M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Laurent Nunez, ministre de l'intérieur. Madame la sénatrice, le ministre de l'éducation nationale et moi-même nous sommes en effet rendus à Dijon, dans le quartier des Grésilles, auprès de la communauté éducative du collège Champollion, qui a été victime d'un incendie criminel. Nous étions accompagnés de nombreux élus dont la maire de Dijon, le président du conseil départemental, François Sauvadet, le président du conseil régional et des parlementaires, dont vous faisiez partie.
Je confirme ce que j'ai déclaré aux médias sur place : nous avons de bonnes raisons de penser qu'il s'agit d'un acte de représailles, en réponse aux coups sévères qui ont été portés au trafic de stupéfiants aux Grésilles depuis de nombreux mois.
Vous le savez, en septembre dernier, nous avons procédé à un démantèlement qui a permis d'interpeller les sept principaux chefs des réseaux de trafic de ce quartier. De ce fait, il n'y existe plus de point de deal. C'est tout du moins ce que les acteurs de terrains nous disent, et en particulier les policiers, ce pour quoi je les ai remerciés.
Le ministre de l'éducation nationale et moi-même allons évidemment accompagner et soutenir la communauté éducative pour que le collège reprenne le plus vite possible son activité.
Ensuite, très concrètement, qu'allons-nous faire pour éviter que le trafic ne se réimplante ? Tout le sujet est là.
Nous allons avant tout continuer notre action, qui est d'abord une action d'occupation du terrain.
J'ai rencontré les effectifs présents sur place de manière permanente. À cet égard, je salue la police municipale de Dijon, qui est également présente aux Grésilles. Ce travail permet de recenser les personnes se livrant aux trafics et de les disperser, donc de rassurer la population.
S'y ajoute le travail de démantèlement ; le travail judiciaire, mené en profondeur. Si de nouveaux réseaux viennent à s'implanter dans ce quartier, nous les démantèlerons sans retard. À cette fin, nous utiliserons tous les outils à notre disposition, dont ceux de la loi de juin dernier visant à sortir la France du piège du narcotrafic. Ce texte nous permet d'utiliser des techniques spéciales d'enquête renforcées. Surtout, il donne aux préfets les moyens de prendre des mesures de police administrative, par exemple des interdictions de paraître, qui, dans ce quartier, seront très utiles.
Madame la sénatrice, vous pouvez compter sur notre détermination à accompagner la communauté éducative de ce collège et à maintenir l'ordre dans le quartier des Grésilles. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
difficultés d'accès au label « reconnu garant de l'environnement » pour les artisans
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.)
M. Grégory Blanc. Ma question s'adresse à M. le ministre de la ville et du logement.
Monsieur le ministre, j'ai fait chez moi, le week-end dernier, le point avec un certain nombre d'artisans du bâtiment, qui – vous le savez – ont manifesté ce matin devant la préfecture d'Angers, comme ils manifestent devant toutes les préfectures de France aujourd'hui.
M. François Patriat. Ils feraient mieux de travailler…
M. Grégory Blanc. Tous m'ont dit la même chose : oui, il faut maintenir des normes environnementales et écologiques très ambitieuses, mais il faut aussi faire preuve de bon sens dans leur application. En effet, ont-ils ajouté, la simplification, ce n'est pas moins de normes : c'est moins de paperasse pour accéder aux chantiers et, parallèlement, plus de contrôles sur site. Il s'agit de vérifier, en inspectant le travail exécuté, que l'argent public est bien utilisé.
Aujourd'hui, les parcours de rénovation sont fracturés. Or il faut de la stabilité, ce qui suppose de mettre fin aux stop and go. Nous en avons connu un certain nombre, qu'il s'agisse de MaPrimeRénov' ou de la fin des monogestes.
Ne serait-ce qu'au cours des deux dernières années, le bâtiment a perdu 40 000 emplois.
En l'état, la qualification « Reconnu garant de l'environnement » (RGE) est non seulement une source de fraude pour ceux qui savent remplir les dossiers, mais aussi un frein pour les TPE et pour la massification des rénovations. Des pourparlers ont lieu depuis de nombreux mois avec votre ministère et, pourtant, tout est bloqué.
Monsieur le ministre, ma question est la suivante : quand allez-vous adopter un décret réformant ces dispositifs, pour qu'ils deviennent plus simples en restant tout aussi ambitieux écologiquement ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de la ville et du logement.
