M. le président. La parole est à M. Michel Masset. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)

M. Michel Masset. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans une période où la défiance s'installe entre les citoyens et leurs institutions, chaque progrès en matière de transparence électorale contribue à renouer la confiance dans notre pacte républicain.

Derrière cela se logent des problématiques très concrètes. Je pense notamment à la nécessité pour l'État de vérifier qu'un candidat est éligible.

C'est précisément le sens de cette proposition de loi, déposée par notre collègue Sophie Briante Guillemont – que je salue –, soutenue par l'ensemble du groupe RDSE. (Exclamations amusées.)

M. Francis Szpiner. Quel événement !

M. Michel Masset. Elle part d'un constat lucide : notre système de contrôle des inéligibilités demeure morcelé, incomplet et son intervention est parfois tardive.

Les préfectures, chargées de l'enregistrement des candidatures, ne disposent que d'outils partiels pour vérifier l'absence d'inéligibilité. Nous connaissons le résultat : des élections annulées, des recours à répétition et, à terme, une atteinte à la sécurité juridique du vote.

Cette proposition de loi vise donc à créer un répertoire national des personnes inéligibles, afin de les recenser dans une base unique centralisée.

L'ambition est avant tout pragmatique : il s'agit de donner aux autorités administratives un instrument fiable, rapide et exhaustif, leur permettant de vérifier, en amont, qu'un candidat remplit bien les conditions fixées par le code électoral.

Il ne s'agit nullement de créer de nouveaux motifs d'inéligibilité ni d'introduire une quelconque forme de stigmatisation. Comme l'auteure de la proposition de loi l'a souligné, ce texte ne modifie pas en substance le droit existant ; il ne fait que rendre effectif un contrôle déjà prévu, mais qui est actuellement très imparfait.

Ainsi, ce répertoire recensera les inéligibilités résultant d'une condamnation pénale, d'une décision du juge électoral ou d'une mesure de protection juridique prononcée par le juge judiciaire. Il permettra aux préfectures de vérifier rapidement, avant toute élection, qu'un candidat n'est pas frappé d'inéligibilité.

Le groupe RDSE y voit une avancée importante pour la fiabilité de nos processus électoraux et la transparence de la vie publique.

Les difficultés récentes, relevées notamment par la Cour des comptes et par les inspections générales, montrent qu'un tel outil est devenu indispensable. En effet, selon les chiffres qui nous ont été transmis, lors des dernières élections municipales, en 2020, seulement 6 % des candidatures ont donné lieu à une vérification du casier judiciaire.

Certains ont exprimé des inquiétudes légitimes, notamment parce que le répertoire recensera une population fragile, les majeurs sous protection juridique. Nous devons donc être parfaitement clairs : ce texte a pour objet non pas d'élargir ou de réviser les motifs d'inéligibilité, mais uniquement de faciliter la vérification par l'administration que les conditions d'éligibilité sont bien réunies.

Ce répertoire sera strictement encadré ; il n'aura qu'un usage administratif et ses modalités d'accès seront fixées par décret, après, bien sûr, avis de la Cnil.

La proposition de loi ne vise en fait qu'à regrouper, dans un dispositif unique, des décisions déjà existantes, dans le respect des droits et de la dignité de chacun. En ce sens, la commission des lois a, sur l'initiative de son rapporteur, utilement resserré le texte sur son cœur juridique, en renommant ledit dispositif « répertoire » plutôt que « fichier ».

Cette proposition de loi s'inscrit dans une démarche fidèle à l'esprit du Sénat et, bien sûr, du groupe RDSE : elle constitue une réforme concrète, équilibrée et respectueuse des libertés publiques.

Le groupe RDSE la votera avec conviction, à l'unanimité ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, GEST, RDPI et UC.)

M. le président. La parole est à Mme Anne-Sophie Patru. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Anne-Sophie Patru. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la crédibilité de nos institutions électorales repose sur la confiance que leur accordent les citoyens. Cette dernière constitue un pilier essentiel de notre démocratie.

Pourtant, cette confiance est aujourd'hui fragilisée par divers facteurs, et notamment par des dysfonctionnements administratifs qui, bien qu'étant d'ordre technique, entraînent des répercussions politiques et financières.

