Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Hervé Gillé. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, soyons clairs dès le début : ce budget est un trompe-l'œil ! Comment, en effet, soumettre au Parlement un budget stable alors que les crédits sont en baisse ? Tout simplement en changeant les règles du jeu !
Prenons un exemple : depuis juillet, les principales aides à l'acquisition de véhicules propres – bonus écologique et leasing social – sont financées non plus par le budget de l'État, mais par un mécanisme extrabudgétaire, les certificats d'économies d'énergie. Autrement dit, ce que l'État ne peut ou ne veut plus financer, il le fait payer à d'autres !
Le fonds vert, qui doit accompagner les collectivités locales, est l'un des symboles les plus frappants de ce recul. Doté, à sa création en 2024, de 2,5 milliards d'euros, il est tombé à 1 milliard l'année dernière, puis à 650 millions aujourd'hui.
Nous constatons le même renoncement sur le plan Eau. Lors de son lancement en 2023, on prévoyait un rehaussement de 475 millions d'euros du plafond de recettes des agences de l'eau sur trois ans. En 2024, ce sont 150 millions d'euros qui ont été accordés à ce plan : en 2025, rien du tout. Et pour 2026, 175 millions d'euros ont été promis tardivement, la semaine dernière au Sénat, au travers du vote d'un amendement en première partie du PLF. Espérons que cette disposition prospère !
L'an dernier, 130 millions d'euros avaient été prélevés sur les trésoreries de ces agences. En outre, leur plafond d'emplois avait été réduit de 12 équivalents temps plein.
Les agences de l'eau financent des projets concrets dans nos collectivités : leur affaiblissement freine directement notre action. Le salon des maires l'a confirmé : la gestion de l'eau est une priorité absolue pour 96 % des collectivités. La mission d'information sur la gestion durable de l'eau que j'ai conduite en 2023 l'a démontré : une politique de l'eau exige des moyens renforcés, pas rabotés.
Le même constat s'impose pour l'économie circulaire : les crédits du fonds qui lui est destiné s'effondrent encore. Ils diminuent de 45 % entre 2025 et 2026, après une baisse de 42 % l'an dernier. Le bilan de la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (Agec) est en demi-teinte : pour réussir, il faut soutenir réellement le principe du pollueur-payeur. Ce n'est plus le cas : plusieurs filières REP s'en écartent, et l'État a perdu la main sur la gouvernance. Les collectivités, elles, voient leurs charges augmenter, et de nombreux dysfonctionnements se font jour.
La prévention des risques subit le même désengagement. La lutte contre l'érosion côtière demeure ainsi la grande oubliée. Certes, quelques avancées ont été observées la semaine dernière, dont il faut espérer qu'elles seront conclusives.
Le groupe SER regrette aussi la disparition du fonds territorial climat, mis en place sur l'initiative de sénateurs de diverses sensibilités – je salue en particulier l'implication de Ronan Dantec.
Ce fonds marquait notre confiance dans les collectivités, en leur donnant pourtant les moyens d'agir par le biais de leur PCAET. Nous espérons que le Gouvernement a entendu cet appel et qu'il confirmera la restauration de cet outil.
Par ailleurs, les crédits du programme 203 « Infrastructures et services de transports » restent insuffisants. Les engagements de la conférence Ambition France Transports peinent à se traduire en actes.
Le groupe SER a fait de nombreuses propositions, notamment sur le plan Vélo et le réseau ferroviaire, mais tant que les moyens ne suivront pas, elles resteront des vœux pieux.
Le plus préoccupant, au-delà des lignes budgétaires, c'est la tendance de fond : les reculs environnementaux s'accumulent. La loi du 11 août 2025, dite loi Duplomb, en est devenue l'emblème. Dans ce domaine comme dans d'autres, la question de l'équilibre reste primordiale. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – MM. Ronan Dantec et Jacques Fernique applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K.)