M. Vincent Jeanbrun, ministre de la ville et du logement. Monsieur le sénateur, merci de cette question tout à fait pertinente, particulièrement en ce jour où de nombreux artisans et chefs d'entreprise manifestent pour dire leur inquiétude.
Non seulement les chantiers sont de moins en moins nombreux, mais – vous le soulignez avec raison – les difficultés administratives s'accumulent. La « paperasse » à remplir, pour reprendre le mot que vous avez employé, provoque beaucoup de difficultés.
Il faut évidemment simplifier ces démarches administratives. Je ne manquerai pas de le dire au président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (Capeb), avec lequel je dois m'entretenir tout à l'heure : à mon sens, il est nécessaire de considérer d'une manière plus globale les enjeux relatifs au RGE.
Nous avons pour ambition commune d'améliorer la qualité de l'habitat, notamment pour faire face aux enjeux de rénovation thermique. Les démarches dont il s'agit doivent être mises en œuvre de la façon la plus simple possible.
En la matière, le Gouvernement poursuit son action, notamment en dotant de plus de 4,6 milliards d'euros l'Agence nationale de l'habitat (Anah). Ces fonds seront en particulier destinés à MaPrimeRénov', que vous avez citée.
Ce dispositif sera maintenu. Ses objectifs seront même rehaussés, puisque nous visons environ 120 000 rénovations d'ampleur l'an prochain.
L'ambition est très claire : éviter à tout prix les stop and go, qui sont délétères pour les particuliers et les copropriétés comme pour nos artisans. Il va de soi que nous maintenons l'effort ; mais, pour éviter tout effet de stop and go, il faut faire en sorte de ne pas commencer l'année sous le régime de la loi spéciale. Il est donc fondamental d'avoir un budget si nous voulons aider nos artisans partout où c'est possible, notamment avec MaPrimeRénov'. (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour la réplique.
M. Grégory Blanc. Monsieur le ministre, il faut bien un budget, mais il faut un budget pour MaPrimeRénov' ! Il faut un budget pour reprendre le soutien aux travaux monogestes. Il faut un budget pour avoir une haute ambition au titre de la rénovation énergétique, pour être au rendez-vous de l'Histoire en matière de neutralité carbone…
M. François Patriat. Il faut commencer par voter le budget !
M. Grégory Blanc. Vous le savez, 10 % seulement des entreprises du bâtiment sont aujourd'hui qualifiées RGE. Je le répète, il est urgent d'ouvrir davantage ce label. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – MM. Rémi Cardon et Jean-Marc Vayssouze-Faure applaudissent également.)
projet de loi de finances pour 2026 (i)
M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour le groupe Les Républicains. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Mathieu Darnaud. Monsieur le Premier ministre, vous avez souhaité que le Parlement, et notamment le Sénat, soit au cœur de la fabrique du budget. Dès lors, jugez-vous acceptables les propos tenus ici même par votre ministre de l'économie, lundi dernier, désignant le Sénat comme le responsable de la dégradation budgétaire ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. Laurent Burgoa. Scandaleux !
M. Mathieu Darnaud. Je le dis avec gravité et solennité. Depuis plusieurs mois, nous nous sommes attachés à élaborer un budget responsable, conforme à la trajectoire que vous avez vous-même indiquée,… (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Mme Silvana Silvani. Voilà le résultat !
M. Mathieu Darnaud. … un budget qui permette de faire des économies tout en supprimant quelque 8 milliards d'euros d'impôts supplémentaires.
À nos yeux, on ne peut pas construire un budget en faisant les poches des Français,… (Protestations sur les mêmes travées.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Taxez les riches !
M. Mathieu Darnaud. … des entreprises et de nos collectivités territoriales. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.) Si notre copie a été dégradée, c'est simplement parce qu'il a fallu accepter l'amendement du Gouvernement qui creuse le déficit public à 5,3 % du PIB… (Protestations sur les travées du groupe SER.)
M. Rachid Temal. Mais c'est vous !
M. Mathieu Darnaud. Monsieur le Premier ministre, à présent, il faut trouver des économies supplémentaires. Nous ne sommes plus qu'à quelques encablures de la commission mixte paritaire (CMP).
