Article 18
Assistance médicale à la procréation

Objet : Cet article propose de modifier le régime juridique de l'assistance médicale à la procréation .

I - Le dispositif proposé

Le I de cet article modifie le chapitre premier dans le titre IV du livre premier de la deuxième partie du code de la santé publique relatif aux dispositions générales.

Le modifie les articles L. 2121-1 et L. 2141-2.

Article L. 2141-1du code de la santé publique

L'alinéa unique de l'actuel article L. 2141-1 relatif à la définition d'une AMP n'est pas modifié. Cette dernière demeure une pratique clinique ou biologique (...) permettant le procréation en dehors du cadre naturel.

A cet alinéa sont ajoutés deux alinéas supplémentaires qui prévoient le régime de la stimulation de l'ovulation :

- pour faire entrer cette pratique dans le champ d'une AMP lorsqu'elle est conduite dans le cadre de cette dernière ;

- pour préciser que les règles de prescription et de suivi des traitements d'induction sont fixées par voie réglementaire.

Article L. 2141-2 du code de la santé publique

Cet article prévoit la finalité de l'AMP. Celle-ci est de répondre à la « demande parentale d'un couple » . La nouvelle rédaction proposée élargit les conditions d'accès à cette assistance au risque de transmission d'une maladie particulière grave au sein du couple. Désormais, l'AMP est ouverte à la fois aux couples infertiles et aux couples risquant de se transmettre entre eux ou à l'enfant, une maladie d'une particulière gravité. Ainsi qu'il a été précisé dans l'exposé général, cette extension ne fait que légaliser une pratique ayant déjà une base réglementaire 79( * ) .

Il est en outre rappelé les conditions que doit remplir le couple pour bénéficier d'une AMP : être un homme et une femme, ce qui n'autorise pas l'AMP pour des couples homosexuels, être non pas majeur mais en âge de procréer, être marié ou en mesure de prouver au moins deux années de vie commune. Il faut en outre, évidemment, consentir préalablement aux techniques de l'AMP, soit le transfert d'embryons, soit l'insémination. Le texte proposé pour cet article par le présent projet de loi prévoit enfin que la « dissolution » du couple fait obstacle à la réalisation de l'AMP.

Le proposé par cet article prévoit des renumérotations au sein de ce chapitre du code de la santé publique.

Le propose une nouvelle rédaction des articles L. 2141-3 et L. 2141-4 du code de la santé publique.

Article L. 2141-3 du code de la santé publique

Le premier alinéa édicte les conditions dans lesquelles peut être créé un embryon dans le cadre d'une AMP. Cette création doit se faire obligatoirement avec les gamètes d'au moins un des deux membres du couple.

Le deuxième alinéa prévoit la congélation d'embryons en vue de la réalisation différée du projet parental. Cet alinéa prévoit en outre l'obligation d'une « information détaillée » des deux membres du couple sur le devenir possible des embryons dans le cas où ces embryons ne trouveraient pas d'utilisation dans le cadre du projet parental.

L'article est complété par un dernier alinéa qui limite la création d'embryons, en n'en permettant pas la création de nouveaux si le couple dispose encore d'embryons congelés.

Article L. 2141-4 du code de la santé publique

Cet article précise le sort de l'embryon créé in vitro . Ce dernier est intimement lié au projet parental.

Le premier alinéa reprend la teneur de l'actuel dernier alinéa de l'article L. 2141-3 ; il prévoit que les membres du couple, chaque année, sont consultés « sur le point de savoir s'ils maintiennent leur projet parental » .

Le deuxième alinéa dispose qu'en cas de réponse négative, trois alternatives s'offrent à eux pour les embryons qui ne seront, in fine , pas transférés : l'embryon est accueilli par un autre couple, il fait l'objet d'une recherche ou il est mis fin à sa conservation.

Dans le seul cas, ce qui est contestable, où le couple choisit la destruction, la demande est écrite et confirmée par écrit après un délai de réflexion de trois mois.

Le troisième alinéa prévoit que, si les membres du couple ne répondent pas, ou s'ils sont en désaccord sur le maintien du projet parental ou sur le devenir des embryons, il est mis fin à la conservation de ces derniers « si la durée de celle-ci est au moins égale à cinq ans ».

