Avis n° 119 (2022-2023) de M. Philippe TABAROT , Mme Évelyne PERROT et M. Hervé GILLÉ , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 17 novembre 2022

Disponible au format PDF (2 Moctets)

Synthèse du rapport (2,2 Moctets)


N° 119

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 novembre 2022

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi de finances , considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2023 ,

TOME II

TRANSPORTS

Par M. Philippe TABAROT, Mme Évelyne PERROT
et M. Hervé GILLÉ,

Sénateurs et Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Longeot , président ; M. Didier Mandelli, Mmes Nicole Bonnefoy, Marta de Cidrac, MM. Joël Bigot, Rémy Pointereau, Frédéric Marchand, Guillaume Chevrollier, Mme Marie-Claude Varaillas, MM. Jean-Pierre Corbisez, Pierre Médevielle, Ronan Dantec , vice-présidents ; M. Cyril Pellevat, Mme Angèle Préville, MM. Pascal Martin, Bruno Belin , secrétaires ; MM. Jean-Claude Anglars, Jean Bacci, Étienne Blanc, François Calvet, Michel Dagbert, Mme Patricia Demas, MM. Stéphane Demilly, Michel Dennemont, Gilbert-Luc Devinaz, Mme Nassimah Dindar, MM. Gilbert Favreau, Jacques Fernique, Mme Martine Filleul, MM. Fabien Genet, Hervé Gillé, Éric Gold, Daniel Gueret, Mmes Nadège Havet, Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Olivier Jacquin, Gérard Lahellec, Mme Laurence Muller-Bronn, MM. Louis-Jean de Nicolaÿ, Philippe Pemezec, Mmes Évelyne Perrot, Marie-Laure Phinera-Horth, Kristina Pluchet, MM. Jean-Paul Prince, Bruno Rojouan, Mme Denise Saint-Pé, MM. Philippe Tabarot, Pierre-Jean Verzelen .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) : 273, 285 , 286 rect., 292 , 337 , 341 , 364 , 369 , 374, 386 et T.A. 26

Sénat : 114 et 115 à 121 (2022-2023)

CHAPITRE IER
LES CRÉDITS CONSACRÉS
AUX TRANSPORTS AÉRIENS

Réunie le 9 novembre 2022, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, suivant sa rapporteure, Évelyne Perrot , a émis un avis favorable aux crédits relatifs aux transports aériens inscrits au projet de loi de finances pour 2023 (PLF 2023) , sous réserve de l'adoption d'un amendement 1 ( * ) en faveur de la lutte contre les nuisances sonores aériennes.

Sortie progressive de la pandémie liée à la COVID-19, conflit en Ukraine : cet exercice budgétaire, pour le secteur aérien comme pour les autres modes de transport, intervient dans un contexte singulier alors même que ce secteur qui connaît un rebond inattendu en 2022 doit, dans le même temps, se décarboner. Tel est le constat de la commission .

Les attentes exprimées d'un partage équitable de l'effort de décarbonation justifient des mesures fiscales comme cette année l'alignement sur la taxation des essences routières. Les mesures de régulation européennes en cours d'élaboration (paquet « Ajustement à l'objectif 55 » ; « Fit for 55 ») contribueront, en parallèle, à renforcer la régulation environnementale du secteur .

La commission, suivant la rapporteure, a mis en avant deux points positifs :

- un recours limité à l'emprunt du budget annexe permettant d'envisager, dès 2023, une trajectoire de désendettement , ramenant la dette nette à 1,1 milliard d'euros en 2027 ;

- la poursuite de l'effort de l'État en faveur du désenclavement des territoires avec le financement - en hausse - de la douzaine de liaisons d'aménagement du territoire (LAT).

La lutte contre les nuisances sonores aériennes, qui préoccupent un grand nombre de riverains, a enfin constitué un point de vigilance particulier pour la commission, justifiant l'adoption d'un amendement 1 .

I. LA REPRISE DU TRAFIC EN 2022, UNE POSSIBLE TRAJECTOIRE DE CONSOLIDATION BUDGÉTAIRE

A. L'AMORCE D'UNE TRAJECTOIRE DE DÉSENDETTEMENT DU BUDGET ANNEXE

En apparence, les dépenses du budget annexe affichent une augmentation de 4,5 % par rapport à la loi de finances pour 2022. Mais, après mesure de périmètre liée au remboursement d'emprunt, les crédits du BACEA sont en diminution de plus de 10 % d'une année sur l'autre et retrouvent leur niveau de 2019.

Point positif : après l'effondrement du trafic et, donc, des recettes du BACEA, le rebond de 2022, qui a dépassé les prévisions, devrait, sauf nouvel imprévu, permettre d'engager une nouvelle phase de désendettement progressif en 2023, qui se prolongerait au moins jusqu'en 2027.

B. DES PERSPECTIVES OPTIMISTES FRAGILES

La prévision budgétaire optimiste du Gouvernement fondée sur un retour du trafic en 2023 à 97 % du niveau de 2019 peut néanmoins être tempérée par deux facteurs :

- des prévisions de reprise du trafic, notamment pendant la saison hiver 2022-2023 et la saison été 2023 qui restent incertaines , sans compter l'absence de prise en compte de nouveaux chocs exogènes imprévus ;

- le comportement des voyageurs face à l'augmentation du prix des billets , 2022 n'étant peut-être pas une année représentative d'une tendance structurelle, les déplacements en transport aérien ayant retrouvé un niveau important grâce à un effet de rattrapage lié au désir de voyager à nouveau après deux années de pandémie.

Augmentation du prix des billets : principaux facteurs

II. PLUSIEURS LEVIERS DE DÉCARBONATION IDENTIFIÉS

A. LES ÉMISSIONS DE CO2 DE L'AVIATION : MIEUX PARTAGER L'EFFORT DE DÉCARBONATION

Les émissions CO 2 et non-CO 2 du transport aérien doivent donner lieu à un partage plus responsable de l'effort de décarbonation .

Le débat sur le transport non commercial qui englobe les flottes d'affaires (« jets privés »), les ULM et les avions de loisirs - reflète cette exigence nouvelle : ce mode de transport représente en effet globalement peu d'émissions - quelques pour cent des rejets de l'aviation - mais, qui sont pour des raisons d'équité de moins en moins bien acceptées. L 'alignement des taxes applicables à l'essence d'aviation et aux carburéacteurs sur la taxation des essences routières (article 8 quater du PLF pour 2023) est une réponse à cette préoccupation.

Cette mesure s'ajoute à l'obligation de transparence accrue imposée par la loi « Climat et résilience » d'août 2021 aux entreprises qui doivent notamment mentionner dans leur déclaration annuelle de performance extra-financière (art. L. 225-102- 1 du code de commerce) - les conséquences sur le changement climatique de leur activité et de l'usage des biens et services qu'elle produit, dont les émissions directes et indirectes de gaz à effet de serre liées à leurs activités de transport amont et ainsi que le plan d'action visant à réduire ces émissions.

B. UNE RÉGLEMENTATION ET DES PRATIQUES FAVORABLES AU VERDISSEMENT

Émissions de GES

en moyenne européenne 14 fois supérieures à celles du train
et jusqu'à 40 fois plus élevées
en comparaison d'un voyage
en TGV

Le nouveau cadre réglementaire européen toujours en cours d'élaboration du paquet « Fit for 55 » va entraîner des mutations profondes pour le secteur aérien . Les positions exprimées par le Parlement européen, plus ambitieuses que celles de la Commission européenne et du Conseil, pourraient même renforcer ce « paquet » : les équilibres finaux seront connus au terme de négociations engagées entre les trois institutions (trilogue) d'ici à la fin de l'année 2022.

Les orientations défendues par le Parlement européen correspondent à plusieurs propositions de la commission formulées dans le rapport d'information sur la réforme du marché carbone européen 2 ( * ) (cf. proposition visant à renforcer la régulation environnementale des trajets aériens internationaux pour compléter le mécanisme CORSIA) et la résolution sénatoriale sur le paquet « Fit for 55 » 3 ( * ) (cf. proposition visant à affiner les délais dans la mise en oeuvre de l'obligation d'incorporation de biocarburants).

Pour les compagnies aériennes entendues par la rapporteure, l'incorporation de carburants durables ( Sustainable Aviation Fuel ) constitue une nouvelle donne à prendre en compte et, en ce sens, un vrai défi , alors même qu'en pratique, il est actuellement difficile de se procurer des biocarburants. 200 millions d'euros de crédits sont alloués à des appels à projets pour faire évoluer cette situation, ce qui mérite d'être salué. La France a pris un certain retard par rapport aux Pays-Bas qui distribuent et exportent vers la France des biocarburants aux normes européennes (sans recours à la biomasse destinée à l'alimentation).

L'électrification de l'aviation qui se limite aux petits appareils (une vingtaine de passagers au maximum sur des distances courtes inférieures à 400 km) n'offre pas d'alternative véritable, à grande échelle. De même, le rayon d'action de l'avion à hydrogène sera limité au moyen-courrier soit environ 4 000 km avec 200 personnes et des réservoirs quatre fois plus volumineux que sur les appareils à kérosène. Pour les vols intercontinentaux , il n'y a pas d'alternative aux carburants durables, même à l'horizon 2050.

Le projet de loi d'accélération des énergies renouvelables (ENR) adopté par le Sénat le 4 novembre dernier permettra d'accompagner ce mouvement. Le déploiement des panneaux solaires sur les grandes surfaces devrait leur permettre de produire de l'hydrogène vert sous forme gazeuse pour les engins au sol et de l'hydrogène liquide pour les futurs avions à hydrogène dont la mise en service est annoncée pour 2035.

Les aéroports sont également des acteurs prenant une part active à l'effort de décarbonation. À court terme, les opérations au sol 4 ( * ) tendent vers l'objectif de « zéro émission » . Les aéroports se transforment par ailleurs en véritables centres de production et de distribution d'énergie renouvelable .

Enfin, la mise en oeuvre, au niveau communautaire, d'ici à 2025, des « espaces aériens en cheminement libre » se traduira par des réductions progressives de longueur des plans de vol déposés dans le plan horizontal, facteur de réduction de la distance effectivement parcourue et, en conséquence, de la consommation en carburants .

C. DES LIGNES D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE INDISPENSABLES À LA COHÉSION DES TERRITOIRES

Les Lignes d'aménagement du territoire (LAT) jouent un rôle essentiel pour maintenir la cohésion des territoires , tout particulièrement lorsqu'aucune alternative ferroviaire ne peut les remplacer. On ne peut donc que se réjouir de l'augmentation de la contribution de la douzaine de lignes financées (26 millions d'euros prévus pour 2023 contre 21 millions d'euros l'an dernier), dans un contexte de retour progressif au trafic d'avant la pandémie d'une part, de renchérissement des carburants d'autre part.

D. LA LUTTE CONTRE LES NUISANCES SONORES, TOUJOURS D'ACTUALITÉ

L'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa) entendue par la rapporteure a relayé les difficultés de certains riverains confrontés, dans leur quotidien, aux nuisances sonores.

Depuis la crise sanitaire, la diminution du trafic aérien n'a pas pour autant réduit la perception des nuisances sonores, notamment du fait du développement du télétravail et des trajectoires de « descentes continues ». De trop nombreux dossiers d'insonorisation restent en attente, ce qui rend nécessaire de compenser les pertes de taxe sur les nuisances sonores aériennes qui financent les travaux dédiés à la lutte contre le bruit. C'est pourquoi la commission a adopté un amendement 5 ( * ) en ce sens, qui correspond aux pertes de recettes générées par la baisse du trafic aérien et dont le reliquat est évalué à 67 millions d'euros par le Gouvernement pour la période 2020-2022, en tenant compte des 8 millions d'euros accordés en loi de finances rectificative pour 2021 6 ( * ) .

CHAPITRE II
LES CRÉDITS CONSACRÉS AUX TRANSPORTS
FERROVIAIRES, FLUVIAUX ET MARITIMES

Réunie le 23 novembre 2022, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a, sur la proposition de son rapporteur Philippe Tabarot , émis, à l'unanimité, un avis de sagesse , sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes inscrits dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2023, sous le bénéfice de l' adoption de 10 amendements visant à :

- soutenir les autorités organisatrices des mobilités face à l'explosion des coûts et pour une période de deux ans par une diminution du taux de TVA sur les transports de voyageurs du quotidien ;

- mettre en cohérence les moyens consacrés à la régénération du réseau ferré avec nos ambitions de développement de la part modale du transport ferroviaire ;

- donner à l' Autorité de régulation des transports la capacité d' exercer pleinement ses missions en toute indépendance dans des conditions budgétaires acceptables ;

- garantir à Voies navigables de France les effectifs nécessaires à l' accomplissement de ses missions ;

- soutenir la compétitivité des entreprises fluviales et le renouvellement de leur flotte ;

- encourager la décarbonation du transport maritime et soutenir sa compétitivité .

I. L'AFITF FACE À UN PARADOXE : UNE HAUSSE INÉGALÉE DES RECETTES, MAIS UN MODÈLE DE FINANCEMENT À BOUT DE SOUFFLE

A. UNE HAUSSE SUBSTANTIELLE DES RECETTES DE L'AFITF

Le PLF pour 2023 prévoit, pour l'année à venir, un montant de recettes et de dépenses de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) de 3,8 milliards d'euros (Md€) contre 3,5 Md€ prévus en 2022, du jamais vu pour l'agence . Cette enveloppe correspond au montant prévu par la loi d'orientation des mobilités (LOM) auxquels s'ajoutent des crédits supplémentaires pour financer de nouveaux projets déployés depuis l'adoption de la LOM, ainsi que 500 M€ prévus dans le cadre du plan de relance et 150 millions d'euros pour anticiper les besoins qu'identifiera le Conseil d'orientation des infrastructures (COI) dans le cadre de ses travaux.

Source : Afitf

Si le rapporteur salue cette augmentation des moyens alloués aux infrastructures de transports , il relève que, dans les faits, les crédits supplémentaires sont parfois sous-exécutés . Ainsi, sur les 830 M€ censés être affectés à l'Afitf dans le cadre du plan de relance , 210 M€ n'ont pas été versés . En outre, l'augmentation des prix de l'énergie et des matériaux risque d'entamer sérieusement sa capacité d'investissement. Ainsi, le quatrième budget rectificatif de l'agence adopté en octobre dernier prend en compte les premières conséquences de l'inflation, avec, par exemple, une hausse de 10 M€ des crédits consacrés à la régénération routière.

B. UN MODÈLE DE FINANCEMENT À SÉCURISER À BRÈVE ÉCHÉANCE

Après deux années d'importantes pertes de recettes induites par la crise sanitaire , le rapporteur s'interroge sur la pérennité du modèle de financement de l'Afitf . Alors que l'agence concourt au financement de projets d'infrastructures d'ampleur s'inscrivant dans le temps long , plusieurs de ses recettes sont de nature incertaine .

Source : Afitf

Pour le rapporteur, l'exercice consistant, année après année, à compenser les manques de recettes de l'Afitf par des collectifs budgétaires place cette dernière dans une situation délicate . Sécuriser la trajectoire de financement de l'agence est impératif et, dans les mois à venir, la révision de la trajectoire de la LOM et les travaux du COI seront des occasions à ne pas manquer pour proposer des avancées nécessaires, sans pour autant que cela exonère le Gouvernement et le Parlement de leurs responsabilités. Ce besoin de visibilité vaut également pour la gouvernance de l'Afitf , la nomination du nouveau président du conseil d'administration est à cet égard une priorité .

II. TRANSPORT FERROVIAIRE : UNE TRAJECTOIRE POSITIVE ENCORE TRÈS INSUFFISANTE AU REGARD DE NOS OBJECTIFS

A. RÉSEAU FERROVIAIRE : LE COMPTE N'Y EST PAS

1. Des efforts en matière de régénération du réseau loin de compenser la poussée inflationniste

Près de 2,9 Md€ sont prévus pour 2023, aux termes du contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau . La régénération du réseau ferroviaire est principalement financée par les fonds propres de SNCF Réseau , et notamment par le produit des péages ferroviaires .

Si, ces deux dernières années, le plan de relance a permis d'allouer 4,7 Md€ supplémentaires au transport ferroviaire, ces montants ont surtout servi à combler le manque de recettes de SNCF Réseau et à mettre en oeuvre des investissements déjà prévus, mais non budgétés .

D'après l'Autorité de régulation des transports (ART), la stabilité de l'effort d'entretien et de renouvellement du réseau ferré national contraste avec la forte augmentation des efforts récemment annoncée au Royaume-Uni et en Allemagne .

En l'état actuel des choses, d'après l'Autorité de régulation des transports (ART), l'état du réseau - en particulier le réseau structurant - est d'ores et déjà préoccupant , au regard de l' indice de consistance de la voie (ICV), qui reflète l'âge moyen relatif de la voie au regard de sa durée de vie.

Source : ART

De l'avis de tous les acteurs du secteur, les montants prévus en matière de régénération du réseau par le nouveau contrat de performance entre SNCF Réseau et l'État sont très insuffisants. Ils ne permettront même pas d'enrayer la spirale de dégradation du réseau .

Malgré un niveau de péages le plus élevé d'Europe, l'état de notre réseau ferroviaire est alarmant et la situation n'ira pas en s'améliorant si nous ne revoyons pas le contrat de performance.

Philippe Tabarot, Rapporteur pour avis

Pire encore, la trajectoire fixée par le nouveau contrat de performance (2021-2030) annonce une évolution critique sur le long terme. D'après la SNCF, à l'horizon 2040 :

- l'enveloppe allouée à la régénération des voies ne permettra de maintenir l'âge des voies qu'en Île-de-France, le reste du réseau structurant subissant une dégradation nette de l'état des infrastructures et un vieillissement encore plus prononcé, son âge augmentant de 5 et 14 ans ;

- les ralentissements sur le réseau structurant classique risquent d'augmenter de plus de 50 % .

Cette situation est extrêmement préoccupante , d'autant plus que les hypothèses sur lesquelles repose le retour l'équilibre financier prévu par le contrat de performance sont, aux termes de l'ART, « peu ou pas justifiées ». La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable avait d'ailleurs à plusieurs reprises alerté le Gouvernement sur les insuffisances du projet de contrat.

En outre, le contexte actuel de forte augmentation des prix de l'énergie et des matières premières laisse à penser que les investissements de régénération prévus, et déjà insuffisants, devront être revus à la baisse.

Aussi, et dans la mesure où le Gouvernement a annoncé que les 150 M€ supplémentaires alloués à l'Afitf pourraient majoritairement bénéficier au mode ferroviaire, la commission a adopté, sur la proposition du rapporteur, un amendement II-334 visant à allouer 150 M€ additionnels à la régénération du réseau ferroviaire .

2. L'absence de vision stratégique et industrielle en matière de modernisation du réseau

Au-delà des insuffisances en matière de régénération du réseau, sa modernisation manque aujourd'hui cruellement d'orientation stratégique et de financement . La comparaison du niveau et du calendrier de déploiement des deux principaux projets de modernisation avec les autres États européens est à cet égard édifiante...