La proposition de loi visant à créer un répertoire national des personnes inéligibles tend précisément à corriger l'une de ces failles : l'absence de vérification systématique et fiable des inéligibilités avant les élections, un problème qui a déjà été relevé lors des dernières échéances.

Les auditions menées par notre rapporteur, Olivier Bitz, ont permis de mettre en lumière une réalité inquiétante : le contrôle des inéligibilités en France est actuellement fragmenté, lent et peu efficace.

Lors des dernières élections municipales, celles de 2020, seulement 6 % des 902 465 candidatures ont fait l'objet d'une demande de transmission du B2 à des fins de vérification, et une seule inéligibilité a été détectée. Ce taux excessivement bas s'explique par l'absence de transmission automatisée entre le casier judiciaire national et les préfectures, ce qui oblige ces dernières à effectuer des demandes manuelles pour chaque candidat.

Même si les délais de transmission devraient être réduits à vingt-quatre ou à quarante-huit heures grâce au déploiement du nouveau service B2+, qui devrait intervenir à la fin de l'année, celui-ci ne permettra pas de généraliser les contrôles pour toutes les candidatures, dans la mesure où les demandes restent ponctuelles et ne sont pas automatisées.

Depuis l'adoption de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, le nombre des peines complémentaires d'inéligibilité prononcées a fortement augmenté. En 2024, 16 000 condamnations ont inclus une peine d'inéligibilité, contre moins de 50 par an avant 2017.

Pourtant, ces informations ne sont pas transmises efficacement aux autorités chargées d'enregistrer les candidatures. Cette situation crée un risque majeur : des personnes inéligibles peuvent se présenter aux élections et leur inéligibilité n'est découverte qu'après coup, à la suite d'un recours devant le juge électoral. Cela peut mener à l'annulation du scrutin, comme lors d'une élection législative dans la deuxième circonscription du Jura en 2024 : le cas d'un candidat sous curatelle renforcée a suscité un fort écho médiatique, et l'élection a dû être annulée.

Aujourd'hui, aucun système centralisé ne recense les décisions de placement sous tutelle ou curatelle, alors que près de 65 000 mesures de protection sont prononcées chaque année. Cette lacune est d'autant plus préoccupante que, selon la loi, ces personnes sont automatiquement inéligibles.

Face à ces constats, la création d'un répertoire national des personnes inéligibles s'impose comme une solution pragmatique, proportionnée et indispensable. Je salue, à cet égard, l'initiative pertinente de notre collègue Sophie Briante Guillemont, auteure de cette proposition de loi.

Ce répertoire serait alimenté par le ministère de la justice pour les inéligibilités liées à des condamnations pénales, par le Conseil d'État pour des inéligibilités prononcées par le juge administratif et, enfin, par les greffes des tribunaux judiciaires pour les mesures de protection juridique. Il ne concernerait pas toutes les inéligibilités, mais uniquement celles qui sont objectives et vérifiables : les condamnations pénales, les décisions du juge électoral et les mesures de protection juridique. Les inéligibilités fonctionnelles, plus subjectives et variables selon les élections, en seraient donc exclues.

Le rapporteur a veillé à ce que seules les données strictement nécessaires soient transmises, conformément au principe de minimisation prévu par le RGPD. La Cnil devra être pleinement associée à la mise en place du répertoire pour garantir le respect de ce principe.

De même, l'accès à ce répertoire sera strictement encadré : ne pourront y accéder que les préfectures, les juridictions, le Conseil constitutionnel et les personnes concernées.

Le texte prévoit également que les préfectures auront l'obligation légale de consulter le répertoire avant d'enregistrer une candidature. Cette mesure est cruciale pour éviter les annulations d'élections a posteriori – objectif important et partagé de cette proposition de loi – et pour garantir la sincérité du scrutin ainsi que la sécurité juridique des candidats.

La commission des lois a reporté la date d'entrée en vigueur au 31 décembre 2029, afin de laisser le temps nécessaire pour développer les interconnexions informatiques entre les différents acteurs, former les agents et assurer la fiabilité du système. Dans la mesure où le répertoire électoral unique a été opérationnel trois ans après son adoption, ce calendrier semble réaliste.

