B. UNE TRANSFORMATION DU MINISTÈRE QUI SE POURSUIT

Moins de trois ans après le lancement, au printemps 2023, de l'Agenda de la transformation, près de 85 % des recommandations ont été mises en oeuvre. Outre les nouvelles capacités en matière de veille, de riposte et de communication stratégique d'une part, et d'organisation d'événements internationaux, qui seront détaillées plus bas, on peut citer les éléments suivants.

1. La transformation numérique

Les dépenses de transformation numérique affichent 60,5 millions d'euros en AE et 60 millions en CP, en hausse de 2 millions d'euros par rapport à 2025, revenant ainsi sur les mesures d'économies proposées sur le PLF pour 2025 par la commission des finances du Sénat et votées en CMP. Les services de transport de données en France et à l'international représentent la part la plus importante des dépenses, de l'ordre de 14,5 millions d'euros, dont les coûts de maintien en condition ont augmenté avec l'ambition des investissements réalisés, de même que ceux liés aux licences des services d'hébergement applicatifs.

Ce volet est un axe primordial du plan de transformation ministériel, qui mise sur le déploiement de nouveaux équipements numériques à des fins de simplification - conditionnant la suppression ou la simplification de notes administratives récurrentes et de formulaires internes -, de sécurisation des communications - visioconférence, transmission des télégrammes diplomatiques -, d'efficacité et d'efficience - en matière de gestion des ressources humaines par exemple - ou encore d'innovation - la direction générale de la modernisation recense à ce jour six cas d'usage de l'intelligence artificielle.

2. La politique immobilière

Comme les crédits du numérique, les dépenses immobilières ont été budgétées à environ 116 millions d'euros, en hausse d'environ 12 %, soit au niveau antérieur à l'adoption de l'amendement de la commission des finances du Sénat. Une telle dynamique s'explique par le fait que les dépenses en matière immobilière sont soumises à une inflation mondiale, et par le fait qu'un moindre effort, sur ce plan comme sur le plan numérique, creuserait rapidement une dette difficile à rembourser.

Le secours du CAS 723, qui a longtemps permis de financer les dépenses immobilières par le produit, par nature exceptionnel, des cessions de biens, devient toujours plus marginal. Sur la période 2007-2023, le MEAE a cédé 224 emprises à l'étranger pour un montant de près de 875 millions d'euros, soit un cinquième de la valeur du parc immobilier à l'étranger. En France, le MEAE a également cédé 10 immeubles entre 2007 et 2014, pour un produit brut de cessions supérieur à 650 millions d'euros. En 2024, dix ventes ont été réalisées pour un total de 20,6 millions d'euros. En 2025, sept ventes ont été réalisées, pour un montant total de 9,6 millions d'euros, parmi lesquelles les anciens locaux de l'institut français à Valence, l'ancienne ambassade à Libreville, ou les logements de l'attaché de défense à Brasilia et aux Comores.

Les droits de tirage disponibles sur le programme 723, qui s'élevaient à 120 millions d'euros au 1er janvier 2025, sont principalement fléchés vers le projet d'extension-réhabilitation de l'aile des archives du Quai d'Orsay, ou projet ERA, évalué à 97,3 millions d'euros. À terme, le nombre de sites en Ile-de-France devrait être réduit de 7 à 3. Des besoins complémentaires sont par ailleurs identifiés pour les autres bâtiments historiques du site du Quai d'Orsay comme la rénovation des toitures, façades et menuiseries et de certaines installations techniques pour un montant total de 37 M€. À l'étranger, les principaux projets en cours en 2025 bénéficiant du CAS sont la construction d'une nouvelle ambassade et résidence à Doha, pour 15 M€, la réhabilitation de la maison de France à Rio de Janeiro pour 8,6 millions d'euros, et la construction de logements à Bamako, pour 3 millions d'euros.

Les dépenses d'entretien lourd en France financées sur des crédits budgétaires concerneront prioritairement la rénovation des sous-sols du Quai d'Orsay comprenant les cuisines de l'hôtel des ministres, l'installation d'un transformateur électrique et d'un groupe électrogène, et la mise en conformité incendie. Les travaux nécessaires sur le site de Nantes, pourtant vieillissant, n'en sont qu'au stade de la programmation. Auditionnée devant la commission, la secrétaire générale du ministère a reconnu que « la rédaction de ce document est compliquée, les bâtiments se dégradant plus vite que nous ne l'avions anticipé ».