Source : ART

Le rapporteur regrette que ni le contrat de performance ni le PLF pour 2023 ne définissent de vision stratégique et industrielle pour la modernisation du réseau ferroviaire . Par ailleurs, il partage la préoccupation de la Fédération des industries ferroviaires (FIF), selon laquelle il est indispensable de soutenir des investissements pour assurer la cybersécurité du système ferroviaire , à la fois pour le transport de voyageurs et pour le transport de marchandises - en particulier des produits dangereux.

B. MARCHANDISES ET VOYAGEURS : DES SERVICES DE TRANSPORT FERROVIAIRE SOUS TENSION

Le contexte actuel d'augmentation des prix affecte également les services de transport ferroviaire .

Ainsi, d'après l'opérateur de fret DB Cargo, le surcoût énergétique pour les entreprises ferroviaires de fret en 2023 est estimé à 193 M€ par rapport à l'année 2021 , dont 172 M€ liés à l'augmentation du coût de l'électricité et 21 M€ à la hausse des coûts des carburants. Cette flambée de prix met en péril la dynamique positive du fret ferroviaire - alors que le plan de relance semblait porter ses fruits avec une augmentation de sa part modale. Certains opérateurs soulignent même le paradoxe qui pourrait conduire à ce que les locomotives diesel présentent un avantage comparatif à l'électrique.

Pour la commission, une perte de compétitivité du mode ferroviaire par rapport au mode routier ne saurait être acceptable, ce qui rend indispensable un soutien de l'État aux opérateurs de fret ferroviaire .

Les surcoûts énergétiques n'épargnent pas non plus les opérateurs de transport ferroviaire de voyageurs , les coûts de l'énergie représentent en moyenne 10 % des coûts d'exploitation .

S'agissant des transports organisés par la puissance publique, la plupart des contrats prévoient des mécanismes d'indexation sur les prix de l'énergie , de telle sorte que les surcoûts sont absorbés , partiellement ou intégralement, par les autorités organisatrices de la mobilité (AOM). Ces dernières se trouvent donc dans une situation critique et font aujourd'hui face à un choix impossible .

Un amendement I-948 de la commission , proposé par le rapporteur, a été adopté par le Sénat afin de diminuer le taux de TVA appliqué aux transports collectifs de voyageurs routiers, guidés et ferroviaires (hormis aux services librement organisés). Selon le Groupement des autorités responsables de transport, cette mesure permettrait en effet de dégager des marges de manoeuvre bienvenues pour contribuer au développement des politiques de mobilité des AOM et au financement des investissements nécessaires à la lutte contre le réchauffement climatique.

En outre, la commission a adopté un amendement II-333 pour renforcer les moyens de l'ART à hauteur de 4,6 millions d'euros supplémentaires pour lui permettre d'exercer pleinement ses missions dans de bonnes conditions, sans grever son fonds de roulement qui a franchi un seuil critique.

III. TRANSPORT FLUVIAL : BIEN QUE RÉSILIENT, UN SECTEUR CONFRONTÉ À DES PERTURBATIONS JUSTIFIANT DAVANTAGE DE SOUTIEN

A. LE TRANSPORT FLUVIAL AFFICHE UNE REPRISE DE FOND, MALGRÉ UN CONTEXTE D'INSTABILITÉ

En 2022, le transport fluvial poursuit sa reprise , malgré des résultats différenciés selon les secteurs.

Après un repli lié à la crise sanitaire en 2020 (- 11,6 % en tonnes-kilomètres), le fret fluvial a « renoué avec la croissance » en 2021, bien que de manière modérée du fait du recul de la production du secteur céréalier , qui représente traditionnellement le tiers du trafic (Voies navigables de France [VNF]). Cette reprise est alimentée par le dynamisme du marché du conteneur mais aussi du BTP , notamment grâce aux chantiers du Grand Paris Express et des Jeux olympiques de 2024 . Elle demeure malgré tout marquée par l' instabilité des marchés , liée en particulier à la crise ukrainienne .

Le fret fluvial a également souffert de la hausse des coûts de l'énergie : si avant la crise, la part du carburant dans le coût de revient d'une prestation de fret fluvial était estimée à environ 25 % , cette part s'établit désormais à 41 % . Entreprises fluviales de France (E2F) estime le surcoût lié au carburant pour les entreprises fluviales à 100 M€ depuis mars 2022 , pour un chiffre d'affaires du secteur de l'ordre de 1 Md€ .

S'agissant du tourisme fluvial , selon E2F, si 2022 a été une meilleure année que 2021, la fréquentation demeure inférieure de 70 % à celle constatée en 2019 . Les opérateurs intervenant en zone dense (Paris, Lyon, Bordeaux et Strasbourg) ont été particulièrement affectés par ce recul, ainsi que les croisières avec hébergement . En revanche, certains secteurs sont parvenus à tirer leur épingle du jeu : la location de bateaux habitables sans permis a progressé en 2022 (+ 5 à 7 % par rapport à 2021) de même que l'activité des paquebots fluviaux (+ 5 % par rapport à 2019), en particulier sur la Seine (+ 15 %).

B. UNE TRAJECTOIRE D'INVESTISSEMENT STABLE POUR LE RÉSEAU FLUVIAL, MAIS UN ÉQUILIBRE FINANCIER INCERTAIN POUR SON GESTIONNAIRE

Pour 2023, le budget d'investissement de VNF devrait s'établir à 250 M€ en CP, soit un montant supérieur à 2022 (201 M€ en CP selon le budget initial pour 2022) mais inférieur aux objectifs initialement fixés par le Contrat d'objectifs et de performance (COP).

Le volet du Plan de relance consacré à la régénération du réseau fluvial affiche un bon état d'avancement : 90 % des projets prévus ont été engagés . Sur les 175 M€ initialement prévus (AE), seuls 40 à 50 M€ sont encore à déployer en 2023, en crédits de paiement.

En 2023, trois programmes seront prioritaires pour VNF en termes d'investissement : le canal Seine-Escaut , la modernisation du réseau et la sécurité des ouvrages hydrauliques .

Hausse des dépenses de VNF estimée
d'ici 2024
(par rapport à 2021)

Plusieurs facteurs exogènes ont fragilisé les finances de l'établissement. Du fait du contexte inflationniste, VNF fait face à une forte hausse de ses coûts . En outre, la crise sanitaire, suivie du ralentissement de l'activité fluviale, ont induit un décalage de sa trajectoire de recettes , qui devraient être supérieures au niveau de 2022, mais inférieures aux prévisions du COP pour 2023 (442,5 M€) qui anticipaient une forte hausse des recettes propres de l'établissement (péages et redevances).

La révision du COP , qui doit avoir lieu en 2023, pourrait être l'occasion d' ajuster la trajectoire financière de VNF définie en 2020-2021.

C. UN APPUI À RENFORCER POUR LE DÉVELOPPEMENT ET LE VERDISSEMENT DU TRANSPORT FLUVIAL

Évolution des ETP de VNF

Depuis plusieurs années, VNF subit une trajectoire à la baisse de ses effectifs . Bien qu'inférieure aux années précédentes, la baisse prévue en 2023 est supérieure à celle constatée en 2022.

Si la modernisation des méthodes de travail de l'établissement doit permettre de compenser cette évolution, la soutenabilité de la trajectoire d'emplois interroge, d'autant que les équipements permettant de réaliser des gains de productivité ne seront mis en service qu'en de 2025-2026 .

Pour permettre à VNF de respecter les objectifs ambitieux fixés par le COP en matière de qualité de service et de fiabilité du réseau , il importe de garantir à l'établissement des moyens humains adéquats .

Le rapporteur rappelle que VNF est par ailleurs un acteur essentiel des politiques visant à :

- renforcer le report modal vers la voie d'eau, à travers la promotion de la logistique fluviale durable ;

- favoriser le verdissement des flottes fluviales , par l'intermédiaire du plan d'aide à la modernisation et à l'innovation (PAMI) qui permet d'attribuer des subventions aux exploitants et propriétaires de bateaux de transport de marchandises, de bateaux de passagers ou de plaisance locative, pour l'acquisition d'équipements « verts ».

Le PAMI 2018-2022 était doté d'une enveloppe globale de 30 M€. Le nouveau PAMI 2023-2027 est en cours de notification à la Commission européenne. Alors que son enveloppe globale est doublée ( 60 M€ ) par rapport à la période précédente, la participation de l'État pour 2023 n'a toutefois, à ce stade, pas été revue à la hausse (1M€ en PLF pour 2023, soit un montant identique à la LFI pour 2022). Le rapporteur estime nécessaire que l' État renforce son engagement financier en faveur de ce dispositif et suivra ce point avec attention .

Dans l'attente de gains d'efficience liés à la modernisation de VNF, la commission a adopté un amendement II-331 visant à maintenir en 2023 un plafond d'emplois stable par rapport à 2022 pour permettre à cet opérateur de recruter les CDD de transition nécessaires . Afin d'assurer le financement de ces postes, elle a adopté un amendement II-332 visant à abonder de 2 millions d'euros supplémentaires la subvention pour charges de service public de VNF en 2023.

Par ailleurs, afin de soutenir la compétitivité des entreprises fluviales et le renouvellement de leur flotte, la commission a adopté deux amendements tendant à :

- rehausser le plafond de l'exonération de plus-values sur les cessions de navires fluviaux affectés à du transport de marchandises ( I-950 ) ;

- rendre plus progressive l' intégration comptable de la revalorisation des actifs des entreprises fluviales ( I-949 ). Cet amendement a été adopté en séance publique.

IV. TRANSPORT MARITIME : DES DÉFIS ÉCOLOGIQUE ET ÉNERGÉTIQUE CROISSANTS, DES MOYENS À RENFORCER

A. UNE REPRISE D'ACTIVITÉ DIFFÉRENCIÉE SELON LES SECTEURS, MAIS UN SOUTIEN ÉCONOMIQUE À LA FILIÈRE QUI CONTINUE À PORTER SES FRUITS

Les fluctuations internationales (pandémie puis conflit en Ukraine) ont affecté différemment les segments d'activité de la navigation maritime .

La hausse du prix de l'énergie a également pesé sur le secteur : entre janvier et juin 2022, le prix des combustibles marins a cru d'environ 65 % , avant un retour au niveau de début d'année. Cette hausse a particulière affecté le secteur des ferries , qui disposent de peu de marges sur le prix du transport. Selon la direction générale des affaires maritimes, de la pêche et de l'aquaculture (DGAMPA), l'explosion du prix du gaz naturel a également « porté un rude coup à l'utilisation du GNL » , la plupart des armateurs ayant dû y renoncer pour des raisons économiques .

Évolution
des moyens attribués à l'ENSM

Exonérations de charges patronales pour la flotte
de commerce (2023)

Exonérations SEAM (2023)

En 2023, les efforts en faveur de la compétitivité de la filière se maintiennent, notamment à travers les exonérations de charges patronales pour les armateurs de la flotte de commerce en situation de concurrence internationale et le dispositif de soutien aux entreprises d'armement maritime (SEAM), mis en place en 2022 pour trois ans, permettant des exonérations de charges patronales pour les opérateurs effectuant du transport international de passager .

Afin de renforcer l'emploi maritime , la montée en puissance des moyens dédiés à l' École nationale supérieure maritime (ENSM) se poursuit en 2023, dans l'objectif de permettre un doublement du nombre d'officiers de la marine d'ici 2027 .

B. LE VERDISSEMENT DU TRANSPORT MARITIME : DE FORTES ATTENTES DES ACTEURS, DES ENGAGEMENTS À CONFIRMER

Le transport maritime émet 1 milliard de tonnes de GES par an , soit près de 3 % des émissions mondiales selon l'Agence internationale de l'énergie . Face à la demande croissante en transport maritime et en l'absence de nouvelles politiques de réduction de ces émissions, elles pourraient atteindre entre 90 % et 130 % de leur niveau de 2008 d'ici 2050 .

Les exigences croissantes en la matière à l' échelle internationale (objectif fixé par l'Organisation maritime internationale d'atteindre la neutralité carbone pour le transport maritime en 2050) et européenne (perspective de l'intégration du transport maritime au marché carbone et discussions en cours sur le projet « Fuel EU » maritime), conjugués à la crise énergétique , font de la décarbonation du transport maritime un enjeu prioritaire .

En dépit de ce contexte, les efforts pour soutenir la transition énergétique du secteur apparaissent encore notoirement insuffisants dans notre pays. Ainsi que l'a indiqué Armateurs de France , le secteur pâtit notamment d'un « manque de R&D sur les technologies propres de demain ».

Plan de relance : des moyens insuffisants

?175 M€ sur deux ans pour le verdissement des ports , soit un montant très inférieur aux recommandations du Sénat (5 Md€ sur 10 ans, rien que pour développer les infrastructures de report modal)

?25 M€ pour le verdissement des navires , destinés uniquement à la flotte de contrôle et de balisage de l'État

Des incertitudes sur l'après Plan de relance

?Des crédits presque intégralement consommés (l'ensemble des AE ont été engagés fin 2022, 45 M€ de CP doivent encore être mobilisés en 2023)

?Le Gouvernement a annoncé un plan France-Mer 2030 (comportant notamment la mise en place d'un fonds d'investissement doté de 300 M€ d'ici la fin du quinquennat, dédié à l'innovation en matière de décarbonation du secteur), qui ne semble pas pris en compte dans le PLF pour 2023

Suramortissement vert : un outil qui doit faire ses preuves

?Dispositif faiblement utilisé jusqu'à aujourd'hui, dont les paramètres ont toutefois été assouplis en LFI pour 2022

?Un dispositif applicable seulement, à ce stade, jusqu'en 2024 , et qui comporte des angles morts , notamment pour les navires neufs qui ne peuvent bénéficier de certaines déductions fiscales

Enfin, s'agissant du contexte énergétique , un soutien plus stable et lisible de la part de l' État est attendu . Comme souligné par l' Union nationale des industries de la manutention dans les ports français (UNIM), dans le cadre de la LFR n° 1 pour 2022, la mise en place d'un tarif réduit de TICFE (0,5 €/MWh) sur l'électricité consommée par la manutention portuaire dans les ports français, en compensation de la hausse des tarifs sur le GNR à la même date, ont été repoussés à 2024. Si le PLF pour 2023 prolonge d'un an l'application du « bouclier tarifaire » pour les manutentionnaires portuaires, des incertitudes demeurent sur le tarif qui sera applicable après 2023 à ce secteur pourtant essentiel pour l' approvisionnement de notre chaîne logistique et la compétitivité de nos ports .

Afin de soutenir la compétitivité des armateurs français et d'encourager la décarbonation du transport maritime , la commission a adopté trois amendements visant à :

- appliquer dès 2023 un tarif réduit de TICFE sur l'électricité consommée pour la manutention portuaire à travers un dispositif pérenne , afin de donner de la visibilité aux manutentionnaires portuaires pour investir dans des équipements électriques ( I-947 ). Cet amendement n'a cependant pas été adopté en séance publique ;

- prolonger jusqu'en 2026 l'application du « suramortissement vert » , afin de donner du temps aux armateurs pour se saisir de cet outil et programmer leurs investissements ( I-951 ). Cet amendement a été adopté en séance publique ;

- étendre aux navires neufs le « suramortissement vert » applicable aux équipements permettant l' alimentation électrique des navires durant les escales et aux équipements destinés à compléter la propulsion principale des navires, par exemple véliques ( I-952 ). Cet amendement a été adopté en séance publique .

CHAPITRE III
LES CRÉDITS CONSACRÉS
AUX TRANSPORTS ROUTIERS

Réunie le 23 novembre 2022, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a, suivant la proposition de son rapporteur Hervé Gillé , émis un avis favorable , à l'adoption des crédits relatifs aux transports routiers inscrits au projet de loi de finances (PLF) pour 2023, sous réserve de l'adoption de 13 amendements visant notamment à :

- sécuriser les recettes de l'Afitf ;

- diminuer le taux de TVA sur les mobilités du quotidien, pour redonner des marges de manoeuvre aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM) ;

- allouer davantage de moyens à l'entretien des routes nationales , d'une part et des ouvrages d'art des collectivités territoriales et de l'État , d'autre part ;

- accompagner les ménages et les professionnels du transport dans la décarbonation des flottes automobiles et de poids lourds ;

- encourager le développement du vélo .

I. INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT : DES RESSOURCES À SÉCURISER

Source : commission de l'aménagement du territoire
et du développement durable, à partir des éléments transmis par l'Afitf

En 2023, les ressources de l'Agence de financement des infrastructures de France (Afitf) devraient atteindre un montant inédit ( 3,8 milliards d'euros [Md€]). Le rapporteur se félicite de cette trajectoire positive. Cependant, il regrette que les augmentations prévues fassent parfois l'objet d'une sous-exécution . À titre d'exemple, le budget rectificatif n° 4 (BR n° 4) de l'agence, adopté en octobre dernier, a conduit à une révision à la baisse de la trajectoire de recettes - et donc de dépenses - de l'agence.

Ces variations s'expliquent notamment par le caractère incertain de plusieurs des ressources de l'Afitf, au premier rang desquelles la contribution du secteur aérien , non perçue en 2021 et en 2022, ou encore le produit des amendes radar , dont l'agence figure au dernier rang de priorité des bénéficiaires. De plus, les sociétés concessionnaires d'autoroutes refusent depuis 2021 de s'acquitter du versement de la contribution volontaire exceptionnelle (120 M€ sur deux ans), à la suite de l'augmentation du taux de la taxe d'aménagement du territoire, par la voie de son indexation sur l'inflation. Au surplus, le versement prévu au titre du plan de relance a été revu à la baisse de 210 M€ pour 2022.

Compte tenu du caractère certain des investissements nécessaires en matière d'infrastructures de transport, le rapporteur considère qu'il est indispensable de diminuer l'aléa pour sécuriser et renforcer la prévisibilité des recettes de l'agence.

C'est pourquoi la commission a adopté, suivant son rapporteur, l'amendement I-957 , visant à ce que, dans le cas où certaines recettes de l'agence viendraient à manquer en 2023, ces dernières soient compensées par une affectation supplémentaire d'accise sur les énergies .

II. TRANSPORTS COLLECTIFS : REVOIR LE MODÈLE DE FINANCEMENT FACE À LA CRISE

A. SOUTENIR LES AUTORITÉS ORGANISATRICES DE LA MOBILITÉ (AOM) DANS UN CONTEXTE HAUSSIER DES PRIX DE L'ÉNERGIE

Après deux années de pandémie, qui ont conduit à d'importantes pertes de recettes commerciales, d'une part, et au titre du versement mobilité, d'autre part, les AOM doivent à présent rembourser les avances qui leur ont été consenties par l'État dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2020. 84 AOM en avaient bénéficié pour un montant d'environ 570 M€. À ces dépenses s'ajoutent désormais d'importants surcoûts énergétiques , compte tenu des clauses d'indexation des contributions versées aux opérateurs de transport.

