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N° 141 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026 |
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Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025 |
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AVIS PRÉSENTÉ au nom de la commission des affaires
étrangères, de la défense |
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TOME II ACTION EXTÉRIEURE DE L'ÉTAT Diplomatie culturelle et d'influence (Programme 185) |
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Par Mme Catherine DUMAS et M. Didier MARIE, Sénatrice et Sénateur |
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(1) Cette commission est composée de : M. Cédric Perrin, président ; MM. Pascal Allizard, Olivier Cadic, Mmes Hélène Conway-Mouret, Catherine Dumas, Michelle Gréaume, MM. André Guiol, Jean-Baptiste Lemoyne, Claude Malhuret, Akli Mellouli, Philippe Paul, Rachid Temal, vice-présidents ; M. François Bonneau, Mme Vivette Lopez, MM. Hugues Saury, Jean Marc Vayssouze-Faure, secrétaires ; M. Étienne Blanc, Mme Valérie Boyer, MM. François-Noël Buffet, Christian Cambon, Mme Marie-Arlette Carlotti, MM. Alain Cazabonne, Olivier Cigolotti, Édouard Courtial, Jérôme Darras, Mme Nicole Duranton, MM. Philippe Folliot, Guillaume Gontard, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, Ludovic Haye, Loïc Hervé, Alain Houpert, Patrice Joly, Mmes Gisèle Jourda, Mireille Jouve, MM. Alain Joyandet, Roger Karoutchi, Ronan Le Gleut, Didier Marie, Pierre Médevielle, Thierry Meignen, Jean-Jacques Panunzi, Mme Évelyne Perrot, MM. Stéphane Ravier, Jean Luc Ruelle, Bruno Sido, Mickaël Vallet, Robert Wienie Xowie. |
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Voir les numéros : Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180 Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026) |
L'ESSENTIEL
Le projet de loi de finances pour 2026 inscrit une baisse significative des crédits du programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence », lesquels passeront de 651,7 M€ inscrits en loi de finances initiale pour 2025 à 605,9 M€ en 2026 (- 7 %).
L'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), principal opérateur du programme, subira une nouvelle baisse de sa subvention pour charges de service public (- 25 M€). L'effet de ciseaux auquel l'Agence sera confrontée en 2026 avec, d'une part, la hausse de ses charges liées en particulier à l'augmentation du taux employeur de la pension civile des fonctionnaires de quatre points prévue en 2026 et au surcoût induit par la réforme du statut des personnels détachés et, d'autre part, la réduction de ses ressources, pèsera sur sa situation financière et sa capacité d'investissement. Face à la dégradation attendue de sa trésorerie en 2026, l'opérateur envisage d'accroître la participation financière complémentaire versée par les établissements en gestion directe et les établissements conventionnés, et d'accélérer le recouvrement de ses créances. À plus long terme, la soutenabilité financière de l'opérateur nécessitera une réforme de son modèle économique, qui pourrait passer par une augmentation des contributions demandées aux établissements. Les rapporteurs regrettent que la réforme du financement de l'AEFE, dont la nécessité est connue de longue date, intervienne dans l'urgence et sur fond de contrainte budgétaire, conduisant à privilégier des mesures qui se traduiront par un accroissement du coût pour les familles et pourraient avoir des conséquences sur le statut des établissements et des personnels.
Préservée en loi de finances initiale pour 2025, la politique d'accueil des étudiants étrangers sera fortement mise à contribution en 2026, avec une enveloppe consacrée aux bourses en diminution de près de 20 %. Cette coupe budgétaire nuira à l'attractivité de la France dans un contexte de très forte concurrence internationale.
Enfin, l'Institut français verra ses moyens une nouvelle fois réduits (- 1 M€ après une baisse de 1,7 M€ en 2025), entraînant une nouvelle revue de ses actions et de ses dépenses.
Au total, les mesures prévues dans le présent projet de loi de finances fragiliseront notre « soft power » à un moment où les luttes d'influence n'ont jamais été aussi fortes.