M. Pascal Savoldelli. C'est une explication de vote !
M. Mathieu Darnaud. Dès lors, ma question est très simple. Plutôt que de vous ériger en censeur, comme l'a fait votre ministre, allez-vous réellement mettre sur la table de nouvelles sources d'économies ? (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. Monsieur le président du Sénat, monsieur le président Darnaud, mesdames, messieurs les sénateurs, cette question me permet de faire un point d'étape en vous disant comment j'envisage et surtout comment je ressens la suite des opérations, pour donner un budget à la France d'ici à la fin de l'année.
Soyez-en assurés : le Gouvernement respecte et respectera toujours le Parlement et les parlementaires… (Vives protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jacques Grosperrin. Pas votre ministre !
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. Or, respecter le Parlement, c'est partir du principe que les parlementaires sont responsables de ce qu'ils ont voté, tout simplement.
Ce rappel étant formulé, nous sommes face à une réalité chiffrée : celle de notre déficit, qu'il convient de réduire.
La tâche est immense, vous le savez. Avant moi, François Bayrou et Michel Barnier s'y sont attelés…
M. Rachid Temal. Sans succès !
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. Il faut rendre hommage à leur action.
Les questions de recettes et de dépenses ont également été traitées, du temps de mes prédécesseurs, avec beaucoup de difficultés ; chacun a dû avancer pour que nous obtenions les compromis nécessaires. D'ailleurs, certains des instruments fiscaux dénoncés aujourd'hui figuraient dans les copies budgétaires élaborées par eux. Il a bien fallu les accepter, même lorsque nous n'étions pas d'accord.
Monsieur le président Darnaud, comme vous le rappelez, nous sommes à quelques encablures de la commission mixte paritaire. Je vois bien que les négociations vont être difficiles.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Eh oui !
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. Tout d'abord, les positions de l'Assemblée nationale sont assez éloignées de celles du Sénat ; cela étant, la commission mixte paritaire, où le Gouvernement n'est pas représenté, a vocation à permettre des convergences.
Je suis un défenseur du bicamérisme. À de nombreuses reprises dans notre histoire – je le rappelle –, des positions qui pouvaient paraître très éloignées avant la CMP ont réussi à converger au sein de cette dernière.
Néanmoins, la situation est un peu plus compliquée encore : les positions des uns et des autres sont parfois dures à identifier et, à l'évidence, il est très difficile de les faire converger entre les différents groupes politiques. Dans cet hémicycle, la situation est plus classique et probablement plus claire ; mais, dans celui de l'Assemblée nationale, elle est bien moins évidente.
M. Alain Milon. C'est sûr…
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. À ce titre, je salue tout particulièrement M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances du Sénat, et M. Philippe Juvin, rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale : vous le savez en tant que président de groupe, la tâche qu'ils assument depuis plusieurs semaines est loin d'être facile.
Je tiens aussi à souligner la qualité du travail accompli avec vous et devant vous par Mme la ministre de l'action et des comptes publics, Amélie de Montchalin. Au-delà de nos divergences d'opinions politiques, on peut reconnaître que le Gouvernement s'est tenu à la disposition de tout un chacun.
Soyons honnêtes : la difficulté ne s'arrête pas là. Parfois, les positions sont difficiles à identifier au sein des groupes politiques ; parfois même, elles divergent entre les groupes d'une même formation politique à l'Assemblée nationale et au Sénat.
M. Rachid Temal. Pas chez Les Républicains, par hasard ? (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. Je pense au Parti socialiste aussi. (Protestations sur les mêmes travées. – Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Patrick Kanner. Oh non !
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. Je le dis sans malice. La réalité, c'est que notre vie politique est fragmentée. Or le budget est le document le plus politique de l'année : par définition, la fragmentation que connaissent les partis politiques se retrouve dans l'exercice que nous sommes en train de vivre.
M. Olivier Paccaud. C'est le budget d'Olivier Faure !
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. C'est le budget du Gouvernement tel qu'il a été amendé par le Sénat, monsieur le sénateur. Le projet de loi de finances (PLF) a été rejeté par l'Assemblée nationale.
Gardons-nous des mensonges. Nous sommes entre gens responsables : ici, il n'y a pas de groupe de La France insoumise (LFI) ou du Rassemblement national (RN).
M. Loïc Hervé. Encore heureux !
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. Eh bien, il va falloir continuer de se battre pour que cela dure.
Les membres de la commission mixte paritaire confronteront donc deux versions de ce budget : la copie initiale du Gouvernement et la copie du Sénat. L'Assemblée nationale n'a examiné que la partie recettes : elle n'a regardé que quelques éléments de la partie dépenses en commission et n'y a pas consacré une minute en séance.
