III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION.

A. LE PÉRIMÈTRE DE LA SAISINE.


• Votre commission ne s'est pas saisie de l'ensemble du projet de loi , mais des seuls articles ayant un impact direct entrant dans son champ de compétence : agriculture, urbanisme, chasse et pêche de loisir, ou encore pêche maritime.

En particulier, même si l'on peut souhaiter un renforcement du rôle et de la place des professionnels dans les organes de gouvernance de la biodiversité, mais aussi au sein de l'AFB, votre commission n'est pas intervenue sur les titres correspondants.

De même, après réflexion, votre commission n'a pas non plus souhaité faire des propositions sur les articles du titre I er , même si elle appelle à la plus grande vigilance dans les formulations qui seront retenues, en particulier concernant le principe de solidarité écologique : la prise en compte des effets indirects sur l'environnement des décisions publiques est techniquement très difficile, et il ne faudrait pas que la nouvelle rédaction de l'article L. 110-1 du code de l'environnement conduise à imposer aux porteurs de projet d'évaluer a priori « l'effet papillon » de leurs projets dans les études d'impact.

L'objectif d'absence de perte nette de biodiversité, voire de gain de biodiversité, de la même manière, paraît irréaliste et dangereux.

Enfin, votre rapporteur considère que si les sols concourent à la constitution du patrimoine de la Nation, cette formulation à l'article 1 er du projet de loi ne doit pas conduire à remettre en cause le droit de propriété des sols et le droit de les utiliser pour l'exploitation agricole, selon les choix de l'exploitant, comme le prévoit aujourd'hui le droit rural.

B. LES PRINCIPALES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION.

Votre commission s'est saisie de plusieurs aspects du projet de loi :

Concernant les mécanismes d'accès aux ressources génétiques et de partage des avantages , mis en place par le titre IV, qui mettent en oeuvre le droit des États à protéger leur patrimoine, pour lutter notamment contre la bio-piraterie et l'appropriation abusive de ressources collectives, votre commission a adopté un amendement à l'article 18 destiné à supprimer l'exigence de preuve de l'origine des ressources génétiques pour les collections anciennes . Il s'agit de rassurer les détenteurs de collections de ressources génétiques anciennes utilisées pour de nombreuses applications : semences, cosmétique, pharmacie. Ils risquent de se retrouver en situation d'insécurité juridique pour des ressources collectées pourtant depuis longtemps, en cas de nouvelle utilisation, ce qui les conduirait à ne plus recourir aux ressources en collection.

Plusieurs dispositions concernent l'urbanisme . La commission a adopté des amendements veillant autant que possible à ne pas complexifier le droit actuel.


• Votre commission n'a pas modifié l 'article 27 qui rectifie une malfaçon de la loi ALUR sur la compatibilité entre les documents d'urbanisme et les chartes de parc naturel régional.


L'article 27 bis prévoit que le SCoT devra transposer les dispositions pertinentes des chartes de parc national. La commission a proposé de supprimer cet article qui revient une nouvelle fois sur le principe du SCoT intégrateur, car les élus appellent de leurs voeux un moratoire sur ces documents.


• Votre commission n'a pas modifié l'article 36 quater , qui créé un nouvel outil pour identifier les espaces de continuités écologiques, cette rédaction étant un compromis qui satisfait les agriculteurs.


• Votre commission a proposé de supprimer l'article 36 quinquies A qui impose aux futurs centres commerciaux d'intégrer sur leur toiture des procédés de production d'énergies renouvelables ou un système de végétalisation et qui prévoit que la surface des places de stationnement imperméabilisées comptera pour le double de la surface. Les exigences en matière environnementale applicables aux surfaces commerciales ont déjà été renforcées avec les lois Alur et artisanat. Votre commission a estimé qu'il n'était pas nécessaire d'aller plus loin.

Concernant l'agriculture et l'utilisation des terrains agricoles , vote commission a souhaité revenir sur certaines dispositions adoptées à l'Assemblée nationale, afin de retenir une approche plus réaliste :


L'article 32 quater , en ouvrant un droit de préemption trop général sur les terrains non urbanisés à l'Agence des Espaces Verts de l'Ile-de-France, risque de mettre à mal la capacité à agir de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural d'Ile-de-France, et de mettre sous cloche une large partie du territoire francilien. Un amendement de suppression de cet article a été adopté.


L'article 33 A , qui perfectionne le dispositif de compensation écologique, va globalement dans le bon sens, à condition de bien veiller à ce que la compensation écologique ne se fasse pas au détriment systématique des terres agricoles.


L'article 33 crée les obligations réelles environnementales, qui peuvent restreindre drastiquement les conditions d'exploitation des terres agricoles. Plusieurs amendements ont été adoptés pour mieux encadrer ces restrictions et exiger une compensation systématique, dans un esprit d'équilibre des droits et obligations.


• Soucieuse que les agriculteurs ne soient pas les seuls à supporter la charge des mesures en faveur de la biodiversité, et considérant qu'il existe déjà une multitude d'instruments de protection, votre rapporteur a proposé à votre commission de supprimer l'article 34 qui crée des zones soumises à contraintes environnementales au sein desquelles des pratiques agricoles peuvent être imposées pour sauvegarder des espèces menacées. Là encore, une démarche contractuelle et partenariale paraît préférable à une démarche forcée.


• L'élargissement des objectifs de l'assolement en commun à un objectif agricole, proposé par l'article 35 , ainsi que l'élargissement du périmètre des associations foncières pastorales aux terrains intéressants pour la préservation de la biodiversité prévu par l'article 36 quinquies constituent des avancées satisfaisantes que votre commission a donc proposé de conserver, sous réserves d'adaptations mineures.


