PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias

vice-président

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L'amendement n° I-171 rectifié bis est présenté par M. Daubet, Mme Briante Guillemont, MM. Bilhac, Cabanel, Gold, Grosvalet et Guiol, Mmes Jouve, Pantel, M. Carrère et Girardin et MM. Roux et Masset.

L'amendement n° I-396 est présenté par MM. P. Joly et Chantrel.

L'amendement n° I-1224 rectifié est présenté par MM. Mohamed Soilihi et Lemoyne, Mme Duranton, MM. Patriat, Rambaud, Fouassin, Patient, Buis et Buval, Mmes Cazebonne et Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke et Lévrier, Mmes Nadille et Phinera-Horth, M. Rohfritsch, Mme Schillinger, M. Théophile et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L'article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « que son acquisition donne lieu à un transfert de propriété, au sens de l'article L. 211-17 du même code, » sont supprimés ;

b) Au deuxième alinéa, après la première occurrence du mot : « de », sont insérés les mots : « l'exécution d'un ordre d'achat ou, à défaut, de » ;

c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Cette taxe s'applique également à la souscription d'un contrat financier dérivé lié à des actions, ou à un indice qui réplique des actions, de sociétés mentionnées au premier alinéa. » ;

2° Le 4° du II est complété par les mots : « , que l'acquisition donne lieu ou non à un transfert de propriété » ;

3° Le VI est ainsi rédigé :

« VI. – La taxe est liquidée, recouvrée et contrôlée par la direction générale des finances publiques, notamment à partir du registre tenu par l'autorité des marchés financiers au titre de l'article 26 du règlement (UE) n° 600/2014 du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers et modifiant le règlement (UE) n° 648/2012. » ;

4° Au premier alinéa du VII, après la seconde occurrence du mot : « titre, », sont insérés les mots : « ou même sans livraison du titre, » ;

5° La seconde phrase du VIII est ainsi modifiée :

a) Après le mot : « précise », sont insérés les mots : « , que l'acquisition donne lieu ou non à un transfert de propriété au sens de l'article L. 211-17 du même code, » ;

b) Après le mot : « concernées » , sont insérés les mots : « lorsqu'ils existent » ; 

6° Les IX, X et XI sont abrogés.

La parole est à M. Raphaël Daubet, pour présenter l'amendement n° I-171 rectifié bis.

M. Raphaël Daubet. Cet amendement vise à confier le recouvrement de la TTF à la DGFiP, avec l'appui de l'Autorité des marchés financiers, afin d'assurer une collecte plus fiable, plus complète et mieux sécurisée de cette taxe.

Il est nécessaire d'adopter cette disposition pour résoudre un problème connu de tous ici.

M. le président. L'amendement n° I-396 n'est pas soutenu.

La parole est à M. Bernard Buis, pour présenter l'amendement n° I-1224 rectifié.

M. Bernard Buis. Cet amendement de mon collègue Thani Mohamed Soilihi a pour objet de renforcer l'efficacité de la taxe sur les transactions financières par deux mesures concrètes.

D'une part, on en élargirait l'assiette en intégrant les opérations intraday, ces transactions réalisées dans la même journée qui échappent aujourd'hui à la taxe. Les teneurs de marché, essentiels à la fluidité des échanges, en demeureraient toutefois exemptés. Nous demandons également d'élargir le périmètre de la TTF aux produits dérivés sur les actions et aux dérivés de gré à gré, à l'exception de ceux qui sont utilisés pour couvrir des risques. Tout cela aurait un avantage réel : on capterait une partie importante de la spéculation financière aujourd'hui non taxée, tout en préservant les opérations économiquement utiles.

D'autre part, en confiant le recouvrement de la taxe à la DGFiP, on centraliserait pour mieux collecter.

