M. Martin Lévrier. Il s’agit d’un amendement de repli : l’idée est simplement, cette fois, d’interdire aux cadres les heures supplémentaires défiscalisées.
Dans mon ancien métier, j’ai vu des cadres supérieurs – fonctionnaires – percevoir jusqu’à 40 000 ou 50 000 euros défiscalisés au titre des heures supplémentaires ; on parle pourtant de gens qui gagnent très bien leur vie. Il faut faire très attention : ces heures doivent être plutôt réservées à des personnes qui ont besoin de pouvoir d’achat.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je souhaite préciser quels sont les publics concernés afin de tordre le cou aux chiffres de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares). La rémunération des heures supplémentaires et complémentaires est, en proportion de la rémunération brute, plus élevée chez les salariés percevant des salaires relativement faibles ou moyens. Autrement dit, les déciles 2 à 6 sont les principaux consommateurs d’heures supplémentaires.
Ce que j’appellerai le mythe des cadres tombe avec cette donnée, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’heures supplémentaires parmi cette catégorie de salariés.
En la matière, les ouvriers sont également très représentés, notamment dans le secteur de la construction. Vous le savez bien, un certain nombre de secteurs connaissent parfois des pics d’activité. Pour de nombreuses entreprises, le dispositif de défiscalisation des heures supplémentaires, au bénéfice des salariés, offre de la souplesse : il n’y a pas forcément assez de travail disponible pour créer un, deux ou trois emplois supplémentaires.
Deux autres éléments méritent notre attention. Plusieurs secteurs d’activité rencontrent aujourd’hui des difficultés pour recruter des personnels répondant à leurs besoins. Près de 500 000 offres d’emploi sont non pourvues, signe que le marché de l’emploi et du travail ne fonctionne pas comme il le faudrait.
Dans ce contexte, la faculté de recourir aux heures supplémentaires permet au moins à celles et à ceux qui le souhaitent de travailler davantage. C’est le fameux « travailler plus pour gagner plus ». Il serait d’ailleurs intéressant de poursuivre dans cette voie, voire d’accélérer encore le mouvement.
Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Concernant le régime applicable aux heures supplémentaires, un certain nombre de dispositions ont été débattues dans le cadre du PLFSS, notamment l’allégement des charges patronales dues sur les heures supplémentaires effectuées dans les entreprises de plus de 250 salariés. Il s’agit, selon moi, d’une mesure intéressante, dont l’objet est d’encourager le travail en réduisant un peu les charges patronales tout en homogénéisant les régimes prévalant dans les petites et dans les grandes entreprises.
Pour ce qui est du plafond de fiscalisation, le dispositif actuel apparaît plutôt bien calibré ; ce débat nous occupe depuis de nombreuses années. L’expérience montre que les heures supplémentaires sont nécessaires dans certains secteurs très particuliers, s’agissant notamment de gérer la saisonnalité. Les montants moyens déclarés atteignent aujourd’hui 2 000, 3 000 ou 4 000 euros par an, selon qu’il s’agit d’employés, d’ouvriers ou de cadres. Les ouvriers réalisent davantage d’heures supplémentaires que les employés. Je pourrai vous communiquer le détail de ces chiffres, monsieur Savoldelli.
Le plafond actuellement en vigueur existe depuis plusieurs années : ce dispositif est stabilisé. Les secteurs concernés ont organisé leur activité autour de ce cadre. Cette « niche fiscale », si l’on retient ce terme, représente environ 5 milliards d’euros, soit autant de pouvoir d’achat supplémentaire pour les travailleurs. S’y ajoute un régime spécifique de charges sociales, de l’ordre de 2 milliards d’euros, qui vise là encore à encourager et à valoriser l’activité accomplie en plus du temps de travail légal.
Je demande donc le retrait de ces amendements ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. La parole est à M. Martin Lévrier, pour explication de vote.
M. Martin Lévrier. Je ne remets absolument pas en cause ce système, que je crois utile et performant tant pour les entreprises que pour les salariés dont les revenus sont relativement faibles, et qui peuvent de cette façon gagner un peu plus.
