M. Michel Canévet. Cet amendement est analogue à celui que j'ai présenté tout à l'heure, dans le cadre de l'examen de la mission précédente, pour demander que les crédits du Conseil constitutionnel n'augmentent pas ou n'augmentent que très modérément.
Je constate que d'autres institutions, la Cour des comptes et autres juridictions financières, voient leur budget croître de façon significative. Dans le contexte budgétaire extrêmement contraint que nous connaissons, il paraît nécessaire que, au plus haut niveau de l'État, l'exemplarité soit de mise.
C'est pourquoi je propose un amendement de réduction de crédits de 4 millions d'euros.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1769, présenté par M. G. Blanc, Mme M. Vogel, M. Dossus, Mme Senée, MM. Benarroche, Dantec, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mme Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Conseil d'État et autres juridictions administratives dont titre 2 |
||||
Conseil économique, social et environnemental dont titre 2 |
6 000 000 |
6 000 000 |
||
Cour des comptes et autres juridictions financières dont titre 2 |
6 000 000 |
6 000 000 |
||
TOTAL |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Grégory Blanc.
M. Grégory Blanc. J'irai à rebours de mon collègue Canévet.
Nous venons de parler de l'équilibre des pouvoirs et des besoins du Parlement en matière de compétences et d'expertise.
Dans d'autres pays que le nôtre, il existe des instances chargées de produire une contre-expertise sur les questions budgétaires. C'est dans cet esprit, d'ailleurs, que le législateur a créé, en 2012, le Haut Conseil des finances publiques. Or on voit bien aujourd'hui que les moyens de cet organe sont limités : ses avis pourraient être plus étayés.
Cet amendement vise par conséquent à renforcer les moyens du Haut Conseil des finances publiques et, partant, l'expertise produite au bénéfice des parlementaires.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1852, présenté par M. Benarroche, Mme M. Vogel, MM. G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée et Souyris, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Conseil d'État et autres juridictions administratives dont titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
Conseil économique, social et environnemental dont titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
Cour des comptes et autres juridictions financières dont titre 2 |
||||
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à M. Guy Benarroche.
M. Guy Benarroche. Cet amendement a pour objet de rétablir le plan de recrutement prévu au titre de la programmation pluriannuelle 2023-2027 pour les juridictions administratives, à savoir la création de vingt-cinq postes de magistrats et de quinze postes de greffiers chaque année tant en 2024 qu'en 2025.
Ce schéma d'emplois avait été décidé et budgété, mais les recrutements n'ont pas eu lieu. Ils ont été au mieux retardés, peut-être annulés – nous ne le savons pas précisément –, alors même que, ces dernières années, le flux d'affaires a crû de 8 % par an dans ces juridictions, ce qui justifiait, d'ailleurs, les créations de postes qui avaient été prévues. Cette année, l'augmentation avoisine même les 20 % !
On arrive donc au bout des possibilités du personnel des juridictions administratives s'agissant de traiter les dossiers en respectant les normes et les indicateurs de performance qui leur sont imposés.
Ce que nous demandons aujourd'hui au Gouvernement et au ministre, c'est de nous dire ce qu'il en est de ces créations de postes, qui étaient déjà budgétées. Où en sommes-nous, monsieur le ministre ?
Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Bilhac, rapporteur spécial. Les amendements nos II-1135 rectifié de Jean-Luc Brault et II-1735 rectifié de Michel Canévet sont des amendements de rabot. Les mesures proposées ne sont ni très ciblées ni très étayées ; elles mettraient en difficulté les juridictions financières, qui sont déjà mises à contribution.
Quant aux amendements identiques n° II-67 rectifié bis de Cédric Chevalier et II-794 rectifié de Valérie Boyer, ils visent à réduire les crédits du Cese de 5 millions d'euros, soit, tout de même, 78 % de baisse : c'est une saignée. J'en demanderai le retrait, car notre assemblée s'est toujours montrée très prudente quant à l'autonomie de la troisième chambre qu'est le Cese.
L'amendement n° II-1769 de Grégory Blanc a pour objet d'augmenter de 6 millions d'euros les crédits du Haut Conseil des finances publiques. Le budget du HCFP, qui est de 1,5 million d'euros, serait multiplié par 7,5 ; cela me semble un peu disproportionné.