Évaluation des surcoûts énergétiques de plusieurs AOM

Source : Groupement des autorités responsables de transport (GART)

Dans ces conditions, certaines AOM envisagent de diminuer l'offre de transport ou d' augmenter le tarif payé par l'usager . Plusieurs d'entre elles n'ont pas d'autre choix que de renoncer ou de reporter certains de leurs investissements . À cet égard, l'Afitf a indiqué observer un décalage entre les ambitions initialement affichées du 4 e appel à projets de transports collectifs en site propre et sa mise en oeuvre ; les collectivités étant, dans cette période d'incertitude, plus prudentes sur leurs investissements .

Pour le rapporteur, aucun de ces leviers n'est pleinement satisfaisant, à l'heure où la décarbonation du secteur des transports est une priorité et dans le contexte actuel particulièrement inflationniste. À terme, ces solutions sont même susceptibles d'amoindrir l'attractivité des transports collectifs par rapport au mode routier , à contre-courant de nos objectifs de report modal.

Pour donner davantage de marges de manoeuvre aux AOM , la commission a adopté l'amendement I-948 , qui vise à abaisser le taux de TVA de 10 à 5,5 % sur les mobilités du quotidien . Cet amendement a été adopté en séance publique .

B. ACCOMPAGNER LE DÉVELOPPEMENT D'UNE OFFRE DE TRANSPORTS DANS LES ZONES PEU DENSES

Près de trois ans après l'adoption de la loi d'orientation des mobilités (LOM), et alors que 53 % des communautés de communes se sont saisies de la compétence mobilité, la question du financement des transports en zones peu denses demeure . Parmi les communautés de communes ayant pris la compétence, toutes n'envisagent pas d'instaurer un versement mobilité (cf. résultats de l'enquête réalisée par Intercommunalités de France, été 2022).

Pour le rapporteur, la répartition inégale des activités et des emplois sur le territoire explique le renoncement de certaines AOM, notamment en zones peu denses, à lever le versement mobilité, compte tenu du faible potentiel de rendement de cette ressource sur leur territoire .

Pour permettre aux AOM d'exercer pleinement leurs compétences, la commission a adopté un amendement I-955 visant à attribuer aux communautés de communes s'étant saisies de la compétence mobilité et n'ayant pas institué de versement mobilité une fraction du produit de l'accise sur les énergies , à hauteur de 10 euros par habitant.

C. AMÉLIORER LA COORDINATION ENTRE LES DIFFÉRENTES PARTIES PRENANTES CONCOURANT AUX POLITIQUES DE MOBILITÉ

Les auditions conduites par le rapporteur ont mis en lumière le manque de dialogue entre les différents acteurs participant, de près ou de loin, aux politiques de mobilité, limitant ainsi leur efficacité.

Pour le rapporteur, une réflexion commune associant tous les acteurs de la mobilité autour de schémas et d' objectifs partagés est une condition sine qua non de la réussite des politiques de transport .

III. ENTRETIEN DES INFRASTRUCTURES ROUTIÈRES : DES MOYENS INSUFFISANTS À AMPLIFIER

A. ÉTAT DES ROUTES : NE PAS BAISSER LA GARDE À LA VEILLE DES TRANSFERTS DE VOIRIES

Le PLF pour 2023 prévoit d'allouer environ 930 M€ en crédits de paiement (CP) à l'entretien du réseau routier national non concédé (RRNNC), soit environ 60 M€ de plus que l'année précédente. Le rapporteur salue cette augmentation ; qui plus est, ce montant respecte la trajectoire fixée par le rapport annexé à la LOM. D'après les documents budgétaires, cette enveloppe permettra d'augmenter la part de chaussées en bon état.

Pour autant, il est à craindre que l'augmentation des prix de l'énergie et des matériaux obère le niveau de régénération des voies initialement envisagé . L'Afitf a ainsi indiqué avoir, dans son BR n° 4, pris en compte les premières conséquences de l'inflation, avec une hausse - à ce stade limitée - de 10 M€ des crédits consacrés à la régénération routière.

En outre, la loi « 3DS » du 21 février 2022 prévoit la possibilité, pour les métropoles, départements et régions volontaires - de manière expérimentale pour ces dernières - de se voir transférer certaines portions du RRNNC. Plusieurs collectivités ont manifesté leur intérêt.

Source : Direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM)

Dans cette perspective, et pour que ces transferts se fassent dans de bonnes conditions, la poursuite d'un effort suffisant d'entretien des routes est indispensable, faute de quoi les collectivités devraient assumer des dépenses supplémentaires pour rattraper le retard en la matière. Or, et comme l'a souligné l'Assemblée des départements de France (ADF), la route constitue trop souvent une « variable d'ajustement budgétaire ».

Pour éviter cet écueil et préparer les futurs transferts, la commission a adopté, suivant son rapporteur, l'amendement II-346 , qui vise à abonder de 50 M€ le budget consacré à l'entretien des routes du RRNNC .

B. OUVRAGES D'ART : DÉPLOYER LE PROGRAMME NATIONAL PONTS À PLUS GRANDE ÉCHELLE

Créé en octobre 2020 dans le cadre du plan de relance, soit un peu plus d'un an après l'adoption par la commission du rapport d'information Sécurité des ponts : éviter un drame , le Programme national ponts (PNP) a permis de consacrer 40 M€ , sur une période de 3 ans (2021-2023), au recensement et à l' évaluation des ponts des collectivités volontaires du bloc communal . Au terme de la première phase du PNP, il apparaît que le constat dressé en 2019, déjà inquiétant, se confirme, voire s'aggrave .

Si le PNP constitue une première avancée positive , le rapport « droit de suite » adopté par la commission en juin 2022 a néanmoins mis en lumière l'insuffisance des montants consacrés à l'évaluation approfondie des ouvrages les plus dégradés . La DGITM a d'ailleurs indiqué qu'il n'était pas envisagé de prolonger le PNP. En outre, aucun financement n'est prévu pour accompagner les collectivités qui en ont besoin à procéder à des travaux de réparation de leurs ouvrages d'art . Enfin, le rapporteur fait sien le constat du rapport de 2022, qui estime urgent de rattraper le retard accumulé concernant les moyens consacrés aux ouvrages d'art du RRNNC.

Aussi, et pour traduire les recommandations du rapport de juin 2022 adoptées à l'unanimité, la commission a adopté 3 amendements du rapporteur afin :

- d'allouer 40 M€ supplémentaires à la réalisation d'une évaluation approfondie des ouvrages d'art les plus dégradés identifiés par le PNP (amendement II-361 ) ;

- de consacrer 60 M€ au co-financement des travaux de réparation de ponts des collectivités territoriales (amendement II-362 ) ;

- de rattraper le retard en matière d' entretien des ponts de l'État (amendement II-345 )

IV. ACCÉLÉRER LA DÉCARBONATION DU PARC DE VÉHICULES

A. ACCOMPAGNER LES MÉNAGES DANS LE RENOUVELLEMENT DE LEURS VÉHICULES

1. Le « leasing social » : un nouveau dispositif aux modalités à ce stade inconnues

L' objectif de fin de vente des véhicules thermiques à compter de 2035 suppose, dès à présent, de conduire une politique volontariste de soutien à l'acquisition de véhicules peu polluants . Plusieurs dispositifs ont d'ores et déjà été mis en oeuvre, à l'image du bonus automobile ou encore de la prime à la conversion .

Cette année, le PLF pour 2023 prévoit en outre la création d'un dispositif dit de « leasing social » , qui vise à soutenir la location à longue durée de véhicules électriques. D'après la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), « l'objectif du dispositif est de diminuer le coût d'usage d'un véhicule pour les ménages sous condition de ressource, avec un loyer n'excédant pas 100 € par mois pour la location d'un véhicule électrique qui permet, de plus, des gains de carburant importants, tout en favorisant la production de véhicules électriques français. »

Au total, 1,3 Md€ est prévu pour financer ces trois dispositifs, alors même que les modalités du « leasing social » n'ont pas encore été arrêtées (public concerné, véhicules ciblés, montant total de l'aide, etc.). Le rapporteur déplore que le Gouvernement impose au Parlement de se prononcer sur une somme aussi substantielle au bénéfice d'un dispositif qui loin d'être abouti et dont tous les acteurs interrogés ignorent tout.

Enfin, le rapporteur estime que les aides à l'acquisition de véhicules propres devraient davantage favoriser les véhicules les plus légers .

2. Déploiement des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) : un accompagnement en deçà des enjeux

Le déploiement des ZFE-m dans les années à venir et la mise en place, dans certaines d'entre elles, de schéma de restrictions de circulation des véhicules les plus polluants doit s'accompagner de dispositifs d'accompagnements ciblés des ménages et des collectivités territoriales concernés.

S'agissant des collectivités territoriales , le rapporteur se félicite des 200 M€ du nouveau programme « Fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires » consacrés à l'accompagnement du déploiement des ZFE-m. Ces fonds permettront notamment, d'après la DGEC, de réaliser des analyses préalables sur les caractéristiques du parc de véhicules en circulation, ou encore de mieux informer les usagers de la ZFE-m. Pour autant, la commission s'inquiète d'une part de ce que ce soutien arrive si tardivement et d'autre part s'émeut, comme France urbaine, du retard pris sur le développement de la lecture automatisée des plaques d'immatriculation , qui est pourtant l'une des conditions de réussite d'une ZFE-m.

Pour ce qui concerne les ménages, il convient de rappeler que plus de 40 % de la population française est concernée par la mise en place d'une ZFE-m. Dans ce contexte, il est essentiel de définir des aides ciblées à destination des ménages, notamment les plus modestes, pour les aider à acquérir un véhicule propre. C'est tout l'objet de l'expérimentation de prêt à taux zéro, inscrite dans la loi « Climat et résilience » du 22 août 2021 à l'initiative de la commission.

Pour autant, et compte tenu des besoins , la commission a adopté un amendement I-953 , sur proposition du rapporteur, afin d'en allonger la durée et d'en élargir le périmètre . Cet amendement a été adopté en séance publique .

B. SOUTENIR LES TRANSPORTEURS DANS LA DÉCARBONATION DE LEURS FLOTTES

Si, compte tenu de nos objectifs ambitieux, la part modale des modes ferroviaire et fluvial était multipliée par deux, le transport routier de marchandises représenterait encore plus de 75 % du fret. Aussi, la décarbonation du transport routier de marchandises doit constituer une priorité . Il s'agit là d'un véritable défi pour les transporteurs routiers , dont les coûts de carburant ont récemment beaucoup augmenté ; d'après la Fédération nationale du transport routier (FNTR), le carburant représente environ 25 % du montant des charges d'une entreprise de transport . En outre, le coût d'acquisition de véhicules lourds fonctionnant avec des propulsions alternatives est bien plus élevé que celui d'un véhicule diesel. Un véhicule lourd électrique est ainsi 4 à 5 fois plus cher qu'un véhicule diesel.

Dans ce contexte, le rapporteur plaide pour un renforcement , dès à présent, du soutien à l'acquisition de véhicules lourds moins polluants , sans quoi l'objectif fixé par la LOM de fin de vente des véhicules lourds utilisant majoritairement des énergies fossiles, d'ici 2040 ne pourra être atteint.

Pour tenir cet objectif fixé par le législateur, la commission a adopté 3 amendements sur proposition de son rapporteur, visant à :

- allouer 15 M€ supplémentaires à l'appel à projets « Écosystèmes des véhicules lourds électriques » ; l'enveloppe initialement prévue ayant été intégralement consommée (amendement II-347 ) ;

- mettre en place un prêt à taux zéro pour l'acquisition de véhicules de plus de 2,6 tonnes peu polluants , dans le contexte d'augmentation des taux (amendement I-954 ). Cet amendement a été adopté en séance publique ;

- élargir le bénéfice du suramortissement pour l'acquisition d'un véhicule peu polluant aux véhicules rétrofités (amendement I-956 ). Cet amendement a été adopté en séance publique.

V. ENCOURAGER LA PRATIQUE DU VÉLO

Alors que, d'après la FUB, l'utilisation du vélo progresse en milieu urbain (+ 12 % de passagers par rapport à 2021), elle reste fragile en milieu périurbain et rural , où le nombre de passagers à vélo a diminué de 2 % sur la même période.

Malgré l'engouement que semble susciter le vélo, l'augmentation de sa part modale reste encore trop limitée . L'action des collectivités territoriales et de l'État, dans le cadre du Plan vélo et mobilités actives initié en 2018, mérite d'être saluée avec la création de plusieurs milliers de kilomètres d'aménagements cyclables . Néanmoins, la croissance du linéaire, estimée à 7 % par an sur la période 2018-2022, est insuffisante pour atteindre les objectifs fixés par la stratégie nationale bas-carbone. Aussi, le rapporteur salue l'annonce, en septembre dernier, d'un deuxième plan vélo, doté de 250 M€ .

Pour autant, force est de constater que les besoins en matière d'ingénierie territoriale sont significatifs et justifient d'y consacrer des moyens complémentaires.

C'est pourquoi la commission a adopté un amendement II-348 , qui a pour objet de consacrer 20 M€ supplémentaires en faveur du développement de la pratique du vélo .

*

Enfin, la commission a adopté l'amendement II-333 , pour renforcer les moyens de l'Autorité de régulation des transports à hauteur de 4,6 M€ supplémentaires afin de lui permettre d'exercer pleinement ses missions dans de bonnes conditions , sans grever son fonds de roulement qui a atteint un seuil critique.

TRAVAUX EN COMMISSION

Audition de M. Christophe Béchu,
ministre de transition écologique et de la cohésion des territoires
et de Mme Dominique Faure, secrétaire d'État chargée de la ruralité
(Mercredi 2 novembre 2022)

Le compte rendu de cette audition est publié dans l'avis budgétaire n° 119 tome 1 fascicule 1 Environnement - Biodiversité et expertise en matière de développement durable et consultable sur le site du Sénat 7 ( * ) .

Examen en commission
(Mercredi 9 novembre 2022)

Réunie le mercredi 9 novembre 2022, la commission a examiné le rapport pour avis sur les crédits « Transports aériens » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » du projet de loi de finances pour 2023.

M. Didier Mandelli , vice-président de la commission . - Mes chers collègues, nous entamons aujourd'hui l'examen du premier avis budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2023 consacré aux crédits relatifs aux transports aériens, sur le rapport de notre collègue Évelyne Perrot. Cette séquence comprendra l'examen de neuf rapports pour avis, que les rapporteurs budgétaires de notre commission présenteront cette semaine et les deux suivantes. Cette année, parmi la priorité de nos missions régaliennes, la transition écologique est affichée comme un axe prioritaire des pouvoirs publics. Le budget est un acte fort dans lequel la Nation affirme ses priorités et détaille les moyens qu'elle consacre à l'atteinte des objectifs qu'elle se fixe. Le budget doit donc être lisible et refléter les choix du législateur et les choix politiques formulés depuis le début de ce nouveau quinquennat. Il est en effet impératif d'allouer les moyens budgétaires et humains à la bonne mise en oeuvre des ambitions environnementales, faute de quoi elles resteraient un voeu pieux. Les rapporteurs ne manqueront pas de nous livrer leur analyse à cet égard.

La maquette budgétaire devient chaque année de plus en plus complexe et ne facilite pas l'analyse. Cette année encore, les crédits alloués aux missions que nous examinons traditionnellement doivent se lire en croisant de missions ponctuelles avec la fin des crédits de paiement alloués à la mission Plan de relance et les crédits intégrés au sein du plan Investir pour la France de 2030, qui remplace la mission Investissement d'avenir. Les crédits concernent parfois plusieurs missions avec des dotations croisées.

Pour la troisième année consécutive, le PLF 2023 comporte en annexe un rapport sur l'impact environnemental du budget de l'État. Ce document vise à compiler les informations disponibles sur les moyens consacrés aux politiques environnementales. Il est regrettable que cette année encore ce rapport ait été remis tardivement. Il a seulement été diffusé par les services de Bercy le 10 octobre dernier, soit le lendemain du début de la discussion budgétaire en séance publique à l'Assemblée nationale.

Ce document montre que près de 13 % des dépenses inscrites au projet de loi de finances ont un impact sur l'environnement (9,3 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2022). Mais la très grande majorité des dépenses concerne en réalité les boucliers tarifaires gaz et électricité contribuant à un brunissement marqué du budget de l'État.

La crise énergétique que nous subissons montre à quel point la transition climatique est dépendante de facteurs socio-économiques. Le contexte économique difficile ne facilite donc pas le mouvement en faveur du verdissement de notre économie. La mission écologie illustre bien cette ambivalence. Le montant des dépenses défavorables à l'environnement a augmenté de 25 % tandis que le montant des dépenses qui lui sont favorables a baissé de 11 %, ce qui représente, au total, un effet ciseau important.

Mme Évelyne Perrot , rapporteure pour avis sur les crédits relatifs au transport aérien . - Pour la troisième année consécutive, j'ai le plaisir de vous présenter le fruit de mes travaux préparatoires en ma qualité de rapporteur pour avis du projet de budget alloué aux transports aériens, qui porte sur les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». De manière sous-jacente, plus de 100 000 emplois sont englobés dans le secteur aérien, 260 000 dans la construction aéronautique et spatiale et, indirectement, le transport aérien constitue une composante essentielle du tourisme et contribue au rayonnement international de notre pays.

Je vous soumets une analyse placée sous le signe de l'efficacité, à travers cinq thèmes principaux (trois D et deux I) : désendettement, décarbonation, désenclavement, innovation et insonorisation.

Tout d'abord, ce budget annexe avoisine, dans la lignée des précédents, 2,5 milliards d'euros en dépenses et en recettes à structure constante. Il représente un effectif d'environ 10 000 personnes et il doit rembourser une dette qui atteint 2,7 milliards d'euros.

L'effondrement du trafic aérien en 2020 et 2021 avait provoqué, par ricochet, celui des recettes du budget annexe essentiellement prélevées en contrepartie des services de navigation aérienne. L'endettement avait alors compensé les pertes de recettes.

L'ampleur de la reprise du trafic aérien en 2022, qui se situe à plus de 80 % du niveau de 2019, a excédé les prévisions estimées l'an dernier à 70 %. La forte reprise du trafic et des recettes a permis, dès 2022, de diminuer plus fortement que prévu le recours à l'emprunt. Les crédits pour 2023 soumis à notre approbation prévoient d'entamer une trajectoire de désendettement à partir de l'an prochain.

Bien entendu, cette construction budgétaire repose non pas sur des certitudes, mais sur une prévision officielle d'un retour à 97 % du niveau de 2019 qu'il me paraît plus prudent de ramener à 90-95 % en prenant en compte deux facteurs minorants.

Cette prévision s'appuie d'abord sur l'absence d'événements imprévus ainsi que la fin de la pandémie.

