M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Ces amendements relatifs aux entreprises éphémères, véritables chevaux de Troie de la criminalité organisée et des fraudes, notamment aux cotisations sociales, revêtent une importance extrême. Certes, nous avons déjà eu l’occasion d’aborder ce point lors d’autres discussions, mais il demeure fondamental.

Monsieur le ministre, lorsque vous affirmez que nous proposerions des dispositifs tendant à jeter l’opprobre sur des entreprises à partir de simples suspicions de fraude, je ne peux souscrire à votre propos.

À propos d’actions déclenchées par des soupçons de fraude, nous avons, lors de la précédente discussion du texte relatif aux fraudes, voté ici même des amendements concernant les assurés sociaux ; nous avons instauré des peines et des condamnations à leur encontre, à partir de simples suspicions.

Même en considérant qu’il n’est pas bienvenu de condamner des entreprises suspectées, le sujet n’a rien d’anodin, ainsi que l’ont démontré les jeux Olympiques : 10 % d’entreprises éphémères ont profité de ce grand moment pour frauder sur les cotisations. Il ne s’agit pas d’un sujet mineur !

Il est indispensable d’y apporter une réponse dans le cadre de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, car ces cotisations nous échappent, alors que les dépenses sont importantes et que nous cherchons des recettes.

Dès lors, vos arguments ne sauraient tenir : il nous faut voter ces deux amendements.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Monsieur le ministre, en votre qualité de ministre du travail, nous sommes en droit d’attendre de vous des signes et des preuves de votre détermination à lutter contre le travail dissimulé. Ce qui a été déjà voté ne suffit pas.

Vous connaissez l’adage : « Il n’y a pas d’amour, il n’y a que des preuves d’amour » ; il en va de même de la lutte contre le travail dissimulé, il faut que vous donniez des preuves, et celles que vous avez inscrites dans le projet de loi précédent sont insuffisantes.

Les indices que nous évoquons ne sont ni des signaux faibles ni même des « indices sérieux », lesquels suffisent pourtant pour sanctionner les demandeurs d’emploi.

Non, il est ici question de présomptions graves et concordantes. Si vous étiez hostile au principe même de la présomption, vous auriez dû émettre un avis défavorable sur le dispositif similaire applicable aux assurés sociaux !

Au-delà de cette polémique, sur laquelle nous ne reviendrons pas, des présomptions graves et concordantes devraient suffire pour traiter un sujet aussi grave que la lutte contre le travail dissimulé.

Je tiens à souligner que le travail dissimulé partiel est actuellement gagnant : dans de nombreux secteurs, une partie des employeurs y ont recours ; ils sont si peu appréhendés et si peu sanctionnés que la pratique reste rentable ; elle perdurera donc.

Il est indispensable que ces pratiques, terribles pour les droits des travailleurs et, souvent, pour leur sécurité, car les conditions de travail sont à l’avenant, soient démontrées quand elles se produisent et sévèrement sanctionnées.

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour explication de vote.

Mme Frédérique Puissat. Je ne développerai pas davantage mon propos, car j’entrevois l’issue du vote sur ces deux amendements ; je me bornerai à rappeler que nous les avions rejetés lors de l’examen du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales dont j’étais rapporteur, alors qu’ils avaient été déposés dans des termes identiques.

Personne ne considère que les entreprises éphémères constitueraient un non-sujet ; nous l’avons d’ailleurs traité dans le cadre de ce projet de loi. Toutefois, nous avions estimé que ces amendements n’étaient pas opérants et nous avons abordé cette question par le biais d’autres dispositions et l’insertion d’articles additionnels spécifiques, conformément aux orientations qu’Olivier Henno et moi-même avions définies.

Nous pouvons mettre ces amendements aux voix, mais je vous rappelle que nos collègues députés travaillent actuellement sur le texte relatif aux fraudes. Ces amendements y seront déposés et seront peut-être modifiés afin de gagner en efficacité.

Je vous propose donc de laisser les députés œuvrer sur ce projet de loi. Nous nous sommes tous accordés pour exprimer notre satisfaction de voir le Gouvernement déposer un texte consacré à la fraude ; regroupons toutes les dispositions afférentes en son sein, plutôt que de les disperser entre ce texte et le PLFSS.

