N° 144

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2025-2026

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2025

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport (1) sur le projet de loi de finances, considéré comme rejeté
par l'Assemblée nationale, pour
2026,

TOME V

Fascicule 1

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Recherche

Par Mme Alexandra BORCHIO FONTIMP,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : M. Laurent Lafon, président ; MM. Max Brisson, Michel Savin, Jacques Grosperrin, Mme Marie-Pierre Monier, M. Yan Chantrel, Mme Samantha Cazebonne, M. Jérémy Bacchi, Mmes Laure Darcos, Monique de Marco, M. Bernard Fialaire, vice-présidents ; Mmes Anne Ventalon, Else Joseph, Colombe Brossel, M. Pierre-Antoine Levi, secrétaires ; Mmes Marie-Jeanne Bellamy, Catherine Belrhiti, Annick Billon, Alexandra Borchio Fontimp, M. Christian Bruyen, Mmes Evelyne Corbière Naminzo, Karine Daniel, Nathalie Delattre, Sabine Drexler, M. Aymeric Durox, Mmes Agnès Evren, Laurence Garnier, Béatrice Gosselin, MM. Jean Hingray, Claude Kern, Mikaele Kulimoetoke, Mme Sonia de La Provôté, MM. Ahmed Laouedj, Michel Laugier, Jean-Jacques Lozach, Mmes Paulette Matray, Catherine Morin-Desailly, M. Georges Naturel, Mme Mathilde Ollivier, MM. Pierre Ouzoulias, François Patriat, Jean-Gérard Paumier, Stéphane Piednoir, Bruno Retailleau, Mme Sylvie Robert, MM. David Ros, Pierre-Jean Verzelen, Cédric Vial, Adel Ziane.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (17ème législ.) : 1906, 1990, 1996, 2006, 2043, 2047, 2048, 2060, 2063 et T.A. 180

Sénat : 138 et 139 à 145 (2025-2026)

AVANT-PROPOS

Dans le contexte de maîtrise des finances publiques, le projet de loi de finances (PLF) 2026 ne concrétise, sur le périmètre relevant de la commission, qu'environ un quart de la sixième « marche » de la loi de programmation de la recherche (LPR). Les moyens nouveaux ouverts en son application sont principalement consacrés à la poursuite de la revalorisation des métiers de la recherche, mais sur un périmètre de mesures très restreint.

La commission déplore le non-respect, pour la deuxième année consécutive et dans une proportion plus marquée, de la trajectoire budgétaire fixée par la LPR. Ce nouveau coup de frein risque de casser la dynamique de réinvestissement qu'elle avait réussi à enclencher entre 2021 et 2024.

L'Agence nationale de la recherche (ANR), dont la commission avait veillé à accroître sensiblement les moyens sur les premières années de la programmation, est aujourd'hui financièrement fragilisée. D'une part, le niveau insuffisant de ses crédits de paiement ne lui permet pas de couvrir les engagements pluriannuels d'ores et déjà souscrits auprès des porteurs de projets. D'autre part, la révision à la baisse de la trajectoire de ses autorisations d'engagements marque un recul par rapport à l'ambition initiale. Sans doute temporairement acceptable dans les proportions proposées par ce projet de budget, elle pourrait, si elle devait être aggravée, faire repasser le taux de succès en dessous des standards internationaux.

La commission estime qu'une revoyure en bonne et due forme de la LPR, associant le Parlement, aurait permis de réfléchir collectivement aux moyens que l'État, contraint à des arbitrages budgétaires, est prêt à consacrer à un secteur crucial pour l'avenir du pays et nécessitant un investissement sur le temps long. Avec le budget proposé, l'effort national de recherche restera en deçà de l'objectif d'au moins 3 % du PIB fixé par la LPR. Des coupes supplémentaires le feraient dangereusement et durablement régresser.

Suivant l'avis de sa rapporteure, la commission de la culture, de l'éducation, de la communication et du sport a émis un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la recherche au sein de la mission « Recherche et enseignement supérieur » du PLF 2026.

I. LA REVOYURE DE LA LOI DE PROGRAMMATION DE LA RECHERCHE AU PRINTEMPS 2025 : UN RENDEZ-VOUS MANQUÉ

A. UN ÉVÈNEMENT « INTERNE » AUQUEL LE PARLEMENT N'A PAS ÉTÉ ASSOCIÉ

L'article 3 de la loi de programmation de la recherche (LPR) dispose que : « La présente programmation fait l'objet d'actualisations, au moins tous les trois ans. Ces actualisations permettent de vérifier la bonne adéquation entre les objectifs fixés dans la présente loi, les réalisations et les moyens consacrés, notamment financiers. »

Alors que cette actualisation, plus couramment appelée « revoyure », aurait dû intervenir en 2023, elle n'a pas été menée par la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche de l'époque, Sylvie Retailleau. Bien que son successeur, Patrick Hetzel, arrivé en poste en septembre 2024, ait fait part de son intention d'activer la revoyure, il n'en a pas eu le temps. C'est finalement le troisième ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche en trois ans, Philippe Baptiste, arrivé en fonction en janvier 2025, qui s'est emparé de ce chantier, rendu selon lui « plus urgent » par les circonstances internationales, marquées par les attaques contre la science aux États-Unis. En mars, il a annoncé son intention de décliner le travail autour de la revoyure en trois sujets : l'attractivité RH, les modes de financement de la recherche, la recherche partenariale entre public et privé. Sur la méthode, le ministre a demandé aux chefs d'établissements du supérieur et aux dirigeants d'organismes nationaux de recherche (ONR) de lui faire parvenir leurs contributions écrites (état des lieux des dispositifs de la LPR, propositions concrètes) pour la mi-avril. Parallèlement, le ministre a reçu les organisations syndicales représentatives du secteur.

Le 29 avril, le ministère a organisé un évènement « interne », intitulé « Convention de l'enseignement supérieur et de la recherche : bilan et perspectives à l'heure de la revoyure de la LPR », qui a rassemblé des chefs d'établissements, des dirigeants d'ONR et des recteurs. Cette journée de travail a pris la forme de débats en séance plénière et de tables rondes thématiques.

Auditionnés par la rapporteure, les dirigeants des principaux ONR ont globalement porté une appréciation mesurée sur cet évènement, qui semble avoir davantage relevé de l'exercice de bilan et de prospective que d'une véritable actualisation de la LPR.

La commission regrette la non-association du Parlement à la revoyure de la LPR, disposition qu'il a pourtant votée. Depuis 20221(*), elle n'a eu cesse d'insister sur l'importance de ce rendez-vous d'étape et demandé à en être partie prenante, compte tenu du rôle joué par le Sénat dans le renforcement du niveau d'investissement financier prévu sur les premières années de la programmation.


* 1 « Mise en oeuvre de la loi de programmation de la recherche : un début globalement satisfaisant mais des correctifs nécessaires lors de la revoyure 2023 », rapport d'information n° 766 (2021-2022), Laure Darcos et Stéphane Piednoir au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 6 juillet 2022.

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