J’insiste lourdement : je trouve très dommage que ces exonérations, qui sont un manque d’impôt et de cotisations sociales, profitent également à des salariés qui n’en ont pas besoin. À la rigueur, conservons le plafond de 7 500 euros, mais adoptons au moins mon deuxième amendement : qu’au moins les cadres n’aient plus accès à ce dispositif, qui n’est pas utile de ce côté-là.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. J’ai bien compris, monsieur le rapporteur, madame la ministre : vous défendez, dans le PLFSS, le principe des exonérations de charges patronales sur les heures supplémentaires effectuées dans les entreprises de plus de 250 salariés. Nous discutons ici, dans le PLF, du même problème dans sa dimension fiscale.
Je souhaite faire une observation : sur 41 millions de contrats d’emploi signés – volume énorme ! –, seuls 10 % sont des CDI, 90 % relevant de l’intérim, du CDD ou de l’auto-entrepreneuriat. Il y a un sujet !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-301 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-300 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° I-1258 rectifié, présenté par MM. Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 4 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 est abrogé.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Puisque le Sénat n’a pas souhaité remettre en cause le principe de la défiscalisation des heures supplémentaires, nous proposons, à titre de proposition de repli, de corriger l’excès de ce dispositif. Même si certains sont convaincus de sa pertinence, le plafond, relevé à 7 500 euros en 2022, mérite d’être mieux ciblé et même évalué, car, en quelque sorte, ces heures sont financées à l’aveugle.
L’étude conduite en 2012 par Pierre Cahuc et Stéphane Carcillo pour l’Institut des politiques publiques (IPP) montre noir sur blanc que la défiscalisation des heures supplémentaires n’a pas augmenté le travail effectif, quelle que soit la typologie de l’entreprise. Elle a surtout gonflé les déclarations : davantage d’heures inscrites sur les bulletins, mais non davantage d’heures réellement travaillées. Autrement dit, on finance par l’impôt le contraire d’une politique de l’emploi.
Nous proposons de revenir à un plafond de 5 000 euros, ce qui dégagerait environ 750 millions d’euros, une économie utile au service de la justice.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Demande de retrait !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° I-2588 rectifié, présenté par M. Canévet, Mme Havet, MM. Folliot, Dhersin, Courtial, Longeot, Delcros, Bleunven et L. Hervé, Mmes Saint-Pé et Guidez et MM. Maurey et Cambier, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 10 de l’article 93 du code général des impôts est abrogé.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Franck Dhersin.
M. Franck Dhersin. Le présent amendement vise à soumettre à l’impôt sur le revenu les sommes perçues par les arbitres et juges sportifs.
Il n’y a selon nous aucune justification à leur exonération, dont le coût pour le budget de l’État est chiffré à 7 millions d’euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je ferai la même réponse que l’an dernier : voilà une dépense fiscale qui n’est pas évaluée. Il y a un an, j’avais demandé que ce travail soit réalisé. Il m’avait été répondu que ce serait chose faite. Pour nous prononcer utilement, une telle évaluation demeure nécessaire : je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Cette évaluation a bien été réalisée, monsieur le rapporteur général.
M. Franck Dhersin. Bien !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. L’exonération dont nous parlons est strictement plafonnée : les sommes exonérées ne peuvent excéder 14,5 % du plafond annuel de la sécurité sociale ni 6 800 euros. On ne peut donc pas dire que le bénéfice soit énorme…
Par ailleurs, les arbitres sont pour beaucoup des bénévoles. L’objectif de cette niche – que j’ai examinée de près, car, comme vous, je m’intéresse aux dispositifs dont les montants sont faibles, mais dont le contrôle peut coûter cher – est de promouvoir le recrutement et la fidélisation des arbitres. Une autre approche consisterait à augmenter leur rémunération – lorsqu’il y a rémunération –, mais les fédérations sportives estiment ne pas en avoir les moyens financiers.
Il y va donc d’un subtil équilibre entre ce qui est à la charge des fédérations et ce qui relève de l’État et de la collectivité. Je vous ai communiqué l’ensemble des éléments dont je dispose : avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° I-208 rectifié ter, présenté par Mme Girardin, MM. Daubet, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et MM. Roux et Masset, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des impôts est rédigé ainsi :
I. – L’article 150 V est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce dernier est revalorisé du taux d’inflation moyen mesuré sur la période de détention par l’Institut national de la statistique et des études économiques. » ;
II. – Le quatrième alinéa de l’article 150 VC est complété par les mots : « à l’exception des objets d’art au sens de l’article 98 A de l’annexe III ».
II. – Au 2° du II de l’article 150 VK, le taux : « 6 % » est remplacé par le taux : « 12 % ».
La parole est à Mme Annick Girardin.