M. le président. L'amendement n° I-958 rectifié bis, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Bilhac, Cabanel, Daubet, Gold, Grosvalet et Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mmes Pantel, M. Carrère et Girardin et MM. Roux et Masset, est ainsi libellé :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L'article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « , que son acquisition donne lieu à un transfert de propriété, au sens de l'article L. 211-17 du même code, » sont supprimés ;

b) Au deuxième alinéa, après les mots : « cadre de », sont insérés les mots : « l'exécution d'un ordre d'achat ou, à défaut, de » ;

c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Cette taxe s'applique également à la souscription d'un contrat financier dérivé lié à des actions, ou à un indice qui réplique des actions, de sociétés mentionnées au premier alinéa. » ;

2° Le 4° du II est complété par les mots : « , que l'acquisition donne lieu ou non à un transfert de propriété » ;

3° Au premier alinéa du VII, après la seconde occurrence du mot : « titre, » , sont insérés les mots : « ou même sans livraison du titre, » ;

4° La seconde phrase du VIII est ainsi modifiée :

a) Après le mot : « précise » , sont insérés les mots : « , que l'acquisition donne lieu ou non à un transfert de propriété au sens de l'article L. 211-17 du même code, » ;

b) Après le mot : « concernées », sont insérés les mots : « lorsqu'ils existent » ;

II. – Le I entre en vigueur le 1er septembre 2026.

La parole est à M. Raphaël Daubet.

M. Raphaël Daubet. Cet amendement de ma collègue Sophie Briante Guillemont vise, lui aussi, à taxer l'ensemble des transactions, en fusionnant les deux volets actuels de la TTF. On ferait de la transaction même le fait générateur de la taxe, au lieu du transfert de propriété.

Les opérations intrajournalières cesseraient ainsi de constituer une zone franche, le dispositif proposé maintenant toutefois les exemptions utiles, notamment pour la tenue de marché.

M. le président. L'amendement n° I-1725, présenté par M. G. Blanc, Mme Senée, MM. Dossus, Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le I de l'article 235 ter ZD du code général des impôts, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :

« I… – La taxe est également due sur les acquisitions à titre onéreux de produits dérivés dont le sous-jacent est constitué, en tout ou partie, par une ou plusieurs actions mentionnées au I, notamment les options, warrants et contrats à terme.

« Sont exclues de cette taxe les acquisitions de produits dérivés qualifiés d'instruments de couverture au sens de la réglementation européenne applicable. »

La parole est à M. Grégory Blanc.

M. Grégory Blanc. Je suis, bien évidemment, favorable à l'élargissement de l'assiette de la TTF à l'ensemble des produits dérivés et structurés.

J'anticipe cependant la réponse qui nous sera faite : « C'est contraire au règlement européen. » Aussi, je présente deux amendements visant à contourner les arguments qui nous ont été opposés l'année dernière.

Oui, il convient d'élargir la taxe à l'ensemble des produits structurés. Toutefois, il existe des produits que la réglementation européenne qualifie d' « instruments de couverture ».

Je propose donc, par cet amendement-ci, de les exclure de l'élargissement proposé afin de prévenir toute difficulté avec l'Europe.

Par voie de conséquence, et dans le même esprit que celui qu'ont exprimé les orateurs précédents, l'amendement n° I-1724 qui suit vise à étendre le dispositif à l'ensemble des opérations intraday. Notre objectif est le même ; seule la formulation diffère, afin d'éviter tout contentieux européen.

M. le président. L'amendement n° I-1724, présenté par M. G. Blanc, Mme Senée, MM. Dossus, Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le I de l'article 235 ter ZD du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « À défaut de transfert de propriété constaté conformément audit code, la taxe est due dès lors que les titres sont comptabilisés sur le compte-titres de l'acquéreur. »

Cet amendement a déjà été défendu.

