3. Un effet de seuil partiellement résolu par l'aide à la mutualisation de la CNAMTS

Le bénéfice de la CMU complémentaire est réservé aux titulaires de revenus inférieurs à 562 euros mensuels pour une personne seule et 843 euros pour deux personnes.

Ce plafond de ressources est souvent critiqué en raison de sa très grande proximité, immédiatement inférieure, avec le montant dont bénéficient les allocataires du minimum vieillesse/invalidité et de l'AAH, qui s'élèvent tous les deux à 569,38 euros mensuels.

Toutefois, les comparaisons doivent prendre en compte le forfait logement, qui concerne la grande majorité des bénéficiaires de la CMU complémentaire. Dans cette optique, l'écart ne s'élève pas à 7,38 euros, mais à 56 euros. En conséquence, placer le plafond de ressources de la CMU complémentaire au niveau du minimum vieillesse et de l'allocation adulte handicapé n'améliorerait pas la situation de la plupart des titulaires de ces minima sociaux.

Cette situation nourrit un important contentieux, 37.844 recours déposés en 2000, fondé sur la contestation des ressources prises en compte par les caisses, dont le niveau détermine l'accès, ou non, à l'exonération du paiement de cotisations et à la dispense d'avance de frais. Cette situation a contraint, en mars 2002, la Direction de la sécurité sociale à rédiger une circulaire procédant au rappel des règles de procédure applicables à la prise de décision et précisant les voies de recours et d'appel afférentes à ces décisions.

Face à cette situation, le précédent gouvernement avait, lors de la lecture définitive du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, annoncé « un nouveau dispositif permettant de réduire le coût d'acquisition d'un contrat de couverture maladie complémentaire par les personnes dont les ressources sont à peine supérieures au plafond de la CMU ».

En conséquence, un avenant à la convention d'objectifs et de gestion Etat-CNAMTS 2000-2003, signé le 7 mars 2002, a prévu de pallier partiellement l'effet de seuil excluant les titulaires de l'AAH et du minimum vieillesse en créant, au bénéfice des personnes dont les revenus sont compris entre le plafond et 10 % de ce dernier, une aide financière dénommée « aide à la mutualisation » , imputée sur les crédits d'action sanitaire et sociale des caisses d'assurance maladie.

Cette aide, dont le montant dépend de la composition du foyer et de l'âge du bénéficiaire, vaut pour une période de un an reconductible. Elle permet l'achat d'un contrat de couverture complémentaire qui doit garantir le « panier de soins » de la CMU complémentaire et respecter un certain nombre de principes (absence de limite d'âge pour l'adhésion à un contrat, non-utilisation de questionnaire ou d'examen médical, etc.).


Les conditions de l'aide à la mutualisation selon l'avenant

- Les personnes ou foyers éligibles sont ceux dont les revenus n'excèdent pas de plus de 10 % le plafond de la CMU complémentaire ;

- les personnes déjà couvertes au titre d'un contrat de protection complémentaire collectif obligatoire sont exclues du bénéfice de l'aide ;

- les contrats éligibles à l'aide doivent garantir le « panier de soins » de la CMU complémentaire et respecter un certain nombre de principes « déontologiques » ;

- les négociations sont déterminées au plan local entre les caisses et les organismes complémentaires afin de déterminer les tarifs auxquels ces contrats sont proposés ;

- les tarifs peuvent être modulés selon l'âge de l'assuré et la composition de la famille ;

- le montant de l'aide s'élève à 115 euros pour la première personne, majoré de 103,5 euros pour la deuxième, et de 57,5 euros par personne supplémentaire. Ce montant est modulé en fonction de l'âge du bénéficiaire adulte à hauteur de - 20 % quand celui-ci est âgé de 18 à 39 ans, + 10 % de 40 à 59 ans, et + 40% pour les plus de 60 ans ;

- dans l'attente des négociations, les personnes ayant déposé un dossier pourront déposer une demande d'aide ponctuelle.

L'avenant à la COG renvoyait vers les CPAM la mise en oeuvre du dispositif. Une circulaire d'application devait être prise en ce sens à la fin du mois de juillet 2002.