Dans un rapport de mai 2025 sur la gestion par le MEAE de son parc immobilier3(*), la Cour des comptes avait formulé plusieurs recommandations. Pour remédier à l'imparfaite connaissance par le ministère de son parc, les travaux de fiabilisation des outils informatiques se poursuivent, la solution logicielle Antilope, testée à l'été 2025 sur une zone géographique déterminée, ayant été déployée à la fin octobre 2025, mais le « nouveau socle de gestion », grand projet de l'État en interministériel, pourrait toutefois la remplacer en 2026. Afin de mieux coordonner la programmation entre la direction des immeubles et la direction de la sécurité diplomatique, des comités directeurs immobiliers mensuels ont été mis en place depuis 2025. L'amélioration de la performance de la politique immobilière et l'attention au respect des bonnes pratiques de taux d'occupation poussent au regroupement et à la relocalisation - ainsi à Rabat, Manille ou Vienne. La direction des immeubles et de la logistique, enfin, a revu son organisation interne afin de monter en compétence technique.

3. Ressources humaines et action sociale

En matière de gestion des ressources humaines, l'agenda de la transformation s'est traduit par la refonte de 70 % des concours et la diversification des recrutements, le lancement d'une plateforme pour le recrutement des agents contractuels - un tiers des effectifs du ministère - , l'obtention de labels Afnor égalité et diversité, la rénovation des pratiques managériales et un meilleur accompagnement des cadres, la féminisation des fonctions d'encadrement, ou encore la création d'une cellule dédiée à l'accompagnement des mobilités.

Sur le plan de l'action sociale, le ministère s'emploie à augmenter le nombre de places en crèches en y consacrant 0,6 million d'euros par an depuis l'an dernier, a mis en place une plateforme de consultations de psychologues en quatre langues destinée aux agents et à leurs conjoints, investit dans l'amélioration des services de restauration collective en déléguant à un prestataire le marché du site nantais accueillant 1 200 agents, et poursuit l'accompagnement des agents en matière de logement.

4. L'Académie diplomatique et consulaire

L'Académie diplomatique et consulaire (ADC) est dotée en 2026 d'un budget, stable, de 5,4 millions d'euros. Organe de formation initiale et continue des agents du ministère créée en 2024, elle vise plus largement à diffuser des pratiques et une culture commune en interministériel et à promouvoir des méthodes pédagogiques innovantes.

Ses textes fondateurs lui donnant pour mission de concourir à la formation de personnes extérieures concernées par les questions relevant de la compétence du MEAE, l'ADC participe aussi de la politique d'influence française à l'étranger4(*). À ce jour, cinq séminaires bilatéraux - franco-polonais, franco-britannique, franco-allemand, franco-italien et le volet français du programme diplomatique européen - ont été organisés en France, un partenariat a été noué avec l'INSP pour proposer des programmes courts à des fonctionnaires étrangers, de même qu'avec le service européen d'action extérieure (SEAE). Sont à l'étude un séminaire pour diplomates des pays de l'ASEAN, des masterclass ouvertes aux diplomates étrangers en poste à Paris sur les thèmes des prochains sommets accueillis par la France, ou encore la poursuite des partenariats avec d'autres acteurs académiques - IHEDN, académie de l'OMS, etc.

L'ADC développe en outre le dialogue entre les mondes de la diplomatie et de la recherche - un cycle annuel de séminaires fait appel aux membres des institutions académiques et think tanks, elle remet un « prix de thèse de l'ADC » et un « prix du mémoire sur la Chine contemporaine » - mais aussi avec la société civile, comme en témoigne le succès de la « Fabrique de la diplomatie », qui a attiré 20 000 visiteurs en septembre 2025, ou des Académies diplomatiques d'été depuis 2021.

L'ADC a encore vocation à devenir l'autorité de gestion et d'encadrement des futurs réservistes de la réserve diplomatique citoyenne. Volontaires pour mieux faire connaître la politique étrangère de la France, ses enjeux et les conséquences sur la vie des Français, pris dans un vivier probablement délimité par le personnel en activité ou retraité du MEAE et de ses opérateurs, les réservistes devraient se voir confier des missions d'expertise, de plaidoyer, de soutien dans l'organisation d'événements internationaux, de mentorat ou encore de soutien à la stratégie de lutte informationnelle. Un véhicule législatif spécifique précisé par un décret en Conseil d'État reste toutefois nécessaire pour adapter le régime prévu par la loi de 20175(*), et notamment pour désigner l'ADC comme autorité de gestion des réservistes. Le dispositif est cependant déjà en phase de préfiguration depuis septembre 2024, et un premier contingent composé d'agents liés au MEAE a été constitué depuis le 3 juillet 2025. L'ADC a déjà reçu 700 candidatures.


* 3 Cour des comptes, La gestion par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères de son immobilier à l'étranger, mai 2025.

* 4 Arrêté du 28 mai 2024 portant création d'un service à compétence nationale dénommé « Académie diplomatique et consulaire.

* 5 LOI n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, dont l'article 1er crée les réserves thématique de la réserve civique.

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