III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES LOIS : RENFORCER LA COHÉRENCE DE CERTAINS DISPOSITIFS PROPOSÉS

Votre commission partage l'ambition du projet de loi visant à doter les différents acteurs institutionnels de l'égalité des chances de véritables moyens d'intervention.

Elle considère toutefois que l'efficience des dispositifs envisagés est largement conditionnée par le respect de certains principes fondamentaux et par la cohérence de leur organisation au sein des structures existantes .

Elle vous propose donc plusieurs amendements tendant, d'une part, à conforter les pouvoirs de sanction de la HALDE en évitant tout empiètement sur les missions de l'autorité judiciaire et, d'autre part, à renforcer la cohérence juridique du contrat de responsabilité parentale.

En outre, afin de compléter notre dispositif de lutte contre les discriminations, votre commission vous soumet un amendement ayant pour objet de permettre et d'encadrer la mesure de la diversité.

Enfin, elle a jugé inappropriée l'attribution au maire d'un pouvoir de transaction pénale en matière d'incivilités.

A. DOTER LA HALDE D'UN POUVOIR DE TRANSACTION PÉNALE RESPECTUEUX DES MISSIONS DE L'AUTORITÉ JUDICIAIRE

Votre commission souscrit pleinement à l'objectif du présent projet de loi de confier à la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité des pouvoirs lui permettant de rendre plus effectives les sanctions prévues par notre droit en matière de discrimination.

A cet égard, elle rappelle qu'elle a oeuvré au renforcement des prérogatives de cette autorité administrative indépendante dès sa création 41 ( * ) . Elle estime que la sanction des comportements discriminatoires favorise une prise de conscience de nature à renforcer la cohésion sociale dans notre pays.

L'exercice par la HALDE d'un pouvoir de sanction paraît en outre indispensable à la crédibilité de cette instance.

Votre commission considère cependant que le dispositif avancé par le projet de loi encourt plusieurs critiques.

Tout d'abord, le pouvoir de sanction confié à la Haute autorité empièterait sur la mission du juge judiciaire , ce qui pourrait conduire le Conseil constitutionnel à censurer le législateur pour non respect de la séparation des pouvoirs.

En effet, la Haute autorité aurait à se prononcer sur des faits relevant à titre principal de délits sanctionnés par le code pénal . Tel n'est pas le cas des autres autorités administratives indépendantes dotées de pouvoirs de sanction, qu'elles exercent à propos de manquements à des législations sectorielles, en application de textes spéciaux 42 ( * ) .

Ensuite, le dispositif considéré comme adopté par l'Assemblée nationale rend plus évidente encore cette atteinte aux missions du juge judiciaire, en précisant que la Haute autorité pourrait prononcer des sanctions pour les actes visés aux articles L. 225-2 et L. 432-7 du code pénal.

Il serait inédit de confier à une autorité administrative indépendante une compétence pour apprécier des éléments constitutifs d'une infraction pénale et pour les sanctionner.

Il apparaît donc clairement que le pouvoir de sanction ainsi envisagé ne peut à la fois respecter le principe de légalité des délits et des peines et la séparation des pouvoirs.

Enfin, l'embarras du législateur ressort manifestement de la multiplication des garanties de procédure retenues par l'Assemblée nationale et qui pourraient paraître assimiler la Haute autorité à une véritable juridiction parallèle, spécialisée en matière de discrimination.

Aussi votre commission vous propose-t-elle un amendement qui, sans remettre en cause la réalité du pouvoir de sanction de la Haute autorité, le met en conformité avec notre organisation institutionnelle .

La procédure de transaction pénale respecterait en effet strictement le partage entre les missions respectives d'une autorité administrative et de l'autorité judiciaire s'agissant de délits.

L'amendement tend ainsi à permettre :

- à la HALDE de proposer aux auteurs de discriminations une transaction consistant à verser une amende et, le cas échéant, à réparer le préjudice subi par la victime . L'amende ne pourrait excéder un montant de 3.000 euros pour une personne physique et de 15.000 euros pour une personne morale. La proposition de transaction serait soumise, pour homologation, au procureur de la République ;

- aux agents de la HALDE dûment habilités de constater par procès-verbal les délits de discrimination ;

- à la Haute autorité, en cas de refus ou d'inexécution de la transaction, de mettre elle-même en mouvement l'action publique.

Ce dispositif préserverait les prérogatives du parquet qui, saisi aux fins d'homologation de la proposition de transaction, pourrait décider d'engager des poursuites.

L'amendement rend par conséquent complémentaires l'action de la HALDE et celle des juridictions.

Par ailleurs, dans un souci de cohérence, l'amendement tend à renforcer les pouvoirs d'investigation de la Haute autorité en permettant à son président, en cas d'opposition du responsable des lieux à une vérification sur place, de saisir le juge des référés afin qu'il autorise ces vérifications.

* 41 Cf. le rapport sur le projet de loi portant création de la HALDE, n° 65, 2004-2005.

* 42 La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), peut ainsi sanctionner, aux termes de l'article 45 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, les manquements aux obligations découlant de cette loi, ainsi que le non respect de ses mises en demeure ; le Conseil de la concurrence sanctionne les manquements aux règles de concurrence définies par le code de commerce (art. L. 464-1 et suivants).

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page