Le groupe Union Centriste soutiendra cette proposition de loi qui allie efficacité administrative et respect des libertés individuelles. Plus qu'un simple répertoire, elle crée un outil qui permettra de renforcer le lien démocratique entre les citoyens et les élus, dans la voie d'une démocratie plus transparente et numérique. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, RDSE et RDPI.)

M. Olivier Bitz, rapporteur. Bravo !

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Mme Laure Darcos. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans un rapport rendu public le 20 novembre 2024 sur l'organisation des élections en France, la Cour des comptes a dressé un certain nombre de constats. Parmi ceux-ci, elle relève la difficulté des préfectures à assurer avec une pleine efficacité leur mission de contrôle a priori des candidatures.

Or la vérification des inéligibilités est une étape indispensable au bon déroulement du processus électoral. Elle garantit que seules les personnes remplissant les conditions fixées par la loi puissent se présenter devant le suffrage universel.

Les outils dont disposent aujourd'hui les services de l'État ne permettent pas une vérification rapide et fiable des inéligibilités dans des délais particulièrement courts. Faute d'instrument de contrôle systématique et automatique des candidatures, les démarches sont lentes et complexes, et le risque d'erreur est élevé.

Aussi la Cour recommande-t-elle de créer un répertoire spécifique, qui serait alimenté par le casier judiciaire national et recenserait uniquement les personnes ayant perdu leur droit à être éligibles. Ce fichier serait accessible de manière sécurisée aux agents des bureaux des élections dans les préfectures et aux autres autorités chargées d'examiner la recevabilité des candidatures.

La proposition de loi que nous examinons cet après-midi vise à créer et à sécuriser un tel dispositif, afin de répondre à la recommandation claire et pragmatique de la Cour des comptes. L'initiative de notre collègue Sophie Briante Guillemont est donc la bienvenue.

L'article unique tend ainsi à instaurer un fichier national des personnes devenues inéligibles à la suite d'une condamnation pénale, d'une décision du juge électoral ou d'une décision du juge judiciaire prononçant une mesure de protection juridique d'une personne majeure.

Le but n'est pas, je veux le rappeler avec force, de stigmatiser qui que ce soit, encore moins les personnes en situation de handicap, comme le craint le Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH). Il s'agit de faciliter le travail d'évaluation des candidatures par les services préfectoraux et de réduire le nombre d'annulations d'élections par le juge électoral.

Ce texte permettra aux préfectures, qui sont au cœur de notre organisation électorale, de s'appuyer sur un outil sûr et efficace pour contrôler l'éligibilité des candidats.

Je me félicite que la commission partage cet objectif. Celle-ci a toutefois apporté quelques améliorations au texte.

Dans un souci de lisibilité du droit, elle a notamment renommé « répertoire » la nouvelle base de données et regroupé l'ensemble des dispositions au sein d'un nouvel article L. 45-2 du code électoral.

Je rejoins également la position de la commission, qui a souhaité, pour plus d'efficacité, ne retenir que les dispositions relevant du champ de compétence du législateur et renvoyer au pouvoir réglementaire l'identification de l'autorité compétente chargée de gérer et d'alimenter le fichier, ainsi que la définition de ses modalités de consultation.

Enfin, je salue le volontarisme et le pragmatisme de la commission des lois, qui a tenu, d'une part, à créer une obligation de consultation du nouveau répertoire par les autorités concernées et, d'autre part, à prévoir une entrée en vigueur du texte au plus tard le 31 décembre 2029.

Avant de conclure, je tiens à remercier le rapporteur, notre collègue Olivier Bitz, pour la qualité de ses travaux.

Madame la ministre, mes chers collègues, en offrant aux services préfectoraux un outil de contrôle leur permettant d'assurer leur mission de façon fiable dans des délais contraints, la proposition de loi contribue pleinement à renforcer l'efficacité administrative.

Vous l'avez compris, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, RDPI et UC.)

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP.)

Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, imaginez un maire élu dont l'élection est annulée par le tribunal administratif quelques mois plus tard. Comment est-ce possible ? Cela s'explique tout simplement par le fait que l'intéressé était inéligible au jour de l'élection et que personne ne l'avait vu, faute d'outil fiable pour le vérifier… Résultat : scrutin annulé ; campagne à recommencer ; argent public de nouveau dépensé ; élus locaux déstabilisés ; citoyens exaspérés.

Cette situation n'est pas théorique. Elle s'est déjà produite et se reproduira. Et pendant ce temps-là, la confiance dans nos institutions s'effrite petit à petit.

Le contrôle de l'éligibilité est aujourd'hui trop complexe, et nous manquons d'outils pour l'assurer efficacement. En effet, les préfectures habilitées à recevoir les déclarations de candidatures pour la plupart des élections doivent, dans des délais très courts, recouper manuellement des informations dispersées : casier judiciaire ; décisions constitutionnelles ; décisions administratives ; mesures de protection juridique. En un mot : c'est un véritable labyrinthe !

Nous demandons l'impossible aux services de l'État, puis nous nous étonnons que des erreurs surviennent. Notre responsabilité – je dirai même notre devoir institutionnel – est simple : moderniser le contrôle de l'éligibilité.

C'est pourquoi je soutiens pleinement la création d'un répertoire national des personnes inéligibles, non pas pour stigmatiser ni pour punir deux fois, mais pour garantir ce qui devrait être une évidence : qu'aucune personne légalement inéligible ne puisse se présenter ; que chaque scrutin soit inattaquable en droit ; que chaque électeur puisse avoir confiance dans la sincérité du vote.

Ce répertoire administré par le ministère de l'intérieur, au périmètre clairement défini, et consultable uniquement par les autorités compétentes et par la personne concernée, n'a rien d'une atteinte à la liberté. C'est une garantie démocratique.

Permettez-moi d'insister sur un point essentiel. Notre République présente une singularité remarquable : elle dispose d'une représentation politique pour ses citoyens résidant à l'étranger. Or la proposition de loi risque de ne pas leur être applicable, car cette représentation est régie par des dispositions électorales qui ne relèvent pas directement du code électoral…

C'est pourquoi je voterai l'amendement de Sophie Briante Guillemont visant à préciser que les candidats aux élections des Français de l'étranger seront soumis au même contrôle, dans les mêmes conditions, avec le même niveau d'exigence que les autres candidats. En effet, laisser place à l'incertitude ouvrirait la voie à des interprétations divergentes et, potentiellement, à des contentieux. Mieux vaut donc prévoir explicitement leur insertion dans le dispositif.

La démocratie ne s'arrête pas à l'Hexagone. Elle vit aussi à Casablanca, à Montréal, à Singapour, à Tel-Aviv, à São Paulo, à Abidjan, à Londres. Partout où les Français sollicitent la confiance de leurs compatriotes, l'intégrité du vote doit être garantie.

Cependant, un registre n'a de sens que s'il est effectivement contrôlé et consulté. La commission le rappelle clairement : l'expérience des dispositifs existants montre qu'un outil, même robuste, devient inefficace si la consultation n'est pas obligatoire et systématique.

C'est la raison pour laquelle il a été justement prévu que toute autorité habilitée à enregistrer une candidature devra vérifier ce registre. Cette exigence n'est pas un détail : elle est primordiale.

Bien sûr, je n'ignore pas les préoccupations que suscite ce fichier. Elles sont légitimes. Protéger les données des citoyens, c'est non pas une précaution administrative, mais une exigence juridique et une responsabilité publique. Cela implique des données strictement nécessaires, et rien de plus, des accès limités, tracés, contrôlés, une surveillance constante par les autorités compétentes, et le droit effectif de corriger toute erreur dans des délais compatibles avec le calendrier électoral.

Ce texte va dans le bon sens. Pour autant, nous resterons vigilants quant à sa mise en œuvre.

Mes chers collègues, créons enfin cet outil simple, efficace, responsable, un outil au service de la République, de l'égalité des candidats et de la confiance des électeurs, en France comme à l'étranger. Garantir la sincérité du vote, c'est garantir la légitimité de nos institutions. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP.)