Si les crédits du programme devaient être adoptés en l'état, les rapporteurs appellent le Gouvernement à en assurer une exécution « à l'euro près » et, plus largement, à garantir aux services du ministère une meilleure visibilité de gestion, condition indispensable pour une utilisation efficace des ressources.
I. UN BUDGET EN BAISSE SENSIBLE EN 2026
Le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 prévoit une baisse significative des crédits du programme 185, qui passeront de 651,7 M€ à 605,9 M€ en autorisations d'engagement (AE) comme en crédits de paiement (CP), soit une diminution de 45,8 M€ (- 7 %).
Cette baisse intervient alors que l'exercice 2025, déjà affecté par une diminution de crédits de 72 M€, a été marqué par une mesure d'annulation1(*) (18 M€ correspondant au montant de la réserve légale) et deux mesures de surgel (pour un montant cumulé de 13 M€). Afin d'y faire face, il a été enjoint aux postes de suspendre tout engagement budgétaire de bourses dont l'attribution n'avait pas fait l'objet d'une notification écrite aux bénéficiaires avant le 12 août 2025.
Cette décision a conduit à une réduction de plus d'un million d'euros de crédits de bourses, affectant principalement les mobilités de courte durée (séjours scientifiques de haut niveau, formations en français langue étrangère, résidences d'artistes, etc.).
Or, certains de ces programmes peuvent faire l'objet de cofinancements par les partenaires étrangers de la France. De telles décisions, même temporaires, peuvent fragiliser la crédibilité progressivement acquise par notre pays dans le domaine de la coopération culturelle et scientifique.
Aussi, les rapporteurs appellent-ils à une exécution à l'euro près des crédits du programme 185 pour l'exercice 2026 et, plus largement, à une meilleure visibilité en gestion afin de permettre aux postes diplomatiques de planifier et de respecter leurs engagements vis à vis de nos partenaires.
Les rapporteurs appellent à une exécution à l'euro près des crédits du programme 185 pour l'exercice 2026 et, plus largement, à une meilleure visibilité en gestion afin de permettre aux postes diplomatiques de planifier et de respecter leurs engagements vis-à-vis de nos partenaires.
Par ailleurs, le PAP pour 2026 introduit une révision substantielle de la maquette budgétaire du programme avec la création de quatre nouvelles actions :
- l'action 03 « Opérateurs » ;
- l'action 08 « Appui au réseau culturel et de coopération » ;
- l'action 09 « Mobilité étudiante » ;
- et l'action 11 « Crédits centraux ».
Si cette évolution est justifiée dans le PAP par la « volonté d'apporter une meilleure lisibilité dans l'allocation des crédits entre l'administration centrale du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et le réseau culturel et de coopération », ces modifications, qui interviennent dans un contexte de baisse importante des crédits du programme depuis 2025, ne peuvent qu'interroger.
En outre, ces changements de périmètre nuisent à la comparabilité des données entre exercices, les contours des dispositifs devant désormais être reconstitués pour permettre une lecture cohérente de l'évolution des moyens alloués.
Évolution des crédits du programme 185 selon la nouvelle nomenclature budgétaire
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8 |
Réseau culturel et de coopération |
108 850 284 |
103 445 956 |
- 5 404 328 |
-5% |
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9 |
Bourses de mobilité |
70 072 657 |
56 272 657 |
-13 800 000 |
-20% |
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10 |
Opérateurs |
446 542 722 |
420 542 722 |
- 26 000 000 |
-6% |
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11 |
Crédits centraux |
26 279 070 |
25 679 070 |
- 600 000 |
-2% |
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TOTAL |
651 744 733 |
605 940 405 |
- 45 804 328 |
-7% |
Source : MEAE, réponse au questionnaire des rapporteurs
Les rapporteurs demandent par conséquent que la maquette budgétaire du programme 185 soit stabilisée à compter de l'exercice 2027.
* 1 Dans le cadre du décret n° 2025-374 du 25 avril 2025 portant annulation de crédits.