L'amendement n° I-957 rectifié bis, présenté par Mme Briante Guillemont, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Gold, Grosvalet et Guiol, Mmes Jouve, Pantel et Girardin et MM. Roux et Masset, est ainsi libellé :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. - L'article 235 ter ZD du code général des impôts est ainsi modifié :

1° Le VI est ainsi rédigé :

« VI. – La taxe est liquidée, recouvrée et contrôlée par la direction générale des finances publiques, notamment à partir du registre tenu par l'autorité des marchés financiers au titre de l'article 26 du règlement (UE) n° 600/2014 du 15 mai 2014 concernant les marchés d'instruments financiers. » ;

2° Les IX, X et XI sont abrogés.

II. - Le I entre en vigueur le 1er septembre 2026.

III. – La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle à l'accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Annick Girardin.

Mme Annick Girardin. Par le biais de cet amendement, ma collègue Sophie Briante Guillemont entend rappeler pourquoi il est, a minima, nécessaire de recentraliser le recouvrement de la TTF. Le rapport d'information sur l'application des mesures fiscales du 30 septembre 2025 l'a clairement établi, reprenant les critiques déjà formulées par la Cour des comptes dans une enquête de 2017.

Nous nous heurtons à plusieurs limites : aucun bilan n'a été réalisé sur le protocole conclu avec Euroclear France ; les contrôles s'avèrent insuffisants ; la rémunération de cet organisme manque totalement de transparence ; enfin, le suivi budgétaire est particulièrement difficile.

M. le président. L'amendement n° I-2218, présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

La collecte de la taxe sur les transactions financières prévue à l'article 235 ter ZD du code général des impôts est assurée par la direction générale des finances publiques, avec le soutien de l'Autorité des marchés financiers.

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. Cet amendement a le même objet que le précédent.

La collecte de la taxe sur les transactions financières a été confiée en 2012 à un acteur privé, Euroclear. Or les différents rapports, notamment celui qui a été consacré cette année à l'application des mesures fiscales, ont pointé l'absence de bilan du protocole signé avec cet organisme, ainsi qu'un défaut de contrôle.

L'ONG Action Santé Mondiale a par ailleurs démontré qu'une part significative des activités financières échappait aujourd'hui à cette taxe, sans véritable justification. Cela laisse supposer l'existence d'erreurs massives dans les déclarations. Les pertes fiscales pour l'État sont estimées à près de 2 milliards d'euros.

Tout en apportant mon soutien à l'ensemble des amendements visant à améliorer le rendement de la taxe, je tiens à rappeler que celle-ci, initialement largement fléchée vers la solidarité internationale, ne l'est désormais plus.

Dans ce budget, outre le choix du Sénat de baisser toutes les recettes proposées, je déplore la chute libre des crédits de l'aide publique au développement ; cela emportera, in fine, la fin d'un certain nombre de programmes de solidarité internationale, ce qui est dramatique. Nous savons que l'épidémie de sida progresse dans plusieurs pays. Le retrait des États-Unis, conjugué à la baisse du soutien de la France à de multiples programmes de solidarité, a dès aujourd'hui des conséquences directes sur la vie des populations.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La TTF est, à l'échelle européenne, un phénomène presque exclusivement français, ce qui nuit quelque peu à notre compétitivité.

Ces amendements visent à en élargir l'assiette, à en rehausser le taux, ou encore à en modifier les modalités de recouvrement. La commission a émis un avis défavorable sur chacun d'entre eux, quel qu'en soit le dispositif exact.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre. Nous pouvons toujours augmenter le taux de 0,1 point chaque année, mais l'accumulation de ces hausses finirait par rendre la taxe excessive. Nous l'avons déjà relevée de 0,1 point l'an dernier pour atteindre 0,4 %, un niveau qui dépasse celui de la plupart des pays européens abritant des bourses concurrentes, à commencer par l'Allemagne. Certes, le Royaume-Uni applique un taux de 0,5 %, mais sur une assiette bien plus restreinte.

Le Gouvernement est donc défavorable à tous les amendements tendant à augmenter le taux.