On constate donc une désynchronisation très importante entre, d'une part, le Sénat, qui a travaillé de nombreuses heures, de nombreux jours et même plusieurs semaines sur la seconde partie du PLF et, de l'autre, une Assemblée nationale fragmentée,…
M. Pascal Savoldelli. Ce budget n'était pas bon !
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. … que vous connaissez, où ce travail n'a pas été fait.
Cette situation s'impose autant à vous qu'à moi ; encore plus à moi qu'à vous, puisque je suis chargé de diriger le Gouvernement. C'est une simple réalité.
Quoi qu'il en soit, il faut que l'on ait un budget avant la fin de l'année. Ce matin, lors du conseil des ministres, j'ai insisté sur le fait que les membres du Gouvernement devaient se plier en six d'ici à vendredi et samedi prochains, pour accompagner les parlementaires sur ces voies de compromis.
Il va falloir davantage de clarté. Il va falloir que les gens se parlent davantage. Je n'en dirai pas plus long publiquement ; toujours est-il que la commission mixte paritaire se réunit maintenant dans un peu plus de quarante-huit heures. Voilà plusieurs jours que je demande à toutes les formations politiques d'organiser une commission mixte paritaire à blanc, à titre préparatoire, pour que les membres du Gouvernement puissent faire des propositions, y compris des propositions d'économies nouvelles s'il le faut. Nous n'avons eu que peu de succès à l'Assemblée nationale, quels que soient les bancs. Vous le savez, monsieur le président Darnaud…
M. Mathieu Darnaud. Nous sommes au Sénat, monsieur le Premier ministre !
Mme Frédérique Puissat. Ici, vous en avez eu !
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. Certes, mais le bicamérisme, ce sont deux chambres. J'observe d'ailleurs que, mardi prochain, le Sénat se prononcera le matin, donc en premier, suivi l'après-midi par l'Assemblée nationale.
Je vous le répète en toute bonne foi, je ne cherche pas le soutien de qui que ce soit. Je ne cherche qu'un peu de bienveillance afin d'éviter le désordre. Je cherche à faire en sorte que, globalement, l'État, les services publics fonctionnent.
Les élections municipales auront lieu au mois de mars prochain. Le monde économique est inquiet. Nous devons arriver à doter la France d'un budget. À cet égard, le seul esprit qui compte est l'esprit d'intérêt général : je sais que vous allez y concourir en tant que président de groupe.
Puisqu'il vous reste un peu de temps de parole, peut-être allez-vous nous indiquer les éléments sur lesquels vos collègues sont prêts à bouger en vue d'un compromis ; les éléments de fond que le groupe Les Républicains peut mettre sur la table,… (Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
Mme Cécile Cukierman. On va vous laisser ! (Sourires sur les travées du groupe CRCE-K.)
M. Sébastien Lecornu, Premier ministre. … permettant ainsi aux autres groupes politiques du Sénat et de l'Assemblée nationale d'avancer.
Adopter le budget, c'est agir dans l'intérêt de la Nation. Mais cela suppose que chacun fasse un pas vers l'autre, sans renoncer à sa liberté, mais avec le sens de l'intérêt général. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, INDEP et SER. – M. Bernard Fialaire applaudit également.)
M. Martin Lévrier. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Mathieu Darnaud, pour la réplique.
M. Mathieu Darnaud. Monsieur le Premier ministre, j'aurai du mal à résumer en trente secondes ce que nous avons mis, ici, six mois à bâtir.
Chers collègues de gauche, comme disait Pierre Mendès France, gouverner, c'est choisir.
Mme Monique Lubin. Exactement !
M. Mathieu Darnaud. Je le confirme, le temps du budget est un temps politique. Il faut choisir entre, d'une part, les tenants de la taxe et de la surtaxe et, de l'autre – c'est notre cas au sein du groupe Les Républicains –, les tenants des économies. (Protestations sur les travées du groupe SER. – Mme Audrey Linkenheld s'exclame.)
M. Patrick Kanner. En faveur des plus aisés !
M. Mathieu Darnaud. Notre but est d'être utiles en donnant un budget à la France et aux Français. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
enjeux de la santé mentale en outre-mer
M. le président. La parole est à Mme Solanges Nadille, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Solanges Nadille. Ma question s'adresse à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées.