M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier. (M. le rapporteur applaudit.)

M. Martin Lévrier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi déposée par notre collègue Sophie Briante Guillemont, et examinée aujourd'hui dans le cadre de l'espace réservé au groupe du RDSE, comble une faille manifeste de notre système électoral : l'absence d'un outil fiable permettant de vérifier, en amont, l'éligibilité de chaque candidat aux fonctions électives.

Cette carence dans le contrôle de l'éligibilité a été mise en lumière lors des législatives anticipées de juin 2024. En effet, dans la deuxième circonscription du Jura, un candidat placé sous curatelle renforcée a pu se présenter et recueillir plus de 30 % des suffrages, ce qui a conduit le Conseil constitutionnel à annuler l'élection.

Cet épisode a malheureusement démontré la fragilité de nos mécanismes de vérification et la nécessité d'un dispositif centralisé, accessible et sécurisé.

La réponse apportée par nos collègues à travers cette proposition de loi est à la fois claire et pragmatique : créer un répertoire national des personnes inéligibles à toute fonction élective. Ce fichier recensera les personnes frappées d'une mesure d'inéligibilité prononcée par une juridiction, ainsi que celles qui seraient placées sous mesure de protection juridique – curatelle ou tutelle. Ces données, strictement encadrées, seront mises à la disposition des autorités administratives au moment du dépôt des candidatures, afin de permettre un contrôle automatique, rapide et exhaustif.

Le travail mené par le rapporteur, M. Olivier Bitz, et la commission des lois a permis d'ajuster ce dispositif pour le rendre à la fois plus opérationnel et respectueux des libertés individuelles. Le texte a d'ailleurs été adopté à l'unanimité en commission, ce qui témoigne d'un large accord sur son principe.

Les apports de la commission portent notamment sur la clarification du champ des données inscrites, les modalités de consultation obligatoire du répertoire, ainsi que sur la sécurisation du traitement des informations personnelles. Ces garde-fous traduisent un souci constant d'équilibre entre efficacité administrative et respect des droits fondamentaux.

Je veux également saluer la cohérence de cette initiative avec les recommandations de la Cour des comptes, qui appelait depuis plusieurs années à une plus grande fiabilité du contrôle des candidatures. En ce sens, le texte s'inscrit pleinement dans une logique de modernisation et de transparence de notre vie démocratique.

Le Gouvernement, par votre voix, madame la ministre, a néanmoins souhaité rappeler les défis techniques et financiers liés à la mise en œuvre du dispositif. Son interconnexion avec le casier judiciaire national, la charge potentielle pour les services préfectoraux, ou encore le calendrier très contraint, qui rend difficile toute application avant les municipales de 2026, sont autant de réserves que nous entendons et que nous prenons sérieusement en considération. La question de la gestion du futur répertoire, partagée entre les ministères de la justice et de l'intérieur, mérite ainsi d'être précisée afin d'éviter toute ambiguïté.

Pour autant, ces difficultés techniques ne doivent pas occulter le fondement politique et démocratique de la proposition : garantir la sincérité du scrutin, renforcer la confiance dans nos institutions et doter l'administration d'un outil moderne, fiable, au service de la transparence électorale.

Le groupe RDPI, convaincu de l'utilité de cette réforme, soutiendra pleinement ce texte, qui représente une avancée concrète pour préserver la crédibilité de notre démocratie et sécuriser le travail des services préfectoraux. (Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, INDEP et GEST.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi visant à créer un répertoire national des personnes inéligibles

Discussion générale
Dossier législatif : proposition de loi visant à créer un répertoire national des personnes inéligibles
Article unique (fin)

Article unique

I. – Le chapitre III du titre Ier du livre Ier du code électoral est complété par des articles L. 45-2 à L. 45-8 ainsi rédigés :

« Art. L. 45-2. – I. – Un répertoire national des personnes inéligibles recense, dans les conditions définies au présent article, l'identité des personnes inéligibles, aux seules fins de contrôle de l'absence d'inéligibilité par les autorités compétentes pour recevoir les déclarations de candidature.

