sujet essentiel.
En février 2022, à Belfort, le Président de la République a prononcé un discours important que l'immense majorité des sénateurs ont, semble-t-il, approuvé.
Ainsi, il a été prévu de relancer le nucléaire français dans le cadre d'un programme ambitieux, avec la construction d'au moins six réacteurs nucléaires, et de poursuivre un engagement fort sur les énergies renouvelables, en particulier l'éolien en mer.
Vous l'avez dit, les vicissitudes de la vie politique ont été telles que les débats ont été rythmés par cette question : faut-il un décret ou une proposition de loi ? Lorsque j'étais ministre de l'énergie, je n'ai pas eu le temps de publier le décret que j'avais envisagé.
M. François Bonhomme. On n'a plus le temps de suivre ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Roland Lescure, ministre. Maintenant, nous devons accélérer le travail. L'essentiel est que nous continuions à avancer sur ce sujet important – je pense que vous en conviendrez, monsieur le sénateur. Dès le début de l'année 2026, nous devrons en effet lancer des appels d'offres sur l'éolien en mer et commencer les travaux sur le nouveau nucléaire.
Ce souci d'aller vite et bien est au cœur de nos préoccupations. Nous tenons, bien sûr, à associer les parlementaires à nos travaux. Aussi ai-je demandé à mon équipe de contacter les parlementaires les plus investis sur le sujet – vous en faites assurément partie, monsieur Gremillet –, afin que nous puissions échanger très vite de manière informelle, dans les jours qui viennent.
Cela nous conduira à proposer formellement, dès l'automne prochain, à l'ensemble de la représentation nationale, une stratégie qui nous permette d'avancer.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour la réplique.
M. Daniel Gremillet. Monsieur le ministre, votre réponse n'est pas claire.
Nous devons savoir si le Parlement ira, oui ou non, au bout du débat. Le Premier ministre a déclaré : « J'ai renoncé à utiliser l'article 49, alinéa 3, de la Constitution. C'est la garantie pour l'Assemblée nationale que le débat – notamment budgétaire, mais pas seulement, dans tous les domaines – vivra et ira jusqu'au bout, jusqu'au vote. »
La question de l'énergie entre dans ces considérations. Allez-vous faire confiance au Parlement ? Êtes-vous capables de donner une trajectoire énergétique à la France, alors que, dans le monde, la bataille économique est lancée et que nous n'avons toujours pas de cap énergétique ?
En matière énergétique, nous vivons sur les décisions du passé :…
M. Yannick Jadot. Le nucléaire, c'est le passé !
M. Daniel Gremillet. … voilà pourquoi nous avons besoin de courage politique. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.)
avenir de novasco
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean-Marie Mizzon. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.
Au train où vont les choses, monsieur le ministre, vous n'aurez bientôt plus besoin d'un ministre délégué à l'industrie, car il n'y aura plus d'industrie en France. On ne parle que de réindustrialiser, mais sans penser à conserver le peu d'industrie qu'il nous reste : voilà l'un des grands paradoxes de notre époque.
La sidérurgie, en particulier, est en train de mourir. Les sites de production du groupe Novasco, ex-Arcelor-Mittal, vont fermer les uns après les autres sur tout le territoire national. C'est vrai dans mon département, la Moselle, à Hagondange, mais aussi dans la Loire, le Nord et la Meurthe-et-Moselle.
À Hagondange, ce sont 450 emplois qui pourraient disparaître dès la semaine prochaine, soit le plus gros du contingent des emplois menacés, qui devraient s'élever à 760 au total.
Novasco est en redressement judiciaire pour la quatrième fois en onze ans, car l'État a laissé des acteurs qui sont davantage des financiers que des capitaines d'industrie reprendre l'entreprise. Nous l'avons vu en 2024 : pour ne pas entrer au capital de l'entreprise à hauteur de seulement 15 millions d'euros, l'État a laissé un fonds d'investissement britannique, Greybull Capital, la reprendre, en lieu et place d'Acciaierie Venete, un groupe industriel italien sérieux.
Monsieur le ministre, Novasco est l'archétype de ce qu'il nous faut préserver. L'entreprise est écologique, car elle recycle de l'acier ; elle est aussi moderne, puisqu'elle fonctionne à l'électricité, et stratégique. Toutes les grandes puissances du G7 ont une industrie sidérurgique.
Ma question est simple : allez-vous enfin prendre les mesures qui s'imposent pour sauver la sidérurgie française ? (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique.
M. Roland Lescure, ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle, énergétique et numérique. Je vous remercie de votre question, monsieur le sénateur. Elle me permet de rappeler que, depuis huit ans, nous avons créé et installé plus d'usines que nous n'en avons fermées. Toutefois, cela ne veut pas dire qu'il n'y en ait pas qui ferment. Nous devons nous occuper de Novasco.
Nous avons créé 130 000 emplois industriels, alors qu'on en avait détruit des millions dans les années qui ont précédé. La politique de réindustrialisation a été lancée, mais il faut évidemment l'amplifier et l'accélérer – j'espère que vous saurez vous en souvenir lorsque vous examinerez le budget.
Nous devons également poursuivre cette politique à l'échelon européen. Si nous voulons sauver les aciéries et les métallurgies, nous devons le faire en Européens. À cet égard, il est important que les travaux sur la clause de sauvegarde de l'industrie arrivent à terme.
J'en viens au dossier Novasco en Moselle, que vous connaissez bien ; c'est d'ailleurs dans ce département que l'entreprise a installé son plus grand établissement. J'étais ministre de l'industrie lorsque la reprise des activités d'Ascometal a été organisée en 2024. Nous avons eu quelques bonnes nouvelles – je pense notamment à la reprise des activités à Fos-sur-Mer par l'industriel italien Marcegaglia, qui a investi et sauvé 300 emplois –, mais aussi des mauvaises nouvelles.
À cet égard, Greybull Capital, n'a pas respecté ses engagements. J'ai donc demandé que l'on regarde de près les raisons pour lesquelles il ne l'a pas fait et que l'on trouve une voie pour poursuivre nos relations avec ce fonds.
L'essentiel, aujourd'hui, ce sont les sites, les employés et les territoires. Vous le savez, une procédure de reprise est en cours. Les deux offres émises seront examinées par le tribunal le 12 novembre prochain.
L'État, notamment les services de Bercy, travaille avec les repreneurs potentiels. Quoi qu'il advienne, nous serons, bien évidemment, très sensibles au traitement des salariés et du territoire. Vous l'avez dit, la Moselle est un territoire difficile, dans lequel les offres de reprise ont parfois tendance à se succéder, sans qu'on puisse donner beaucoup d'espoir aux salariés, qui sont les premiers concernés.
J'y insiste, nous suivrons ce dossier de très près et j'ai demandé au ministre délégué chargé de l'industrie, Sébastien Martin, de s'en occuper directement.
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quinze,
est reprise à seize heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.