Il faut également prendre en compte la sensibilité des consommateurs à l'augmentation du prix des billets. Certes, en 2022, l'épargne des ménages et la volonté de voyager ont pu prendre le dessus, mais aujourd'hui le coût du kérosène dans le contexte de crise énergétique, qui représente traditionnellement 25 à 35 % des charges supportées par les compagnies aériennes, a plus que doublé - passant de 500 à 1 200 euros la tonne. Je rappelle également qu'il faudra incorporer des carburants durables, entre quatre et huit fois plus coûteux que le kérosène fossile.

Les voyageurs devront donc s'acquitter d'un vrai surcoût qui s'ajoute à l'inquiétude climatique, particulièrement intense chez les jeunes générations. Cela incitera nécessairement à réduire l'appétence pour les voyages en avion, d'autant qu'il n'est pas question de « bouclier tarifaire » dans l'aérien. Avec le conflit en Ukraine, les temps de vols vers l'Asie organisés par les compagnies européennes se sont d'ailleurs allongés de plusieurs heures pour contourner les interdictions de survol de la Russie. Pour mémoire, une heure de vol a un coût d'environ 10 000 euros à répartir entre 200 passagers ou plus.

Soyons donc lucides, en attendant les ruptures technologiques à venir, la trajectoire de démocratisation et de massification du voyage aérien a peut-être atteint son pic en 2019 avec 4,5 milliards de passagers.

Je formulerai deux brèves observations sur les principaux postes de dépenses du budget annexe prévus pour 2023.

La modernisation du contrôle et de la navigation aérienne nécessite des investissements d'environ 300 millions d'euros par an, en particulier pour acquérir des logiciels plus performants et harmonisés avec ceux de nos voisins européens. L'enjeu est également climatique puisqu'il s'agit, par exemple, de permettre le réglage fin des trajectoires de descente continues qui permettent de moins solliciter les moteurs. Je signale également l'avancée que constitue le programme « free route » ou « cheminements directs » qui favorise, au-dessus de 6000 mètres d'altitude, les économies de carburant en privilégiant la ligne droite ou les trajets avec vent favorable.

En fonctionnement, le principal poste de dépenses reste celui des rémunérations - qui représente la moitié du budget annexe.

J'en viens maintenant à la décarbonation et au rôle de notre maillage aéroportuaire territorial.

L'effort de décarbonation est une réalité qui s'impose aussi au secteur aérien. Le débat sur les « jets privés » le reflète à cet égard : le transport aérien privé représente globalement peu d'émissions - de l'ordre de quelques pour cent des rejets de l'aviation - mais, par personne, elles sont excessivement élevées et de moins en moins acceptées par le corps social. Comme l'a récemment souligné le ministre de la transition écologique, Christophe Béchu, devant notre Commission, l'aérien représente 3 % des émissions de la France, mais comme n'importe quel autre acteur du réchauffement climatique, ce secteur doit pleinement participer à l'effort. Tel est bien le cas pour le transport aérien public à l'échelle nationale, européenne et même internationale qui s'est aligné, le 7 octobre dernier à Montréal, sur l'objectif « zéro émission » en 2050.

Dans le débat budgétaire en cours, cela justifie l'augmentation des taxes sur les carburéacteurs prévue par l'article 8 quater du projet de loi de finances pour 2023 que nous allons examiner. Cet alignement fiscal sur les essences routières à échéance 2024 concerne les jets privés d'affaires ainsi que l'aviation de tourisme et de loisirs, y compris les hélicoptères et les ULM. J'observe que le périmètre de cette taxation va au-delà d'une des propositions de la Convention citoyenne pour le climat, soucieuse de freiner des activités aériennes qu'elle a jugées « sans utilité directe pour la société » et qui n'avait pas été reprise dans la loi « Climat et résilience » d'août 2021. J'indique également que l'article 138 de la loi « Climat et résilience » impose aux entreprises de mentionner dans leur déclaration annuelle de performance extra-financière les conséquences sur le changement climatique de leur activité un ensemble d'informations, dont les émissions liées aux activités de transport en amont et en aval de leur activité ainsi que le plan d'actions visant à réduire les émissions.

Au-delà, le soutien des mesures favorisant le verdissement de ce mode de transport est essentiel. L'électrification des avions pour effectuer des petits déplacements ou servir à la formation des pilotes est une évolution qui va dans le bon sens d'exemplarité. Pour les trajets plus longs, des obligations renforcées d'incorporation de kérosènes durables environ quatre fois plus chers que le carburant fossile - sont nécessaires, ce que prévoit d'ailleurs le projet européen « Fit for 55 », toujours en cours d'adoption et sur lequel notre commission a travaillé en février dernier en collaboration avec la commission des affaires européennes.

Je rappelle également que les Lignes d'aménagement du territoire (LAT) présentent un réel intérêt pour la cohésion de nos territoires ; aucune alternative ferroviaire n'existe le plus souvent. Aujourd'hui, une douzaine de lignes sont financées par une contribution de 26 millions d'euros prévue pour 2023 contre 21 millions l'an dernier.

En ce qui concerne le voyage individuel en transport public, les émissions de l'aérien par personne et par kilomètre sont en moyenne européenne 14 fois supérieures à celles du train, et jusqu'à 40 fois en comparaison de notre TGV. C'est surtout la multiplication des voyages en avion sur des distances importantes qui doit constituer un point de vigilance. Pour que les voyageurs en prennent conscience, de nombreux calculateurs de CO 2 sont à leur disposition et les députés proposent de compléter l'offre déjà existante. Cela donne toute son actualité à la recommandation formulée l'an passé de mieux informer les passagers sur les émissions induites par le mode de transport qu'ils choisissent.

Comme l'année dernière, j'évoquerai la dimension internationale du transport aérien, secteur extrêmement concurrentiel.

Le cadre réglementaire « Paquet 55/Fit for 55 » va, à cet égard, constituer un véritable défi pour ce secteur et nécessiter un engagement sur le long terme avec l'extinction progressive des quotas gratuits de CO 2 de 2024 à 2027.

Cette année, en lien avec l'examen du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables, je souhaite souligner les liens entre la décarbonation de l'aviation et notre maillage aéroportuaire. C'est, pour se préparer à l'avion à hydrogène, une problématique un peu analogue à celle des bornes de recharge pour accompagner l'électrification du parc automobile.

Tout d'abord, au cours des auditions, les compagnies aériennes ont insisté, à propos des carburants durables (dits S.AF pour Sustainable Aviation Fuel ), sur le choc auxquelles elles sont confrontées avec, d'un côté, des obligations d'incorporation qui augmentent et, de l'autre, une très grande difficulté à s'en procurer. Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu entendu la semaine dernière nous a rappelé que l'État consacrera 200 millions d'euros de crédits pour des appels à projets destinés à ce que les acteurs français s'emparent du sujet. La France a cependant pris un certain retard.

Par comparaison, les États-Unis, grâce à l'ampleur des surfaces cultivées, ne font pas cette distinction et subventionnent massivement non seulement la production, mais aussi la consommation de ces biocarburants d'aviation dits « 1G » pour première ou ancienne génération.

Le sujet des biokérosènes est crucial, car l'avion électrique ne pourra physiquement transporter, en plus de ses lourdes batteries, qu'une vingtaine de passagers au maximum sur des distances courtes inférieures à 400 km. Le rayon d'action de l'avion à hydrogène sera limité au moyen-courrier soit environ 4 000 km avec 200 personnes et des réservoirs quatre fois plus volumineux que sur nos appareils à kérosène. Pour les vols intercontinentaux, il n'y a pas d'alternative en vue aux carburants durables, même à l'horizon 2050.

Je soulignerai également que nos aéroports sont, pour leur part, très actifs dans leurs efforts de décarbonation. À court terme, ils visent le « zéro émission » pour les opérations au sol. Les aéroports se transforment également en centres de production et de distribution d'énergies renouvelables. En particulier, leur grande superficie leur permet de déployer des panneaux solaires qui serviront à produire de l'hydrogène vert sous forme gazeuse pour les engins au sol et de l'hydrogène liquide pour les futurs avions à hydrogène dont nos avionneurs garantissent la mise en service en 2035.

J'en viens maintenant à la question de la lutte contre les nuisances sonores. J'ai en effet entendu des représentants de l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires (Acnusa), afin de prendre la mesure des réalités vécues par les riverains et de leur sensibilité. Tout d'abord, contrairement à une idée reçue, la diminution du trafic aérien n'a pas pour autant réduit la perception des nuisances, car certains des riverains des aéroports ont davantage recours au travail à domicile. Les tensions n'ont donc pas diminué, d'autant que le fret aérien est revenu à son niveau de 2019 et que les vols de nuit atteignent leur plafond réglementaire.

Enfin, la généralisation des « descentes continues » permet de moins solliciter les moteurs, elle implique cependant de voler plus longtemps à basse altitude, ce qui élargit le périmètre des riverains concernés par les nuisances sonores. Il faut donc adapter les efforts de soutien à l'isolation acoustique et, dans l'immédiat, résorber les trop nombreux dossiers d'insonorisation en attente. Cela nécessite de compenser les pertes de taxe sur les nuisances sonores aériennes qui financent ces travaux et je vous propose d'adopter un amendement en ce sens, comme l'année dernière.

En conclusion, avant le conflit en Ukraine, le secteur aérien a subi le choc de la pandémie qui a engendré d'importantes difficultés financières pour de nombreux opérateurs du secteur aérien. Le soutien bienvenu des pouvoirs publics a, dans certains cas, alors été conditionné à des impératifs de décarbonation prolongés et confirmés par le législateur européen. La France a joué un rôle majeur dans l'impulsion de ce processus qui mérite d'être salué en s'engageant dans une voie d'équilibre.

Aujourd'hui, dans la période ouverte par le conflit en Ukraine, l'aviation subit des hausses de prix qui changent la donne économique tant pour les compagnies aériennes que pour les consommateurs.

J'ajoute qu'il est important de souligner la volonté réelle des aéroports de devenir respectueux de l'environnement, même s'ils sont inquiets quant au stockage des futurs biocarburants, qui représenteront des volumes importants, notamment pour les aéroports de province. Ces « petits aéroports » doivent être maintenus, car ils constituent des relais importants entre les territoires. La durée de vie d'un avion est cependant de 40 ans et la flotte ne pourra pas être entièrement renouvelée rapidement sans un colossal effort d'investissement.

Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports aériens, sous réserve de l'adoption de l'amendement relatif au financement de l'insonorisation acoustique.

M. Gilbert-Luc Devinaz . - Je remercie la rapporteure d'avoir organisé des auditions éclairantes sur ces crédits que mon groupe votera.

J'ai noté que le trafic aérien de 2022 a représenté environ 80 % du niveau atteint en 2019. Des craintes, mentionnées par la rapporteure pour avis, se manifestent pour le trafic en 2023 : un enlisement de la guerre en Ukraine soulèverait bien entendu des difficultés avec le dérèglement des marchés énergétiques, la dégradation du pouvoir d'achat des ménages et s'y ajoutent la fragilité financière de certaines compagnies aériennes, tout comme les difficultés de recrutement sans doute récurrentes qu'elles rencontrent. On ne peut pas non plus écarter le redémarrage du risque sanitaire. La prise en compte de ces données rend difficilement atteignables les objectifs de reprise du trafic au-delà de 90 % du niveau de 2019 prévues par ce budget annexe.

L'engagement pris au sommet de Toulouse en février dernier par une quarantaine de pays et de structures a ouvert la voie aux accords internationaux de Montréal d'octobre 2022 pour aller vers une décarbonation nette de l'aviation civile d'ici 2050 pose question et remet peut-être en cause le modèle économique de ce secteur. J'ajoute que si les émissions de carbone de l'aviation atteignent un niveau estimé à 3 % du total, elles ont bondi de 80 % entre 1990 et 2019, soit plus de 24 millions de CO 2 en France. Cinq millions de tonnes de carburants durables seront ainsi nécessaires pour atteindre l'objectif de décarbonation en 2030 en Europe. La filière doit donc absolument se développer sur nos territoires sans quoi on devra les importer. Si on peut considérer, tout compte fait, à la lumière des auditions, que le secteur aérien est un bon élève par rapport à ses objectifs, il faut prendre conscience d'un certain nombre de questions qui vont se poser. La principale est que les nouveaux carburants risquent de ne pas être disponibles en quantité suffisante pour basculer dans le durable. De plus, la massification de leur production risque de générer des conflits sur l'usage des sols et on peut se demander quels seront les arbitrages sur la part des terres réservée à l'alimentation ou sur les secteurs prioritaires pour l'accès aux biocarburants.

À moyen terme, on peut également s'interroger sur le pari technologique que constitue le recours à l'hydrogène. Cette conversion suppose le reprofilage des appareils et des investissements massifs dans de nouvelles flottes aériennes : le secteur a-t-il les moyens de supporter ces coûts, surtout si ces technologies se traduisent par l'obsolescence d'une partie de la flotte actuelle - dont le recyclage préoccupe, à juste titre, la rapporteure pour avis ? L'Union européenne a-t-elle les moyens de financer cette transition ? Dans le même temps, il faut se demander si les pouvoirs publics doivent anticiper une éventuelle réduction du trafic. Enfin, comme l'a évoqué la rapporteure, la décarbonation ne doit-elle pas être planifiée de façon équitable pour que l'ensemble du public puisse continuer de bénéficier de ce mode de transport ? Voilà un aperçu des questions et difficultés que devra résoudre l'aviation pour que ce bon élève puisse atteindre son objectif de verdissement en 2050 et, à ce titre, je leur souhaite beaucoup de courage. Le groupe SER rejoint donc l'avis favorable proposé par la rapporteure pour avis et approuve l'amendement présenté.

Mme Évelyne Perrot , rapporteure . - Les compagnies aériennes et les fabricants d'avions sont effectivement très inquiets de ne pas disposer de biocarburants en volume suffisant pour faire voler les avions dont les motorisations sont d'ores et déjà adaptées à des taux d'incorporation élevés. Aujourd'hui, s'agissant des huiles usagées utilisables comme carburant, c'est surtout la Chine qui détient une position dominante sur le marché.

M. Bruno Belin . - Je remercie Mme Perrot d'avoir ouvert ses auditions aux membres de la commission. Depuis deux ans, j'ai tenu à m'informer sur ce sujet car « l'aviation bashing » est une réalité, mais il faut prendre conscience et tenir compte des efforts réalisés par l'aviation civile. J'ai la chance de représenter le Sénat au Conseil supérieur de l'aviation civile et de participer au groupe d'études Aviation civile présidé par Vincent Capo-Canellas. Je fais observer, à la suite de l'intervention précédente, que ce n'est pas uniquement au niveau européen que les évolutions vont être décidées : l'enjeu est évidemment planétaire et certains pays n'auront aucun scrupule, sur le terrain, à montrer qu'ils sont les plus forts. Il suffit par exemple de regarder du côté du Qatar, de la Chine ou de la Turquie aux portes de l'Europe et n'oublions pas que la moitié des vols de la planète sont des trajets intérieurs aux États-Unis.

Accompagner la décarbonation de l'aérien est fondamental car ce secteur est utile et nécessaire : on l'a bien vu, au début de la pandémie, quand il a fallu organiser des rapatriements. Cet été encore, les canadairs et les infrastructures de l'aviation ont été déterminants pour gérer les méga-feux. Nous qui sommes en charge de l'aménagement du territoire et représentants des collectivités territoriales devons souligner la nécessité de maintenir les « petits aéroports de province » - selon la formule employée par la rapporteure pour avis. Ces aéroports sont, d'une part, mobilisés « H24 » pour assurer des interventions médicales urgentes et bien souvent des greffes d'organes. D'autre part, ils sont une garantie de sécurité en tant qu'aéroports de déroutement surtout quand ils disposent d'une piste d'atterrissage d'un peu plus de 2 kilomètres.

Par ailleurs, s'agissant de l'interdiction des lignes aériennes de province quand existe une alternative en 2 h 30 de TGV, on en voit, avec le recul, les inconvénients et l'exemple de Bordeaux est parlant. Huit vols Air France étaient assurés avant l'interdiction ; certains ont été supprimés au profit du TGV, mais celui-ci arrive gare Saint Jean alors que le tissu économique se situe sur la zone de Mérignac, près de l'aéroport : il en résulte des embouteillages et une embolie de la ville de Bordeaux alors que les trajets Mérignac - Paris avaient tout leur utilité.

Il faut aussi, comme cela a été évoqué, souligner les efforts de sobriété de l'aviation. Je rappelle par exemple, que les Airbus A220 et A350 sont des appareils dotés de nouvelles motorisations et des consommations beaucoup plus basses que les anciennes flottes. Juste une remarque sur l'avion électrique : la simulation qui a été faite sur un Paris-Toulouse montre qu'il faut faire une étape à Limoges pour recharger les lourdes batteries ; ce n'est donc pas la solution idéale pour des distances supérieures à 400 kilomètres. Le verdissement de la flotte est néanmoins essentiel et il est en cours. Comme cela a été indiqué, il y a effectivement, en matière de kérosènes durables, un problème de filière et celle-ci doit être développée. Des stocks sont nécessaires - en particulier de déchets bois - pour fabriquer les volumes nécessaires de carburants durables.

S'agissant des prévisions de trafic, les chiffres mentionnés au dernier conseil supérieur de l'aviation civile oscillent entre 82 et 86 % du niveau de 2019. N'oublions pas non plus une autre donnée : le prix d'un billet d'avion est aujourd'hui composé à 48 % de taxes, il faut donc réfléchir sur ce paramètre si on souhaite maintenir l'aviation à la portée de nos concitoyens.

Telles sont les observations qui me tenaient à coeur et je soutiens les éléments présentés par la rapporteure.

M. Jean-Michel Houllegatte . - Je salue l'important travail réalisé par Mme Perrot. Trois leviers permettent de réduire l'empreinte du carbone dans le secteur aérien. Le premier est lié au design des avions, le deuxième aux carburants alternatifs, le dernier aux mesures organisationnelles, avec notamment la modification du profil de descente des avions permettant une approche plus en souplesse malgré des nuisances sonores supplémentaires.

La réduction du temps d'attente à l'atterrissage demande à être prise en compte via le nouveau système de contrôle aérien ForeFlight, véritable serpent de mer, tout comme le ciel unique européen censé améliorer les transmissions.

M. Jean-Claude Anglars . - Le rapport est excellent notamment sur les liaisons d'aménagement du territoire. Avec 26 millions d'euros, les crédits affectés à ces liaisons sont en augmentation cette année. Il est indispensable que l'État participe au financement de ces aéroports de province.

Mme Évelyne Perrot . - Pour répondre à M. Houllegatte, « ForeFlight » a été livré par Thalès et « Free Route » est en place sur la moitié de la France.

M. Gilbert Favreau . - Je ne voudrais pas « doucher l'optimisme » des précédents orateurs, mais un article récent rappelle que le Directeur de l'association internationale du transport aérien déclarait en 2007 que d'ici à dix ans les carburants d'aviation durable représenteraient 10 % du besoin. Quinze ans plus tard, en 2022, cette part du carburant s'élève à 0,01 %.

