M. Jean-Pierre Vogel, rapporteur spécial

SOMMAIRE

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LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL 5

ANALYSE GÉNÉRALE DE LA MISSION

I. UNE HAUSSE SYMBOLIQUE DES CRÉDITS QUI N'EST PAS À LA HAUTEUR DE LA GRAVITÉ DE LA SITUATION 7

A. UNE SITUATION DOUBLEMENT EXCEPTIONNELLE POUR LES FORCES DE SÉCURITÉ 7

1. Une hausse sans précédent de la menace terroriste 8

2. Une crise migratoire de grande ampleur 10

B. FACE À CE DÉFI, UN BUDGET « USUEL » 11

1. La mise en oeuvre du plan de lutte anti-terroriste et du plan « migrants » 11

2. Une hausse des crédits de 0,9 % loin d'être exceptionnelle 14

II. UNE « PAUPÉRISATION » DES FORCES DE SÉCURITÉ QUI APPELLE LA MISE EN PLACE D'UNE STRATÉGIE RENOUVELÉE FONDÉE SUR LA RATIONALISATION DES TÂCHES ET LA MUTUALISATION DES MOYENS 15

A. UNE « PAUPÉRISATION » DES FORCES DE SÉCURITÉ, QUI NE DISPOSENT PLUS DES MOYENS NÉCESSAIRES POUR ASSURER LEURS MISSIONS 15

1. Un choix idéologique de concentrer l'effort budgétaire sur les créations d'emplois 15

2. En conséquence, une « paupérisation » des forces de l'ordre 16

B. UNE AUTRE STRATÉGIE FONDÉE SUR LA RATIONALISATION DES TÂCHES ET LA MUTUALISATION DES MOYENS EST POSSIBLE 18

1. Trois principaux leviers permettent d'augmenter la présence sur le terrain et la capacité opérationnelle des deux forces à effectifs et moyens constants 18

2. L'absence de recherche de nouveaux gisements de productivité depuis 2012 19

III. UN VOLET PERFORMANCE MARQUÉ PAR UN PROBLÈME D'IMPUTATION INÉDIT 21

A. UN PROBLÈME D'IMPUTATION INÉDIT QUI INVITE À FAIRE ÉVOLUER LE DISPOSITIF DE PERFORMANCE 21

1. Des ruptures statistiques importantes 21

2. Une évolution indispensable du dispositif de performance 22

B. UNE HAUSSE DE LA DÉLINQUANCE SUR LA PÉRIODE RÉCENTE 24

1. Un retraitement statistique indispensable 24

2. Un retraitement qui met en évidence une hausse de la délinquance au cours de la période récente 24

ANALYSE PAR PROGRAMME

I. LE PROGRAMME 152 « GENDARMERIE NATIONALE » 27

A. PRÉSENTATION DES CRÉDITS 27

B. UNE DÉFLATION DU CORPS DES OFFICIERS ACCOMPAGNÉE D'UN RENFORCEMENT DES PERSONNELS ADMINISTRATIFS 28

C. UN PLAFOND D'EMPLOIS ARTIFICIELLEMENT ÉLEVÉ 29

D. L'ENJEU DE L'APPLICATION À LA GENDARMERIE DE LA DIRECTIVE EUROPÉENNE RELATIVE AU TEMPS DE TRAVAIL 31

E. UNE BAISSE DES CRÉDITS DE FONCTIONNEMENT DE NATURE À REMETTRE EN CAUSE LA HAUSSE PRÉVUE DES CRÉDITS D'INVESTISSEMENT ? 32

II. LE PROGRAMME 176 « POLICE NATIONALE » 34

A. PRÉSENTATION DES CRÉDITS 34

B. L'ENJEU DE LA RÉPARTITION DES CRÉATIONS DE POSTES ENTRE LES CORPS 35

C. LA MISE EN PLACE DE NOUVEAUX CYCLES DE TRAVAIL, UNE OPPORTUNITÉ POUR RÉDUIRE LE STOCK D'HEURES SUPPLÉMENTAIRES 36

D. UNE TENSION SUR LES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT QUI INVITE À CONCRÉTISER LES PISTES DE RATIONALISATION ET DE MUTUALISATION 37

E. UNE HAUSSE DE L'INVESTISSEMENT QUI POSE LA QUESTION DE L'ÉVOLUTION DE LA MAQUETTE BUDGÉTAIRE 38

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE 41

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Les attaques terroristes de janvier 2015 ont bouleversé la hiérarchie des préoccupations des Français. Si le chômage reste mentionné comme le problème le plus préoccupant par 38,3 % de la société française (- 8,4 points sur un an), le terrorisme remplace la pauvreté (- 2,7 points sur un an) à la deuxième place (17,7 %, + 15,1 points sur un an), juste devant la délinquance. Il ne fait aucun doute que les attentats du 13 novembre 2015 vont faire de la lutte contre le terrorisme la principale préoccupation des Français.