Il doit bien être compris que ce n'est qu'au bout d'un délai de cinq ans, qu'en cas de désaccord dans le couple, même survenu précocement, qu'il est mis fin à la conservation des embryons.

Le quatrième alinéa prévoit également la fin de la conservation de l'embryon lorsque ce dernier avait été l'objet d'un don en vue d'un accueil et que cet accueil n'a pas eu lieu dans un délai de cinq ans.

Le prévoit une renumérotation des articles du code.

Le modifie les règles entourant l'accueil de l'embryon : le a) prévoit que l'autorisation par l'autorité judiciaire, à laquelle est subordonné l'accueil de l'embryon, est de trois ans ; le b) prévoit, pour sa part, que seuls les établissements à but non lucratif pourront se livrer à des activités d'accueil.

Le propose une rédaction nouvelle pour les articles L. 2141-7 et L. 2141-9 du code de la santé publique.

L'article L. 2141-7 prévoit les possibilités de recours à l'AMP avec tiers donneur.

La structure de la phrase pourrait tout d'abord laisser entendre que « L'AMP avec tiers donneur peut être mise en oeuvre (...) lorsque le couple dûment informé y renonce ». Il faut bien évidemment comprendre que l'AMP avec tiers donneur peut être mise en oeuvre lorsque le couple renonce à l'AMP au sein du couple . Ce point étant précisé, il reste que les conditions d'ouverture de l'AMP avec tiers donneur peuvent paraître paradoxales : si en effet les deux premières conditions semblent restrictives (risque de transmission d'une maladie grave ou échec de toute autre technique d'AMP) , la troisième condition, (le renoncement du couple à une AMP au sein du couple), qui n'en est pas véritablement une, affaiblit singulièrement la portée des deux premières. Il reste que la rédaction retenue, qui veut que le couple renonce après avoir été « dûment informé », renvoie implicitement, sinon juridiquement, aux risques et impossibilités qui peuvent le conduire à renoncer.

L'article L. 2141-9 prévoit le régime juridique de l'entrée et de la sortie du territoire des embryons.

Le de cet article modifie les caractéristiques de l'équipe d'accueil au sein des centres d'AMP ; en effet, cette dernière cesserait d'être pluridisciplinaire pour devenir « clinico-biologique ».

Le prévoit une nouvelle rédaction pour l'article L. 2141-11 du code de la santé publique, l'ancienne rédaction étant transférée et modifiée à l'article L. 2141-12.

Article L. 2141-11 du code de la santé publique

Cet article prévoit que les personnes subissant un traitement potentiellement attentatoire à leur fertilité pourront bénéficier du recueil et de la conservation de leurs gamètes. L'autorisation d'accéder à cette technique est, pour les mineurs et les majeurs sous tutelle, donnée par les titulaires de l'autorité parentale ou le tuteur. Certes, le principe d'un consentement à cette conservation est nécessaire mais il heurte celui, juridique, du parallélisme des formes puisque, pour pouvoir bénéficier d'une AMP, il suffit d'être en âge de procréer.

Article L. 2141-12 du code de la santé publique

Cet article prévoit que les modalités d'application de ce chapitre seront mises en oeuvre par un décret en Conseil d'Etat.

Le II de cet article modifie le chapitre II relatif aux conditions d'autorisation et de fonctionnement des établissements.

Le ajoute à l'article L. 2142-1 relatif aux activités cliniques d'AMP la stimulation ovarienne, par cohérence avec les modifications apportées à l'article L. 2141-11.

Le prévoit la suppression de la référence à la CNMBRDP et au CNOSS pour l'instruction des demandes d'autorisation des centres d'AMP pour pratiquer ces activités. A l'instar des activités de DPI et DPN, le précédent gouvernement avait prévu de régionaliser ces activités. Cette compétence sera désormais confiée aux ARH sous la direction de l'APEGH.

Le prévoit, pour les centres d'AMP, la même procédure que pour les centres de DPN ( cf. article 17 ), à savoir que l'autorisation du centre devra mentionner le nom des praticiens habilités à y exercer les actes fixés par l'autorisation.

Il subordonne, en outre, la mise en oeuvre d'une fécondation in vitro (FIV) auxdites autorisations biologiques et technologiques. En effet, cette activité exige l'accomplissement d'actes des deux natures, cliniques et biologiques.