Mme Annick Girardin. En dix ans, le marché de l’art a explosé de plus de 55 %. La valeur des œuvres a grimpé en flèche et, avec elle, celle du patrimoine de leurs propriétaires.
Dans ce contexte, il faut le dire clairement, la fiscalité française appliquée à l’art est l’une des plus favorables au monde : elle permet d’intégrer les œuvres dans de véritables stratégies d’optimisation financière. Qu’il s’agisse de l’achat, de la détention, de la cession ou même de la succession, notre droit prévoit un ensemble de régimes dérogatoires.
Tous ces dispositifs ne sont pas à jeter. Il faut continuer, bien entendu, à soutenir la création artistique en aidant les artistes et en encourageant la détention et la transmission d’œuvres entre particuliers. Nous ne remettons absolument pas en cause ces principes.
Certains dispositifs offrent toutefois des avantages fiscaux qui ne sont pas justifiés. Ils aboutissent parfois à favoriser la détention privative d’œuvres au détriment de l’accès de tous à la culture et créent un traitement nettement plus favorable que celui qui est appliqué à d’autres types d’actifs. Plusieurs ajustements sont donc nécessaires.
Mon groupe présente à cet effet trois amendements portant articles additionnels après les articles 2 et 3.
Le premier, l’amendement n° I-2588 rectifié, vise à mieux imposer les plus-values de cession. Aujourd’hui, le contribuable peut choisir entre un régime forfaitaire très avantageux et le régime général des plus-values, assorti d’un régime d’abattement pour durée de détention.
Par cet amendement, nous proposons deux évolutions : porter le taux forfaitaire de 6 % à 12 % – ce qui demeure bien inférieur aux 30 % du prélèvement forfaitaire unique (PFU) appliqué aux autres plus-values mobilières ; supprimer l’abattement pour durée de détention, qui efface totalement la plus-value après vingt-deux ans, pour le remplacer par une indexation du prix d’acquisition sur le taux d’inflation moyen constaté pendant la durée de détention, mesure plus juste économiquement et plus cohérente.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Le moins que l’on puisse dire est que la hausse proposée est, sans transition, assez brutale. Elle pourrait d’ailleurs donner lieu à des mécanismes d’optimisation nuisant au rendement potentiel de cette fiscalité applicable aux particuliers.
Nous aurons d’ailleurs l’occasion d’examiner ce sujet en débattant du régime applicable aux entreprises en cas de cession de biens somptuaires.
En outre, l’amendement recèle, par l’indexation sur l’inflation qu’il inclut pour déterminer la plus-value latente brute, un mécanisme difficilement opérant et contraire au principe même de la plus-value. Vous le savez, les ventes d’œuvres d’art dépendent d’abord de l’état du marché et non de l’inflation : avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Plusieurs de vos amendements, madame la sénatrice, concernent le régime fiscal applicable à la détention et à la cession d’œuvres d’art et son éventuelle indexation. Je n’ai pu, dans les délais impartis, en mesurer toutes les conséquences directes et indirectes.
Vous proposez d’harmoniser le régime des œuvres d’art et celui des métaux précieux, bijoux et autres biens de valeur.
Actuellement, vous le savez, ce dernier régime est différencié. Une partie des cessions – c’est le cas, par exemple, pour l’or, l’argent et le platine – sont fiscalisées au taux de 11 %, et ce dès le premier euro, alors que la fiscalité n’est que de 6 % en cas de cession de bijoux et d’objets d’art ou de collection, lorsque le prix est supérieur à 5 000 euros.
L’application de ce seuil permet notamment de soutenir les activités de brocante en exonérant les ventes d’objets anciens d’une valeur inférieure à 5 000 euros.
L’adoption de votre amendement bouleverserait cet équilibre. Elle aurait des effets non négligeables sur l’activité d’un certain nombre de nos commerçants, mais aussi sur celle des chambres et des salles de vente.
Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, afin d’avoir le temps d’examiner en détail ses conséquences.
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Je remercie notre collègue d’avoir déposé ces deux amendements.
J’entends les arguments qui ont été avancés.
Certes, la France est le deuxième pays au monde en ce qui concerne le nombre de ventes réalisées. Il n’en demeure pas moins, comme l’ont montré de nombreux rapports, et notamment celui de la commission d’enquête sénatoriale aux fins d’évaluer les outils de la lutte contre la délinquance financière, dont la rapporteure était Nathalie Goulet, qu’une part grandissante des activités de blanchiment s’effectue, de nos jours, au travers de la vente d’œuvres d’art.