L'amendement n° II-1852 de Guy Benarroche vise quant à lui à renforcer les moyens des juridictions administratives. Je vous rejoins, mon cher collègue : il faudrait les renforcer. Une réflexion plus large doit être engagée, car on ne peut pas dans le même temps demander à ces juridictions de respecter des délais d'instruction raisonnables et ne pas leur donner les moyens dont elles ont besoin pour ce faire.
Je demande donc, au nom de la commission, le retrait de l'ensemble de ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Laurent Panifous, ministre délégué. Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de ces amendements, qui traduisent une fois de plus votre souci d'une gestion saine et efficace des deniers publics.
Si l'effort de maîtrise des dépenses publiques doit bien entendu être partagé par toutes les entités publiques, je ne suis cependant pas persuadé que les économies budgétaires ici proposées soient compatibles avec la bonne marche des institutions concernées.
À titre d'exemple, le budget du Conseil d'État et des autres juridictions administratives diminue de 5,2 % pour 2026. Le budget de fonctionnement et d'investissement du programme 165, hors dépenses de personnel, connaît une baisse significative de 25,8 % en crédits de paiement, ce qui traduit l'achèvement progressif des grands programmes d'investissement immobilier des juridictions administratives et un effort sans précédent de diminution des dépenses de fonctionnement courant.
Cet effort est d'autant plus remarquable que, après avoir déjà fortement crû en 2023 et 2024, l'activité des tribunaux administratifs a connu une hausse sans précédent en 2025 – le nombre de requêtes enregistrées a augmenté de près de 18 %, comme l'a rappelé le sénateur Benarroche. À cet égard, la réduction de 11 millions d'euros proposée par les auteurs de l'amendement n° II-1135 rectifié serait tout simplement insoutenable et contreviendrait au bon fonctionnement de nos juridictions administratives.
Par ailleurs, les juridictions financières ont pleinement contribué à la maîtrise des dépenses de l'État entre 2023 et 2025, via une baisse des crédits de fonctionnement, un sous-financement du dispositif de glissement vieillesse technicité et une réduction des effectifs.
Le projet de loi de finances pour 2026 prolonge déjà cette trajectoire exigeante : baisse du plafond d'emplois de 18 équivalents temps plein, économie de 1,2 million d'euros sur la masse salariale, diminution de 3 millions d'euros de l'enveloppe destinée au rattrapage indemnitaire des magistrats financiers. L'année 2026 sera une année blanche pour ce qui est des crédits de fonctionnement, après la baisse cumulée de près de 12 % déjà enregistrée depuis 2023.
Une diminution supplémentaire de 5,34 millions d'euros aurait pour conséquence de mettre en difficulté la Cour des comptes et les chambres régionales dans l'exercice de leurs missions, marquées notamment par la montée en puissance du nouveau régime de responsabilité des gestionnaires publics.
J'en viens au Conseil économique, social et environnemental, dont les crédits seraient fortement touchés par l'adoption des amendements nos II-67 rectifié bis et II-794 rectifié : considérant que cette institution, dont l'existence et le rôle sont inscrits dans la Constitution, a déjà largement participé aux efforts demandés en matière de maîtrise des dépenses publiques, le Gouvernement ne souhaite pas aller plus loin.
D'une manière générale, mesdames, messieurs les sénateurs, les économies que vous proposez ne permettraient pas à ces institutions de poursuivre leur mission dans de bonnes conditions.
Pour l'ensemble de ces raisons, l'avis du Gouvernement est défavorable sur l'ensemble de ces amendements en discussion commune.
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. À titre personnel, je suis pour la suppression du Conseil économique, social et environnemental.
Mme Valérie Boyer. Nous aussi !
M. Laurent Somon. Oui !
M. Vincent Delahaye. Cela étant, le Cese étant une institution constitutionnelle, il serait difficile de le supprimer.
Néanmoins, la Constitution ne prévoit pas de budget particulier pour cet organe. On peut donc lui demander des efforts supplémentaires, compte tenu de sa contribution au débat public et de ce qu'il apporte à nos travaux.
Dans ces conditions, je suis partisan de voter les amendements de diminution du budget du Cese.
MM. Jean-Luc Brault et Cédric Chevalier. Bravo !
Mme la présidente. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.