Par conséquent, je suggère le retrait de ces amendements.

À défaut, par souci de cohérence avec ma position précédente, je voterai de nouveau contre. Ce vote ne signifie pas que nous nous désintéressons des entreprises éphémères, mais nous jugeons ces dispositifs inopérants, les amendements et articles additionnels que nous avons déjà adoptés nous semblant plus efficaces.

M. le président. La parole est à M. Olivier Bitz, pour explication de vote.

M. Olivier Bitz. Je souhaite apporter mon soutien à l’amendement de Mme Goulet, car nous savons bien que la lutte contre la fraude est un travail de longue haleine.

Dans le texte relatif à la lutte contre les fraudes figurent des propositions formulées par notre collègue Nathalie Goulet voilà trois ou quatre ans et qui avaient été rejetées à l’époque par notre assemblée. Elles ont finalement été adoptées.

Je propose donc que nous gagnions un peu de temps : certes, une position a été prise il y a quelques semaines, mais la lutte contre ces entreprises éphémères est absolument prioritaire.

Pour ce qui concerne la perspective du travail de l’Assemblée nationale et de nos collègues députés, pardonnez-moi de vous dire que je fais peu confiance à la forme qu’aura ce texte à sa sortie du Palais-Bourbon.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Madame Poncet Monge, vous me demandez des preuves ; je vous apporterai non pas des preuves d’amour, mais des preuves de désamour de la fraude.

Celles-ci résident d’abord dans l’action de l’Office européen de lutte antifraude (Olaf), qui a saisi 600 millions d’euros l’année dernière grâce à des procédures de gel et de saisie visant les sociétés éphémères.

Elles se manifestent également au quotidien : Tracfin et les services de renseignement placés sous mon autorité me transmettent chaque jour des informations, grâce à la mise en place d’un système en circuit court : lorsque Tracfin détecte une société éphémère, le dossier est immédiatement judiciarisé et les avoirs gelés. Nous saisissons et gelons ainsi des dizaines de millions d’euros chaque trimestre.

Pour être opérante, cette action doit s’inscrire dans le respect du droit. Or en Europe, il est impossible de suspendre l’activité d’une société sur le fondement d’une simple suspicion ; il faut identifier, contrôler, geler, judiciariser et sanctionner. Telle est la chaîne qui fonctionne.

Madame la sénatrice Sollogoub, vous le savez, tout comme Mme Goulet : nous l’avons accompagnée, avec le Premier ministre, auprès des services qui mènent ce combat quotidiennement. Je la remercie d’ailleurs pour le travail très pertinent qu’elle a accompli sur le financement de la criminalité organisée.

Pour être forts et efficaces, nous devons être juridiquement irréprochables. Nous affrontons des organisations criminelles disposant de ressources financières considérables, voire excessives. Cet argent leur permet de s’offrir des avocats et d’engager des procédures pour emboliser le système et gripper la machine, quand nous souhaitons saisir et sanctionner.

Je peux citer des exemples : nous demandons aux tribunaux de commerce de nous signaler les sociétés qu’ils suspectent de fraude, non pour les suspendre, ce que le droit ne permettrait pas, mais pour déclencher un contrôle immédiat. Cette méthode s’avère bien plus efficace que l’amendement que vous défendez.

Par ailleurs, nous exigeons désormais la fourniture des attestations de conformité fiscale et sociale pour toute liquidation amiable. Cela empêche la liquidation amiable de sociétés supportant en réalité de lourdes dettes sociales et fiscales.

Les preuves abondent donc, il ne s’agit pas d’amour, sinon pour la cause que vous portez collectivement, mais de désamour de la fraude.

Mme la sénatrice Puissat a parfaitement raison : nous avons déposé ce projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales concomitamment au projet de loi de finances PLF et au PLFSS afin d’offrir un véhicule juridique solide à vos propositions sur les fraudes et d’éviter ainsi que le Conseil constitutionnel ne les qualifie de cavaliers législatifs.

Nous tenions, en outre, à traiter en même temps les volets fiscal et social, parce que notre approche est devenue singulière : nous sommes bien plus performants en matière de recouvrement fiscal que social…

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Nous transposons donc au social les méthodes qui fonctionnent pour le fiscal.

