M. Laurent Nunez, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, madame la rapporteure spéciale, madame la rapporteure pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, aujourd'hui, puis le lundi 8 décembre, le Sénat va examiner les missions qui composent le budget du ministère de l'intérieur. C'est une satisfaction pour moi, car le projet de loi de finances pour 2026 traduit budgétairement de véritables priorités.

Ce projet de budget est au service de la sécurité des Français : nous y renforçons les moyens de la lutte contre les différentes formes de menaces, en particulier le narcotrafic et le terrorisme.

Le projet de loi de finances prévoit de porter le budget du ministère à 24,5 milliards d'euros l'an prochain, soit une hausse de 587 millions d'euros. Aussi l'adoption de ce texte est-elle essentielle : elle conditionne l'octroi des ressources nécessaires à nos forces de sécurité et de secours.

Mais les enjeux qu'embrasse le ministère vont, évidemment, bien au-delà de la sécurité. L'examen des crédits de la mission AGTE, qui nous réunit ce jour, le fait clairement apparaître.

Le vote du projet de loi de finances doit également permettre, en 2026, l'organisation des élections municipales et sénatoriales – l'ensemble des orateurs l'ont rappelé –, mais aussi la poursuite de la refondation de l'administration territoriale, qui assure la présence de l'État au plus proche de nos concitoyens.

En 2026, la mission AGTE voit ses crédits croître de 272,1 millions d'euros. Cette évolution résulte principalement de la hausse des moyens consacrés à l'organisation des élections municipales, centrales dans la vie démocratique de notre pays, en tenant compte des réformes relatives aux modalités de scrutin à Paris, Lyon et Marseille.

La mission comprend aussi, évidemment, les crédits afférents à la tenue des élections sénatoriales. Ce sont ainsi 200 millions d'euros supplémentaires, par rapport au précédent exercice, qui sont alloués pour 2026 au programme 232 « Vie politique ».

Le programme 354 « Administration territoriale de l'État » doit lui aussi bénéficier d'une augmentation de crédits, de l'ordre de 64 millions d'euros. Le projet de loi de finances pour 2026 constitue en effet une nouvelle étape dans la refondation de l'État local.

Il est prévu la création de 50 ETP et la masse salariale est rehaussée, ce qui permettra la mise en œuvre de plans de renfort temporaires au profit des services préfectoraux chargés de l'accueil des étrangers et des centres d'expertise et de ressources dédiés à l'instruction des demandes de titres, les CERT.

Le réarmement de l'État territorial passe, en outre, par la poursuite du rattrapage du retard de l'investissement immobilier dans les préfectures et dans les directions départementales interministérielles, ainsi que par la modernisation des infrastructures et des services numériques.

Le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur » connaît, quant à lui, une forte baisse de 134 millions d'euros de ses crédits. Cette réduction démontre que le ministère de l'intérieur sait établir ses priorités, dans un contexte budgétaire particulièrement exigeant.

Bien que le ministère doive faire face à des besoins toujours croissants, il consent un effort d'économies, qui porte notamment sur son administration centrale.

La baisse des crédits du programme découle surtout de la révision du calendrier des paiements au titre des grands projets : je pense en particulier à la réalisation du site unique de la DGSI et à la prise en compte du taux de couverture en matière de vidéoprotection.

Concernant le FIPD, j'ai entendu la préoccupation du Sénat ; nous en reparlerons lors de la discussion des amendements.

La logique de priorisation dans laquelle nous nous inscrivons permettra, en dépit de la réduction de l'enveloppe allouée au programme 216, de poursuivre l'effort en matière numérique, avec le déploiement à venir du réseau Radio du futur, ou RRF, et le renforcement de la mobilisation de l'intelligence artificielle, au service de l'efficacité de l'action publique.

Nous nous donnons également les moyens de continuer la construction du projet du site unique de la DGSI et de finaliser l'installation de près de 2 700 agents d'administration centrale sur le site Universeine, à Saint-Denis. Il en résultera une économie de 35 millions d'euros par an.