La consommation du carburant par passager a été divisée par deux, mais en 30 ans le trafic a explosé. La situation n'a donc pas vraiment avancé. Il sera sans doute très difficile d'améliorer la performance énergétique des avions à l'avenir.

M. Hervé Gillé . - L'intermodalité des aéroports mériterait d'être analysée plus en profondeur dans le cadre de schémas de mobilité partagés avec les collectivités territoriales et l'État.

Sur l'adaptation des moyens aériens, il existe une possibilité de remotorisation. L'enjeu des agrocarburants est majeur et devrait être pris en compte à l'échelle de l'Europe.

Six vols par jour existent encore entre Paris et Bordeaux via Air France et 16 au total avec les autres compagnies. La problématique vient plus du départ de l'aéroport Charles-de-Gaulle. À Bordeaux, les problèmes d'accessibilité à la gare Saint-Jean étaient essentiellement dus à des travaux.

M. Philippe Tabarot . - La loi « Climat et résilience » a permis des avancées en faveur de la décarbonation du transport aérien : je pense notamment à la suppression des lignes aériennes en cas d'alternative ferroviaire de moins de 2 h 30 pour les vols qui ne sont pas majoritairement des correspondances. Quel bilan dressez-vous de l'application de ces mesures ? Sont-elles appliquées ?

M. Pierre Médevielle . - Je pense pour ma part que le meilleur reste à venir dans le domaine de la décarbonation de l'aviation. L'avion à hydrogène vole déjà. Des avions hybrides carburants et électriques sont à l'étude dans une société toulousaine, Aura Aero. 2050 est un objectif lointain, mais de bonnes surprises pourraient surgir en amont. Airbus Defense and Space réfléchit à une centrale photovoltaïque satellitaire pouvant ravitailler des avions en vol par faisceaux. En Israël, une entreprise a trouvé le moyen de produire de l'hydrogène sans électricité. Je place toute ma confiance dans le travail des ingénieurs du consortium Airbus qui ont encore une avance confortable sur les Chinois.

M. Jean-François Longeot , président . - Une usine Alstom située sur ma commune avait une avance considérable en matière de fabrication de moteurs de TGV, mais a été dépassée par les Chinois. L'aviation pourrait subir le même sort.

M. Jacques Fernique . - L'une des manifestations les plus visibles de l'inégalité de la répartition des efforts collectifs pour le climat est l'usage abusif des jets privés. Un amendement a été proposé à l'Assemblée nationale pour doubler la taxation du kérosène pour ces usages. Quel est votre sentiment sur ce point ?

Mme Évelyne Perrot . - Pour répondre à M. Favreau, la consommation d'un Airbus a effectivement baissé de façon continue et représente aujourd'hui en moyenne 3,2 litres aux 100 km, par passager. Cependant, en 2019, l'aviation a transporté 4,5 milliards de passagers dans le monde, ce qui conduit donc à une consommation importante de carburant. Les constructeurs aéronautiques comme Safran prévoient des moteurs ultra sobres avec une nouvelle diminution de la consommation de 20 %.

L'alternative ferroviaire évoquée par M. Tabarot concerne les trajets de 2 h 30 en train mais la commission européenne souhaite qu'on distingue Paris et les aéroports autour de Paris : le calcul des 2 h 30 est donc moins simple qu'il n'y paraît. C'est pourquoi le décret d'application de la loi climat est toujours en phase d'examen au niveau européen. Par ailleurs, s'agissant des trajets aériens à très bas prix, je rappelle que le coût du kérosène sur les vols low cost représente 35 % du prix du billet et ce dernier va nécessairement être impacté par le doublement a minima du prix des carburants d'aviation.

Les jets privés font également partie d'un secteur d'activité qui conserve une certaine utilité : la difficulté majeure surgit quand leur taux d'occupation est trop faible. Quand les jets voleront avec une énergie verte, ils seront mieux tolérés. Je rappelle également que selon certains chiffrages, seuls 8 % de jets privés ayant circulé en France sont immatriculés dans notre pays.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs « Transports aériens ».

Examen en commission
(Mercredi 16 novembre 2022)

Réunie le mercredi 16 novembre 2022, la commission a examiné les amendements de première partie sur le projet de loi de finances pour 2023 de MM. Philippe Tabarot et Hervé Gillé, rapporteurs pour avis.

M. Jean-François Longeot , président. - À l'issue de l'examen des rapports pour avis de nos trois collègues, que je tiens à remercier ici, je vous propose à présent d'examiner les amendements de première partie de nos collègues rapporteurs pour avis Philippe Tabarot et Hervé Gillé.

Ceux-ci nous présenteront leur rapport sur le projet de loi de finances pour 2023 la semaine prochaine, sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes pour ce qui concerne M. Tabarot et sur les crédits relatifs aux transports routiers pour ce qui concerne M. Gillé.

Cela étant dit, le délai limite pour les amendements à la première partie du projet de loi de finances étant fixé au jeudi 17 novembre à 11 heures, il était nécessaire d'examiner leurs amendements sur la première partie aujourd'hui.

Je vous propose d'abord d'examiner les amendements présentés par Hervé Gillé.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports routiers - Mes travaux et les propositions que je vous présente aujourd'hui s'inscrivent dans la droite ligne de ceux d'Olivier Jacquin qui était rapporteur l'année dernière et reprennent, pour plusieurs d'entre elles, un certain nombre de positions établies par notre commission.

Article 7

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis. - L'amendement I-953 vise à prolonger la durée et à élargir le périmètre de l'expérimentation d'un prêt à taux zéro pour l'acquisition d'un véhicule léger peu polluant, qui avait été inséré dans la loi « Climat et résilience » à l'initiative de notre collègue Philippe Tabarot. Aux termes des négociations en commission mixte paritaire, le champ en avait été réduit aux seules personnes domiciliées dans ou à proximité d'une zone à faibles émissions mobilité (ZFE-m) ne respectant pas les normes de qualité de l'air de manière régulière et la disposition pérenne adoptée au Sénat avait été transformée en expérimentation pour deux années. Or, nous observons aujourd'hui à quel point l'accélération du déploiement des ZFE-m va contraindre les déplacements d'un grand nombre de ménages. Dans ce contexte, il est donc essentiel d'accompagner la décarbonation du parc automobile. C'est pourquoi je vous propose de revenir à une version plus ambitieuse, inspirée de ce que nous avions adopté il y a un an et demi.

L'amendement I-953 est adopté.

Après l'article 8

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis. - Suivant la même logique, l'amendement I-954 vise à créer un prêt à taux zéro pour l'acquisition d'un poids lourds peu polluant, neuf ou transformé (c'est-à-dire « rétrofité »), dans la droite ligne de ce que notre commission avait adopté une première fois dans le cadre de l'examen de la loi « Climat et résilience » et une seconde fois dans le cadre de l'examen du projet de loi «  Pouvoir d'achat », mais qui n'a pas survécu à la commission mixte paritaire.

L'amendement I-954 est adopté.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis. - L'amendement I-955 a pour objet, dans l'inspiration de ce que notre commission avait adopté dans le cadre de l'examen de la loi d'orientation des mobilités, de doter les communes qui se sont saisies de la compétence mobilité et n'ont pas institué de versement mobilité, d'une fraction de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), à hauteur de 10 euros par habitant, pour leur permettre d'exercer leur nouvelle compétence dans de bonnes conditions. Certaines communautés de communes qui ont pris cette compétence n'ont, pour l'heure, pas toujours les moyens de la mettre en oeuvre. Cette proposition permettrait d'améliorer leur situation en les dotant d'une nouvelle ressource.

L'amendement I-955 est adopté.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis. - L'amendement I-956 vise à élargir aux véhicules rétrofités le bénéfice du suramortissement destiné à encourager l'acquisition de véhicules de plus de 2,6 tonnes peu polluants.

L'amendement I-956 est adopté.

Après l'article 15

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis. - L'amendement I-957 a pour objectif de sécuriser les ressources de l'Afitf, qui finances des dépenses de transports certaines et très conséquentes, alors qu'elle bénéficie de ressources qui sont pour plusieurs d'entre elles incertaines (je pense aux amendes radar - dont elle est le dernier bénéficiaire -, à la contribution du secteur aérien). C'est pourquoi cet amendement vise à ce que, pour l'année 2023, dans le cas où les recettes prévues viendraient à manquer, le manque soit compensé par une affectation supplémentaire de TICPE. L'objectif est de consolider le financement de l'Afitf, compte tenu de l'ensemble des programmes d'investissements auxquels elle doit faire face.

L'amendement I-957 est adopté.

M. Jean-François Longeot , président. - Nous allons à présent examiner les amendements de Philippe Tabarot sur la première partie du PLF.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes. - Je viens d'assister à la présentation par nos collègues rapporteurs spéciaux de la commission des finances, de leur rapport sur les programmes 203, 205 et 355 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Nous partageons les mêmes constats sur les difficultés en termes de moyens sur ces programmes. Je leur ai fait part de notre voeu que certains de nos amendements puissent recevoir un avis favorable de la commission des finances.

Après l'article 6

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis. - L'amendement I-947 vise à simplifier le régime fiscal applicable à l'électricité consommée pour les activités de manutention portuaire. Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2022, le législateur a prévu un tarif réduit de taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) à 0,5 € par mégawattheure sur l'électricité consommée par les manutentionnaires dans les ports français à compter du 1 er janvier 2024, en compensation de la hausse des tarifs de TICPE sur le gazole non routier prévue à la même date. Dans le même temps, l'article 6 du PLF prévoit la prorogation du « bouclier tarifaire » en 2023 avec un tarif de l'accise sur l'électricité de 0,5 € par mégawattheure pour les consommations en électricité de l'ensemble des entreprises, dont celles du secteur de la manutention portuaire. L'amendement que je vous propose vise à instituer un tarif réduit de TICFE sur l'électricité de façon pérenne pour ce secteur, dès le 1 er janvier 2023. Cela permettra de sécuriser la situation dans l'hypothèse où l'entrée en vigueur du taux réduit de TICFE, initialement prévue au 1 er janvier 2024, serait à nouveau repoussée. Par ailleurs, cette proposition permettra de donner la visibilité nécessaire aux manutentionnaires portuaires pour investir dans des matériels électriques et de renforcer leur compétitivité face à la concurrence internationale. Cet amendement a été travaillé et vu par nos collègues Didier Mandelli, Pascal Martin et Martine Filleul, que je sais très attentifs à ces sujets.

L'amendement I-947 est adopté.

Après l'article 8

M. Jean-François Longeot , président. - Je vous donne la parole pour la présentation de l'amendement I-948 , co-signé par Hervé Gillé.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis. - Cet amendement vise à appliquer un taux réduit de TVA, en la portant de 10 à 5,5 %, aux transports collectifs de voyageurs, qu'ils soient routiers ou ferroviaires, hormis les services librement organisés. C'est une mesure que notre commission a déjà adoptée, dans le PLF de l'année dernière, mais aussi à l'occasion de l'examen du projet de loi « Climat et résilience ». Précédemment, nous avions l'habitude de défendre cette mesure en expliquant que le transport est un produit de première nécessité, et dans l'objectif que cette diminution soit répercutée dans le prix du billet de l'usager. Nous observions simplement des divergences, entre nos groupes, sur le périmètre de la mesure : quand certains souhaitaient l'appliquer à tous les modes de transport, d'autres préféraient la réserver au mode ferroviaire. Cette année, nous vous proposons de préciser que cette diminution s'applique aux transports collectifs de voyageurs, qu'ils soient routiers ou ferroviaires - hors services librement organisés. Cette année, l'objectif est de redonner de l'oxygène aux autorités organisatrices de la mobilité (AOM), qui sont, comme vous le savez, dans une situation catastrophique. Dans quelques mois, elles auront sans doute à choisir entre une augmentation de la tarification et une réduction de l'offre, ce qui va à l'inverse de notre volonté de développer les transports en commun. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons cet amendement.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis. - Nous avons tous conscience de la situation particulièrement critique aujourd'hui pour nos AOM. Nous avons à imaginer des solutions, et celle-ci en fait en effet partie.

M. Didier Mandelli . - Pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, je souhaiterais simplement revenir sur l'amendement I-955 , qui permettrait aux intercommunalités ayant pris la compétence mobilité de bénéficier d'une contribution, à hauteur de 10 euros par habitant. Il existe deux types d'intercommunalités : celles qui ont pris la compétence et celles qui ne l'ont pas prise. Ces dernières ont la possibilité, si elles organisent des transports collectifs, de mettre en place le versement mobilité.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis. - Certaines collectivités ont une assiette particulièrement faible, qui ne leur permet pas de financer la compétence correctement.

M. Didier Mandelli . - Cet amendement permettrait donc à certaines collectivités qui pourraient lever le versement mobilité de continuer à ne pas le faire et aux autres qui n'en ont pas la possibilité de mettre en place ce versement, de bénéficier d'une fraction de TICPE. Je trouve cela gênant : dans un cas, ce sont les entreprises qui financent et dans l'autre, ce sont les contribuables. L'esprit du versement mobilité était de faire contribuer les entreprises au financement des transports. A-t-on connaissance d'intercommunalités qui ont une assiette suffisante et qui n'ont pas souhaité mettre en place ce versement - pour des raisons politiques - et qui préfèreraient plutôt bénéficier d'un financement de la part du contribuable ?

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis. - Ce sujet met en perspective la question de la péréquation du versement mobilité. Si je prends l'exemple de la métropole de Bordeaux, cette dernière concentre l'ensemble des activités et le versement mobilité est particulièrement important sur l'ensemble de la métropole. Les communautés de communes qui ont pris la compétence en deuxième ou troisième couronne ont quant à elles une assiette très faible, de telle sorte qu'elles ne peuvent pas financer de services de transport et par ailleurs, il n'existe pas de péréquation.

M. Gérard Lahellec . - Je viens d'un département où nous sommes passés de 28 à 8 intercommunalités, avec de nombreux cas de figure différents en matière de prise de la compétence mobilité et d'instauration - ou non - du versement mobilité. Je vois donc un intérêt dans cet amendement en ce qu'il ouvre une fenêtre nouvelle de possibilité.

L'amendement I-948 est adopté.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis. - Je profite de la présentation de l'amendement I-949 pour rebondir sur le sujet précédent. Je parle sous le contrôle du rapporteur de la loi d'orientation des mobilités (LOM), mais il me semble que cette question du financement des communautés de communes qui s'apprêtaient à prendre la compétence mobilité était au coeur des débats lors de la commission mixte paritaire de la LOM. Il est intéressant de voir que le Sénat avait soulevé ce problème central du financement et qu'à l'époque, nous n'avons pas été suivis sur cette question, qui revient aujourd'hui dans l'actualité.

L'amendement I-949 vise à prévoir un étalement sur 15 ans, au lieu de 5 ans actuellement, des effets fiscaux liés à la revalorisation des actifs détenus par les entreprises fluviales. Une telle évolution permettrait de renforcer la solidité financière des entreprises fluviales et, ainsi, de favoriser la conduite de leurs investissements. J'avais déjà présenté cet amendement l'année dernière dans le cadre de l'examen du PLF pour 2022, il avait été adopté en séance publique mais n'avait malheureusement pas passé le cap de la navette parlementaire... Je le dépose à nouveau dans l'espoir qu'il puisse cette fois-ci aboutir.

L'amendement I-949 est adopté.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis. - L'amendement I-950 vise à rehausser le plafond concernant l'exonération des plus-values sur la cession de bateaux de navigation intérieure affectés au transport de marchandises. Ce plafond, aujourd'hui fixé à 100 000 euros, constitue une exception par rapport aux régimes applicables dans d'autres États européens comme l'Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas. J'avais déjà porté cet amendement lors de l'examen des deux précédents PLF : il avait été adopté, avec avis favorable de la commission des finances en 2020, mais a été rejeté l'année dernière, au motif qu'une suppression pure et simple du plafond poserait des difficultés au regard des règles européennes en matière d'aides d'État. Afin d'augmenter nos chances de voir cet amendement adopté cette année, je propose cette fois-ci non pas une suppression mais un doublement du plafond sur l'exonération des plus-values, pour qu'il s'établisse à 200 000 euros.

L'amendement I-950 est adopté.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis. - L'amendement I-951 vise à prolonger jusqu'en 2026 l'application du suramortissement vert, prévu à l'article 39 decies C du code général des impôts, qui permet aux armateurs de bénéficier d'une déduction fiscale sur l'acquisition d'équipements de propulsion décarbonés pour leurs navires. Il reprend une proposition formulée par la proposition de loi relative à la performance et à la gouvernance des ports maritimes de Michel Vaspart, adoptée par le Sénat en décembre 2020.

L'amendement I-951 est adopté.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis. - Enfin, l'amendement I-952 vise à étendre aux navires neufs la possibilité de bénéficier d'une déduction fiscale pour l'acquisition d'équipements véliques destinés à compléter la propulsion principale d'un navire ou d'équipements destinés à permettre l'alimentation électrique du navire lorsqu'il effectue une escale.

L'amendement I-952 est adopté.

M. Jean-François Longeot , président. - Je remercie les deux rapporteurs pour leur travail et pour la présentation de ces amendements.

Examen en commission
(Mercredi 23 novembre 2022)

Réunie le mercredi 23 novembre 2022, la commission a examiné le rapport pour avis sur les crédits « Transports ferroviaires, fluviaux et maritimes » des missions « Écologie, développement et mobilité durables » et « Plan de relance » du projet de loi de finances pour 2023.

M. Jean-François Longeot , président . - Nous examinons à présent le rapport de Philippe Tabarot sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes inscrits au projet de loi de finances pour 2023

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes . - J'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui le rapport pour avis sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes.

Le volet transport du PLF pour 2023 s'inscrit dans le contexte particulier de la crise énergétique, liée au conflit russo-ukrainien, et de la pression inflationniste, deux facteurs qui pèsent actuellement sur les dépenses des secteurs ferroviaire, fluvial et maritime, alors qu'ils sont confrontés à des besoins importants en matière d'investissement.

Je vais sans plus attendre vous présenter les quatre volets autour desquels s'articule mon rapport.

Je commencerai par le financement des infrastructures de transport via l'Agence de financement des infrastructures de France (Afitf).

Le PLF pour 2023 prévoit une augmentation sensible des recettes, et donc des dépenses, de l'Agence de financement des infrastructures de France, avec une enveloppe de 3,8 milliards d'euros, un montant jusqu'à présent inégalé pour cet acteur. Cette enveloppe respecte et même dépasse la trajectoire définie par la loi d'orientation des mobilités (LOM), puisqu'elle inclut des projets dont le financement n'était pas prévu dans cette trajectoire, ainsi que 500 millions d'euros du plan de relance et 150 millions d'euros pour anticiper les besoins complémentaires qui seront identifiés par le Conseil d'orientation des infrastructures (COI).