• En revanche, l'utilisation de l'aménagement foncier agricole et forestier dans un but principalement environnemental constitue un détournement de cette procédure, dangereux à long terme, d'où un amendement de suppression proposé à l'article 36 .


• En matière de produits phytopharmaceutiques, l'introduction d'une nouvelle base légale pour réglementer les utilisations des fonds de cuve, à l'article 51 quinquies , peut faire consensus. En revanche, l' article 51 nonies , qui vise à réserver une enveloppe financière spécifique pour les groupements d'intérêt économique et environnemental (GIEE) et pour lutter contre les néonicotinoïdes au sein du plan Ecophyto, risque de rigidifier la gestion de ce plan. L'interdiction complète par l'article 51 quaterdecies des néonicotinoïdes dès le 1er janvier 2016 constitue par ailleurs une mesure excessive et mal cadrée sur le plan juridique. Deux amendements de suppression ont été proposés sur ces deux questions.


• En revanche, votre commission salue le choix de donner enfin une définition légale aux cours d'eau, à l'article 51 decies , en formant le voeu que les cartes pourront être rapidement connues, à l'issue d'un processus favorisant l'accord entre propriétaires riverains, exploitants et institutions oeuvrant dans le domaine de l'eau.

Concernant la mer et la pêche maritime , les dispositions contenues dans le projet de loi sont très consensuelles :


L'article 37 dispense les pêcheurs d'étude d'impact individuelle de leur activité en zone Natura 2000. Il est en effet sage que l'analyse soit collective, et sur cet article, votre commission a adopté un simple amendement de coordination.


• À l'article 38 , votre commission a proposé de rétablir le texte initial, en permettant aux organismes représentant les professionnels comme les comités régionaux des pêches maritimes et élevages marins, d'être autorité gestionnaire des réserves naturelles en mer. Il n'y a aucune raison de jeter la suspicion sur les organismes professionnels, qui doivent pouvoir être candidat à la gestion de ce type d'espaces. La commission a donc proposé le rétablissement du texte initial avant discussion à l'Assemblée nationale.


L'article 43 instaure en mer des zones de protection halieutiques. C'est une bonne initiative, qui avait été réclamée lors du Grenelle de la mer. Il convient cependant que la mise en oeuvre des mesures à l'intérieur de ces zones soit souple, pour tenir compte des caractéristiques des ressources halieutiques.

Concernant les dispositions touchant à la chasse et la pêche de loisir, votre commission a adopté plusieurs amendements :


• S'agissant de la composition du conseil d'administration de l'ONCFS modifié par l'article 7 ter , votre commission, après un intense débat, a maintenu le principe d'une représentation majoritaire des chasseurs au sein du conseil d'administration tout en ouvrant le conseil à des représentants des collectivités territoriales.


L'article 8 , qui prévoit la possibilité de rattacher un établissement public du code de l'environnement à un autre à la majorité des deux tiers n'a pas été modifié.


• A l'article 53 bis , votre commission a adopté un amendement de réécriture afin d'harmoniser les délais de transmission des procès-verbaux pour l'ensemble des gardes assermentés et non pour les seuls gardes-pêche comme le prévoit l'article.


L'article 58 fait oeuvre de simplification en supprimant les orientations régionales de gestion et de conservation de la faune sauvage et de ses habitats et le schéma départemental de vocation piscicole qui ne sont plus mis à jour. L'entrée en vigueur de la loi agricole a modifié le périmètre de ces suppressions et prévoit désormais que sera supprimée la compatibilité du schéma de gestion cynégétique avec les programmes régionaux de la forêt et du bois. Votre commission a adopté un amendement pour revenir sur cette modification et ainsi maintenir le compromis entre chasseurs et forestiers qui avait été trouvé lors de la loi agricole.

Un amendement permet également de donner la possibilité au préfet de proroger de 6 mois le schéma de gestion cynégétique lorsque les travaux d'élaboration du nouveau schéma n'ont pu être menés à leur terme, et ce afin d'éviter tout vide juridique.


Les articles 59 et 60 prévoient des habilitations à légiférer par ordonnances sur le régime dérogatoire applicable aux fédérations interdépartementales de chasseurs d'Ile de France et sur la notion d'animaux nuisibles. Les dispositions de ces ordonnances ont été directement intégrées dans le projet de loi.


• Votre commission a proposé la suppression de l'article 68 quater qui interdit de chasser les mammifères pendant les périodes de reproduction et de dépendance et l'article 68 quinquies qui interdit la chasse à la glu. Ces articles ont pour objet de remettre en cause des chasses dites traditionnelles sans aucune justification. Ils ont peu à voir avec le projet de loi.


• Votre commission a aussi supprimé l'article 54 ter qui applique aux piscicultures les règles de classement des cours d'eau en deux catégories. En effet, la rédaction retenue pose de sérieuses difficultés d'application.


• Enfin, l'article 54 bis , qui sécurise sur le plan juridique la pratique du « no kill fishing », l'article 54 quater qui rétablit le droit de pêche banal à une seule ligne aux associations agrées de pêcheurs amateurs aux engins et filets, l'article 54 quinquies qui limite les cas d'incompatibilités entre les fonctions de gardes assermentés et de membres de bureau d'associations de chasse ou de pêche, et l'article 55 qui durcit les sanctions encourues pour la pêche d'espèce de poissons en danger, n'ont pas été modifiés.

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