L'effort engagé précédemment en matière d'action sociale sera poursuivi, avec une hausse de crédits de 10 millions d'euros.

Enfin, si le programme 216 doit bénéficier de la création de 50 ETP, cette évolution du schéma d'emplois répond avant tout à un objectif de rationalisation de la dépense publique : il s'agit de réinternaliser les compétences, notamment en matière numérique, pour lesquelles le recours à des prestations extérieures s'avère plus coûteux.

La discussion du budget du ministère de l'intérieur pourra être poursuivie lundi. Cela étant, comme vous l'aurez noté, le vote des crédits de la mission AGTE par votre assemblée revêt une importance particulière, eu égard notamment aux échéances électorales prochaines. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP. – Mme Frédérique Puissat applaudit également.)

administration générale et territoriale de l'état

M. le président. Nous allons procéder à l'examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État », figurant à l'état B.

ÉTAT B

(En euros)

Mission / Programme

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Administration générale et territoriale de l'État

5 031 176 839

5 116 543 463

Administration territoriale de l'État

2 805 573 725

2 754 999 891

dont titre 2

2 160 913 134

2 160 913 134

Vie politique

299 561 626

300 925 020

dont titre 2

15 222 943

15 222 943

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

1 926 041 488

2 060 618 552

dont titre 2

897 304 925

897 304 925

M. le président. Il nous reste un gros quart d'heure pour examiner onze amendements. Je renouvelle donc, mes chers collègues, mon appel à la concision, afin que nous puissions achever cette discussion dans les temps et débuter aux alentours de quinze heures l'examen des crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».

Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-1129, présenté par M. Laménie, Mmes Bessin-Guérin et Bourcier, MM. Brault, Capus, Chasseing et Chevalier, Mme L. Darcos, M. Grand, Mme Lermytte, MM. V. Louault, Malhuret, A. Marc et Médevielle, Mme Paoli-Gagin et MM. Pellevat, Rochette, Verzelen, L. Vogel et Wattebled, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État

dont titre 2

 

55 099 998

 

55 099 998

Vie politique

dont titre 2

 

6 018 500

 

6 018 500

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

 

41 212 371

 

41 212 371

TOTAL

 

102 330 869

 

102 330 869

SOLDE

- 102 330 869

- 102 330 869

La parole est à M. Marc Laménie.

M. Marc Laménie. Nous proposons, par cet amendement, une diminution globale de 2 % des crédits de la mission, ce qui représenterait une économie de 102 millions d'euros.

M. le président. L'amendement n° II-1293 rectifié, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet et MM. Longeot, Menonville, Folliot, Cambier, Maurey et Delahaye, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État

dont titre 2

 

 

 

 

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

 

100 000 000

 

100 000 000

TOTAL

 

100 000 000

 

100 000 000

SOLDE

-100 000 000

-100 000 000

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, qui est similaire au précédent, a été très bien défendu.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale. L'amendement de M. Laménie vise à minorer de 2 % les crédits de chaque programme de la mission, soit une économie d'environ 100 millions d'euros. Ce coup de rabot n'est ni documenté ni étayé ; il serait peu opérationnel de procéder de la sorte.

L'amendement présenté par Mme Goulet et déposé par M. Canévet vise quant à lui à minorer de 100 millions d'euros les seuls crédits du programme 216. Je rappelle que celui-ci est déjà mis à contribution en 2026, via une réduction de 136 millions d'euros de ses crédits. Il serait donc extrêmement préjudiciable de procéder à une nouvelle baisse.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Laurent Nunez, ministre. Je rejoins l'argumentaire de Mme la rapporteure spéciale : l'adoption de l'un ou l'autre de ces amendements aurait un impact immédiat sur l'exercice par le ministère d'un certain nombre de ses missions.

Je rappelle que le budget de l'administration générale et territoriale de l'État participe déjà, via le programme 216 notamment, à l'effort de redressement des comptes publics, certaines dépenses d'investissement, en particulier, faisant l'objet d'un étalement.

Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.

M. Marc Laménie. Compte tenu des explications de Mme la rapporteure spéciale et de M. le ministre, je retire mon amendement.

Mme Nathalie Goulet. Je retire le mien également, monsieur le président !

M. le président. Les amendements nos II-1129 et II-1293 rectifié sont retirés.

L'amendement n° II-1289 rectifié, présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet et MM. Cambier, Maurey, Folliot, Menonville, Longeot et Delahaye, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État

dont titre 2

 

 

 

 

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

 

40 872 047

40 872 047

 

40 872 047

40 872 047

TOTAL

 

40 872 047 

 

40 872 047 

SOLDE

-40 872 047 

-40 872 047 

La parole est à Mme Nathalie Goulet.

Mme Nathalie Goulet. Il est défendu, monsieur le président.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale. Cet amendement tend à supprimer 500 ETP dans le schéma d'emplois du programme 216, pour une économie de 40 millions d'euros. Je l'ai dit, les crédits du programme sont déjà en baisse de 136 millions d'euros. Dans ces conditions, il semble vraiment inopportun de procéder à une nouvelle ponction : avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Laurent Nunez, ministre. La rapporteure spéciale l'a rappelé, le programme 216 est déjà ponctionné. Notons d'ailleurs qu'il ne concerne pas que les services d'administration centrale : il comprend aussi les services de soutien aux services déconcentrés, tels que les secrétariats généraux pour l'administration du ministère de l'intérieur (Sgami).

Compte tenu de l'impact qu'aurait l'adoption de cet amendement sur l'action du ministère, l'avis du Gouvernement est défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.

Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, comme d'autres, fut cosigné par amitié et est retiré par conviction ! (Rires. – M. Bernard Pillefer applaudit.)

M. le président. L'amendement n° II-1289 rectifié est retiré.

Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L'amendement n° II-1003 rectifié quater est présenté par MM. Kerrouche, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kanner, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Roiron, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

L'amendement n° II-1079 est présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État

dont titre 2

23 520 000

23 520 000

 

23 520 000

23 520 000

 

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

 

23 520 000

23 520 000

 

23 520 000

23 520 000

TOTAL

23 520 000

23 520 000

23 520 000

23 520 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Corinne Féret, pour présenter l'amendement n° II-1003 rectifié quater.

Mme Corinne Féret. Par cet amendement, nous proposons d'augmenter de 5 % les effectifs des services préfectoraux, afin d'atteindre l'objectif de réarmement territorial des préfectures, que nous partageons.

Le projet de loi de finances prévoit la création de 50 ETP, ce qui ne nous paraît pas tout à fait à la hauteur des besoins. C'est en effet la plus faible augmentation du nombre de postes depuis 2021, alors que les besoins sont réels : sur 233 sites, près de 60 ne reçoivent désormais plus aucun usager.

Pour ce qui est du service des étrangers, la hausse des demandes, liée notamment à la complexification des démarches, requiert un nombre accru d'agents pour accueillir le public.

L'adoption de cet amendement permettrait de financer le recrutement de quelque 380 agents.

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour présenter l'amendement n° II-1079.

M. Guy Benarroche. Ce n'est pas sorcier : il faut rétablir une présence physique, c'est-à-dire des humains, dans tous les lieux de réception du public.

La paupérisation provoquée des services qui accueillent le public a assez duré. Tout le monde sait très bien quelles difficultés rencontrent les usagers qui ont besoin, pour obtenir un renseignement, d'être mis en contact avec un agent, au guichet ou par téléphone.

Les condamnations de l'administration pour entrave à la prise de rendez-vous sont nombreuses. Au-delà d'acter la démission de l'État auprès des usagers, elles mettent en lumière un problème que vous êtes trop nombreux, ici même, à percevoir comme une simple fatalité.