Pour autant, rien n'assure que la totalité de ces 3,8 milliards d'euros sera effectivement consommée. Nos collègues rapporteurs de la commission des finances ont très justement souligné dans leur rapport que le budget voté initialement était régulièrement sous-exécuté. En 2022 par exemple, 210 des 830 millions d'euros prévus au titre du plan de relance n'ont pas été versés. En outre, certaines ressources sont particulièrement incertaines, à l'image des amendes radar, dont l'Afitf figure au dernier rang de priorité sur la liste des bénéficiaires. Ce contexte rend donc impératif de sécuriser le modèle de financement de l'agence. Les travaux du Conseil d'orientation des infrastructures et la révision à venir de la trajectoire de la LOM pourraient utilement nourrir des propositions sur ce point, sans pour autant que cela exonère le Gouvernement et le Parlement de leurs responsabilités.

Un besoin de visibilité et de pérennité de ses ressources pour l'agence s'applique d'ailleurs en matière de gouvernance et la nomination d'un nouveau président du conseil d'administration, qui, je l'espère, assurera l'ensemble de son mandat, est une urgence.

En ce qui concerne le transport ferroviaire, si la trajectoire est positive, elle reste très insuffisante pour atteindre nos objectifs.

Comme de nombreux autres secteurs cette année, celui du transport ferroviaire doit faire face à d'importantes difficultés que le PLF pour 2023, dans la version qui nous a été transmise par l'Assemblée nationale, ne permet pas de compenser, loin de là.

Je vous propose d'abord d'évoquer la question des moyens consacrés au réseau ferroviaire, à la fois à son entretien et à sa modernisation.

Le nouveau contrat de performance entre SNCF Réseau et l'État, sur lequel nous avons eu l'occasion à plusieurs reprises d'alerter le Gouvernement pour pointer ses insuffisances prévoit d'allouer environ 2,9 milliards d'euros à la régénération du réseau ferroviaire. Il est important de souligner que cette enveloppe n'est pas financée, comme dans d'autres pays, par des crédits budgétaires à strictement parler, mais par les fonds propres de SNCF Réseau, et en grande majorité par le produit des péages ferroviaires - péages dont le niveau, je me dois de vous le rappeler, est le plus élevé d'Europe.

Tous les acteurs s'accordent à dire que ces 2,9 milliards d'euros sont insuffisants, ne serait-ce que pour enrayer la spirale de dégradation de notre réseau ferroviaire. D'après l'Autorité de régulation des transports (ART) en effet, l'état du réseau, et notamment du réseau structurant, est particulièrement préoccupant. La moyenne, sur l'ensemble du réseau, de l'indice de consistance de la voie (ICV), qui traduit l'âge moyen du réseau, s'élève à 45, alors même que l'ICV « cible » défini par SNCF Réseau comme permettant d'assurer la pérennité du patrimoine s'établit à 55.

Dans ces conditions, la trajectoire d'investissements prévue par le contrat de performance devrait conduire d'ici à 2040, comme nous l'avions déjà relevé lorsque nous avions conduit un cycle d'auditions sur le sujet il y a quelques mois, à un vieillissement du réseau et à une augmentation significative des ralentissements sur le réseau structurant classique.

La situation est d'autant plus alarmante que le contexte actuel d'augmentation des coûts de l'énergie et des matières premières conduit SNCF Réseau à intégrer un surcoût en année pleine de l'ordre de 500 millions d'euros. Faute de moyens supplémentaires, cette situation laisse à penser que le périmètre des investissements en matière de régénération et d'entretien du réseau pourrait être revu à la baisse.

Le ministre chargé des transports a évoqué devant nous une enveloppe de 150 millions d'euros de crédits supplémentaires pour l'an prochain, qui, d'après ce que nous en avons compris, pourraient être en majorité alloués au transport ferroviaire. Pour autant, 850 millions d'euros supplémentaires seraient nécessaires pour atteindre le milliard d'euros identifié par de nombreux acteurs du secteur , comme étant nécessaire pour maintenir le réseau en état. C'est d'ailleurs le diagnostic d'Hervé Maurey et Stéphane Sautarel dans leur rapport Situation de la SNCF et ses perspectives.

Compte tenu des contraintes budgétaires que vous connaissez, je vous proposerai un amendement visant à allouer non pas 850 millions d'euros, même si ce n'est pas l'envie qui m'en manquait, mais 150 millions d'euros supplémentaires à la régénération du réseau. Cette somme est plus cohérente avec l'état de nos finances publiques. Elle s'ajouterait aux 150 millions supplémentaires débloqués par l'État. Ces montants sont considérables, j'en ai bien conscience, mais comme pour tous les investissements d'infrastructures, ce que nous n'injectons pas dans le réseau aujourd'hui nous coûtera bien plus cher dans cinq ou dix ans. Je préfère que l'on investisse dans le réseau plutôt que l'on prenne des mesurettes à court terme, notamment en faveur des énergies fossiles, qui ne permettront pas d'assurer une transition que nous appelons de nos voeux. Au-delà du seul investissement, c'est toute la trajectoire définie par le contrat de performance qu'il faut revoir.

Cela m'amène à mon deuxième point : le PLF pour 2023, au même titre que le contrat de performance d'ailleurs, ne fixe aucun cap en matière de modernisation du réseau.

Dans les faits, cela se traduit par l'énorme retard accumulé par la France dans le déploiement de deux principaux projets de modernisation du réseau ferroviaire, que sont le système européen de gestion de trafic des trains (ERTMS - European Rail Traffic Management System ) et la Commande centralisée du réseau (CCR).

Concernant l'ERTMS, qui permet de réduire l'espacement entre deux trains, et donc d'augmenter la capacité des infrastructures, et d'améliorer l'interopérabilité du réseau à l'échelle européenne, il ne sera déployé qu'à un tiers de l'objectif fixé par le droit européen en 2030.

S'agissant de la CCR, qui consiste à regrouper l'essentiel des 2 200 postes d'aiguillage en une quinzaine de grands centres de gestion de la circulation ferroviaire, la situation est encore pire. D'après l'ART, l'achèvement du déploiement de la CCR en France dans les conditions actuelles n'apparaît pas possible avant 2070 ! Le retard pris par rapport aux autres États européens est considérable. À titre d'illustration, les réseaux suisse, allemand et italien sont aujourd'hui respectivement équipés à 100 %, 90 % et 70 %. Notre système ferroviaire pâtit de cette absence de vision stratégique pour notre réseau. Au-delà du seul réseau, c'est toute la filière industrielle ferroviaire française, pourtant l'une des meilleures au monde, qui s'en trouve menacée. Les retards pris dans le déploiement de la CCR et de l'ERTMS ne sont d'ailleurs pas les seuls « angles morts » du programme de modernisation. La Fédération des industries ferroviaires m'a alerté sur le besoin de soutenir les investissements pour assurer la cybersécurité du système ferroviaire, à la fois pour le transport de voyageurs et pour le transport de marchandises.

La situation des entreprises de transport ferroviaire mérite également toute notre attention. Le constat est, là encore, alarmant.

S'agissant du fret ferroviaire, le surcoût énergétique des entreprises ferroviaires est estimé à 193 millions, dont 172 millions d'euros liés à la seule augmentation des coûts de l'électricité et 21 millions liés à la hausse des coûts du carburant. Alors que le secteur du fret ferroviaire semblait enfin voir sa part modale augmenter, sous l'effet notamment, et il faut le saluer, du plan de relance - celui-ci a fonctionné, car les mesures ont émané du secteur et n'ont pas été dictées par le Gouvernement -, nous nous retrouvons dans une situation tout à fait invraisemblable dans laquelle une locomotive diesel devient presque plus compétitive qu'un train électrique.

S'agissant du transport de voyageurs, les opérateurs font là aussi face à d'importants surcoûts, les coûts de l'énergie représentant en moyenne 10 % des coûts d'exploitation. Pour ce qui concerne les transports organisés par la puissance publique, et compte tenu des mécanismes d'indexation sur les prix de l'énergie, ces surcoûts se répercutent sur les autorités organisatrices de la mobilité, qui se trouvent actuellement dans une situation catastrophique ; c'est ce que m'a confirmé la présidente d'Île-de-France Mobilités que j'ai entendue sur ce sujet. Les AOM doivent aujourd'hui faire un choix cornélien : diminuer l'offre de transport, en totale contradiction avec nos objectifs de report modal, ou augmenter le prix des billets, alors même que le pouvoir d'achat est déjà lourdement pénalisé. C'est ce qui nous a conduits la semaine dernière, avec mon collègue rapporteur Hervé Gillé, à vous présenter un amendement visant à réduire le taux de TVA, pour les deux années à venir, sur les transports du quotidien, routiers, guidés et ferroviaires. Je me réjouis donc que cet amendement ait été adopté avant-hier !

Enfin, avant d'évoquer le mode fluvial, je souhaiterais vous indiquer que je vous proposerai, encore en lien avec mon collègue Hervé Gillé, et comme l'an dernier, un amendement visant à permettre à l'ART de fonctionner dans de bonnes conditions, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. En effet, le régulateur a vu ses missions croître, les moyens humains ont suivi, mais pas le budget, l'obligeant à ponctionner son fonds de roulement. Il est important de donner à l'ART les moyens d'exercer en toute indépendance ses missions indispensables au bon déroulement de l'ouverture à la concurrence et de ne pas craindre d'aller au contentieux quand cela est nécessaire. Le transport fluvial est un secteur résilient, mais qui nécessite un soutien renforcé de la part de l'État dans le contexte actuel.

L'année 2022 semble marquer une reprise de fond pour l'activité du transport fluvial, malgré des résultats différenciés selon les secteurs.

S'agissant du fret, après un repli lié à la crise sanitaire en 2020, l'activité a renoué avec la croissance, malgré le recul de la production céréalière : le fret a augmenté de 12,5 % en tonnes-kilomètres en 2021, hors filière agricole. La reprise semble toutefois encore fragile, compte tenu de l'instabilité des marchés. Le fret a également souffert de la hausse du prix de l'énergie : selon Entreprises fluviales de France (E2F), depuis mars 2022, le surcoût lié au carburant pour les entreprises fluviales est de l'ordre de 100 millions d'euros soit 10 % du chiffre d'affaires du secteur. En dépit de ces difficultés, le transport fluvial a toutefois bénéficié de peu de soutien sectoriel...

S'agissant du tourisme fluvial, si l'activité a été plus dynamique en 2022 qu'en 2021, la fréquentation demeure inférieure de 70 % à celle constatée en 2019, qui constitue une année de référence. Certains secteurs sont particulièrement touchés, comme les croisières avec hébergement.

Un mot également sur la situation de Voies navigables de France (VNF) : le budget de l'établissement ayant été affecté par la baisse de l'activité fluviale puis par le contexte inflationniste, sa trajectoire de recettes risque de connaître un décalage l'année prochaine par rapport aux prévisions du contrat d'objectifs et de performance (COP), qui s'établissaient à 442,5 millions d'euros. Il en est de même de la trajectoire d'investissement de l'établissement dans le réseau fluvial, qui serait inférieure de plus de 60 millions d'euros aux prévisions du COP pour l'année prochaine, selon le cadrage budgétaire provisoire pour 2023 qui nous a été transmis. Peut-être sera-t-il donc nécessaire, à l'occasion de la révision du COP prévue l'année prochaine, de réajuster la trajectoire financière de l'établissement.

Surtout, comme l'année précédente, je m'inquiète de la trajectoire d'emplois de VNF : après une baisse de 30 équivalents temps plein (ETP) en 2022, de 99 ETP en 2021 et de 90 ETP en 2020, l'établissement s'apprête à subir une nouvelle baisse de 60 ETP en 2023. La modernisation des méthodes de travail de VNF devrait permettre, à horizon 2028, d'absorber ces baisses d'effectifs. Toutefois, la courbe de la trajectoire ne me semble pas soutenable, dans la mesure où les équipements qui permettront de réaliser des gains de productivité ne seront mis en service qu'en 2025-2026. VNF est obligé de recourir à des intérimaires qui coûtent plus cher. En attendant ce cap, il importe de garantir à cet opérateur des moyens humains suffisants, si on veut lui permettre de respecter les objectifs ambitieux qui lui sont fixés par le COP, notamment en matière de qualité de service et de fiabilité du réseau fluvial. Dans cette optique, je vous proposerai un amendement pour maintenir un plafond d'emplois stable pour VNF en 2023 par rapport à 2022.

Par ailleurs, dans un souci de soutenir la compétitivité des entreprises fluviales et le verdissement de leur flotte, je rappelle que je vous ai proposé, mercredi dernier, deux amendements : d'une part, un amendement visant à doubler le plafond d'exonération des plus-values sur la cession de bateaux de la navigation intérieure, qui n'a malheureusement pas passé le cap de la séance publique, et, d'autre part, un amendement visant à étaler sur quinze ans l'intégration fiscale de la revalorisation des actifs financiers des entreprises fluviales, afin de renforcer leur solidité financière. Ce dernier amendement a été adopté en séance publique, ce dont je me réjouis.

J'en viens enfin au transport maritime.

Il faut renforcer les moyens pour accompagner le secteur dans la transition énergétique et écologique. Comme les autres secteurs, le transport maritime a été marqué en 2022 par des fluctuations internationales liées notamment à la guerre en Ukraine. La hausse des prix de l'énergie a également pesé sur le secteur : le prix des combustibles marins a crû de 65 % entre janvier et juin 2022, avant un retour à son niveau de début d'année. Les segments du trafic maritime ont été affectés de manière très différenciée : si le trafic des conteneurs affiche toujours une dynamique positive, comme en 2021, l'année 2022 a été plus difficile pour le vrac liquide ainsi que pour les activités de croisières et les ferries.

Globalement, le PLF pour 2023 s'inscrit dans la continuité de la loi de finances initiale pour 2022 s'agissant du transport maritime avec un maintien des efforts en faveur de la compétitivité du secteur avec en particulier deux dispositifs phares. D'une part, le net wage , qui permet aux entreprises d'armement maritime effectuant du transport de passagers à l'international de bénéficier d'exonérations de cotisations patronales. Ce dispositif est applicable pour trois ans (2022-2024) et permettra aux compagnies de ferries concernées de bénéficier de plus de 12 millions d'euros d'exonérations en 2023. Et d'autre part, les exonérations de cotisations patronales applicables aux armateurs de la flotte de commerce, qui s'élèveront à 67 millions d'euros en 2023.

Je souhaite achever ce propos en évoquant les enjeux de verdissement du transport maritime. Le transport maritime représente près de 3 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales. Face à la demande croissante en transport maritime, ce taux pourrait atteindre 90 à 130 % de son niveau de 2008 d'ici à 2050 en l'absence de nouvelles politiques de réduction des émissions. Dans ce contexte, l'Organisation maritime internationale a fixé un objectif de neutralité carbone pour le transport maritime d'ici 2050.

Or, face à cet enjeu croissant, les efforts pour soutenir les armateurs dans la transition écologique apparaissent encore notoirement insuffisants dans notre pays.

Premièrement, le plan de relance avait prévu 175 millions d'euros pour le verdissement des ports sur deux ans, soit un montant très inférieur aux recommandations de la mission d'information sénatoriale sur la gouvernance et la performance des ports maritimes de 2020, qui proposait une trajectoire d'investissement de 5 milliards d'euros sur 10 ans, rien que pour développer les infrastructures de report modal. En outre, 25 millions d'euros étaient prévus pour le verdissement des navires, mais ces crédits sont uniquement destinés à la flotte de contrôle et de balisage de l'État et ne profitent donc pas aux armateurs.

Deuxièmement, les crédits du plan de relance sont désormais presque intégralement consommés et les acteurs sont donc dans l'incertitude sur la suite. Le Gouvernement vient d'annoncer début novembre un plan France Mer 2030, avec notamment la mise en place d'un fonds d'investissement dédié à l'innovation en matière de transition écologique des navires d'ici la fin du quinquennat qui serait doté de 300 millions d'euros, mais celui-ci ne semble pas pris en compte dans le présent projet de loi de finances.

Enfin, et en définitive, à l'heure actuelle, le seul outil à disposition des armateurs pour verdir leur flotte est le suramortissement vert, qui leur permet de bénéficier d'une déduction fiscale sur l'acquisition d'équipements de propulsion décarbonés. Or, comme vous le savez, ce dispositif a été faiblement utilisé jusqu'à aujourd'hui. Nous en avons revu les paramètres l'année dernière, dans le cadre de l'examen du PLF pour 2022, afin de le rendre plus accessible et plus opérationnel. Les armateurs ont toutefois besoin de temps pour se l'approprier, car le renouvellement de leur flotte dépend de nombreuses contraintes, telles que la disponibilité des financements, le calendrier des chantiers navals ou encore le coût des combustibles... Or, le dispositif n'est pour l'heure applicable que jusqu'en 2024.

Afin de donner plus de visibilité aux armateurs, je vous ai donc proposé la semaine dernière un amendement visant à en prolonger l'application jusqu'en 2026.

En outre, le suramortissement vert comporte encore des angles morts : les navires neufs ne peuvent par exemple pas bénéficier de la déduction fiscale portant sur les équipements véliques destinés à compléter la propulsion principale d'un navire ni de la déduction fiscale concernant l'acquisition d'équipements permettant l'alimentation électrique des navires durant les escales. Je vous ai donc proposé un amendement la semaine dernière visant à remédier à cette anomalie.

Ces deux amendements ont été adoptés en séance publique, ce dont nous pouvons nous féliciter.

Sous le bénéfice des observations que j'ai partagées avec vous et des amendements que je vous soumets, je vous propose d'émettre un avis de sagesse à l'adoption des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes.

M. Hervé Maurey , rapporteur spécial de la commission des finances sur les transports terrestres et maritimes . - Il n'est pas si fréquent que les commissions s'accordent entre elles au moment du budget, mais, en l'occurrence, nous souscrivons tout à fait aux propos de M. Tabarot.

Nous avons été stupéfaits en constatant la sous-exécution des crédits de l'Afitf, alors même que ces derniers ne sont pas suffisants... J'espère que le prochain président de l'agence sera vigilant sur ce point. Quant au contrat d'objectifs et de performance - ou plutôt, devrait-on dire, de contre-performance ! -, il n'est absolument pas satisfaisant : les crédits en faveur de la régénération du réseau sont trop faibles, tandis que la modernisation est totalement oubliée. Le ministre des transports a indiqué que l'objectif était de maintenir au niveau actuel l'état du réseau. C'est inquiétant et grave, car notre réseau est dans un mauvais état, et la situation continue de se dégrader : si pour l'instant ce sont principalement des lignes secondaires qui sont touchées, des lignes plus importantes pourraient être bientôt concernées ! Il est presque miraculeux que l'on n'ait pas connu un autre accident similaire à celui de Brétigny-sur-Orge.

Comme vous, j'aurais aimé déposer un amendement plus ambitieux, mais nous déposerons un amendement identique au vôtre. Nous devons unir nos forces pour augmenter les crédits en faveur du ferroviaire : nous ne pouvons pas attendre 2070 pour que le réseau soit modernisé !