Mme Marie-Claude Varaillas. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, « sans équivoque, les humains sont la cause du changement climatique auquel nous assistons. » Ces mots, le président du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), les prononçait devant les 600 experts réunis à Paris la semaine dernière. Le dépassement du seuil de 1,5 degré de réchauffement planétaire est désormais inévitable.
La COP 30 qui s'est déroulée au Brésil devait être la COP de la vérité. Or la sortie des énergies fossiles n'est même pas mentionnée dans le document final…
Certes, tous les participants ont salué la clarté de la France pour contrer le déni climatique. Mais comment expliquer que nous ne mettons pas tout en œuvre pour éviter la catastrophe ni pour nous en protéger ?
Nous ne regardons peut-être plus ailleurs pendant que la maison brûle, mais nous nous contentons de la regarder brûler.
Au fil des débats sur la seconde partie de ce PLF, on relève une constante : l'impératif, nous dit-on, n'est pas que ce texte réponde aux urgences, mais qu'il soit voté !
Dans ce contexte contraint, la mission « Écologie, développement et mobilité durables » devient une variable d'ajustement. Or les crédits ne sont pas au rendez-vous pour empêcher la crise sociale que provoqueront les coupes annoncées.
Ainsi, les crédits alloués au dispositif MaPrimeRénov' diminuent de 500 millions d'euros et les critères permettant d'en bénéficier sont resserrés, alors que 7 millions de nos concitoyens vivent dans des passoires thermiques et que le montant des chèques énergies reste insuffisant.
Que dire du fonds vert, qui, doté de seulement 650 millions d'euros, perd une nouvelle fois la moitié de ses crédits par rapport à l'année précédente ?
Nos collectivités territoriales, en première ligne pour conduire des politiques efficaces en faveur de la transition écologique, sont déjà contraintes de participer à l'effort de maîtrise du déficit public. Désormais, elles devront avancer avec moins de moyens, alors que les besoins sont immenses en matière d'isolation des bâtiments, notamment les gymnases et les écoles, ou de renaturation des centres-villes.
Ces mêmes collectivités investissent chaque année 8,3 milliards d'euros pour la transition écologique. Or cet effort devrait pratiquement doubler pour atteindre nos objectifs climatiques ! Mais ce n'est pas le sort qui leur est réservé dans ce budget qui leur permettra d'atteindre ce niveau d'investissements.
Les transports constituent l'un des enjeux importants de cette mission, au même titre que la prévention des risques, la réduction de nos déchets, ou encore le soutien à l'économie circulaire. Ces politiques sont aussi indispensables que l'ingénierie et les moyens humains qui les accompagnent.
L'État n'a pas suffisamment pris en compte le rôle potentiel du transport ferroviaire dans la mise en œuvre de la transition écologique. Celle-ci doit reposer sur la modernisation du réseau, la création des services express régionaux métropolitains (Serm) pour la desserte périurbaine, la reconquête des lignes de desserte fine du territoire et une véritable relance du fret ferroviaire.
Concernant les catastrophes naturelles, 62 % de la population française est exposée de manière forte ou très forte aux risques climatiques.
En modifiant les équilibres naturels, le dérèglement climatique augmente la fréquence et l'intensité des événements météorologiques extrêmes, comme les inondations, les tempêtes, les cyclones les feux de forêt et les épisodes caniculaires.
Or, quand les sécheresses ou les inondations se multiplient, les agriculteurs sont les premières victimes de la perte de récoltes, qui entraîne, en outre, une hausse du prix des denrées alimentaires qui accentue les inégalités.
Ces mêmes phénomènes extrêmes sont à l'origine de la forte progression du RGA dans notre pays : aujourd'hui 10,5 millions de maisons sont concernées par ce phénomène. Ces sinistres ont augmenté de 145 % entre les périodes 1989-2005 et 2006-2024. Les dépenses liées au RGA représenteront bientôt plus de 2 milliards d'euros chaque année si nous ne changeons pas nos pratiques et si nous persistons à conserver une partie non négligeable du fonds Barnier dans le budget de l'État.