S'agissant de l'élargissement de l'assiette aux produits dérivés, j'appelle à la vigilance. Il est très difficile de définir exactement ces produits dérivés. Au-delà du problème de couverture que vous avez évoqué se posent les questions du notionnel, de l'échéance, etc. Franchement, nous risquons de donner naissance à une usine à gaz très dangereuse. Il en va de même pour l'intrajournalier.

Il convient, en outre, de laisser la gestion de cette taxe à Euroclear. Faire réaliser tous ces calculs par la DGFiP exigerait des recrutements massifs et le développement d'outils informatiques extrêmement sophistiqués, qui existent, de fait, au sein de la société de clearing. Il faut donc maintenir le dispositif actuel.

J'engage surtout le Sénat à conserver le taux à son niveau actuel. Une hausse finirait par obérer la compétitivité de la place de Paris, qui compte parmi les plus belles du monde.

Je rappelle enfin que, depuis un an, les recettes de la taxe sur les transactions financières ne sont plus affectées à l'aide publique au développement.

M. Thomas Dossus. C'est un problème !

M. Roland Lescure, ministre. Nous pouvons débattre de cette aide – vous aurez cette discussion dans quelques jours – comme nous pouvons débattre de la TTF, mais ces deux sujets sont totalement disjoints. On ne saurait arguer de l'un pour augmenter l'autre, ou inversement.

L'avis est défavorable sur l'ensemble de ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour explication de vote.

M. Akli Mellouli. Monsieur le ministre, vous avez raison : ce qui était possible en 2024 et auparavant ne l'est plus en 2025 et ne le sera apparemment pas plus en 2026. Pourtant, cette taxe avait été instaurée, comme la taxe sur les billets d'avion par le président Chirac, spécifiquement pour financer l'aide au développement.

Nous vous soumettons des recettes qui ne pèsent pas sur les Français. Les acteurs financiers eux-mêmes vous le confirmeront ; ce n'est pas moi qui l'affirme, mais bien le secteur concerné, nous pouvons en débattre quand vous voulez !

L'année dernière, 2 milliards d'euros ont été retirés à l'aide au développement. Cette année, une nouvelle coupe de 700 millions d'euros est envisagée. Cette manne contribuerait, ne serait-ce qu'indirectement, à renflouer ces caisses.

Vous invoquez parfois l'humanisme et le réalisme. Or, monsieur le ministre, nous sommes précisément au cœur de ces enjeux.

Pour ce qui est de l'humanisme, la baisse de ces aides met en péril plus de 20 millions de personnes ; la réalité, ce sont des enfants et des femmes menacés de mort ! Cette situation met à mal notre esprit de solidarité. Si nous aspirons à un monde solidaire, il nous appartient d'en faire naître les prémices. Oserai-je rappeler que la fraternité, nourrie par la bienveillance, figure parmi les valeurs de la République ?

S'agissant du réalisme, j'ai pu constater la situation sur le terrain. L'enjeu est aussi climatique. Si nous voulons éviter les déplacements de populations et permettre à ces dernières de vivre dignement chez elles, il est impératif de les aider. Le climat contraint les gens à migrer ; c'est une question de survie.

L'enjeu est également sanitaire ; ce n'est pas un hasard si mon collègue a cité l'ONG Action Santé Mondiale. Les épidémies nous atteignent. Depuis la pandémie de covid-19, nous nous savons interconnectés. Contre le dérèglement climatique et la maladie, il n'existe ni visa, ni barrière, ni frontière !

Enfin, cette aide constitue un levier diplomatique essentiel, notamment en Afrique, un continent où la France perd aujourd'hui du crédit. Nous donnons une mauvaise image de nous-mêmes ; ce sont de mauvais signaux que la France envoie à l'humanité et à la planète.

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.

