II. UN SURSAUT NÉCESSAIRE AU NIVEAU EUROPÉEN
A. LES CONSÉQUENCES DE L'ÉCHEC DU TIR D'ARIANE 5
Le
développement du lanceur Ariane 5 a été
décidé par le Conseil de l'Agence spatiale européenne en
novembre 1987. L'objectif principal du programme était de doter l'Europe
d'un lanceur capable de lancer deux charges utiles en orbite de transfert
géostationnaire en tenant compte de l'évolution de la masse des
satellites. L'échec du tir 517 du 11 décembre 2002, qui
constituait la première occasion de tester la nouvelle famille de
lanceurs (« Ariane 5 ECA ») est venu aggraver la crise
touchant le secteur spatial européen. Face à cette situation,
l'Agence spatiale européenne, en concertation avec ses partenaires, a
élaboré un plan destiné à garantir
l'indépendance d'accès à l'espace pour l'Europe. Rendu
public le 27 mai 2003 et adopté à l'unanimité,
ce plan comprend trois volets.
Le rétablissement d'Ariane 5
L'objectif de ce plan est la mise au point d'une version compétitive du
lanceur Ariane 5 pour assurer la continuité du service à partir
de 2005. Son financement est assuré par un redéploiement des
ressources en provenance d'autres programmes et par différentes mesures
d'économies, notamment sur le contrat du Centre spatial guyanais.
Le programme European guaranted access to space (EGAS)
Ce programme tend à assurer à l'Europe une garantie
d'accès à l'espace en finançant une partie des coûts
fixes industriels associés à la production et aux
opérations des lanceurs Ariane 5 pour la période 2005-2009. Il
permettra ainsi aux Etats membres d'acquérir un droit d'accès,
prioritaire et dans la durée, à ces installations
stratégiques. Par ailleurs, ce plan permettra le retour à la
compétitivité du programme Ariane 5 -qui devrait s'achever fin
2009- et rendra possible une exploitation équilibrée du lanceur
durant cette même période. Souscrit à hauteur de 99 %
de son coût par les Etats membres (dont 51,9 % à la charge de
la France), il s'élève à 960 millions d'euros et il
est lié aux engagements pris par les industriels sur les coûts de
production et la réorganisation à court terme de la
filière.
Le plan de restructuration du secteur des lanceurs
Les financements requis pour assurer l'avenir de la filière Ariane
s'accompagnent d'une importante réduction des coûts et d'une
réorganisation complète du secteur des lanceurs, avec un seul
maître d'oeuvre industriel pour le système Ariane :
l'entreprise EADS. Parallèlement, Arianespace est confirmée dans
son rôle d'opérateur de lancement, responsable des
activités marketing et commerciales, et de donneur d'ordres pour la
production, l'Agence étant le donneur d'ordres pour le
développement. L'Agence spatiale européenne continuera à
faire appel aux compétences du CNES dans un cadre contractuel
renouvelé. La France confirme ainsi son niveau d'engagement à
plus de 50 % du programme Ariane. La réorganisation de l'ensemble
des services de lancement, qui touche le secteur public et le secteur
industriel privé, a pour objet de parvenir à réduire les
coûts des phases de développement et de production, d'amener
à une plus grande cohérence entre la demande commerciale et les
développements technologiques et d'établir un meilleur
équilibre des responsabilités et des bénéfices
entre les Etats membres et les industriels.
Le développement du programme Galileo
Comme votre rapporteur pour avis l'avait indiqué l'an passé, le
programme Galileo a pour objectif de doter l'Europe d'un système de
positionnement par satellites lui apportant une autonomie par rapport au
système GPS américain. Le 26 mai 2003, en marge du
Conseil ministériel de l'Agence spatiale européenne, le dernier
obstacle à un accord sur le financement du programme Galileo a
été levé. Les quatre Etats principaux
4(
*
)
voient leur contribution maintenue,
celle de l'Espagne passe à 10,25 % et celle de la Belgique à
4,8 %.
L'entreprise commune pour le développement du système, dont le
lancement avait été autorisé lors du Conseil des
transports de l'Union européenne du 26 mars 2002 a donc
été créée. Son président, M. Grohe, a
été nommé le 16 juin dernier et des contrats pour les
deux satellites d'occupation de fréquence et de développement
exploratoire ont été signés le 11 juillet dernier. La
tâche principale de l'entreprise commune est la préparation de la
phase de déploiement et d'opérations du programme Galiléo.
Son rôle est déterminant pour le respect des objectifs et des
délais du programme, ainsi que pour l'efficacité de la mise en
concurrence des industriels et la maîtrise des coûts pendant la
phase de développement.
Au total,
la contribution de la France à la phase
développement-validation
s'élève à
190 millions
sur un budget global de 1,1 milliard d'euros.
Votre rapporteur pour avis note que
le financement de la phase de
déploiement
(2,3 milliards d'euros) laisse
deux questions
encore ouvertes
: certains Etats membres attendent un financement
privé et les industriels n'ont pas, jusqu'à présent,
indiqué l'ampleur de leur participation pour financer à court
terme un système destiné au service public, car les retours sur
investissement ne sont pas attendus avant la phase d'exploitation (2008).
Les modalités d'un partenariat public-privé doivent donc
être étudiées instamment.
Comme la Commission européenne l'a souligné, il est fondamental
que l'Union européenne doit investir massivement dans le
développement de ce programme. En effet, le marché des services
de navigation par satellite et des produits dérivés croît
dans le monde de 25 % par an et pourrait atteindre 100 milliards d'euros
en 2010, occasionnant, de ce fait, la création de 40.000 emplois
qualifiés en Europe.