Il y a quinze jours, la Guadeloupe était frappée d'effroi. Au Gosier, un psychiatre a perdu la vie, poignardé par l'un de ses patients au sein même du centre médico-psychologique (CMP) où il exerçait.
Ce drame absolu n'est pas un simple fait divers. Il est le symptôme violent d'un système de santé mentale à bout de souffle.
Dimanche dernier encore, c'est une ancienne députée de la Nation et ancienne coordinatrice interministérielle contre les violences faites aux femmes en outre-mer, qui, avec une citoyenne anonyme, a été sauvagement agressée au Moule. Ces actes tragiques révèlent l'impérieuse nécessité de protéger ceux qui soignent comme ceux qui sont soignés.
En Guadeloupe, l'établissement public de santé mentale (EPSM) suit aujourd'hui 20 % de patients de plus qu'en 2019. Les besoins explosent, mais les moyens suivent-ils ?
La situation de notre jeunesse est encore plus alarmante. Dans une étude récente, la Mutualité française dresse ce constat sans appel : dans nos outre-mer, près de quatre jeunes sur dix souffrent de dépression. En Guyane, c'est plus d'un jeune sur deux. Mais le plus grave, c'est le silence.
Alors que la souffrance est plus forte chez nous, le recours aux soins y est plus faible : seulement 30 % des jeunes Ultramarins osent consulter. Pourquoi ? Par peur de la stigmatisation, certes, mais surtout parce que, dans nos territoires, l'offre de soins est illisible, fragmentée et trop souvent inaccessible. Nos jeunes se heurtent à un parcours du combattant, là où ils devraient trouver une main tendue.
Madame la ministre, mes questions sont simples. L'agence régionale de santé (ARS), garante de l'offre de soins, ne peut se contenter d'une gestion comptable. Quand doterez-vous nos EPSM et nos structures de proximité de moyens humains et financiers à la hauteur, face à l'explosion des troubles psychiatriques ? Concrètement, quelles mesures d'urgence allez-vous déployer pour que les problèmes de santé mentale de nos jeunes Ultramarins cessent d'être une fatalité et pour que nos soignants puissent enfin exercer sans risquer leur vie ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe INDEP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'autonomie et des personnes handicapées.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée auprès de la ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargée de l'autonomie et des personnes handicapées. Madame la sénatrice Nadille, avant tout, permettez-moi de m'associer à l'hommage que vous venez de rendre au psychiatre récemment assassiné en Guadeloupe par l'un de ses patients. De même, je tiens à exprimer mon entier soutien à la ministre Justine Benin, qui, comme vous l'avez rappelé, a été victime d'une agression.
Ces événements nous rappellent, comme bon nombre de faits divers déplorés au fil des jours, à quel point les enjeux de santé mentale sont prégnants dans notre pays. C'est d'ailleurs pourquoi M. le Premier ministre a souhaité déclarer la santé mentale grande cause nationale pour 2026,…
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. … comme l'avait fait Michel Barnier pour 2025.
Face à la multiplication des troubles psychiatriques, vous nous demandez les actions concrètes mises en œuvre par le Gouvernement, particulièrement en direction des jeunes.
Tout d'abord, j'insiste sur le fait que les crédits consacrés à la santé mentale augmentent. Dans le cas de la réforme du financement de la psychiatrie, huit régions ont ainsi bénéficié d'un rattrapage financier : la Guadeloupe en fait partie. À ce titre, 12 millions d'euros ont été alloués aux territoires ultramarins.
Ces moyens viendront soutenir les établissements publics de santé mentale, qui, vous l'avez rappelé, ont bien besoin de notre aide, notamment en Guadeloupe. Mais, dans ce domaine, nous restons placés face à un véritable défi humain : il faut recruter un certain nombre de professionnels – psychiatres, infirmiers ou encore psychologues. Or, dans ce secteur, la pénurie de soignants est durable, ce qui entraîne un certain nombre de difficultés. Mais l'État se mobilise : en témoignent divers dispositifs destinés à renforcer l'attractivité de ces métiers.
En outre, plusieurs dispositions ont été prises en direction des plus jeunes. Nous renforçons notamment les maisons des adolescents, le développement des équipes mobiles de pédopsychiatrie et l'intervention des professionnels de santé mentale en milieu scolaire. Nous déployons, en parallèle, le dispositif de repérage précoce.