Au cours des prochaines décennies, les dépenses investies dans la limitation du réchauffement des températures mondiales ne représenteraient que le quart du coût des dommages infligés aux personnes, aux écosystèmes et aux infrastructures.
Par ailleurs, la réindustrialisation et la décarbonation de nos entreprises doivent nous amener à considérer l'électrification massive de la consommation d'énergie comme incontournable. La bataille de l'énergie est essentielle. Il nous faut la mener, car elle a pour objet un bien commun qui doit être accessible à tous. La théorie selon laquelle nous devrions laisser faire le marché est une impasse, qui s'est révélée très coûteuse pour les usagers.
La bifurcation écologique implique de créer des recettes vertes en faisant notamment contribuer les acteurs économiques les plus aisés et les plus polluants. En 2023, les entreprises du CAC40 ont réalisé des bénéfices records, à hauteur de 153,6 milliards d'euros contre 42 milliards en 2022.
Nous devons mettre fin aux niches fiscales climaticides et conditionner chaque euro de financement public à des objectifs sociaux et environnementaux. C'est ce que préconisent nos collègues Fabien Gay et Olivier Rietmann dans les recommandations du rapport de leur commission d'enquête sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants.
Agir pour préserver le climat, c'est chercher à construire un monde solidaire qui accorde une place centrale au développement humain, à la coopération et à la paix plutôt qu'au commerce des armes, par exemple.
En l'état, mon groupe ne sera pas en mesure de voter les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K. – M. Simon Uzenat applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Jacques Fernique. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, force est de constater que les domaines relevant de la mission « Écologie, développement et mobilités durables » sont bien des terres de mission à l'environnement hostile, bien loin du rythme soutenu et soutenable qu'il faudrait adopter pour réussir la transition écologique et énergétique.
Au regard de ses objectifs en matière de climat et de biodiversité, notre pays accuse un déficit de plus de 4,5 milliards d'euros d'investissements : c'est le résultat du calcul réalisé par la Commission européenne en juillet 2025. Pour ce gouvernement, l'aggravation de ce déficit semble faire office d'expédient d'ajustement budgétaire, mais ces fausses économies seront autant de coûts aggravés à l'avenir…
Citons tout d'abord la baisse du fonds vert, quasiment divisé par deux, comme si nos collectivités pouvaient réussir la transition dans ce contexte désastreux de stop and go, d'affichage d'un jour démenti le lendemain. Par rapport à son niveau le plus haut, le fonds vert a perdu 74 % de ses crédits !
Ensuite, il faut évoquer la disparition du fonds territorial climat : manifestement, les gouvernements successifs – vos gouvernements, mesdames, messieurs les ministres ! – ne comprennent rien à la confiance accordée par le Sénat aux collectivités pour conduire leur transition territoriale.
Nous continuons, en outre, à couler la stratégie nationale biodiversité 2030 : rien que pour 2026, les crédits n'égaleront pas même un dixième du montant initialement prévu. Dans ces conditions, qui peut croire que nous arriverons à atteindre en 2030 les objectifs fixés pour 2026 ?
Enfin, le fonds économie circulaire s'effondre : après une baisse de 41,9 % en 2025, il accuse une diminution de 45,7 % en 2026. Or rien n'indique que les éco-organismes prendront le relais. Environ 40 % du gisement des déchets sous REP échappent encore à la collecte ; les objectifs de sobriété, d'écoconception ou de réemploi de l'Agec sont loin d'être atteints ; enfin, le taux de circularité de notre économie ne bouge pas significativement : à la fin, ce sont nos perspectives d'autonomie stratégique industrielle qui sont compromises !