M. Grégory Blanc. Je vais retirer mon amendement, qui était un amendement d'appel.
Je veux simplement souligner que les crédits supplémentaires que nous demandons pour les juridictions financières – 6 millions d'euros – correspondent peu ou prou à ce qu'il faudrait allouer au Haut Conseil des finances publiques pour qu'il puisse faire ce que nous voudrions qu'il fasse, à savoir émettre à notre intention un avis éclairé et étayé en amont de l'examen du projet de loi de finances initiale, mais aussi en cours d'exécution budgétaire. La Cour des comptes, elle, émet des avis a posteriori, dans le cadre du contrôle budgétaire.
Nous devons nous contenter aujourd'hui d'une vision macroéconomique, sans aucune visibilité précise sur ce qui motive chaque année, ministère par ministère, les gels, surgels et annulations de crédits décidés en cours de gestion. Nous avons besoin d'appréhender plus finement la manière dont les crédits sont, ou non, effectivement consommés. C'est là, précisément, le rôle du Haut Conseil des finances publiques tel qu'il a été conçu. Il nous faut, en France, une institution de ce type en ordre de marche, telle qu'il en existe dans d'autres démocraties.
Je retire donc l'amendement n° II-1769, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1769 est retiré.
La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. J'ai bien entendu les explications du Gouvernement, notamment ce qu'a dit le ministre à propos des juridictions administratives.
Il est fréquent désormais que des recours intempestifs aient pour effet de geler des projets dont la concrétisation serait pourtant largement bénéfique à l'économie de notre pays. Il est temps que le Gouvernement propose des mesures tendant à limiter ces recours excessifs qui gangrènent l'activité des juridictions administratives, ce qui est particulièrement inadmissible. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
Pour ce qui concerne la Cour des comptes, je propose non pas de supprimer ni même de réduire les crédits qui lui sont alloués, mais de modérer autant que possible la hausse qui est prévue, et cela pour une raison très simple : il faut que, au plus haut niveau de l'État, on soit exemplaire !
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour explication de vote.
Mme Laurence Muller-Bronn. Je soutiendrai l'amendement de ma collègue Valérie Boyer, qui a pour objet une baisse de 15 % du budget du Cese. Une telle diminution resterait soutenable : la réforme de 2021 ayant conduit à une baisse du nombre de membres de l'institution, une réduction des crédits semble tout à fait rationnelle.
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Je réponds à mon collègue Michel Canévet.
En tant que rapporteur pour avis de la commission des lois, je visite tous les ans, partout en France, des tribunaux administratifs. Les problèmes sont partout les mêmes : il est rare qu'ils soient liés à des recours sans fondement. Cela arrive, très minoritairement, mais une grande partie des problèmes constatés sont liés à la simple application normale de la loi en vigueur et à la difficulté de garantir aux justiciables des délais de jugement normaux.
On observe par ailleurs un volume important de contentieux relevant du droit des étrangers et du droit d'asile. Pourquoi ? Tout simplement parce que, faute de personnel suffisant, les préfectures se montrent incapables de respecter les délais légaux régissant l'accès aux rendez-vous pour le renouvellement des documents officiels.
Il en résulte des contentieux qui sont pris en charge par la justice administrative, alors que ce ne devrait pas être le cas ! La justice administrative sert ainsi de secrétariat des préfectures, en raison de l'insuffisance de personnel au sein de ces dernières.
L'approche consistant à considérer que l'encombrement des tribunaux administratifs relèverait de certaines catégories d'affaires ne permet pas d'apporter une réponse satisfaisante. Ces phénomènes doivent être pleinement pris en compte et correctement traités !
Mme la présidente. Monsieur Brault, l'amendement n° II-1135 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Luc Brault. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° II-1135 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques nos II-67 rectifié bis et II-794 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme Valérie Boyer. Bravo !
Mme la présidente. En conséquence, les amendements nos II-1769 et II-1852 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° II-1735 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'État », figurant à l'état B.
Je n'ai été saisie d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme du temps imparti pour l'examen de ces missions.
Il nous reste 24 amendements à examiner.
Dès lors, conformément à l'organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission est reportée au samedi 13 décembre 2025, après l'examen de la suite de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Relations avec les collectivités territoriales
Compte de concours financiers : Avances aux collectivités territoriales
Mme la présidente. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (et articles 72, 73, 74, 75, 76 et 77) et du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales ».
La parole est à Mme la rapporteure spéciale.
Mme Isabelle Briquet, rapporteure spéciale de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ne représentent qu'une petite partie des transferts financiers de l'État aux collectivités. Ils s'élèvent à 3,9 milliards d'euros en crédits de paiement (CP) dans le projet de loi de finances pour 2026, quand les transferts de l'État sont estimés à près de 108 milliards d'euros, et même 155 milliards d'euros au sens large si l'on inclut les fractions compensatrices de TVA.