Les chiffres sont éloquents : sur 16 milliards d’euros de fraude fiscale détectée, nous en recouvrons près de 12 milliards d’euros ; sur 5 milliards d’euros de fraude sociale détectée, nous n’en recouvrons qu’un seul. Ce ratio démontre clairement la nécessité de mettre au service de la sphère sociale les outils éprouvés dans la sphère fiscale, tels que la flagrance, le gel et la saisie.

J’espère vous avoir apporté la démonstration de mes preuves d’amour pour la cause et de désamour pour la fraude !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1001.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 802 rectifié.

(Lamendement est adopté.) – (Marques de satisfaction sur les travées du groupe SER.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 4.

L’amendement n° 771 rectifié bis, présenté par Mmes Gruny, Petrus et Dumont, MM. H. Leroy et Burgoa, Mmes Puissat, Canayer et Belrhiti, MM. Lefèvre, J.P. Vogel et Cambon, Mme V. Boyer, M. Brisson, Mmes Joseph, Lassarade et Malet, MM. Sido, Panunzi, Gueret et Anglars, Mme Aeschlimann et M. Genet, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 243-7 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« En cas de difficultés rencontrées au cours de la vérification, le cotisant a la faculté de s’adresser à l’interlocuteur désigné par le directeur de l’organisme et dont les références lui sont indiquées dès le début des opérations de contrôle. »

La parole est à Mme Pascale Gruny.

Mme Pascale Gruny. L’article L. 243-7 du code de la sécurité sociale dispose que les organismes chargés du recouvrement des cotisations du régime général ont compétence pour contrôler l’application des dispositions de ce code.

Le présent amendement vise à permettre au cotisant, en cas de difficulté rencontrée au cours de la vérification, de saisir un interlocuteur dédié.

À l’heure actuelle, en cas de contrôle, le cotisant se trouve seul face à l’inspecteur ; il apparaît judicieux de permettre le recours à un tiers en cas de difficulté de dialogue. Ce principe existe, du reste, dans le cadre du contrôle fiscal.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement tend à permettre à la personne contrôlée par les Urssaf de s’adresser à un interlocuteur désigné par le directeur de l’organisme en cas de difficulté au cours du contrôle.

Or la personne contrôlée a déjà la faculté de recourir à la médiation en vertu du code de la sécurité sociale ; il ne me paraît donc pas nécessaire d’y ajouter une procédure d’intermédiation.

L’amendement étant pleinement satisfait dans son intention, je sollicite son retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Lors d’un contrôle, la personne ou l’institution contrôlée dispose évidemment de droits, tels que la procédure écrite et la procédure contradictoire. Ce délai de procédure offre d’ailleurs à ceux qui le souhaitent la possibilité d’organiser leur insolvabilité.

De plus, il existe une commission de recours amiable avant le stade contentieux. Ainsi, le cotisant n’est jamais seul face à un contrôleur.

Je rappelle également que, dans le cadre de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte), vous avez institué le droit à l’erreur ; la bonne foi du citoyen ou de l’entreprise est toujours proposée, de prime abord, comme point de départ du travail collectif. Il convient ensuite de caractériser et de prouver la fraude ou le manquement.

J’estime donc que l’amendement est satisfait, car des voies de recours existent déjà.

Si nous introduisions la possibilité de choisir son interlocuteur, je crains qu’il en résulte une grande désorganisation des services, pour des résultats qui ne seront pas nécessairement différents : si vous avez fraudé, vous avez fraudé, l’identité de la personne à qui vous vous adressez n’y changera rien.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

M. le président. Madame Gruny, l’amendement n° 771 rectifié bis est-il maintenu ?

Mme Pascale Gruny. Je visais plutôt les contrôles normaux en entreprise, exempts de fraude. Dans ces situations, des difficultés surgissent, car l’interprétation des textes s’avère de plus en plus complexe, vous en conviendrez.

Il s’agit parfois de questions de personnes. Peut-être faudrait-il alors adresser des messages à l’administration ?

Lors d’un contrôle fiscal, l’ouverture, l’écoute et les explications sont réelles ; avec l’Urssaf, les relations sont toujours beaucoup plus difficiles.

J’entends vos arguments et j’ai été rapporteur sur le droit à l’erreur, ce sujet est, bien entendu, très important.

