EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LES DÉPENSES DE L'ETAT EN FAVEUR DE L'INCLUSION SOCIALE, DE LA PROTECTION DES PERSONNES ET DE L'ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE

Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit d'allouer au programme n° 304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire » 3,6 milliards d'euros de crédits de paiement, soit une augmentation de près 200 % par rapport à 2014. La répartition des crédits au sein des différentes actions qui composent le programme s'effectue de la façon suivante :

Figure n° 1 : Les crédits de paiement alloués en 2015 au programme n° 304 « Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire »

(en millions d'euros)

Crédits
de paiement en 2015

Inclusion sociale, protection des personnes et économie sociale et solidaire

2 631,2

Revenu de solidarité active

2 330,9

Economie sociale et solidaire

4,7

Autres expérimentations

0,9

Aide alimentaire

32,6

Qualification en travail social

5,6

Protection juridique des majeurs

241,3

Protection et accompagnement des enfants, des jeunes et des familles vulnérables

15,3

Source : Projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances

A. LES DÉPENSES RELATIVES AU REVENU DE SOLIDARITÉ ACTIVE

1. Le changement opéré dans le mode de financement du fonds national des solidarités actives

Le programme n° 304 contribue principalement au financement de la partie activité du revenu de solidarité active (RSA), via le fonds national des solidarités actives (FNSA). Celui du RSA « socle » est à la charge des départements. La dotation allouée au FNSA en 2015 doit s'élever à 2,3 milliards d'euros , soit quasiment quatre fois plus qu'en 2014.

Le revenu de solidarité active

1) Les critères d'éligibilité au RSA


Les conditions administratives :

Peuvent prétendre au bénéfice du RSA les personnes âgées de plus de 25 ans. Ne sont pas soumis à cette condition d'âge :

- les parents isolés, c'est-à-dire ne vivant pas en couple de manière déclarée et permanente et ne partageant pas leurs ressources et leurs charges avec un conjoint, concubin ou partenaire pacsé, ayant au moins un enfant à charge, né ou à naitre ;

- les personnes ayant travaillé au moins deux ans au cours des trois années précédant leur demande (c'est le « RSA jeunes »).

Les bénéficiaires du RSA doivent résider en France de manière stable, effective et permanente. Les ressortissants de l'espace économique européen et de la Suisse doivent résider en France de façon régulière depuis au moins trois mois. Sont exonérées de cette durée de résidence, les personnes exerçant une activité professionnelle ou ayant exercé une activité professionnelle mais qui sont en incapacité temporaire de travailler pour des raisons médicales ou suivent une formation ou sont inscrites sur la liste des demandeurs d'emploi.

Les autres ressortissants étrangers doivent être titulaires, depuis au moins cinq ans, d'un titre de séjour autorisant à travailler. Sont exonérés de ce titre les réfugiés, les apatrides, les bénéficiaires de la protection subsidiaire, les étrangers titulaires de la carte de résident ou d'un titre de séjour conférant des droits équivalents ainsi que les personnes ayant droit à la majoration pour parent isolé.


Les conditions de ressources :

Le montant du RSA dépend du niveau de ressources (revenus d'activité et autres) du demandeur et des autres membres du foyer. Est calculée la moyenne mensuelle des ressources perçues au cours des trois mois précédant la demande.

2) RSA « socle » / RSA « activité »

Le RSA « socle » se substitue au revenu minimum d'insertion (RMI) et à l'allocation parent isolé (API). Son montant, forfaitaire, est calculé en fonction de la situation familiale du demandeur. Il peut être majoré pour les personnes isolées ayant un enfant à charge (on parle alors de RSA « socle » majoré).

Montant maximal du RSA « socle » au 1 er janvier 2014 (en euros)

Nombre d'enfants

Personne seule

Parent isolé

Couple

0

509,30

654,00

763,95

1

763,95

872,00

916,74

2

916,74

1 090,00

1 069,53

Enfant supplémentaire

203,72

218,00

203,72

Le RSA « activité » est un complément aux revenus du travail qui doit garantir la progression des revenus d'activité de la personne. Il correspond à 62 % des revenus d'activité. Le niveau total du RSA versé à une activité est égal au montant du RSA « socle », augmenté de 62 % des revenus d'activité, diminué du niveau de ces revenus d'activité. Ainsi, une personne seule sans enfant à charge gagnant 500 euros par mois touchera :

509,30 euros + 62 % de 500 euros - 500 euros = 319,30 euros.

Lorsque le demandeur bénéficie d'une aide au logement, est propriétaire de son logement ou l'occupe à titre gratuit, le montant du RSA est diminué d'une somme forfaitaire dite forfait logement, qui varie de 61,12 euros pour une personne seule à 151,26 euros lorsque le foyer comprend trois personnes et plus.

La hausse considérable des crédits destinés au FNSA résulte d'un changement effectué dans son mode de financement . Jusqu'à présent, celui-ci était alimenté par une fraction du prélèvement de solidarité sur les produits de placement et les revenus du patrimoine, l'Etat apportant une contribution d'équilibre dont le niveau s'élevait à 595 millions d'euros en 2014. Cette recette est désormais entièrement versée à la sécurité sociale et le FNSA est donc financé dans sa totalité par une dotation de l'Etat.