Par conséquent, si l’on veut lutter contre la fraude et le crime organisé, il faut aussi agir en la matière. Il n’y a pas que le narcotrafic : celui-ci n’est qu’une petite niche au sein de la masse globale du crime organisé.
Autrement dit, si l’on veut un État fort et une lutte active contre les pratiques de blanchiment, il faut aussi faciliter significativement le dépôt des déclarations de soupçon relatives au trafic d’œuvres d’art. Or l’augmentation du nombre de déclarations suppose une réforme de notre fiscalité, car celle-ci n’est pas adaptée à cet égard.
En rendant plus pertinente l’imposition sur les ventes d’œuvres d’art, nous permettrions sans doute à votre administration, madame la ministre, d’être plus efficace.
Je soutiens ces deux amendements. J’entends bien qu’il sera nécessaire de vérifier leur articulation avec un certain nombre de dispositions existantes, qu’il conviendra de passer au peigne fin. Mais il sera toujours possible, comme cela arrive souvent lorsque nous adoptons des amendements, de corriger d’éventuelles distorsions au cours de la navette parlementaire ou en commission mixte paritaire.
En tout état de cause, nous ne pouvons pas tenir un double discours : la lutte contre le trafic d’œuvres d’art est un chapitre incontournable de la lutte contre le crime organisé.
M. le président. La parole est à Mme Annick Girardin, pour explication de vote.
Mme Annick Girardin. L’adoption de cette mesure favoriserait l’accès à l’art du grand public, en réduisant les incitations à la détention d’œuvres purement privée. Nous ne visons en effet que les particuliers, et non les entreprises qui font du mécénat : le dispositif que nous proposons concerne des opérations précises et bien identifiées.
Il s’agit de rétablir l’équité fiscale entre les collectionneurs d’art et les investisseurs en bourse, ces derniers ne bénéficiant pas aujourd’hui du même traitement que les premiers au moment de la cession.
Nous voulons également mettre fin à un système – nous allons en parler dans un instant – dans lequel l’achat et la vente d’œuvres d’art sont plus faciles et plus avantageux pour un prince saoudien, par exemple, que pour un ressortissant français.
M. Grégory Blanc. Bien sûr !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-208 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° I-209 rectifié quater, présenté par Mme Girardin, MM. Bilhac, Daubet, Cabanel, Gold et Grosvalet, Mme Guillotin, M. Guiol, Mmes Jouve, Pantel et M. Carrère et MM. Roux et Masset, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 150 VJ est ainsi modifié :
a) Le 5° est abrogé ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les cessions des biens mentionnés au 2° du I de l’article 150 VI acquis au bénéfice d’une première vente directement auprès de son auteur et dans la limite de 50 000 €. »
II. – Le II de l’article 150 UA est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Aux cessions des biens mentionnés au 2° du I de l’article 150 VI acquis au bénéfice d’une première vente directement auprès de son auteur et dans la limite de 50 000 €. »
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Annick Girardin.
Mme Annick Girardin. Actuellement, comme je viens de le dire, il est plus intéressant de vendre un objet d’art à l’exportation ou à un investisseur étranger qu’à un investisseur national, car les non-résidents ne sont pas imposés sur les plus-values de cession.
Notre droit fiscal facilite ainsi la fuite des œuvres d’art à l’étranger, ce qui est totalement contraire à ce que nous souhaitons faire, à savoir soutenir la création, la culture et les musées français.
Ce régime d’imposition, dont les critères sont très opaques, ne s’applique pas à l’ensemble de notre patrimoine culturel ; il ne protège pas toutes les œuvres qui suscitent l’appétit des investisseurs. Le dernier exemple remonte à 2014 – il y en a peut-être d’autres, mais je ne les connais pas –, lorsque le Qatar est devenu l’heureux propriétaire du célèbre portrait de Gustave Courbet, Le Désespéré. Celui-ci sera exposé, dès 2030, à Doha, dans le futur musée d’art moderne et contemporain, sans aucune retombée fiscale pour la France, faute de taxation.
La question est donc de savoir comment et à quel moment nous déciderons de faire autrement, afin de ne plus favoriser les propriétaires étrangers ; elle est aussi de savoir quel soutien au développement culturel nous souhaitons promouvoir.