Il est ubuesque de ne pas voir que les prétendues économies que vous pensez réaliser coûtent en fait très cher : les dysfonctionnements dont nous parlons font obstruction aux démarches et empêchent par exemple la signature en préfecture de documents importants, ceux-là mêmes qui ouvrent l'accès à tant de droits. L'impact est considérable sur les personnes concernées et, j'y insiste, les coûts induits sont substantiels, y compris pour les tribunaux administratifs.

Mais cette situation n'est pas une fatalité : c'est pourquoi je vous demande de voter cet amendement !

M. le président. L'amendement n° II-1002 rectifié ter, présenté par MM. Kerrouche, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kanner, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État

dont titre 2

6 750 000

6 750 000

 

6 750 000

6 750 000

 

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

 

6 750 000

6 750 000

 

6 750 000

6 750 000

TOTAL

6 750 000

6 750 000

6 750 000

6 750 000

SOLDE

0

0

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à renforcer les effectifs des services qui, dans les préfectures et sous-préfectures, exercent des missions de conseil aux collectivités territoriales.

Le plus souvent, les relations entre les préfectures et les collectivités se font par le biais du contrôle de légalité ou du contrôle budgétaire. Mais les missions de conseil sont elles aussi essentielles ; elles contribuent en amont à la sécurité juridique des actes.

Le projet de loi de finances prévoit certes une très légère augmentation de 2,7 % des moyens alloués aux services préfectoraux au titre du conseil aux collectivités et du contrôle de légalité. Toutefois, ces moyens seront avant tout fléchés vers le contrôle de légalité, puisqu'on constate une augmentation de 30 % de cette activité.

Afin que cette mission de contrôle et de conseil soit efficacement et complètement exercée, nous proposons de financer la création de 95 ETP supplémentaires.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale. Les amendements identiques nos II-1003 rectifié quater et II-1079 ont pour objet de majorer de 23,5 millions d'euros les crédits de la mission, afin de créer 383 ETP dédiés à l'instruction des titres et à l'exécution des missions du bureau des étrangers.

Cela fait plusieurs années que je donne l'alerte, dans mes rapports, sur les conséquences négatives de la réduction des effectifs en préfecture et en sous-préfecture ; je pense notamment à la réduction opérée entre 2010 et 2020, qui est encore ressentie à ce jour.

D'ailleurs, la Cour des comptes, en 2022, avait jugé non réalistes ces suppressions de poste. Celles-ci contribuent à la dégradation des services publics, qui alimente l'exaspération de nos concitoyens.

Cela étant, la commission des finances rappelle que nous devons tenir compte de la sévère dégradation de nos comptes publics et assurer la conformité des dépenses du programme « Administration territoriale de l'État » à la Lopmi.

Il n'empêche, monsieur le ministre, qu'à l'avenir il faudra revoir la trajectoire budgétaire de l'opérateur France Titres, afin qu'il puisse mener à bien l'instruction de l'ensemble des titres et faire face aux défis qui l'attendent pour 2031 et 2033.

Pour l'ensemble de ces raisons, la commission demande le retrait de ces amendements identiques ; à défaut, l'avis serait défavorable.

Quant à l'amendement n° II-1002 rectifié ter, il vise à augmenter de 6,75 millions d'euros les crédits de l'administration territoriale de l'État, en vue d'assurer la création de 95 ETP dédiés à l'accompagnement des élus.

Lors des contrôles budgétaires que j'ai pu effectuer sur le terrain, j'ai constaté une carence des autorités locales en matière d'accompagnement des élus, faute de moyens adéquats. Alors que nous cherchons à dynamiser nos territoires, nous n'offrons pas aux élus locaux l'assistance nécessaire pour garantir ce développement.

Par ailleurs, j'appelle de mes vœux la création d'un outil statistique permettant d'identifier exactement les besoins d'accompagnement des élus. J'observe que nous avons du mal à quantifier le temps qu'y consacrent les agents des préfectures, car la mesure du temps de travail est globalisée.