S'agissant tout d'abord des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », après plusieurs années de stabilité, les autorisations d'engagement (AE) connaissent une baisse de 152 millions d'euros en 2026, qui peut être intégralement imputée au programme 119. Celui-ci représente plus de 90 % des crédits de la mission et porte les dotations de soutien à l'investissement local, ainsi que les dotations de décentralisation.
La baisse est bien moindre, toutefois, s'agissant des crédits de paiement, avec une diminution qui se limite à 31 millions d'euros en 2026.
Comment expliquer ces évolutions ? S'agissant du programme 119, la mesure principale est la création à l'article 74 du présent projet de loi de finances d'un fonds d'investissement pour les territoires (FIT).
Ce fonds est issu de la fusion de trois dotations d'investissement portées par le programme 119 : la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) et la dotation politique de la ville (DPV). Cette fusion avait été annoncée par le Roquelaure de la simplification mené par le Gouvernement en avril 2025 et visait à assurer « une plus grande lisibilité des critères d'attribution ». Nous sommes assez loin du compte !
En vingt-cinq alinéas et sur deux pages, le Gouvernement nous propose une nouvelle architecture, en revoyant les collectivités éligibles, les modalités de répartition et la gouvernance des dotations de soutien à l'investissement des collectivités territoriales.
Certes, le Sénat a mis en avant par le passé un besoin de simplification de ces dotations, mais il s'agissait avant tout, à court terme, d'un indispensable travail administratif d'harmonisation des procédures et des calendriers. À l'inverse, sur le plan budgétaire, une dotation comme la DETR suscite l'unanimité, et la valeur des financements qu'elle apporte aux zones rurales est reconnue de tous.
Si ce dispositif devait évoluer, il nécessiterait des échanges prolongés avec le Sénat et les associations d'élus, ainsi que des partages de simulations pour identifier et analyser les effets redistributifs, ce qui n'a pas été fait en l'espèce.
En toute logique, l'ensemble des associations d'élus demandent la suppression de ce dispositif. C'est pourquoi la commission des finances présentera l'amendement n° II-22, qui vise à supprimer l'article 74.
Sur le plan budgétaire, les autorisations d'engagement consacrées aux trois dotations qui composent le FIT sont en baisse de 200 millions d'euros, soit une diminution de 12 %. Le Gouvernement s'appuie toutefois sur le cycle électoral, en notant que les investissements connaissent naturellement une baisse en année d'élection municipale. Les communes éligibles à la DETR et à la DPV seraient préservées, et la baisse porterait sur la DSIL.
Il convient par ailleurs de noter que, contrairement aux autorisations d'engagement, les crédits de paiement du programme 119 sont en hausse, avec notamment une augmentation de 59 millions d'euros pour les trois dotations du FIT. Cette hausse vise à tenir compte des importants restes à payer pour ne pas assécher l'investissement des collectivités.
Quant aux crédits du programme 122, qui concernent essentiellement les aides destinées à soutenir les collectivités faisant face à des situations exceptionnelles, ils sont grandement affectés par l'article 73 du projet de loi de finances pour 2026, qui étend le bénéfice de dotation de solidarité aux collectivités victimes d'événements climatiques ou géologiques (DSE) aux collectivités d'outre-mer.
Pour mémoire, la DSEC permet aujourd'hui d'indemniser les collectivités de métropole lorsqu'elles sont touchées par de tels événements. Les collectivités d'outre-mer pouvaient, quant à elles, s'appuyer sur le fonds de secours pour l'outre-mer (FSOM), qui couvre cependant un périmètre plus large, puisqu'il peut aussi indemniser des particuliers, des entreprises à caractère artisanal ou familial et des exploitations agricoles.
Ce fonds présente toutefois plusieurs limites.
Tout d'abord, il est dépourvu de base légale puisqu'il repose sur une circulaire du 11 juillet 2012 du ministre délégué chargé du budget et du ministre des outre-mer.
Ensuite, le Sénat a pointé par le passé des insuffisances s'agissant des modalités d'indemnisation et des délais de mobilisation.