Nous aurions aimé émettre un avis négatif sur ces crédits mais notre rapport s'inscrit dans la mission « Écologie, développement et mobilités durables », pour lequel l'avis de la commission était globalement favorable. Nous avons toutefois indiqué que nous étions tout à fait défavorables aux crédits tels qu'ils étaient proposés ; s'ils peuvent paraître satisfaisants au premier regard, ils ne préparent pas l'avenir.

M. Stéphane Sautarel , rapporteur spécial de la commission des finances sur les transports terrestres et maritimes . - Nous partageons l'analyse de M. Tabarot. Au-delà des constats, il convient de trouver des solutions. Nous devrions ainsi réfléchir à des montages financiers innovants pour faire face au mur d'investissements de 100 milliards d'euros qui se dresse devant nous pour financer la régénération et la modernisation du réseau. Un autre axe de réflexion concerne les péages ferroviaires, dont le niveau pèse sur tout le système et sur le prix du billet facturé à l'usager.

L'ART a fait la preuve de son utilité. Nous devons préserver son indépendance financière. Nous soutenons vos propositions.

VNF doit assurer la modernisation des écluses tout en gérant efficacement ses effectifs. C'est ce qui explique le recours à des CDD pendant une période temporaire. L'organisme a besoin de 40 postes de plus dans l'immédiat.

Pour conclure, le principal sujet d'inquiétude est bien l'état du réseau ferroviaire. Le budget à cet égard est en trompe-l'oeil : si le projet de loi de finances semble s'inscrire dans la trajectoire de la LOM, il n'est pas du tout à la hauteur des enjeux.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis . - Le niveau de nos péages ferroviaires est le plus élevé d'Europe ; cela pose des problèmes aux opérateurs et aux AOM.

L'Afitf n'est pas condamnée à voir ses crédits sous-consommés. Le passage de Jean Castex à la tête de l'agence pendant quelques semaines a montré que la situation pouvait évoluer. En quelques semaines, des situations se sont débloquées et de nombreuses conventions ont été signées. Était-ce lié au poids politique de Jean Castex, à sa connaissance des services de l'État, à ses liens avec les élus ? En tout cas, une agence qui gère autant de fonds ne peut fonctionner avec quelques ETP et quelques stagiaires et a besoin de plus de moyens. La question de sa gouvernance est cruciale si l'on veut que les crédits soient consommés.

La mission d'un rapporteur de crédits budgétaires n'est pas de lancer des alertes. Dénoncer les manques, c'est bien, mais il faut aussi faire des propositions pour agir. Pour cela, nous devons rassembler. J'aurais aimé déposer un amendement pour consacrer 850 millions supplémentaires à la régénération ferroviaire, mais je ne suis pas sûr que la commission des finances m'aurait suivi, non plus que le Gouvernement... Le rapport de la commission des finances de février courageux a dénoncé des problèmes réels. Mon but est désormais d'essayer de faire avancer les choses. Finalement, 150 millions, c'est mieux que rien, et cela permet d'aller de l'avant.

M. Jean-François Longeot , président . - C'est effectivement en se fixant des objectifs atteignables que l'on peut avancer. Encore une fois, la collaboration entre Hervé Gillé et Philippe Tabarot a été exemplaire à cet égard.

M. Rémy Pointereau . - VNF manque de moyens pour aider les collectivités qui investissent pour entretenir les canaux ou créer des ports de plaisance fluviale.

La sous-consommation des crédits de l'Afitf s'explique-t-elle par un renouvellement trop fréquent des présidents de l'agence ? Ou alors, faut-il pointer le retard des travaux de la SNCF ? Beaucoup de chantiers n'avancent pas. La SNCF ne fait pas assez appel à des sous-traitants. On souffre aussi d'une pénurie de main-d'oeuvre pour réaliser les travaux. La SNCF a une part de responsabilités. La ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, communément appelée POLT, est en travaux depuis longtemps et ceux-ci, qui devaient être terminés en 2024, ne le seront qu'en 2026 ou 2027 ; c'est autant de crédits qui ne sont pas consommés.

M. Jean-François Longeot , président . - Je n'ai pas compris pourquoi SNCF Réseau n'avait pas engagé davantage de travaux pendant la pandémie.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis . - Si l'on doit saluer l'effort réalisé par le Gouvernement pour augmenter les crédits d'investissement de VNF, on peut s'inquiéter d'une réduction trop rapide de la trajectoire d'emplois de l'organisme. VNF est obligé soit de recruter des intérimaires qui coûtent 30 % plus cher, soit de se défausser sur les collectivités territoriales. C'est pourquoi je propose d'augmenter le plafond d'emplois pour lui permettre de recruter des effectifs via des CDD.

Vos remarques sur l'Afitf sont justes. Je ne crois pas à l'homme providentiel. Je ne sais pas si un maintien de Jean Castex à la présidence de l'Afitf aurait permis de résoudre tous les problèmes, mais s'agissant des difficultés que vous évoquez concernant la réalisation des travaux, je constate que, durant sa présidence, tous les services de l'État concernés participaient aux conseils d'administration de l'agence, ce qui n'était pas le cas auparavant, tandis qu'il veillait personnellement à l'avancée des chantiers.

Nous devrons aussi veiller à ce que SNCF Réseau dispose des ressources humaines suffisantes pour mener à bien tous ses chantiers, quitte peut-être à avoir recours à des prestataires privés.

On peut aussi se demander, comme nos rapporteurs spéciaux l'ont fait, s'il n'aurait pas mieux fallu donner une vraie indépendance à SNCF Réseau à l'occasion de la réforme de la SNCF. Mais c'est un autre sujet...

M. Jacques Fernique . - Le président de SNCF Réseau estimait, lors de son audition au Sénat, que l'entreprise avait la capacité de réaliser des travaux de régénération à hauteur de 300 millions d'euros par an. Cela correspond exactement aux 150 millions promis par le Gouvernement et aux montants supplémentaires qui seraient octroyés si l'amendement de notre rapporteur pour avis était adopté. Mais pour régénérer et moderniser notre réseau, il faudrait faire bien plus !

Vous avez évoqué l'embellie qu'a représentée pour l'Afitf la brève présidence de M. Castex. Soit, mais je ne rappellerai qui était son président précédemment, et pour une période bien plus longue...

Une loi de programmation ferroviaire serait nécessaire. Cela permettrait de casser la logique infernale de la hausse des péages ferroviaires. Je rappelle que la majeure partie des moyens d'investissement de SNCF Réseau provient des péages et le COP prévoit qu'ils vont continuer à augmenter fortement.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis . - Nous avons reçu un pseudo-engagement du ministre de déposer un projet de loi de programmation du ferroviaire. J'espère que ce sera bien le cas. Mais avant d'envisager une telle loi, il faut résoudre la question de la sous-consommation des crédits, sinon un nouveau texte ne serait guère utile.

S'agissant des péages, la situation est complexe. La dynamique est catastrophique. On sait qu'une baisse des péages permet de relancer le secteur. On l'a constaté à l'étranger, ou encore avec le plan de relance du fret : celui-ci a fonctionné parce qu'il n'a pas été dicté par l'État et parce qu'il a procédé d'initiatives des acteurs de la filière ; les opérateurs ont proposé une baisse des péages et cela a fonctionné ! Les régions, en tant qu'AOM, investissent pour développer des dessertes nouvelles et maintenir des lignes existantes, mais s'il n'est pas possible de faire circuler davantage de trains parce que les péages sont trop élevés, ces efforts sont vains. Tout doit être coordonné. Il faut à la fois investir pour moderniser le réseau, permettre à SNCF Réseau de mener à bien les travaux nécessaires et régler la question de la hausse des péages, sinon on ne sortira pas de l'impasse.

M. Olivier Jacquin . - Nous parvenons souvent à avoir des vues concordantes sur le ferroviaire. Je salue à mon tour le travail conjoint entre Hervé Gillé et Philippe Tabarot. Les rapporteurs spéciaux ont bien analysé la situation catastrophique du secteur dans leur rapport paru en février dernier. Notre rapporteur a dit qu'il n'était pas un lanceur d'alerte, mais quelle est la portée d'un amendement de 150 millions d'euros ? Sans doute ne pouvez-vous aller plus loin en raison de votre ligne politique... J'interpelle aussi les rapporteurs spéciaux : nous sommes tous d'accord sur le diagnostic, il est temps maintenant d'agir, faute de quoi des lignes continueront à être fermées. Je plaide pour une loi de programmation du ferroviaire. Peut-être devrions-nous nous appuyer sur un travail transpartisan et consensuel, afin de définir un nouveau modèle économique du ferroviaire en France. En attendant, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain déposera des amendements plus ambitieux et plus proches des recommandations de l'ART.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis . - Ma position n'est pas dictée par les discussions au sein du groupe Les Républicains. Simplement, un amendement augmentant de 850 millions d'euros les crédits en faveur de la régénération du ferroviaire aurait certainement reçu un avis défavorable de la commission des finances et du Gouvernement, et n'aurait eu guère de chances d'être adopté. Ne vaut-il pas mieux parvenir à faire adopter un amendement de 150 millions ? Cette somme, ajoutée aux 150 millions du Gouvernement, permet d'atteindre le seuil de 300 millions, le montant de crédits qui peut être réellement consommé par SNCF Réseau dans l'immédiat. J'ai donc préféré faire preuve de pragmatisme. Mieux vaut 150 millions que rien. Ce n'est certes pas le grand-soir, mais cette proposition est réaliste, consensuelle et conforme à ce qui peut être fait.

M. Jean-François Longeot , président . - Nous passons aux amendements.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis . - L'amendement II-332 vise à allouer 2 millions d'euros supplémentaires à VNF pour 2023, afin de lui permettre de recruter 40 ETPT, sous la forme de contrats à durée déterminée. Il s'agit de privilégier des CDD plutôt que des CDI ou des intérimaires, afin d'accompagner l'organisme dans sa modernisation en attendant que des gains de productivité se fassent sentir et permettent à VNF d'absorber les baisses d'effectifs prévues.

L'amendement II-332 est adopté.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis . - L'amendement II-333 , que je propose avec Hervé Gillé, vise à allouer 4,6 millions d'euros supplémentaires à l'Autorité de régulation des transports. L'ART est aujourd'hui dans une situation critique ; son fonds de roulement ne lui permettant pas de faire face à un imprévu ou à un contentieux qu'elle perdrait. Cet amendement vise donc à lui donner les moyens d'exercer son rôle dans de bonnes conditions et de manière totalement indépendante.

L'amendement II-333 est adopté.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis . - L'amendement II-334 vise à affecter 150 millions d'euros supplémentaires à la régénération du réseau ferroviaire. Il ne s'agit pas de financer de grandes opérations de modernisation du réseau, mais bien de réaliser des investissements dans les territoires pour les désenclaver ou conserver des petites lignes.

L'amendement II-334 est adopté.

Article 33

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis . - L'amendement II-331 est complémentaire de l'amendement II-332 : pour permettre à VNF de recruter les 40 ETPT, il convient de modifier le plafond d'emplois de cet opérateur tel que prévu par le présent projet de loi de finances.

L'amendement II-331 est adopté.

Mme Marie-Claude Varaillas . - Le groupe communiste républicain citoyen et écologiste s'abstiendra sur la proposition du rapport sur les crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes.

M. Jacques Fernique . - Le Groupe Écologiste - Solidarité et Territoires s'abstiendra aussi.

La commission a émis un avis de sagesse sur l'adoption des crédits relatifs aux transports ferroviaires, fluviaux et maritimes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

Examen en commission
(Mercredi 23 novembre 2022)

Réunie le mercredi 23 novembre 2022, la commission a examiné le rapport pour avis sur les crédits « Transports routiers » des missions « Écologie, développement et mobilité durables » et « Plan de relance » du projet de loi de finances pour 2023.

M. Jean-François Longeot , président . - Nous passons maintenant à l'examen du rapport pour avis d'Hervé Gillé sur les crédits relatifs aux transports routiers prévus par le projet de loi de finances (PLF) pour 2023.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis sur les crédits relatifs aux transports routiers . - J'ai l'honneur de vous communiquer à mon tour les principaux axes de mon avis sur les crédits consacrés aux transports routiers dans le projet de loi de finances pour 2023. Je souhaiterais en détailler avec vous les cinq principaux volets.

Je commencerai par évoquer la question du financement de nos infrastructures de transport.

Comme vous l'a indiqué Philippe Tabarot, 3,8 milliards d'euros de recettes sont attendus pour 2023 par l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf). Il s'agit, comme cela a été indiqué, d'une somme considérable, et en augmentation par rapport à l'année précédente.

Cela étant dit, et eu égard au dernier budget rectificatif adopté par l'agence en 2022, on peut penser que malgré cette tendance positive, les consommations de crédits sont en réalité moins importantes que la prévision initiale.

En outre, l'Afitf pâtit, depuis plusieurs années désormais, d'un modèle de financement qui fait reposer des dépenses pérennes et certaines sur des recettes incertaines, pour ne pas dire parfois imprévisibles. Je pense bien sûr aux amendes radar mais, également, pendant la crise sanitaire, à la contribution du secteur aérien. S'y ajoute, depuis deux ans, le refus de la part des sociétés concessionnaires d'autoroutes de s'acquitter du versement de la contribution volontaire exceptionnelle à la suite de l'augmentation du taux de la taxe d'aménagement du territoire, ce qui représente un manque à gagner d'environ 60 millions d'euros par an. L'année 2022 a également été marquée par une sous-exécution de plus de 210 millions d'euros du plan de relance. Cette situation est préoccupante, d'autant plus dans un contexte de hausse des prix qui pourrait conduire à un renchérissement du coût des projets financés par l'Afitf. D'ores et déjà, l'agence nous a indiqué que le dernier budget rectificatif prenait en compte une hausse de 10 millions d'euros des coûts de régénération routière.

Dans ce contexte, il est essentiel de sécuriser les ressources de l'Afitf. C'est dans cet esprit que je vous avais présenté, la semaine dernière, un amendement visant à ce que, si certaines recettes de l'agence venaient à manquer, une part supplémentaire d'accise sur les énergies (ex-taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques ou TICPE) lui serait affectée.

J'en viens à présent au deuxième axe de mon avis budgétaire, relatif au financement des transports collectifs.

Là encore, je partage le constat formulé par Philippe Tabarot : les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) sont dans une situation intenable. D'une part, elles doivent à présent commencer à rembourser les avances qui leur avaient été accordées par l'État pendant la crise sanitaire. D'autre part, elles doivent faire face à d'importants surcoûts énergétiques du fait de la répercussion de la hausse des prix de l'énergie. Pour ne donner que quelques exemples, ce surcoût est estimé à Lyon à 14 millions d'euros pour 2022 et à 41 millions d'euros pour 2023 ; à Toulouse, il est de l'ordre de 5 à 6 millions d'euros pour 2022 et devrait atteindre 28 millions d'euros en 2023.

La situation est alarmante et les AOM n'ont d'autre choix que de réduire l'offre de transports, augmenter le tarif payé par l'usager ou encore renoncer - ou du moins reporter - certains de leurs investissements en matière de transports collectifs. Aucune de ces solutions n'est pleinement satisfaisante, d'autant plus compte tenu de nos objectifs de décarbonation du secteur des transports, qui supposent un report modal massif vers les transports collectifs.

C'est pourquoi, afin de donner davantage de marges de manoeuvre aux AOM, vous avez adopté la semaine dernière l'amendement que nous avons porté avec Philippe Tabarot, afin de diminuer le taux de TVA sur les mobilités du quotidien. Je me réjouis que cet amendement ait été adopté en séance publique.

En complément, je vous avais également proposé, la semaine dernière, d'adopter un amendement dans l'objectif de soutenir les communautés de communes s'étant récemment saisies de la compétence mobilité et n'ayant pas instauré de versement mobilité, par l'affectation d'une fraction d'accise sur les énergies à hauteur de 10 euros par habitant.

Enfin, avant d'en venir à l'état de nos routes, je souhaiterais partager avec vous l'un des constats importants de mon rapport : celui du manque de coordination entre les différentes parties prenantes concourant aux politiques de mobilité. Nous manquons de vrais schémas de mobilité partagés. Ce diagnostic m'a été rapporté par de nombreux acteurs que j'ai eu l'occasion d'auditionner. À titre d'exemple, Intercommunalités de France a soulevé la problématique des ruptures de continuité des itinéraires, notamment dans les espaces périurbains, qui résultent souvent d'un manque de communication et d'objectifs partagés. Un autre exemple concerne la faible association du tissu économique local à la définition des politiques de mobilité, alors même que les trajets domicile-travail représentent une part non négligeable des déplacements et que les entreprises concourent significativement au financement des transports collectifs.

Le troisième point de mon rapport porte sur l'entretien des infrastructures routières. Le PLF pour 2023 prévoit d'allouer, conformément à la trajectoire fixée par la loi d'orientation des mobilités, environ 930 millions d'euros de crédits de paiement à l'entretien du réseau routier national non concédé (RRNNC), soit une augmentation d'environ 60 millions d'euros par rapport à l'enveloppe prévue pour 2022.

Pour autant, tout laisse à croire que, compte tenu de l'augmentation des prix de l'énergie d'une part, et des prix des matières premières d'autre part, les objectifs de régénération du réseau national soient revus à la baisse. Pourtant, l'heure n'est pas à baisser la garde, à la veille des transferts de routes nationales aux métropoles, départements et régions volontaires en application de la loi du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

À cet égard, il faut rappeler que les demandes des collectivités représentent environ 4 000 kilomètres de linéaire, sur les 11 000 kilomètres de voies concernées. En outre, 16 départements ont assorti leur demande de transfert de conditions. Certaines d'entre elles portent notamment sur l'engagement de l'État sur des opérations d'investissements dans les prochains contrats de plan État-régions (CPER) - sur lesquels, comme vous le savez, on manque de visibilité.

Aussi, il est essentiel de maintenir un effort suffisant d'entretien des routes qui servent trop souvent, comme l'a très justement fait remarquer l'Assemblée des départements de France, de variable d'ajustement budgétaire. Dans ces conditions, je vous proposerai un amendement visant à abonder de 50 millions d'euros supplémentaires le budget consacré à l'entretien des routes de l'État.

Suivant la même logique, je vous proposerai un amendement visant à rattraper le retard en matière de financement des dépenses d'entretien des ouvrages d'art de l'État.

J'en viens à présent aux ouvrages d'art des collectivités territoriales. Créé plus d'un an après l'adoption, par notre commission, du rapport de 2019 Sécurité des ponts : éviter un drame de la mission présidée par Hervé Maurey, et dont les rapporteurs étaient Patrick Chaize et Michel Dagbert, le programme national Ponts a permis de déployer, dans le cadre du plan de relance, 40 millions d'euros sur trois ans en faveur du recensement et de l'évaluation des ouvrages d'art du bloc communal. Aux termes de cette première phase de diagnostic, il apparaît que le constat alarmant dressé en 2019 s'est confirmé, voire même aggravé. Ainsi, sur les 40 000 ponts des 11 540 communes bénéficiaires du programme, il apparaît que 23 % des ouvrages d'art du bloc communal présentent des défauts significatifs majeurs.