M. Grégory Blanc. Je souhaite aborder deux points.

Le premier rejoint les arguments que j'ai développés lors de la discussion générale et que vient de rappeler mon collègue Akli Mellouli. Augmenter le budget des armées sans accroître les moyens de l'aide au développement revient à jeter les pays du Sud dans les bras de la Chine et de la Russie. Nous devons articuler ces deux volets. À travers le débat sur la TTF se fait jour la nécessité de nous doter des moyens d'une politique cohérente.

S'agissant de la TTF, j'attends des éclaircissements sur un certain nombre d'éléments. Cette taxe vise uniquement le marché des actions des entreprises dont la capitalisation dépasse un milliard d'euros. En revanche, elle épargne les produits ayant pour sous-jacent ces mêmes actions. Pourquoi une telle distorsion ? Il faudrait tout de même introduire de la cohérence.

J'en viens à mon second point. Monsieur le ministre, j'ai besoin que vous m'expliquiez une chose : il est incompréhensible que Bercy ne soit pas en mesure d'appliquer la TTF sur des produits dérivés, alors que ses services parviennent parfaitement à percevoir la contribution sociale généralisée (CSG). Je demande des explications, car l'argumentation servie chaque année est identique : il serait trop complexe de soumettre ces produits à la TTF.

Pourtant, l'administration sait appliquer les barèmes existants dès lors que des plus-values sont réalisées. Je veux bien l'entendre pour les opérations intrajournalières, à la rigueur, mais pour le reste, j'attends vos précisions.

C'est la raison pour laquelle j'ai déposé deux amendements, en excluant les opérations de couverture.

De deux choses l'une : soit il existe une volonté d'instaurer une égalité de traitement fiscal pour l'ensemble des produits mis sur les marchés, soit cette volonté fait défaut. Aujourd'hui, franchement, en inversant la perspective, on pourrait presque considérer que nous pénalisons le marché des actions des entreprises cotées à plus d'un milliard d'euros. Il est impératif d'appliquer un traitement égal à l'ensemble des produits financiers.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Je ne me placerai pas sur le terrain de l'aide publique au développement, bien que je comprenne qu'il soit pertinent de l'évoquer.

Ce qui m'étonne dans cette affaire, c'est que l'État, sous plusieurs gouvernements successifs, accepte de privatiser une mission de service public. Euroclear, société privée, recouvre des impositions de toute nature, et cela ne semble déranger personne. À ce compte-là, autant privatiser Bercy !

Au-delà du débat sur l'assiette – faut-il taxer uniquement les actions, inclure les produits dérivés, ou encore le high frequency trading (HFT) ? –, comment le Parlement peut-il consentir à déléguer le pouvoir de recouvrement à une société privée ? Apparemment, cette situation ne semble susciter aucun émoi ; M. le ministre se contente d'invoquer la technicité excessive du sujet pour laisser agir Euroclear.

Par ailleurs, j'entends notre rapporteur général arguer de la compétitivité. Or cette taxe rapporte au bas mot 8 milliards d'euros en Grande-Bretagne ; elle existe en Corée du Sud, à Taïwan, à Hong Kong, sans pour autant avoir affaibli l'attractivité de ces places financières. Ici, pourtant, nous glosons sur une atteinte à la place de Paris. Après le Brexit, nous avons spéculé sur l'accroissement de son attractivité. Depuis 2012, année de création de la TTF, cette attractivité ne s'est pas véritablement démentie.

Je ne comprends pas que nous acceptions de transférer une mission régalienne à une entreprise privée et je m'en étonne grandement.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Roland Lescure, ministre. Je souhaite simplement répondre à M. le sénateur Grégory Blanc sur la distinction entre la CSG et la taxe sur les transactions financières.

La CSG frappe les revenus : ce sont donc les sommes effectivement versées qui se trouvent taxées ; en revanche, la TTF porte sur des notionnels, dont la valorisation est extrêmement difficile.