Monsieur le ministre, cher Philippe Tabarot, nous devons au moins nous réjouir de l'absence de baisse significative sur les crédits alloués aux transports. (M. le ministre et Mme la rapporteure spéciale marquent leur soulagement.)
Si cette décision résulte en partie de la conférence Ambition France Transport, celle-ci avait pourtant une tout autre ambition qu'un simple gel des crédits.
Cette conférence a ainsi fixé la trajectoire à court terme qui apparaît impérative, sous peine d'une dégradation lourde et d'une paupérisation de nos réseaux, à 3 milliards d'euros d'investissements annuels supplémentaires. Ceux-ci se décomposent en 1,5 milliard pour le réseau ferroviaire structurant, 1 milliard pour le réseau routier national et 500 millions pour les infrastructures de fret ferroviaire et fluvial.
Avec ce projet de loi de finances, ce scénario de planification écologique des transports n'est pas encore clairement engagé, même s'il faut reconnaître l'existence de quelques signaux positifs.
Ainsi, il faut se réjouir des crédits prévus pour le renouvellement du matériel roulant des trains de nuit d'ici à 2030. Cependant, une telle mesure rend encore moins acceptable le recul que marquerait la disparition effective des liaisons Paris-Berlin et Paris-Vienne via Strasbourg.
Je relève un autre signal positif : en matière de fret ferroviaire, les engagements sont tenus. Pour la régénération et la modernisation du réseau, 3,2 milliards d'euros ont déjà été mobilisés, grâce au concours significatif de la seule SNCF. L'objectif de 4,5 milliards d'euros à compter de 2028 est donc à notre portée, mais il faudra encore une loi-cadre à la hauteur et une programmation robuste pour l'atteindre.
En revanche, l'électromobilité, l'acquisition de véhicules propres et les mobilités solidaires – je pense évidemment à la loi qui m'est chère – demeurent promis à un recul funeste, que ne compensent ni le succès contenu du leasing social ni les vagues promesses d'affectation des C2E.
Le plan Vélo, dont la dynamique a été brisée en 2024, ne retrouve pas son élan dans le cadre de ce projet de loi de finances. Nos collègues de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire de l'Assemblée nationale entendaient l'amender pour le ranimer. Faisons-le nous-mêmes, mes chers collègues, si nous voulons qu'en milieu rural et périurbain se déploient les infrastructures cyclables qui assureront le rabattement des déplacements intermodaux vers les mobilités décarbonées du quotidien.
C'est du reste tout l'enjeu des Serm : trente-quatre territoires souhaitent s'y engager, mais l'incertitude règne sur ces projets, qui comportent de nombreuses inconnues, notamment en termes d'investissement et de charges d'exploitation. L'essentiel reste à mettre en place…
Nous défendrons par ailleurs des amendements tendant à abonder le fonds Chaleur et à recentrer le chèque énergie au profit des plus précaires.
Je conclurai sur l'aérien : non, mes chers collègues, ne gaspillons pas l'argent public et nos surfaces agricoles en encourageant des carburants synthétiques et des biocarburants qui coûteront cinq fois plus cher que le kérosène ! Mon groupe défend au contraire la nécessité de rééquilibrer la fiscalité entre l'aérien et le ferroviaire.
Cohérence, constance et détermination en faveur de la transition, voilà ce qu'il nous faut ! Les écologistes voteront contre l'adoption des crédits de cette mission « Écologie, développement et mobilité durables », d'où ces mots d'ordre sont totalement absents ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme la présidente. La parole est à M. Joshua Hochart.
M. Joshua Hochart. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, depuis trop d'années, une écologie punitive, dogmatique et profondément déconnectée du réel est imposée aux Français. Elle est mise en place par le Gouvernement, amplifiée par certains écologistes autoproclamés et appliquée sans nuance par des administrations parfois plus soucieuses d'affichage que d'efficacité.