Le programme national Ponts a donc permis une première avancée nécessaire, mais l'effort doit être poursuivi. D'abord, compte tenu des crédits du programme restants, seuls 300 à 500 ouvrages devraient pouvoir bénéficier d'une évaluation approfondie de leur état. Je vous proposerai, avec mon collègue rapporteur Louis-Jean de Nicolaÿ, un amendement visant à permettre à l'ensemble des ponts dégradés, de bénéficier de cette évaluation. En outre, après ce travail de recensement et d'évaluation approfondie, se posera évidemment la question du financement des travaux de réparation des ouvrages qui peuvent atteindre des niveaux considérables. Sur ce point-là, nous avons pris un retard significatif par rapport à la recommandation formulée en 2019 de consacrer 130 millions d'euros par an aux ouvrages d'art des collectivités territoriales. Aussi, afin de permettre la remise en état d'environ 500 ponts parmi les ouvrages les plus dégradés identifiés dans le cadre du programme national Ponts, je vous proposerai, également avec mon collègue rapporteur Louis-Jean de Nicolaÿ, un amendement visant à créer un fonds d'aide à l'entretien et à la réparation des ouvrages d'art des collectivités territoriales.

Le quatrième volet de mon avis porte sur la décarbonation des véhicules, lourds comme légers, qui suppose de renforcer les dispositifs de soutien des ménages, mais aussi des collectivités territoriales.

Nous nous sommes fixé, à l'échelle nationale et à l'échelle européenne, des objectifs ambitieux de fin de vente des véhicules thermiques. Pour les atteindre, il est crucial d'anticiper les échéances et de soutenir les ménages et les professionnels dans le renouvellement de leurs véhicules pour les encourager à acquérir des véhicules moins polluants. C'est tout l'objectif des dispositifs de bonus automobile ou encore de prime à la conversion. Je profite d'évoquer ces deux dispositifs pour vous signaler que plusieurs des auditions que j'ai conduites ont mis en lumière le fait que certaines de ces aides ne sont pas suffisamment ciblées pour favoriser l'acquisition de véhicules moins lourds, qui sont aussi moins polluants. Nous sommes face à un paradoxe : nous confortons aujourd'hui les constructeurs automobiles qui produisent des véhicules de plus en plus lourds et ceux-ci déplorent la concurrence de la Chine, qui produit des véhicules de plus en plus légers. Autrement dit, les constructeurs chinois gagnent des parts de marché en France sur les véhicules plus légers, qui sont intéressants pour mener nos politiques de décarbonation du secteur automobile.

Cette année, le PLF pour 2023 prévoit la création d'un nouveau dispositif de leasing social , dont l'objectif est de permettre aux ménages les plus modestes de pouvoir louer des véhicules électriques à moins de 100 euros par mois, tout en favorisant la production de véhicules français. Pour autant, aucune des auditions que j'ai menées dans le cadre de cet avis budgétaire ne m'a permis de disposer d'informations plus détaillées sur les modalités de ce prêt : qui en bénéficiera ? Quels seront les véhicules concernés ? Quel sera le montant de l'aide ? Autant de questions qui restent en suspens. Au total, 1,3 milliard d'euros sont prévus pour le bonus automobile, la prime à la conversion et ce dispositif de leasing social. Je regrette fortement que le Gouvernement impose au Parlement de se prononcer sur une somme aussi substantielle pour un dispositif dont on ignore encore tout.

Cela étant dit, le renforcement du soutien à l'acquisition de véhicules propres est particulièrement prégnant dans le contexte du déploiement des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m). S'il faut saluer l'affectation de 200 millions d'euros du fonds d'accélération de la transition écologique dans les territoires à l'accompagnement du déploiement des ZFE-m, je regrette le retard du déploiement de la lecture automatisée des plaques d'immatriculation, sans quoi l'efficacité des ZFE-m restera limitée. En outre, je vous avais proposé la semaine dernière un amendement visant à allonger la durée de l'expérimentation d'un prêt à taux zéro pour l'acquisition d'un véhicule peu polluant dans et à proximité des ZFE-m. Je me réjouis que cet amendement ait été adopté en séance publique.

En parallèle de la décarbonation de la flotte automobile, la transition écologique du secteur du transport routier de marchandises représente un défi considérable ; 99 % du parc des 600 000 poids lourds fonctionnant au diesel et les alternatives étant particulièrement onéreuses.

Je salue l'adoption, en séance publique, des deux amendements que je vous avais proposés d'adopter sur le sujet, qui visaient respectivement à créer un prêt à taux zéro pour l'acquisition de poids lourds peu polluants et à élargir le bénéfice du suramortissement pour l'acquisition de poids lourds peu polluants aux véhicules rétrofités. Je vous proposerai, en complément, d'adopter un amendement visant à allouer davantage de moyens à l'appel à projets « Ecosystèmes des véhicules électriques », dont l'enveloppe a déjà été intégralement consommée.

Enfin, je souhaiterais évoquer la question du développement du vélo qui, ces dernières années, est loin d'être anecdotique. Le plan Vélo et mobilités actives, créé en 2018, a en effet permis de créer plusieurs milliers de kilomètres d'aménagements cyclables et le nouveau plan Vélo, annoncé en septembre dernier, poursuit cette dynamique positive. Pour autant, on observe aujourd'hui que le mouvement doit être encore amplifié, notamment pour faire face aux besoins en matière d'ingénierie territoriale. Je vous présenterai un amendement en ce sens.

Sous le bénéfice des observations que j'ai partagées avec vous et des amendements que je vous propose d'examiner, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports routiers.

M. Jean-François Longeot , président . - Nous passons aux amendements.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis . - L'amendement II-345 vise à rattraper le retard pris par l'État dans l'entretien de ses ouvrages d'art au regard de la trajectoire de 120 millions d'euros par an préconisée par le rapport de notre commission de 2019 sur la sécurité des ponts, et d'y consacrer 105,1 millions d'euros supplémentaires dès 2023.

L'amendement II-345 est adopté.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis . - L'amendement II-346 vise à consacrer 50 millions d'euros supplémentaires à l'entretien du réseau routier national non concédé, notamment dans la perspective des transferts de voirie aux collectivités territoriales volontaires en application de la loi « 3DS » relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale.

L'amendement II-346 est adopté.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis . - L'amendement II-347 vise à allouer 15 millions d'euros supplémentaires à l'appel d'offres « Écosystème des véhicules lourds électriques », mis en place en mars 2022 et doté de 65 millions d'euros. D'après la Fédération nationale des transports routiers, l'Ademe ne reçoit plus de dossier sur cet appel à projets, l'enveloppe ayant été intégralement consommée. Compte tenu des besoins en matière de décarbonation des flottes de poids lourds, cet amendement vise donc à amplifier le soutien à la transition écologique du secteur.

L'amendement II-347 est adopté.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis . - L'amendement II-348 vise à déployer 20 millions d'euros supplémentaires au bénéfice du développement de la part modale du vélo, et plus particulièrement pour faire face aux besoins en matière d'ingénierie territoriale.

L'amendement II-348 est adopté.

M. Philippe Tabarot , rapporteur pour avis . - Avant de conclure, je voulais remercier tous les membres de la commission qui ont fait front en séance ces derniers jours pour défendre nos positions : grâce à vous, nous avons pu faire adopter nos amendements. En tant qu'élus, nous ne devons pas seulement dénoncer ce qui ne va pas, mais aussi faire des propositions concrètes pour régler les problèmes.

M. Hervé Gillé , rapporteur pour avis . - Je m'associe à ces remerciements. Je tiens aussi à remercier Olivier Jacquin à qui je succède en ma qualité de rapporteur. Nos propositions s'inscrivent dans la continuité de ses travaux lorsqu'il était rapporteur pour avis sur les transports routiers pendant deux années.

La commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits relatifs aux transports routiers de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

Examen en commission
(Mercredi 23 novembre 2022)

Réunie le mercredi 23 novembre 2022, la commission a examiné la proposition de rectification de l'amendement n° II-116 de Mme Évelyne Perrot, rapporteure pour avis.

M. Jean-François Longeot , président . - Notre collègue Évelyne Perrot, rapporteure pour avis sur les crédits relatifs au transport aérien, souhaite nous soumettre une proposition qui concerne l'insonorisation des logements situés près des aéroports.

Vous avez approuvé, le 9 novembre dernier, à la fois les crédits de l'aérien pour 2023 et un amendement destiné à compenser les pertes de recettes de taxe qui financent les travaux pour améliorer la quiétude des riverains : notre amendement demandait 67 millions d'euros, ce qui correspond au chiffrage du Gouvernement.

Notre initiative s'est révélée opportune, car une semaine après, le 16 novembre, le Sénat a adopté une disposition similaire en projet de loi de finances rectificative : similaire, mais pas identique puisqu'il s'agit de 20 millions d'euros et pas de 67.

Un accord a été obtenu hier en CMP et les conclusions seront examinées en séance vendredi 25 novembre. Si le texte du Sénat est définitivement adopté, il serait logique de rectifier notre amendement en déduisant les 20 millions d'euros déjà votés de notre chiffre initial, qui, je le rappelle, résulte des calculs effectués par l'administration et figurent dans les réponses au questionnaire budgétaire.

Le plus simple serait de donner mandat à la rapporteure pour avis afin de procéder, en votre nom, à la rectification en cas de besoin. Approuvez-vous cette démarche de rectification graduée ?

Il en est ainsi décidé .

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Transports aériens
Personnes entendues par Mme Évelyne Perrot, rapporteure pour avis

Mardi 25 octobre 2022

- Fédération nationale de l'aviation marchande : M. Laurent TIMSIT , délégué général

- Union des aéroports français : M. Nicolas PAULISSEN , délégué général, Mme Mélanie SUESCUN , économiste statisticienne et M. Rafael COSTA , responsable développement durable

- Groupe Air France-KLM : Mme Marianne SIEG de MAINTENANT , directrice affaires internationales et institutionnelles et M. Aurélien GOMEZ , directeur affaires publiques

- Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires : MM. Gilles LEBLANC , président, et Philippe GABOULEAUD secrétaire général

Mercredi 26 octobre 2022

- Réseau action climat - France : M. Pierre LEFLAIVE , responsable Transports

Mercredi 2 novembre 2022

- Direction générale de l'aviation civile : MM. Marc BOREL , directeur général adjoint, directeur du transport aérien, Kévin GUITTET , sous-directeur des études, des statistiques et de la prospective à la direction du transport aérien, Frédéric GUIGNIER , directeur de la direction de la stratégie et des ressources, à la direction de la navigation aérienne et Édouard GAUCI , secrétaire général adjoint du secrétariat général

Transports ferroviaires, fluviaux et maritimes
Personnes entendues par M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis

Mardi 18 octobre 2022

- Autorité de régulation des transports : MM. Jordan CARTIER , secrétaire général et Nathanaël STREHAIANO , chargé de mission auprès du secrétaire général

- SNCF Réseau : M. Alain QUINET , directeur général exécutif Stratégie et affaires corporate, et Mme Laurence NION , conseillère parlementaire

Vendredi 21 octobre 2022

- Fédération des industries ferroviaires (FIF) : MM. Louis NÈGRE , président, Igor BILIMOFF , délégué général et Mme Capucine DU RIVAU , responsable affaires publiques

- Fédération nationale des associations d'usagers des transports (FNAUT) : MM. Bruno GAZEAU , président et Jean LENOIR , vice-président

Lundi 24 octobre 2022

- Île-de-France Mobilités : Mme Valérie PÉCRESSE , présidente du Conseil régional d'Île-de-France et présidente d'Île-de-France Mobilités

Mercredi 2 novembre 2022

- Table ronde opérateurs de fret

. Rail Logistic Europe (RLE) : M. Nicolas GINDT , directeur de la stratégie

. Europorte : M. Raphaël DOUTREBENTE , président-directeur général d'Europorte et président de la Commission Fret de l'association française du rail

. DB Cargo : M. Jean-Yves LHOMME , directeur des relations institutionnelles

. SNCF : Mme Laurence NION , conseillère parlementaire

Jeudi 3 novembre 2022

- Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) : Mme Katrin MOOSBRUGGER , secrétaire générale (AFITF) et M. Étienne DEREU , sous-directeur Budget et synthèse stratégique de la Direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM)

- Ministère de la transition écologique, de la cohésion des territoires - DGITM : M. Étienne DEREU , sous-directeur Budget et synthèse stratégique

- Table ronde ferroviaire

. Transdev : MM. Édouard HÉNAUT , directeur général France et Laurent MAZILLE , directeur des relations institutionnelles

. Railcoop : Mme Alexandra DEBAISIEUX , directrice générale déléguée

. SNCF : MM. Antoine DE ROCQUIGNY , secrétaire général, Bruno SOUCHON , directeur de cabinet adjoint du PDG et Mme Laurence NION , conseillère parlementaire

. Trenitalia France : M. Roberto RINAUDO , président-directeur général.

Mardi 8 novembre 2022

- Groupement des autorités responsables de transport (GART) : M. Guy LE BRAS , directeur général

Jeudi 10 novembre 2022

- Voies navigables de France : MM. Thierry GUIMBAUD , directeur général, Régis BAC , directeur juridique, économique et financier et Mme Muriel MOURNETAS , chargée des relations institutionnelles

- Armateurs de France : Mme Cécile RAFAT , responsable des affaires économiques, fiscales et statistiques et M. Amaury BOLVIN , co-fondateur et directeur Général de la compagnie maritime Zéphyr & Borée

Transports routiers
Personnes entendues par M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis

Mardi 25 octobre 2022

- Table ronde France Urbaine et Intercommunalités de France :

. France Urbaine : M. Étienne CHAUFFOUR , directeur Île-de-France, en charge de l'éducation, des mobilités et des solidarités et Mme Sarah BOU SADER , conseillère relations parlementaires

. Intercommunalités de France : M. Jean-Yves BRENIER , président de la communauté des communes des Balcons du Dauphiné, Mmes Carole ROPARS , responsable du pôle aménagement et environnement d'Intercommunalités de France et Montaine BLONSARD , responsable des relations avec le Parlement

- Plateforme automobile (PFA)/Mobilians : Mmes Louise D'HARCOURT , chargée des affaires parlementaires de Plateforme automobile , Dorothée DAYRAUT JULLIAN , directrice des affaires publiques et de la Communication et M. Frédéric GENEY , responsables relations extérieures et institutionnelles de Mobilians

- Personnalités qualifiées : MM. Frédéric HÉRAN , économiste-urbaniste, maître de conférences à l'Université de Lille 1 et Aurélien BIGO , chercheur sur la transition énergétique des transports

Jeudi 3 novembre 2022

- Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) : Mme Katrin MOOSBRUGGER , secrétaire générale et M. Étienne DEREU , sous-directeur Budget et synthèse stratégique de la Direction générale des infrastructures, des transports et des mobilités (DGITM)

- Ministère de la transition écologique, de la cohésion des territoires - DGITM : M. Étienne DEREU , sous-directeur Budget et synthèse stratégique

Vendredi 4 novembre 2022

- Table ronde Union des entreprises de transport et logistique de France (TLF), Fédération nationale des transports routiers (FNTR) et Organisation des transports routiers européens (OTRE) :

. FNTR : Mmes Florence BERTHELOT , déléguée générale et Pauline MARTIN , secrétaire générale FNTR Île-de-France

. OTRE : Mme Laure DUBOIS , secrétaire générale adjointe.

. TLF : Mme Olga ALEXANDROVA , directrice déléguée au pôle « Terrestre » et M. Jérôme DOUY , directeur délégué Multimodal, développement durable et logistique urbain

- Mouvement des entreprises de France (MEDEF) : M. Christophe BEAUX , directeur général, Mme Marie-Pascale ANTONI , directrice des affaires fiscales et M. Antoine PORTELLI , chargé de mission affaires publiques

- Régions de France : MM. Michel NEUGNOT , vice-président du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté et président délégué de la commission transport et mobilités de Régions de France-et David HERRGOTT , conseiller transports transport et mobilités de Régions de France.

Mardi 8 novembre 2022

- Assemblée des départements de France : M. François DUROVRAY , président.

- Groupement des autorités responsables de transport (GART) : M. Guy LE BRAS , directeur général

- Table ronde Fédération des usagers de la bicyclette (FUB) et Vélo et territoires :

. FUB : Mme Camille THOMÉ , directrice

. Vélo et territoires : M. Olivier SCHNEIDER , président

ANNEXE
LISTE DES AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION DE L'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

Amendements de Mme Évelyne Perrot, rapporteure pour avis sur les transports aériens

Amendement II-116

Amendements de M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis sur les transports ferroviaires, fluviaux et maritimes

Amendement I-948 , en commun avec M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis sur les transports routiers

Amendement I-947

Amendement I-951

Amendement I-952

Amendement I-949

Amendement I-950

Amendement II-334

Amendement II-333 , en commun avec M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis sur les transports routiers

Amendement II-332

Amendement II-331

Amendements de M. Hervé Gillé, rapporteur pour avis sur les transports routiers

Amendement I-948 , en commun avec M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis sur les transports ferroviaires, fluviaux et maritimes

Amendement I-953

Amendement I-956

Amendement I-954

Amendement I-955

Amendement I-957

Amendement II-362 , en commun avec M. Louis Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis sur la politique des territoires

Amendement II-361 , en commun avec M. Louis Jean de Nicolaÿ, rapporteur pour avis sur la politique des territoires

Amendement II-345

Amendement II-346

Amendement II-348

Amendement II-333 , en commun avec M. Philippe Tabarot, rapporteur pour avis sur les transports ferroviaires, fluviaux et maritimes

Amendement II-347

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2023.html


* 1 http://www.senat.fr/amendements/2022-2023/114/Amdt_II-116.html.

* 2 Voir le rapport d'information n° 576 (2021-2022) de M. Guillaume Chevrollier et Mme Denise Saint-Pé, Réformer le marché carbone pour bâtir une économie européenne souveraine, durable et juste, fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 15 mars 2022.

* 3 Voir la Résolution du Sénat n° 124 (2021-2022) sur le paquet « Ajustement à l'objectif 55 ».

* 4 Comme la prise en charge des avions ayant atterri pour leur permettre de couper les moteurs le plus tôt possible.

* 5 http://www.senat.fr/amendements/2022-2023/114/Amdt_II-116.html.

* 6 Un amendement n° 55 rect. bis a été adopté par le Sénat avec l'avis favorable de la commission des finances, le Gouvernement ayant émis un avis défavorable, à l'article 4 du projet de loi finances rectificative pour 2022 le 16 novembre dernier.

* 7 http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20221031/atdd.html#toc6.

Page mise à jour le

Partager cette page