Quoique je souscrive fortement à l'objectif des auteurs de cet amendement, le contexte budgétaire m'oblige à leur demander de bien vouloir le retirer ; à défaut, l'avis serait défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Laurent Nunez, ministre. Je vous rappelle qu'un effort est d'ores et déjà prévu pour 2026, via la création de 50 ETP. En 2025, il y avait eu, par redéploiement, 101 créations de postes ; depuis 2023, ce sont au total 244 emplois qui ont été créés, dont 153 pour le service des étrangers.

Le schéma d'emplois est donc évidemment à la hausse. Je rappelle également qu'en 2026 un certain nombre de crédits sont prévus pour assurer des renforts : 274 ETP seront affectés aux CERT et 190 ETP aux services des étrangers – en renfort, j'y insiste.

Enfin, les projets d'amélioration des services numériques auront un impact sur la qualité et l'efficacité du travail de nos agents.

J'en viens à la demande d'un renforcement du contrôle de légalité et des missions de conseil et d'accompagnement des élus. Nous prévoyons d'affecter 868 ETP au contrôle de légalité, car il s'agit d'une mission prioritaire pour les préfectures. Le taux de contrôle des actes se révèle très stable, ce dont je me félicite ; j'en profite pour remercier l'ensemble des agents des préfectures et sous-préfectures.

Vous avez indiqué, madame la rapporteure spéciale, votre volonté que soit quantifiée la part du travail des services consacrée au conseil et à l'accompagnement des collectivités ; j'en prends bonne note. Je rappelle que le Premier ministre a souhaité aller encore au-delà de ce qui a déjà été fait pour renforcer le rôle des préfets en matière d'accompagnement des élus locaux.

Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Christian Bilhac, pour explication de vote.

M. Christian Bilhac. Pour ma part, je soutiens ces amendements, car il nous faut renforcer les préfectures.

Je vais vous parler de musique, monsieur le ministre. Au siècle dernier, nous avions, dans tous les départements, un orchestre symphonique. Le préfet était l'auteur de la partition et le chef d'orchestre et les services jouaient la mélodie.

Aujourd'hui, les directions, services et opérateurs de l'État sont légion : les Dreal (directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement), les DDTM (directions départementales des territoires et de la mer), les architectes des bâtiments de France exerçant au sein des Udap (unités départementales de l'architecture et du patrimoine), l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie), et j'en passe !

Chacun griffonne un morceau de partition dans son coin, sans respecter ni le rythme ni la mélodie, et on demande au préfet de jouer le morceau. L'orchestre n'est plus symphonique, il est cacophonique ! (Rires.)

Au-delà des moyens, c'est l'autorité du préfet qu'il faut restaurer, monsieur le ministre. C'est à lui d'écrire la partition et de diriger l'orchestre ; quant aux musiciens, ils doivent lui obéir.

Mme Nathalie Goulet. Très bien !

Mme Sonia de La Provôté. Il faut aussi que le préfet ait l'oreille musicale ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, pour explication de vote.

Mme Mathilde Ollivier. Je tiens moi aussi à soutenir ces amendements qui tendent à rehausser les moyens des préfectures, en vous faisant part du témoignage d'un créateur de contenus nommé Maskey.

Mes chers collègues, je vous invite à aller voir l'éclairante vidéo qu'il a réalisée sur l'arbitraire et les dysfonctionnements des préfectures, qui sont sous pression en raison d'un manque de moyens.

Maskey était scolarisé au lycée français de Nouakchott et, comme la plupart des élèves de nos lycées français à l'étranger, est venu faire ses études supérieures en France. Il a par la suite reçu un passeport talent renommée internationale, document qu'il faut renouveler au bout de dix ans.

Voici ce qu'il s'est passé alors.

Maskey, qui remplit toutes les conditions, dépose son dossier en ligne ; un an s'écoule : pas la moindre réponse de l'administration. Aussi finit-il par se retrouver sans titre de séjour : là commence la galère.