Les tenants de cette idéologie voient dans les Français des coupables. Or les chiffres sont là : la France est responsable d'environ 1 % des émissions mondiales de CO2, quand la Chine en émet plus de 30 %, les États-Unis près de 15 %, et l'Union européenne autour de 7 %. (Exclamations dubitatives sur les travées des groupes GEST et SER.) Autrement dit, même si nous allions jusqu'à tous rouler en charrette et nous chauffer à la bougie, cela ne changerait pas grand-chose au réchauffement climatique, parce que la France est déjà l'un des pays les plus vertueux en matière environnementale grâce à son parc nucléaire.
Et pourtant, les derniers gouvernements, par dogmatisme et court-termisme, ont fermé des réacteurs, affaibli EDF et mis en péril notre souveraineté énergétique, au moment même où nous aurions dû la renforcer.
Pour masquer cet échec, on condamne les Français à subir des mesures absurdes et injustes.
Ainsi, certains membres de la gauche parisienne, déconnectés de la vie menée au-delà du périphérique, proposent d'interdire ou de surtaxer les SUV en ville, sans tenir compte des familles nombreuses, des artisans ou des professionnels qui ont réellement besoin de véhicules robustes.
On cherche à tout prix à chasser la voiture, même dans des territoires où aucune autre option crédible n'existe. Et l'on oublie que la voiture, pour des millions de nos concitoyens, n'est pas un luxe, mais une nécessité de service ou un impératif pour les déplacements professionnels.
Les fameuses zones à faibles émissions (ZFE) auraient exclu de nombreux travailleurs de leurs propres villes : c'était un dispositif socialement injuste et économiquement contre-productif. Grâce à la détermination du Rassemblement national, la généralisation aveugle de ces zones a été stoppée : nous avons obtenu des garanties afin de ne pas pénaliser les catégories les plus fragiles.
Pendant que l'on punit les automobilistes et que l'on moralise la vie quotidienne, on multiplie les éoliennes industrielles dans nos campagnes, souvent au mépris de la volonté des riverains.
Le département du Nord, en particulier, a été transformé en laboratoire de cette politique : des mâts en acier essaiment partout dans des territoires déjà éprouvés ; ils défigurent le paysage, font baisser la valeur foncière des habitations et ne garantissent en rien une production stable et prévisible. Bien entendu, les écologistes vous demanderont, dans le cadre de cette mission, d'augmenter les crédits en faveur de cette énergie non fiable et déjà trop subventionnée.
En vérité, notre politique énergétique doit remettre la filière nucléaire au centre du jeu : cette énergie est maîtrisée, massive et décarbonée, mais la Macronie l'a, hélas ! affaiblie.
La même logique pèse également sur nos agriculteurs, qui sont soumis, eux aussi, à une cascade de normes de plus en plus contraignantes, à des règles conçues par des administrations souvent déconnectées des réalités du terrain. Nos paysans sont pourtant parmi les plus respectueux des contraintes environnementales. Et ils nourrissent la Nation !
Les mises en conformité successives, les contrôles, les obligations administratives et les exigences sanitaires pèsent lourdement sur leurs exploitations. Et demain, l'accord entre l'Union européenne et le Mercosur, voulu par Bruxelles, viendra encore aggraver leur situation. La priorité doit être non pas la soumission aux diktats du libre-échange, qui détruit nos filières, mais la défense de nos agriculteurs et la valorisation des produits français.
Au niveau local, les élus territoriaux vivent dans l'incertitude permanente, entre obligations nouvelles, normes qui se superposent et financements insuffisants.
Nous refusons l'écologie punitive qui taxe, interdit et culpabilise sans offrir d'autre choix crédible. À l'inverse, nous proposons une écologie du bon sens, une écologie de la production locale, de la souveraineté industrielle et alimentaire.
Notre exigence est simple : protéger la planète sans sacrifier la Nation !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Jean-François Longeot applaudit également.)