Sur le plan budgétaire, ce projet de loi de finances prévoit pour 2026 le transfert de 5 millions d'euros en autorisations d'engagement et de 2 millions d'euros en crédits de paiement depuis le programme 123, « Conditions de vie outre-mer », de la mission « Outre-mer », vers le programme 122, dans l'enveloppe de la DSEC proposée pour 2026 sur ce même programme. Celle-ci est fortement rehaussée, passant de 30 millions d'euros en 2025 à 70 millions d'euros cette année, afin de tenir compte de l'intensification de l'aléa climatique sur l'ensemble du territoire français.
Si d'aventure les crédits de la DSEC devaient se révéler insuffisants en cas de catastrophe d'ampleur remarquable survenant en outre-mer ou en métropole, je rappelle que les redéploiements en gestion, des dégels de réserve et, en dernier recours, des crédits de virement, de transferts ou des ouvertures de crédits permettent d'ajuster en cours d'année les montants de cette dotation.
Autrement dit, le présent article ne change rien au fait que la France soutiendra financièrement ses collectivités en cas de catastrophe naturelle, en métropole comme en outre-mer. Nous vous proposons donc de voter l'article 73 sans modification.
Quant au programme 122, dans son ensemble, malgré cette hausse substantielle des crédits de la DSEC, les autorisations d'engagement proposées pour 2026 sont stables, s'élevant à 250 millions d'euros, et les crédits de paiement sont en forte baisse, passant de 350 millions d'euros à 256 millions d'euros.
Cette diminution reflète notamment le versement en 2025 d'une dotation de continuité territoriale exceptionnelle en faveur de la Corse. Le Gouvernement a déposé un amendement pour renouveler cette dotation en 2026.
Quelles conclusions tirer sur le niveau des crédits de la mission ? La commission a voté les crédits de la mission, acceptant la baisse proposée comme un moindre mal, une mesure dont l'impact sera amorti par le cycle électoral. À titre personnel, toutefois, comme l'ensemble de mon groupe, je ne puis que déplorer le sort général réservé aux collectivités territoriales par ce projet de loi de finances.
J'en viens, enfin, aux comptes de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales », qui voient juste transiter le produit des impositions locales versées mensuellement.
Comme pour les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales », les crédits de ce concours financier ont été votés par la commission. À titre personnel, je maintiendrai mon opposition à leur sujet.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur spécial. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Sautarel, rapporteur spécial de la commission des finances. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je poursuis, après ma collègue Isabelle Briquet, la présentation de cette mission, qui est celle de notre bien commun, garantissant nos services publics de proximité et nos investissements d'avenir. C'est pourquoi, malgré le contexte que nous connaissons, nous avons cherché à garantir la capacité d'agir de nos collectivités.
Nous avons déjà présenté les articles 73 et 74, qui concernaient la réforme de la DSEC et la création du FIT. Il me reste à vous parler des articles 72 à 77.
L'article 72 porte diverses mesures en lien avec la répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) en 2026. En premier lieu, il vise à prévoir une hausse de 290 millions d'euros des composantes péréquatrices de la DGF, dont 150 millions d'euros au titre de la dotation de solidarité rurale (DSR) et 140 millions d'euros au titre de la dotation de solidarité urbaine (DSU).
Si le maintien du montant global de la DGF, proposé à l'article 31 du présent projet de loi de finances, implique que cette hausse soit intégralement financée par les collectivités territoriales, nous n'avons pas souhaité revenir sur cette progression. Nous souhaitons en effet encourager la trajectoire d'augmentation de la péréquation et, singulièrement, l'effort particulier en faveur des communes rurales dont témoigne la progression de la DSR.
Nous appelons également de nos vœux une réforme de plus grande ampleur des modalités de répartition de la DGF, à laquelle nous travaillons dans notre rapport de contrôle budgétaire et qui doit nous aider à préparer une réforme structurelle indispensable.
De nombreux amendements ont été déposés sur cet article et sur la DGF en général. Ils ont reçu, pour la plupart, un avis défavorable en raison des effets redistributifs importants qui peuvent exister entre collectivités.
Nous émettrons toutefois un avis favorable sur l'amendement du Gouvernement qui tend à revenir sur la création de la DGF des régions, que nous avons votée, ainsi que sur les amendements qui visent à assurer la neutralisation financière de la réforme de l'effort fiscal à hauteur de 60 % en 2026, afin d'atténuer le choc que représenterait le retour à la trajectoire initialement prévue pour l'application de cette réforme.
J'en viens à l'article 77, qui tend à prévoir le versement en 2026 des sommes affectées au fonds de sauvegarde des départements, y compris l'abondement de l'État prévu par l'article 33 du présent projet de loi de finances.