2. Ce bouleversement se traduit par un surcroît important d'activité pour les forces de sécurité intérieure , qui sont confrontées à une hausse sans précédent de la menace terroriste et à une crise migratoire de grande ampleur. Votre rapporteur spécial tient à saluer le dévouement des policiers et gendarmes, qui ont fait face avec courage et détermination à ces défis nouveaux.

3. Dans ce contexte, un plan de lutte anti-terroriste et un plan « migrants » ont été annoncés, en complément du renforcement des effectifs prévu par la loi de programmation des finances publiques (LPFP). Au total, les forces de police et de gendarmerie devraient bénéficier en 2016 d'une hausse des crédits de paiement de 0,9 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2015.

4. Cette hausse modérée montre que le Gouvernement n'a pas encore pleinement pris la mesure de la gravité de la situation. À titre de comparaison, la hausse des crédits de paiement en exécution était de 3,5 % en 2009, de 2,6 % en 2011 et de 2 % en 2013, alors même que ces exercices n'ont pas été marqués par un renforcement particulier du niveau de la menace.

5. Depuis 2012, le Gouvernement a fait le choix idéologique de concentrer l'effort budgétaire sur les créations d'emplois. Pourtant, les comparaisons internationales ne témoignent pas d'une sous-dotation des forces de sécurité intérieure de notre pays, bien au contraire. Parmi nos principaux voisins européens, un seul (l'Italie) a des effectifs supérieurs aux nôtres.

6. Si la menace terroriste, qui pèse de manière asymétrique sur notre pays, peut justifier un renforcement des effectifs, ces créations de postes masquent une « paupérisation » des deux forces, qui ne disposent plus des moyens en fonctionnement et en investissement pour assurer leurs missions. Une comparaison entre l'exécution budgétaire 2009 et les crédits demandés pour 2016 montre ainsi que pour des effectifs comparables, les moyens de fonctionnement et d'investissement sont inférieurs de 336 millions d'euros en 2016.

7. À titre d'illustration, le maintien du parc automobile en l'état nécessiterait l'achat de plus de 6 600 véhicules par an sur la période 2015-2017. Pourtant, le montant alloué à l'achat de véhicules dans chacun des deux programmes est de seulement 40 millions d'euros, ce qui ne permettra d'acquérir que 4 000 véhicules en 2016. Aucune mesure d'exception comparable à ce qui avait été réalisé en 2009 dans le cadre du plan de relance, avec l'achat de près de 9 000 véhicules, n'a été décidée. En la matière, il est regrettable que le Gouvernement actuel ne fasse pas preuve de la même réactivité en 2015, face à la crise sécuritaire, que son prédécesseur en 2009, face à la crise financière.

8. Afin de dégager des marges de manoeuvre sur le plan budgétaire, une stratégie fondée sur la rationalisation des tâches et la mutualisation des moyens doit être poursuivie. En la matière, la dynamique engagée en 2009 avec le rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur a été interrompue.

9. Les annonces de ces dernières semaines - « plan interne de simplification », nouveaux redéploiements des zones de compétences, etc. - témoignent d'une prise de conscience très tardive de ces enjeux. Il est particulièrement regrettable qu'une manifestation de plusieurs milliers de policiers sur la place Vendôme, à l'appel de l'ensemble des syndicats représentatifs, ait été nécessaire pour que le Gouvernement décide de s'engager dans cette voie.

10. Il est difficile de se prononcer sur l'évolution de la délinquance, en raison de l'existence de ruptures statistiques. Toutefois, les chiffres retraités par le nouveau service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) mettent en évidence une hausse de la délinquance au cours des derniers mois . Cette évolution doit être surveillée car elle pourrait être le signe d'une dégradation de la situation des services généralistes chargés de la lutte contre les formes classiques de délinquance, la hausse des effectifs et des moyens étant concentrée sur les services spécialisés (et notamment les quatre services concourant au renseignement intérieur).

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 100 % des réponses étaient parvenues à votre rapporteur spécial.