M. Jean-Yves Roux. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, « la transition écologique est très coûteuse, mais constitue bien un investissement rationnel, économiquement pertinent, socialement protecteur et humainement indispensable. » Cette phrase est extraite de la stratégie pluriannuelle des financements de la transition écologique et de la politique énergétique nationale, sur le fondement de laquelle je vous propose d'évaluer les crédits de cette mission.
Si nos émissions de gaz à effet de serre baissent légèrement – de 0,6 % –, force est de constater que cette tendance reste bien éloignée de la trajectoire de la troisième stratégie nationale bas-carbone, qui fixe un objectif de l'ordre de 5 % par an d'ici 2030.
Pour 2026, les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » sont en hausse de 5,71 % en autorisations d'engagement et de 0,51 % en crédits de paiement, ce qui laissait augurer une trajectoire plus volontariste, dans un contexte budgétaire très contraint.
Or cette augmentation mérite d'être fortement nuancée, et ce à deux titres.
D'une part, elle résulte de changements de périmètres et de débudgétisations majeures qui, en définitive, reflètent un désengagement de l'État.
Au même titre que les primes versées pour la rénovation énergétique, les principales aides à l'acquisition de véhicules propres seront cette année financées par un mécanisme extrabudgétaire, celui des certificats d'économies d'énergie. Autrement dit, on transfère le coût de ces dispositifs du contribuable au consommateur ; une telle mesure réduit également le périmètre du contrôle parlementaire, ainsi que celui de l'action publique.
D'autre part, cette mission marque un coup d'arrêt au financement d'instruments essentiels à la transition écologique, alors que chaque stratégie, publique ou privée, implique de la visibilité et de la stabilité. Madame la ministre, nous défendrons des amendements visant à préserver certains de ces dispositifs.
Permettez-moi notamment de regretter la forte réduction des crédits de la stratégie nationale biodiversité 2030, le rehaussement insuffisant du plafond de recettes des agences de l'eau, l'absence de financements en faveur de la prévention de l'érosion côtière et de la submersion marine, ainsi que l'effondrement du budget alloué au fonds Économie circulaire.
Je veux en outre insister sur les moyens mis à la disposition des collectivités locales.
À cet égard, je regrette la disparition du fonds territorial climat. Celui-ci, mis en place en 2024 et en 2025 sur l'initiative du Sénat, visait à allouer directement aux collectivités territoriales l'argent dont elles ont besoin pour les projets qu'elles souhaitent mener dans le cadre de leurs plans climat-air-énergie territoriaux.
Après avoir déjà perdu 60 % de ses crédits en autorisations d'engagement dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2025, le fonds vert voit de nouveau ses crédits s'effondrer cette année : la baisse est de 43,5 % !
Je dirai aussi quelques mots du CAS Facé, qui permet aux collectivités rurales d'entretenir leur réseau électrique. Ce compte spécial se retrouve, malgré la réforme de 2025, très fragilisé. Mes chers collègues, parce qu'il renforce la qualité de vie dans la ruralité tout comme son attractivité, nous défendrons un amendement visant à en accroître les moyens.
Pour ceux qui connaissent mon attachement viscéral à la question de l'adaptation de notre pays au dérèglement climatique, mes chers collègues, l'alerte que je lance n'aura que plus de portée : pour avoir été rapporteur de trois missions d'information sur ces sujets, dont deux sont récentes – l'une avait trait à la prévention des inondations, l'autre à la réforme de la compétence Gemapi (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) –, j'ai la conviction que la prévention est une politique souvent ingrate, mais aussi terriblement efficace, si tant est qu'elle s'inscrive dans le cadre d'une trajectoire.
En amont, je souhaite ainsi insister sur l'impérieuse nécessité de doter Météo-France, l'IGN et le Cerema, dont on connaît l'indispensable engagement aux côtés des collectivités pour rénover les ouvrages de protection, des moyens nécessaires pour connaître, alerter et prévenir les catastrophes climatiques.