Il perd petit à petit l'accès à tous ses droits, de son abonnement à un club de fitness à – plus grave – l'accès à son compte en banque.

Maskey doit maintenant gérer toutes ses dépenses en liquide et demande à ses amis de payer ses factures avec leur carte bancaire. Il avait une belle carrière de créateur de contenus, avec 1,5 million de followers sur YouTube. (Marques d'impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Antoine Lefèvre. Allez, on accélère !

Mme Mathilde Ollivier. Il voit se rapprocher la perspective d'un retour en Mauritanie ; mais voilà que ses papiers sont prêts ! Reste à ruser pour obtenir un rendez-vous à la préfecture. (Mêmes mouvements.)

M. Laurent Burgoa. À ce rythme, on ne tiendra jamais le délai !

M. le président. Votre temps est écoulé, chère collègue : vous disposiez d'une minute…

Mme Mathilde Ollivier. S'ensuit une stratégie pour se faire bien voir des vigiles et des agents ; enfin le titre de séjour tant attendu peut être récupéré. Cela aura pris deux années !

M. le président. Veuillez, mes chers collègues, ne pas dépasser le temps de parole qui vous est imparti : il est, je vous le rappelle, d'une minute par intervention.

Je mets aux voix les amendements identiques nos II-1003 rectifié quater et II-1079.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1002 rectifié ter.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° II-1262, présenté par MM. G. Blanc, Benarroche, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État

dont titre 2

 

18 958 657

 

18 958 657

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

18 958 657

 

18 958 657

 

TOTAL

18 958 657

18 958 657

18 958 657

18 958 657

SOLDE

0

0

La parole est à M. Guy Benarroche.

M. Guy Benarroche. Cet amendement, nous en avons parlé, vise à maintenir le niveau des crédits du fonds interministériel de prévention de la délinquance.

M. le président. L'amendement n° II-1004 rectifié bis, présenté par MM. Kerrouche, Bourgi et Chaillou, Mmes de La Gontrie et Harribey, M. Kanner, Mmes Linkenheld et Narassiguin, M. Roiron et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(En euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

 

+

-

+

-

Administration territoriale de l'État

dont titre 2

 

10 000 000

 

10 000 000

Vie politique

dont titre 2

 

 

 

 

Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur

dont titre 2

10 000 000

 

10 000 000

 

TOTAL

10 000 000

10 000 000

10 000 000

10 000 000

SOLDE

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La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. À quelques mois du renouvellement des conseils municipaux, la baisse des crédits du FIPD est la marque tout à fait regrettable d'un désengagement de l'État à l'égard des élus locaux.

Il serait bienvenu de maintenir l'enveloppe de 10 millions d'euros allouée à ce fonds, dont l'impact est très important dans nos territoires.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

Mme Florence Blatrix Contat, rapporteure spéciale. L'amendement n° II-1262 tend à majorer les crédits du FIPD de 18,96 millions d'euros, tandis que l'amendement n° II-1004 rectifié bis a pour objet un abondement de 10 millions d'euros visant à maintenir le fonds à son niveau de 2025.

J'insiste sur la nécessité de maintenir ces crédits, la baisse prévue de 10 millions d'euros étant particulièrement préjudiciable. On est en train de vider l'enveloppe du FIPD, qui passe cette année de 43 millions à 33 millions d'euros.

Le FIPD a besoin de ces sommes pour mener à bien sa mission de prévention de la délinquance et de la radicalisation. Si cette politique a connu de beaux succès dans certaines villes, comme Orléans ou Vaulx-en-Velin, c'est parce que des associations y ont les moyens d'intervenir.

N'oublions pas qu'il est prévu de transformer le secrétariat général du comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (SG-CIPDR) en une délégation interministérielle.

À titre personnel, j'estime que les crédits du FIPD auraient dû être maintenus. Néanmoins, en raison des contraintes budgétaires, la commission demande le retrait de ces amendements ; à défaut, l'avis serait défavorable.