M. le président. Madame la ministre, il faut conclure.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Madame la sénatrice, voilà quelques exemples de moyens mis à disposition pour répondre aux enjeux de santé mentale, en particulier en Guadeloupe. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Marc Laménie applaudit également.)
projet de loi de finances pour 2026 (ii)
M. le président. La parole est à M. Laurent Somon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Laurent Somon. Monsieur le Premier ministre, je souhaite revenir à mon tour sur les propos tenus ce lundi au Sénat par votre ministre de l'économie – je m'abstiens volontairement d'y associer les finances : Mme de Montchalin semble en avoir assumé, depuis l'installation du Gouvernement, l'intégralité du pilotage.
« Houston, we have a problem », a-t-il déclaré, en bon français. Je vous le confirme en bon picard : we have a problem. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Ce problème, c'est le mépris persistant à l'égard du Parlement et plus encore du Sénat ; et cela suffit.
Monsieur le ministre, je ne prendrai qu'un exemple précis : l'amendement de la commission des finances tendant à tirer les conséquences de la gestion du plan France 2030, marquée depuis deux exercices par des surestimations manifestes. Vous avez vous-même proposé, en fin de gestion, des annulations successives de 1,2 milliard et de 1,6 milliard d'euros de crédits.
Sur la base des éléments transmis au Sénat par le secrétariat général pour l'investissement (SGPI), nous avons proposé de sincériser ces crédits à hauteur de 1 milliard d'euros. Il ne s'agissait ni d'un désengagement ni d'une remise en cause du plan. Nous entendions procéder à un exercice élémentaire de sincérité budgétaire.
Dans ces conditions, les informations erronées, pour ne pas dire fallacieuses, qui ont circulé, entretenues par certains services relevant de Matignon, ne sont pas acceptables. Elles trahissent une forme de mépris institutionnel à l'égard du Parlement.
En outre, je dénonce un véritable manque de transparence dans la gestion de ces fonds. J'en veux pour preuve la publication insuffisante des documents de contrôle, voire l'absence pure et simple et de ces derniers.
Monsieur le Premier ministre, pourriez-vous rappeler à vos services que, dans ce pays, c'est le Parlement qui décide et le Gouvernement qui exécute ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
M. Jacques Grosperrin. Bravo !
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'action et des comptes publics.
Mme Amélie de Montchalin, ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur le sénateur Somon, sans doute pouvons-nous apprendre collectivement des discussions qui nous occupent depuis plusieurs semaines. On peut être en désaccord sans être dans le mépris… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Les amendements que vous citez ne sont pas des amendements de manipulation : ce sont des amendements de sincérité. À cet égard, je tiens à rappeler calmement quelques faits, car – vous le soulignez vous-même – ces débats ont donné lieu à un vaste mouvement de désinformation.
Au titre des amendements déposés par le Gouvernement, on a longuement débattu des conséquences du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) sur le déficit public. M. Milon vous le confirmera, à l'instar de Mme Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales, il a beaucoup été question, au cours de nos travaux, des transferts entre l'État et la sécurité sociale.
M. Alain Milon. Tout à fait !
Mme Frédérique Puissat. Exactement !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le savez tous désormais, le PLFSS, tel qu'il a été définitivement adopté hier, opère 4,6 milliards d'euros de transferts entre l'État et la sécurité sociale.
M. Max Brisson. Ce n'est pas la question !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je tiens à rappeler, sans aucun mépris ni esprit de polémique, que le Sénat avait lui-même proposé, dans sa propre copie du PLFSS, 5,7 milliards d'euros. Le Gouvernement a retenu la somme de 4,6 milliards d'euros. C'est d'ailleurs un des éléments de compromis transpartisans qui ont émergé entre le groupe centriste, le groupe Les Républicains du Sénat, le groupe écologiste de l'Assemblée nationale et votre collègue député Thibault Bazin, rapporteur général de la commission des affaires sociales et membres du groupe de la Droite républicaine. Il me semble nécessaire de le rappeler.
L'enjeu de sincérisation a été évoqué. Nous avons fait les comptes et je reste à votre disposition pour vous montrer en quoi les 5,3 % de déficit sont la conséquence de vos votes au titre de la première partie du PLF… (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Corinne Imbert. Non !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je pense aux 8 milliards d'euros évoqués il y a quelques instants par le président Darnaud et à un certain nombre de dispositions prises au titre des dépenses.