À mon sens, il convient de transmettre des messages pour que la discussion s’instaure, dans le cadre des contrôles normaux au sein des entreprises.

Je retire cet amendement.

M. le président. L’amendement n° 771 rectifié bis est retiré.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Madame la sénatrice, je saisis mieux votre intention. Il existe effectivement un enjeu culturel : l’application du droit à l’erreur requiert beaucoup de pratique.

J’entends donc que la bonne culture que tente de diffuser la direction générale des finances publiques (DGFiP) doit désormais infuser au sein des Urssaf.

M. le président. L’amendement n° 202, présenté par MM. Durox, Hochart et Szczurek, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 244-3 du code de la sécurité sociale, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « cinq ».

II. – Le présent article s’applique aux créances nées postérieurement au 1er janvier 2026.

La parole est à M. Christopher Szczurek.

M. Christopher Szczurek. Le délai actuel de prescription de trois ans pour le recouvrement des cotisations et contributions sociales entraîne la perte définitive d’un volume très significatif de créances.

Le présent amendement vise à renforcer la soutenabilité financière de la sécurité sociale ainsi que l’équité entre les cotisants en allongeant de trois à cinq ans le délai de prescription applicable aux créances des Urssaf.

Il tend ainsi à rapprocher le régime social du droit commun de la prescription civile et à améliorer le taux de recouvrement effectif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je comprends l’intention de notre collègue, mais je doute que l’allongement du délai permette de résoudre le problème.

Nous touchons là encore à des questions qui ont été abordées lors de l’examen du projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales. Je tiens à saluer une fois de plus l’initiative du Gouvernement, qui a présenté un texte distinct, lequel devait, précisément, rassembler l’ensemble des dispositions relatives à la fraude, qu’elle soit sociale ou fiscale.

L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Le délai est déjà porté à cinq ans en cas de suspicion de travail illégal. Il est fixé à trois ans afin d’assurer la symétrie avec le droit au remboursement des cotisations indûment prélevées.

L’équilibre actuel me semble donc satisfaisant.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 202.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1456 rectifié, présenté par MM. Canévet, Folliot et Fargeot, Mme Sollogoub, MM. S. Demilly, Mizzon, Menonville, Kern et J.M. Arnaud, Mmes Patru et Romagny et MM. Dhersin, Duffourg, Longeot et Delahaye, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La section 2 du chapitre 3 du titre Ier du livre VI du code de la sécurité sociale est complétée par un article L. 613-6-… ainsi rédigé :

« Art. L. 613-6-… . – I. – Lorsqu’il existe des présomptions qu’un prestataire relevant de l’article L. 613-7, qui fournit, par l’intermédiaire d’une plateforme mentionnée à l’article L. 613-6, des services à la personne soumis aux dispositions du titre III du livre II de la septième partie du code du travail, se soustrait à ses obligations en matière de déclaration ou de paiement des cotisations et contributions sociales, des taxes ou du versement libératoire mentionnés au I de l’article L. 613-6-1 du présent code, l’administration ou l’organisme en charge du recouvrement peut signaler ce prestataire à l’opérateur de la plateforme, afin que celui-ci puisse prendre les mesures de nature à permettre à ce prestataire de régulariser sa situation.

« L’opérateur de la plateforme notifie à l’administration ou à l’organisme en charge du recouvrement les mesures prises en application du présent I.

« II. – Si les présomptions persistent après un délai d’un mois à compter de la notification prévue au second alinéa du I ou, à défaut d’une telle notification, à compter du signalement prévu au premier alinéa du même I, l’administration ou l’organisme en charge du recouvrement peut mettre en demeure l’opérateur de la plateforme de prendre des mesures supplémentaires ou, à défaut, d’exclure le prestataire concerné de la plateforme.

« L’opérateur de la plateforme notifie à l’administration ou à l’organisme en charge du recouvrement les mesures prises en application du présent II.

« III. – En l’absence de mise en œuvre des mesures ou de l’exclusion mentionnées au II après un délai d’un mois à compter de la notification prévue au second alinéa du II ou, à défaut d’une telle notification, à compter de la mise en demeure prévue au premier alinéa du même II, les cotisations et contributions sociales, les taxes ou le versement libératoire dont est redevable le prestataire mentionné au I sont solidairement dus par l’opérateur de la plateforme.