Cette simplification devrait permettre de lisser dans le temps la contribution de l'Etat, puisque celle-ci ne dépendra plus des fluctuations d'une recette qui s'avérait volatile. Elle améliorera également la visibilité dont dispose le Parlement pour apprécier chaque année l'évolution des dépenses de RSA « activité ».

Votre rapporteur regrette cependant que, dans le même temps, il soit prévu d'abonder à hauteur de 200 millions d'euros la dotation de l'Etat par la contribution exceptionnelle de solidarité des fonctionnaires afin de tenir compte de la revalorisation exceptionnelle du RSA de 10 % sur cinq ans, en sus de l'indexation annuelle sur l'inflation, prévue par le plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale. Une telle mesure ne va pas dans le sens de la simplification opérée via l'affectation à la sécurité sociale du prélèvement de solidarité.

Elle traduit en outre le fait que le Gouvernement ne se donne pas les moyens d'assumer les conséquences des décisions qu'il a prises pour la revalorisation du RSA puisqu'il décide de financer leur impact sur le RSA « activité », non pas en augmentant de façon pérenne le niveau des crédits alloués par l'Etat, mais en y affectant une ressource extérieure non pérenne.

Le FNSA assure trois missions :

- la principale, en termes de volumes financiers, concerne le financement de la partie activité du RSA, pour un montant estimé à 1 951 millions d'euros en 2015 ;

- par dérogation avec la règle relative au partage des charges entre Etat et départements, il assure l'ensemble du financement du RSA « jeunes » ; ce mode de financement est reconduit pour l'année 2015 par l'article 60 du projet de loi de finances, rattaché à la mission ; la dotation devrait s'élever l'année prochaine à 26 millions d'euros ;

- il finance également une aide exceptionnelle dite « prime de Noël », versée à la fin de chaque année aux bénéficiaires du RSA et, depuis 2013, à ceux de l'allocation de solidarité spécifique (ASS), de l'allocation équivalent retraite (AER) et de l'allocation transitoire de solidarité (ATS) ; le coût global de cette aide sera l'année prochaine de 513 millions d'euros dont 424,1 millions d'euros pour les bénéficiaires du RSA et 88,9 millions d'euros pour ceux des autres prestations.

S'ajoutent à ces dépenses 39,5 millions d'euros destinés à compenser les frais engendrés pour les caisses d'allocations familiales (Caf) et celles de la mutualité sociale agricole (MSA) par la gestion du RSA « activité » et du RSA « jeunes ».

2. Le risque de sous-évaluation des dépenses relatives au RSA « activité »

Le projet annuel de performances prévoit le versement du RSA « activité » à 830 000 foyers en 2015.

Figure n° 2 : Evolution du nombre de bénéficiaires du RSA « activité »
et des montants moyens mensuels versés entre 2009 et 2015

2009

2010

2011

2012

2013

2014 p

2015 p

Nombre de bénéficiaires

598 800

659 884

700 413

720 900

772 519

761 462

830 000

Montant moyen mensuel (en euros)

178

173

179

183

190

182

200

Source : Projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances pour 2015

Si le RSA « activité » présente des lacunes indéniables qui expliquent une montée en charge limitée du dispositif depuis sa création, il n'en demeure pas moins que les dépenses de l'Etat connaissent une évolution à la hausse dont votre rapporteur estime qu'elle est sous-estimée par le Gouvernement dans le présent projet de loi de finances.

En premier lieu, la revalorisation exceptionnelle du RSA « socle » a un impact, à la fois sur le niveau du RSA « activité » et sur le nombre de bénéficiaires potentiels. Selon le rapporteur spécial de la commission des finances, celui-ci devait être de 230 millions d'euros sur les dépenses de l'Etat au titre du RSA « activité » entre 2015 et 2017, ce qui signifie que la hausse de crédits envisagée par le Gouvernement sur cette période pour l'ensemble de la mission sera en grande partie absorbée sous le seul effet de la revalorisation exceptionnelle du RSA.

Dans le même temps, 68 % des bénéficiaires potentiels du RSA « activité » continuent de ne pas avoir recours à la prestation . Le niveau effectif des dépenses est donc très largement inférieur à ce qu'il pourrait être. De la même façon, avec 7 882 bénéficiaires au mois de mars 2014, le RSA « jeunes » est loin d'avoir atteint sa cible.

Or l'un des objectifs du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale, adopté en janvier 2013, est justement l'amélioration du recours aux droits , notamment grâce à l'organisation de rendez-vous des droits par les Caf.

Votre rapporteur ne peut que soutenir de telles mesures et souhaiter qu'elles atteignent leur objectif de diminution du taux de non recours aux droits. Il insiste cependant, et les associations qu'il a entendues l'ont souligné à plusieurs reprises, sur le fait qu'une telle politique aura nécessairement un impact substantiel sur les dépenses de l'Etat. Or celui-ci n'est à aucun moment pris en compte dans les prévisions d'augmentation des dépenses à trois ans présentées dans le projet annuel de performances.

Page mise à jour le

Partager cette page