« Les autorités compétentes pour recevoir les déclarations de candidature consultent ce répertoire afin de vérifier que les candidats ne font pas l'objet d'une peine d'inéligibilité ni d'une mesure aux fins de protection juridique qui entraîne la perte du droit d'éligibilité.

« II (nouveau). – Le répertoire national des personnes inéligibles recense l'identité des personnes déclarées inéligibles en conséquence :

« 1° De la décision d'une juridiction pénale prononçant une peine ayant pour objet ou pour effet de priver la personne condamnée de son droit d'éligibilité ;

« 2° De la décision d'une juridiction administrative prononçant l'inéligibilité ;

« 3° De la décision du Conseil constitutionnel prononçant l'inéligibilité ;

« 4° De la décision du juge judiciaire prononçant une mesure aux fins de protection juridique d'une personne majeure, lorsqu'une disposition législative en vigueur fait découler de cette décision la perte du droit d'éligibilité de la personne majeure en cause.

« III (nouveau). – Le répertoire national des personnes inéligibles comprend les nom, prénoms, date et lieu de naissance de la personne inéligible.

« Il comporte la date de début de l'inéligibilité et, le cas échéant, la date de fin de l'inéligibilité ainsi que la référence de la décision prononçant l'inéligibilité.

« IV (nouveau). – Les informations nécessaires à la tenue et à la mise à jour du répertoire national des personnes inéligibles sont transmises par voie électronique.

« Les règles relatives au traitement de ces informations sont fixées dans les conditions définies par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.

« Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, fixe les conditions d'application du présent article.

« Art. L. 45-3 à L. 45-8. – (Supprimés) ».

bis (nouveau). – Le I entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 31 décembre 2029.

II. – Les éventuelles conséquences financières résultant pour l'État du I sont compensées, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 10

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« À la date de fin de l'inéligibilité, les données personnelles relatives à la personne concernée sont effacées du répertoire national.

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Nous proposons d'inscrire expressément dans le code électoral l'obligation d'effacer les données à caractère personnel du répertoire national, dès lors que la mesure d'inéligibilité frappant le candidat n'est plus en vigueur.

Bien sûr, on nous objectera que notre amendement est déjà satisfait, puisque l'article 18 du règlement général sur la protection des données (RGPD) pose le principe du droit à la limitation du traitement des fichiers lorsque les données à caractère personnel ne sont plus nécessaires au regard des finalités pour lesquelles elles ont été collectées ou traitées. Néanmoins, il nous semble nécessaire de le faire figurer clairement dans ce texte.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Olivier Bitz, rapporteur. Mon cher collègue, vous avez à la fois présenté votre amendement et exposé les raisons qui vont me conduire à vous en demander le retrait. (M. Guy Benarroche sourit. – Mme Marie-Pierre de La Gontrie s'exclame.) Vous l'avez rappelé, ce que vous proposez est d'ores et déjà satisfait par le RGPD.

Cela étant, je partage vos préoccupations et je souhaite à cet égard vous rassurer : les modalités de gestion du fichier seront précisées par un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil).

Ce cadre – les dispositions du RGPD conjuguées à l'avis de la Cnil – me semble apporter des garanties suffisantes. C'est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur le sénateur ; à défaut j'y serai défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Marie-Pierre Vedrenne, ministre déléguée. Monsieur le sénateur, je suis tout à fait d'accord avec vos propos, mais je rejoins aussi M. le rapporteur : votre amendement est satisfait à la fois par les dispositions du RGPD et les recommandations attendues de la Cnil.

Comme la commission, le Gouvernement vous demande donc le retrait de votre amendement ; à défaut, il y sera défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 1.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 2 rectifié, présenté par Mme Briante Guillemont, M. Bilhac, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel, M. Roux, Mme Jouve et M. Cabanel, est ainsi libellé :

Après l'alinéa 10

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Par dérogation à l'article 777-3 du code de procédure pénale et afin d'assurer l'inscription au répertoire des personnes ayant été privées de leur droit d'éligibilité par une condamnation pénale, une interconnexion, au sens du 3° du I de l'article 33 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, est autorisée entre le casier judiciaire national automatisé et le répertoire national des personnes inéligibles.

La parole est à Mme Sophie Briante Guillemont.