Ces deux mécanismes n'ont rien de commun. Ils appréhendent deux réalités totalement distinctes : du stock et du flux. Dans le premier cas, la perception de fonds déclenche l'imposition ; dans le second, il faut estimer la valeur d'un produit dérivé, exercice par nature extrêmement délicat en matière fiscale.

M. Grégory Blanc. Mais enfin, il s'agit bien au final de gagner de l'argent !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1273 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-189 rectifié.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1459.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-146, I-170 rectifié ter, I-595 rectifié, I-1399 et I-2337.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-171 rectifié bis et I-1224 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-958 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1725.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1724.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-957 rectifié bis.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-2218.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° I-1274, présenté par M. Savoldelli, Mme Cukierman, M. Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l'article 11

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le chapitre III du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par une section… ainsi rédigée :

« Section…

« Surtaxe sectorielle et additionnelle sur les transactions financières relatives aux entreprises cotées de la défense »

« Art. 235 quater

« I. – À compter du 1er janvier 2026, il est institué une surtaxe sectorielle additionnelle à la taxe sur les transactions financières prévue à l'article 235 ter ZD, spécifiquement applicable aux acquisitions de titres émis par les entreprises dont l'activité principale consiste en la production, l'entretien, la recherche, le développement ou la commercialisation de matériels de guerre, d'armes, de munitions et de leurs éléments définis aux 1° et 2° du I de l'article L. 2331-1 du même code, lorsque leur chiffre d'affaires consolidé excède 400 millions d'euros.

« II. – La surtaxe est due à raison des acquisitions mentionnées au I de l'article 235 ter ZD lorsqu'elles portent sur des titres admis aux négociations sur un marché réglementé ou organisé, émis par des entreprises relevant de l'article L. 2332-1 du code de la défense.

« La surtaxe s'applique à l'ensemble des instruments financiers composés ou dérivés dont le sous-jacent est constitué, en tout ou partie, de titres émis par les entreprises mentionnées au précédent alinéa.

« III. – La surtaxe est assise sur :

« 1° La valeur d'acquisition des titres mentionnés à l'article 235 ter ZD ;

« 2° La valeur notionnelle des instruments financiers dérivés ou structurés dont le sous-jacent relève du même article ;

« 3° La contre-valeur, exprimée en euros, des opérations libellées en devises portant sur les titres mentionnés au II.

« IV. – La surtaxe est due par l'acquéreur final des titres, y compris lorsque l'opération est réalisée par l'intermédiaire d'un prestataire de services d'investissement ou d'un teneur de compte-conservateur.

« V. – Le taux de la surtaxe est fixé comme suit :

« 1° 0,6 % lorsque la part du chiffre d'affaires de l'émetteur provenant des activités mentionnées au I est comprise entre 20 % et 50 % ;

« 2° 0,8 % lorsque cette part est comprise entre 50 % et 70 % ;

« 3° 1,1 % lorsque cette part excède 70 %.

« VI. – La surtaxe est établie, recouvrée et contrôlée selon les modalités applicables à la taxe sur les transactions financières. Les obligations déclaratives afférentes portent sur l'ensemble des opérations mentionnées au III. Par dérogation, le II de l'article 235 ter ZD ne s'applique pas à la surtaxe prévue au I. »

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Le présent amendement vise à endiguer la valorisation boursière des engagements en faveur de la guerre.

Les conflits ou menaces de conflits peuvent en effet constituer une aubaine pour plus d'une entreprise qui, espérant en particulier profiter de la commande publique, choisirait de devenir dépendante de la production de produits militaires. Les transactions ainsi conclues doivent donc être taxées, pour éviter que la guerre ne devienne un indice boursier alléchant susceptible d'encourager des redéploiements dans ce sens belliqueux.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. À défaut d'un retrait, il sera défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Roland Lescure, ministre. Même avis !

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-1274.

(L'amendement n'est pas adopté.)