« IV. – Les modalités d’application du présent article sont définies par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Michel Canévet.

M. Michel Canévet. Je me propose de défendre également l’amendement suivant.

M. le président. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 1457 rectifié, présenté par MM. Canévet, Folliot et Fargeot, Mme Sollogoub et MM. S. Demilly, Mizzon, Menonville, Kern, Dhersin, Duffourg, Longeot et Delahaye, est ainsi libellé :

Après l’article 4

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le B du II de l’article 6 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation au premier alinéa du présent B, les obligations mentionnées aux articles L. 613-6-1 et L. 613-8 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction résultant des 2° et 3° du I du présent article, sont applicables aux opérateurs de plateforme qui mettent en relation des personnes avec des prestataires soumis aux dispositions du titre III du livre II de la septième partie du code du travail dès la promulgation de la loi n° …-… du … relative à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales si celle-ci intervient avant le 1er janvier 2027. »

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

M. Michel Canévet. Ces deux amendements se rapportent à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, laquelle a introduit la responsabilité des plateformes de services, susceptibles d’être redevables du précompte afin de garantir que les cotisations sociales sont effectivement payées par l’ensemble des prestataires.

Cette disposition soulève deux difficultés.

La première tient à l’urgence de sa mise en œuvre pour certains prestataires, notamment des microentreprises, afin de s’assurer que celles-ci s’acquittent bien de l’ensemble des cotisations sociales.

Deuxièmement, dans d’autres situations, comme les locations de gîtes, cette mesure emportera un effet délétère ; il conviendra donc, à mon sens, de l’adapter.

En l’espèce, le premier amendement vise à anticiper le versement du précompte pour les plateformes mettant en relation des microentreprises, en ramenant l’échéance de 2027 à 2026.

Le second tend à rendre ces dernières solidaires du paiement des cotisations sociales dues.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. S’agissant de l’amendement n° 1456 rectifié, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 a mis en place un mécanisme de précompte des cotisations et des contributions sociales sur les revenus versés par l’opérateur de la plateforme. Ce régime général nous semble suffisant à l’heure actuelle pour empêcher les manquements mentionnés.

En effet, telle qu’elle est rédigée, votre proposition s’appliquerait à toutes les plateformes, et non aux seules structures dédiées aux services à la personne. Or certaines plateformes sont spécialisées dans d’autres domaines et l’adoption de cette mesure serait gênante pour elles.

L’avis est donc défavorable.

Quant à l’amendement n° 1457 rectifié, il vise à anticiper l’application de la réforme prévue dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 – nous effectuons ainsi de petits retours en arrière.

Cette réforme, que nous avons soutenue, entrera en phase pilote en 2026, pour les seules plateformes volontaires. Il n’est pas certain qu’une application obligatoire dès l’année prochaine soit opérationnellement possible ni souhaitable en termes de délai de prévenance.

En outre, il ne serait pas opportun de prévoir une entrée en vigueur précoce pour les seules plateformes de services à la personne.

L’avis est donc également défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je partage l’avis de la rapporteure générale.

La réforme du précompte est très ambitieuse et sa pleine entrée en vigueur est fixée au 1er janvier 2027. Il me semble préférable de nous en tenir à ce dispositif, lequel prévoit déjà, vous le savez, de nombreuses pénalités pour les plateformes ou pour les acteurs qui contreviendraient au mécanisme devant être mis en œuvre.

Je suggère donc un retrait de ces amendements, afin que nous concentrions notre énergie sur la réussite de l’introduction de cette réforme en 2027.

L’année 2026 constituera une année de transition entre le système appelé à prendre fin et l’ambition affichée. Je souhaite donc que nous maintenions la mobilisation des équipes sur la réussite de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2027, plutôt que de leur demander d’accomplir des tâches nouvelles.

M. le président. Monsieur Canévet, les amendements nos 1456 rectifié et 1457 rectifié sont-ils maintenus ?

M. Michel Canévet. Non, je les retire, monsieur le président.

M. le président. Les amendements nos 1456 rectifié et 1457 rectifié sont retirés.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de Mme Sylvie Robert.)