IV. UN REDIMENSIONNEMENT DU PASS CULTURE QUI NE PROFITE PAS À UNE VÉRITABLE POLITIQUE PUBLIQUE D'ÉDUCATION ARTISTIQUE ET CULTURELLE

A. LA RÉFORME DE LA PART INDIVIDUELLE DU PASS CULTURE : UNE ULTIME TENTATIVE DE SAUVETAGE DU DISPOSITIF AVANT SA DISPARITION ?

Après avoir fait l'objet d'intenses débats lors de l'examen du PLF pour 2025, la réforme de la part individuelle du pass Culture est entrée en vigueur par voie réglementaire3(*) au 1er mars 2025. Souhaitée par la ministre de la Culture, cette réforme entend favoriser la diversité des pratiques culturelles des jeunes et améliorer l'accès à l'offre culturelle pour ceux qui en sont le plus éloignés.

Alors qu'un consensus avait émergé sur la nécessité de procéder à un lissage des montants attribués à chaque tranche d'âge entre 15 et 18 ans, le ministère a finalement fait le choix de concentrer le dispositif sur les jeunes âgés de 17 ans et plus4(*). Les jeunes de 15-16 ans en sont désormais exclus. Une bonification de 50 euros à 18 ans a par ailleurs été créée pour les jeunes en situation de handicap et ceux dont les parents ont des revenus modestes. Les modalités financières et techniques de ce bonus, relativement complexes, sont toujours en cours d'élaboration. Le ministère indique que ce chantier devrait aboutir courant 2026 ; les jeunes dont les droits à bonification ont déjà été ouverts seront crédités rétrospectivement.

Sur le plan budgétaire, la part individuelle du pass Culture, financée par le programme 361 dont elle représente 25 % des crédits5(*), a vu sa voilure fortement réduite, passant de 210,5 M€ dans le PLF pour 2025 à 171 M€ en LFI pour 2025. Le PLF pour 2026 poursuit cette trajectoire baissière, avec une dotation fixée à 127,5 M en AE et en CP, soit une nouvelle économie de 43,5 M€.

- La rapporteure s'interroge sur la pertinence du recentrage du dispositif sur les jeunes de 17 ans et plus. Selon la communication du ministère, celui-ci est justifié par « un parcours de découverte culturelle plus clair et progressif » : le jeune collégien, puis lycéen bénéficie d'activités d'EAC dans le cadre de la part collective ; devenu jeune adulte, il reçoit la part individuelle qui lui permet de s'autonomiser dans ses pratiques culturelles. Cette logique ne fonctionne que si la part collective joue pleinement son rôle. Or, son gel en début d'année a brutalement mis à l'arrêt de nombreuses actions dans les établissements scolaires. Ce contexte n'est évidemment pas propice à un travail conjoint du ministère de la Culture et du ministère de l'Éducation nationale sur une meilleure articulation entre part collective et part individuelle, que demande la commission depuis plusieurs années.

- Alors que la suppression de la part individuelle est toujours en débat, la rapporteure plaide pour une certaine stabilité vis-à-vis d'un public jeune, qui vient tout juste d'intégrer les nouvelles modalités du dispositif. Elle doute en outre que, dans le contexte budgétaire actuel, la place que laisserait vacante la part individuelle soit réinvestie par les politiques d'EAC de l'État et des collectivités territoriales. Elle alerte enfin sur le fait qu'une éventuelle extinction du dispositif devra s'accompagner du maintien de financements pendant plusieurs années, afin de couvrir les engagements déjà pris. Rien qu'au 1er janvier 2026, sans nouveau bénéficiaire, le besoin de financement est chiffré, en hypothèse basse, entre 115 et 133 millions d'euros.

La SAS pass Culture, nouvel opérateur de l'État

Demandée depuis plusieurs années par le Parlement et recommandée par de nombreux rapports publics à des fins de transparence et de contrôle budgétaires, la transformation de la SAS pass Culture en opérateur de l'État interviendra au 1er janvier 2026. Désormais inscrite à l'annexe budgétaire du PLF concernant les opérateurs, la SAS pass Culture voit son plafond d'emplois fixé à 176 ETP pour 2026. Son statut juridique (établissement industriel et commercial ou établissement administratif) n'est pas encore fixé, le ministère attendant les résultats d'une étude préalable. Son contrat d'objectifs, arrivé à échéance en 2025, est actuellement en cours de réécriture pour la période 2026-2028.


* 3 Décret n° 2025-195 du 27 février 2025 relatif au pass Culture.

* 4 Le montant de 150 euros à 18 ans est mobilisable jusqu'à 21 ans.

* 5 Pour rappel, la part collectivité du pass Culture est financée par le programme 230 « Vie de l'élève » de la mission « Enseignement scolaire ».

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