M. Vincent Capo-Canellas. Très bien !
M. Jean-Yves Roux. Nous plaiderons en ce sens au travers de nos amendements.
En aval – c'est une conviction née de travaux menés en commun avec Jean-François Rapin, Rémy Pointereau et Hervé Gillé –, le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit fonds Barnier, devra être conforté. À cet effet, nous défendrons tout à l'heure un amendement transpartisan qui sera, je l'espère, suivi d'effets.
Faute de politique préventive ambitieuse, ce seront tous les Français qui paieront la note, financière et humaine, et les plus fragiles qui paieront le plus cher. Soyons-en certains ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Jean-François Longeot applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Denise Saint-Pé. (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi qu'au banc des commissions.)
Mme Denise Saint-Pé. Madame la présidente, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, ne nous y trompons pas : si les crédits de cette mission sont en apparence quasiment stables, cela résulte avant tout de mesures ayant affecté son périmètre. Je pense à l'inscription dans cette maquette budgétaire, pour la première fois, des autorisations d'engagement de l'Ademe, ou encore à la débudgétisation du bonus écologique, basculé vers les C2E.
Pour ma part, je ne critiquerai pas ces choix qui peuvent tout à fait se justifier. Mais force est de constater qu'ils contribuent à une compensation artificielle de certains crédits, ce qui revient à dissimuler la tendance baissière des politiques publiques en matière de transition écologique.
Le chèque énergie constitue, à mon sens, un exemple assez parlant de ce phénomène. Le Gouvernement affirme que les crédits alloués à ce dispositif sont en forte augmentation : leur montant passe en effet de 465 millions d'euros en 2025 à 655 millions en 2026. Il ne faut pourtant pas oublier que le seuil particulièrement bas qu'il a atteint l'an passé découle d'une réforme visant à répondre à l'impossibilité d'attribuer le chèque automatiquement, comme c'était le cas auparavant – c'est l'un des effets imprévus de la suppression de la taxe d'habitation…
Depuis, seule une partie des ménages éligibles sont connus de l'administration et bénéficient d'un envoi automatisé. Les autres ménages doivent dorénavant se manifester sur une plateforme en ligne ou par courrier. Je regrette une telle complexité, d'autant qu'elle devrait aboutir à une diminution de l'ordre de 30 % du nombre de bénéficiaires.
On ne peut que déplorer le contraste avec 2024, dernière année d'attribution automatique du chèque énergie, lorsque les dépenses s'élevaient à près de 795 millions d'euros pour 5,7 millions de ménages bénéficiaires, et que le taux de recours avoisinait les 80 %.
Les crédits affectés au chèque énergie me paraissent d'autant plus insuffisants que le barème n'a pas été revalorisé depuis 2019, soit bien avant la crise énergétique qui a suivi le début de la guerre en Ukraine.
Par ailleurs, je tiens à rappeler l'importance des crédits alloués au CAS Facé. En effet, les besoins d'investissement pour les réseaux publics de distribution d'électricité en zone rurale sont en très forte augmentation, et ce pour deux raisons.
D'abord, ces investissements permettent d'améliorer la résilience des réseaux face à des événements climatiques de plus en plus fréquents et violents, et de proposer aux usagers un niveau de qualité de service satisfaisant, contribuant à combler la fracture territoriale croissante entre zones rurales et zones urbaines.
Ensuite, ils favorisent le raccordement des énergies renouvelables électriques à ces réseaux, puisque les productions décentralisées sont de plus en plus nombreuses au titre de la transition énergétique.
Il est donc nécessaire de conforter les autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE), qui ont déjà démontré leur capacité à agir localement et à gérer les concessions de distribution électrique, en optimisant leurs investissements, en lien avec le concessionnaire. Mais j'aurai évidemment l'occasion d'en reparler lors de l'examen des amendements que j'ai déposés pour relayer toutes ces attentes. (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – Mme la rapporteure spéciale applaudit également.)