L'application de cet avenant devra, en outre, surmonter quatre difficultés :

l'absence d'adhésion des acteurs de la protection sociale complémentaire (Mutuelle/Assureur/Prévoyance), qui préconisent eux-mêmes des solutions alternatives ;

une gestion juridiquement contestable des dotations inscrites dans la COG ;

la reconstitution de nouvelles disparités entre départements, disparités que la CMU avait précisément pour objet de gommer ;

une mise en place longue et fastidieuse sur le plan local, liée à la nécessité de négocier au plus près le contenu de la couverture avec les organismes complémentaires.

• Les projets des fédérations mutualistes

L'idée d'un crédit d'impôt pour une couverture complémentaire, née au sein de la Mutualité des agents des impôts (MAI) en 1991, a été relancée récemment par la Mutualité française.

Fort du constat que la CMU complémentaire ne bénéficiait pas à de nombreux exclus de toute protection médicale complémentaire (AAH, minimum vieillesse, certains salariés de PME, etc.), la Mutualité a proposé que ces derniers puissent bénéficier d'un crédit d'impôt ou d'une déduction -selon leur situation- d'un montant de 155 euros auxquels s'ajouteraient 40 euros par enfant à charge, leur permettant de financer, dans le cadre d'un contrat individuel, une protection santé complémentaire.

Le coût de cette proposition est estimé à environ 800 millions d'euros.

De son côté, la Fédération nationale interprofessionnelle des mutuelles (FNIM) propose, pour sa part, une aide personnalisée à la santé, inspirée des propositions formulées par le Sénat lors de l'examen du projet de loi relatif à la CMU en 1999.

Cette fédération préfère l'instauration d'une aide dégressive financée par une dotation budgétaire annuelle et conteste l'idée du crédit d'impôt qui, selon elle, ne serait pas conforme au principe de progressivité de l'impôt et, pour être efficace, du fait de sa dispersion, coûterait rapidement très cher.

Tant le Président de la République que le Gouvernement ont précisé qu'ils étaient ouverts à l'éventualité d'un dispositif favorisant l'accès à une couverture complémentaire santé. Mais, pour l'instant, aucune orientation n'a encore été arrêtée.


L'alternative proposée par le Sénat : l'allocation personnalisée à la santé (APS)

L'APS avait vocation à supprimer l'effet de seuil

Le dispositif actuel de la CMU -complémentaire- est attribué aux titulaires d'un revenu inférieur à 562 euros mensuels pour une personne seule. Ce dispositif exclut notamment les titulaires de l'allocation adulte handicapé (AAH) et du minimum vieillesse dont les montants excèdent de 7,38 euros le plafond mensuel de la couverture maladie universelle.

Pour annuler cet effet de seuil, le Sénat a proposé que le montant de l'APS soit dégressif avec le revenu partant d'une prise en charge à 100 % pour les titulaires du revenu minimum d'insertion (RMI).

L'APS privilégiait la voie conventionnelle pour la fixation du « panier de soins »

Pour favoriser « un scénario partenarial », la commission des Affaires sociales avait proposé d'autoriser les régimes obligatoires d'assurance maladie et les fédérations représentatives des organismes assureurs, de prévoyance et mutualistes à établir une convention permettant :

- la possibilité de définir le contenu du panier de soins, celui-ci pouvant différer dans son périmètre et dans ses montants de celui prédéfini par le régime de base d'assurance maladie (art. L. 321-1) et sur lequel s'alignait le projet de CMUC gouvernemental ;

- la possibilité de fixer les critères de qualité et de prix auxquels doivent satisfaire les producteurs de biens et services médicaux pour bénéficier d'un agrément ouvrant droit à la prise en charge des soins.

La convention ne devait entrer en vigueur qu'après ratification par un arrêté ministériel.

L'APS prévoyait une « garantie de ressources » en faveur des organismes complémentaires participant au dispositif, l'Etat compensant au franc le franc les dépenses acquittées pour un montant supérieur aux subventions reçues et ce, afin d'assurer que le prix de la CMU complémentaire est estimé à sa juste valeur.

En effet, le système proposé par le Gouvernement est inéquitable à l'égard de ces organismes qui sont financés par une dotation forfaitaire par affilié, dont le montant -environ 1.500 francs annuels- reste inférieur au coût réel moyen de prise en charge.

A l'instar de la CMU complémentaire, l'APS prévoyait le principe du tiers payant et le caractère « différentiel » de la couverture .

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