Parallèlement, nous proposons une mesure visant à soutenir les jeunes artistes, qui dynamisent notre création artistique.
Les deux aspects vont de pair : d’un côté nous taxons, de l’autre nous aidons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable – nous venons d’en débattre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Ce sujet est lié au précédent, tout en étant un peu différent.
Madame la sénatrice, les conventions fiscales disposent que l’on taxe là où le propriétaire de l’objet est fiscalement résident.
Si votre amendement était adopté, madame la sénatrice, la France serait le seul pays à imposer de cette manière les transactions dont il est question. Par conséquent, celles-ci auraient lieu ailleurs et la France n’abriterait plus les activités qui leur sont liées, quand bien même ces transactions ne rapportent pas directement de recettes fiscales.
Par ailleurs, l’exonération fiscale que vous proposez, dans la limite de 50 000 euros, en cas de première acquisition directement auprès d’un peintre ou d’un créateur, serait contraire à l’objectif – le taux actuellement en vigueur, je le rappelle, est de 6 %.
Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Je souhaite revenir brièvement sur l’amendement précédent, par lequel nos collègues proposaient de porter de 6 % à 12 % le taux de la taxe forfaitaire en cas de cession d’une œuvre d’art.
Alors que le taux du PFU est de 30 %, je trouve que cette proposition était des plus raisonnables.
Je n’apprends rien à personne, il est des objets ou prestations artistiques dont la valeur est supérieure à celle de l’immobilier ; c’est ainsi. Il en va de même pour certains bijoux et pour d’autres types de biens qui font l’objet de transactions internationales.
J’y insiste, alors que le PFU est à 30 %, il était simplement proposé de porter de 6 % à 12 % le taux de la taxe forfaitaire en cas de cession d’une œuvre d’art.
J’ai vraiment du mal à comprendre comment un tel amendement – et ce n’est pas mon groupe qui l’a déposé – n’a pu réunir une majorité d’entre nous.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-209 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° I-602 rectifié, présenté par M. Fargeot, Mme Billon, MM. Longeot, Delcros et Courtial, Mme Loisier, MM. Levi et Verzelen et Mme Jacques, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 4 quater du VIII de la première sous-section de la section II du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À l’intitulé, le mot : « partielle » est supprimé et sont ajoutés les mots : « et de la contribution au remboursement de la dette sociale » ;
2° L’article 154 quinquies est ainsi modifié :
a) À la première phrase du I, les mots : « , à hauteur de 6,8 points ou, pour les revenus mentionnés au II de l’article L. 136-8 du même code, à hauteur de 3,8 points lorsqu’elle est prélevée au taux de 3,8 % ou 6,2 %, à hauteur de 4,2 points lorsqu’elle est prélevée au taux de 6,6 % et à hauteur de 5,9 points lorsqu’elle est prélevée au taux de 8,3 %, » sont supprimés ;
b) Le même I est complété par une phrase ainsi rédigée : « La contribution prévue au I de l’article 14 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est admise en déduction du revenu imposable de l’année de son paiement. » ;
c) Au premier alinéa du II, les mots : « , à hauteur de 6,8 points » sont supprimés.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Daniel Fargeot.
M. Daniel Fargeot. Cet amendement vise à rendre intégralement déductibles la contribution sociale généralisée (CSG) et la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) de l’assiette de l’impôt sur le revenu.
Il s’agit de remédier à une situation injuste où les contribuables paient de l’impôt sur l’impôt.
Et pour cause, alors que la CSG est prélevée au taux de 9,2 %, elle n’est déductible que sur une fraction de 6,8 %, la CRDS n’étant quant à elle pas déductible, d’où s’ensuit, au total, une fraction imposable de 2,9 %.
Prenons le cas d’une rémunération brute de 2 000 euros : le revenu réel net de CSG-CRDS est de 1 779 euros, mais le contribuable est imposé à l’impôt sur le revenu sur une base de 1 826 euros. Il paie donc chaque mois de l’impôt sur 47 euros dont il ne dispose pas, puisqu’ils ont déjà été prélevés au titre de la CSG et de la CRDS.
De plus, les recettes de CSG et de CRDS étant destinées aux organismes de sécurité sociale, il serait à la fois juste et logique de les traiter comme des cotisations obligatoires, en les rendant donc intégralement déductibles du revenu imposable.