En première partie, nous avons fait passer cet abondement de 300 millions à 600 millions d'euros, ce dont je me félicite. L'article 77 restreint toutefois le bénéfice de ce fonds aux départements dont l'indice de fragilité sociale est supérieur à 95 % de la moyenne, alors que ce seuil était fixé à 80 % de la moyenne en 2024.
Seule une trentaine de départements pourraient ainsi en bénéficier, alors qu'une soixantaine d'entre eux en auraient besoin.
C'est pourquoi nous avons proposé, au niveau de la commission des finances, un élargissement qui nous conduira, bien sûr, à émettre un avis favorable sur les amendements identiques nos II-25 rectifié, II-176 rectifié ter, II-1052 rectifié, II-1560 et II-1853 rectifié bis.
J'en viens enfin au dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico), qui fait l'objet des articles 75 et 76.
Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2025, le Sénat a adopté, sur l'initiative de notre commission, ce dispositif de lissage conjoncturel. Il s'agissait de traduire l'engagement de la Haute Assemblée en faveur d'une contribution des collectivités au redressement des comptes publics, tout en marquant notre rejet du fonds de réserve que proposait alors le Gouvernement, qui était brutal et inabouti.
Comme vous le savez, le Dilico fonctionne en prélevant des contributions une année, puis en les reversant par tiers les trois années suivantes, ce qui a produit des effets sur l'évolution des dépenses des collectivités en 2025 – nous l'avons vu lors de l'examen du projet de loi de fin de gestion. Une incertitude demeurait jusqu'ici sur l'effectivité de ces reversements.
L'article 75 vise à assurer le reversement des sommes prélevées au titre du Dilico en 2025. C'est pourquoi nous nous opposerons, bien sûr, à tous les amendements qui tendent à supprimer cet article. Le Dilico adopté en 2025 a conduit au prélèvement d'un montant total de 1 milliard d'euros, qui sera rendu aux collectivités. Il est essentiel de tenir cette parole.
L'article 76, lui, vise à créer un Dilico 2 pour un montant total de 2 milliards d'euros, répartis à hauteur de 700 millions d'euros pour les communes, de 500 millions pour les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), de 280 millions d'euros pour les départements et de 500 millions pour les régions. Il tend également à modifier les modalités de reversement par rapport au Dilico initial.
Il est en particulier prévu de distinguer plusieurs scénarios de reversement en fonction de l'évolution des dépenses des collectivités, scénarios qui pourraient, dans de très nombreux cas, se traduire par le non-reversement des sommes prélevées au titre du Dilico 2. Le mécanisme d'épargne forcée qui était au cœur de l'acceptabilité du Dilico proposé par le Sénat serait ainsi dévoyé.
De nombreux amendements ont été déposés pour supprimer le Dilico 2 proposé par le Gouvernement. Non seulement je comprends leur motivation, mais je la partage.
C'est pourquoi je proposerai de remplacer le Dilico 2, bien mal nommé, par le Dilico que nous avons adopté l'année dernière, en ramenant la contribution pour 2026 à 890 millions d'euros, en limitant l'effort des départements et en exonérant les communes de tout prélèvement pour l'année prochaine, tout en maintenant une contribution différenciée des trois blocs.
J'appellerai donc au retrait des amendements de suppression au profit de celui de la commission, dont les dispositions constituent un compromis acceptable et permettront d'atteindre l'objectif d'effort de 2 milliards d'euros fixé par le président Larcher ; celui-ci, pour ne pas être trop confiscatoire, est centré sur l'épargne forcée et la trésorerie.
Si nous montrons un front uni, mes chers collègues, ni le Gouvernement ni l'Assemblée nationale ne pourront revenir sur le compromis que nous aurons trouvé ici. Je me permets d'y insister, pour que nous ayons des votes responsables, se traduisant par des décisions effectives.
En conclusion, la commission vous invite à adopter les crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte spécial « Avances aux collectivités territoriales », ainsi que les articles 72, 73, 75, 76 et 77 modifiés par les amendements que nous vous soumettrons.
Nous vous proposons, en revanche, comme l'a rappelé ma collègue, de supprimer l'article 74, qui fusionne les dotations d'investissement aux collectivités territoriales, pour sauvegarder la DETR à laquelle nous sommes tous attachés. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – Mme Isabelle Florennes et M. Marc Laménie applaudissent également.)