Cette obligation permettra le regroupement de tous les actes au sein d'un même centre et d'éviter la dispersion des responsabilités entre plusieurs établissements ou laboratoires successifs.

Le Conseil d'Etat avait formulé une telle proposition (cf. ci-dessous).

Le prévoit le retrait ou la suppression des autorisations pour les mêmes raisons que le retrait d'autorisation des DPN et DPI : violation des dispositions légales, d'une part, volume d'activités et résultats insuffisants, d'autre part.

Le propose de compléter l'article L. 2142-4 en renvoyant à un décret en Conseil d'Etat les modalités d'application du présent chapitre et notamment les dispositions relatives :

- aux actes cliniques et biologiques d'AMP ;

- aux conditions de fonctionnement des établissements pratiquant l'AMP ;

- aux conditions de formation et d'expérience des praticiens ;

- aux conditions d'exercice et d'organisation d'AMP ;

- aux conditions dans lesquelles sont tenus les registres de gamètes et d'embryons dans les centres d'AMP.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a modifié substantiellement cet article.

a) L'élargissement du recours à l'AMP

L'Assemblée nationale a élargi les conditions de recours à l'AMP, en adoptant deux amendements.

Le premier, à l'initiative de la commission spéciale et de Mme Yvette Roudy, supprime la condition de deux ans de vie commune pour les personnes non mariées et la remplace par la notion de « concubins ».

Les auteurs de l'amendement ont justifié de modifier ainsi les conditions prévues par le législateur de 1994 pour deux raisons : la discrimination résultant du dispositif en vigueur entre couples mariés et non mariés et l'âge tardif auquel, parfois, beaucoup de femmes font des demandes d'AMP.

Le second, adopté à l'initiative de la commission spéciale, prévoit d'autoriser le recours au transfert post mortem d'embryons.

Ainsi, dans un délai compris entre six mois et dix-huit mois après le décès du père, la femme peut demander à ce que soit réalisé le transfert de l'embryon. Elle doit, en outre, bénéficier d'un accompagnement personnalisé. Le mariage ou remariage fait obstacle à ce transfert.

b) Le principe de l'évaluation systématique de toute nouvelle technique d'AMP

Sur proposition de sa commission spéciale, l'Assemblée nationale a prévu, en introduisant un article L. 2141-1 nouveau, que toute nouvelle technique d'AMP fasse l'objet d'une évaluation préalable.

Cette évaluation est l'objet d'un protocole autorisé par l'APEGH qui juge de sa pertinence scientifique, de l'importance de ses objectifs ainsi que de l'acceptabilité éthique du projet.

Dans les mêmes conditions que pour la recherche sur l'embryon ( cf. article 19 ), les protocoles sont transmis aux ministres en charge de la santé et de la recherche qui peuvent les suspendre ou les interdire.

Le protocole doit prévoir l'accord du couple, qui est exprimé après un délai de réflexion. A l'issue de l'évaluation, les embryons éventuellement conçus à cette fin d'évaluation sont détruits.

Une liste des établissements aptes à réaliser ces évaluations est établie par l'APEGH.

Ce dispositif est complété par un article L. 2141-1-2 nouveau qui soumet à l'autorisation expresse du ministre chargé de la santé le passage à l'application clinique d'une nouvelle technique d'AMP. Car, s'agissant d'une application sur le vivant, la mère sur laquelle sera transféré un embryon conçu au moyen de cette nouvelle technique bénéficiera des dispositions de la loi Huriet de 1988 sur les recherches biomédicales, ce qui ne sera pas le cas de l'embryon qui n'est lui-même qu'une personne potentielle. Aussi l'application clinique de cette technique nouvelle est-elle soumise à l'autorisation du ministre.

c) Les garanties entourant la stimulation ovarienne

L'Assemblée nationale a adopté plusieurs autres amendements de précision ou de nature rédactionnelle :

- à l'initiative de Mme Marie-Thérèse Boisseau et de la commission spéciale, elle a adopté un amendement rédactionnel supprimant le pléonasme, réitéré par le texte initial, des « deux » membres du couple ;

- à l'initiative de sa commission spéciale et de M. Yves Bur, est introduite à l'article L. 2141-3 une exception à l'interdiction par le couple de recourir à une nouvelle FIV lorsqu'il dispose encore d'embryons congelés. Conformément à une observation du Comité national consultatif d'éthique, il sera autorisé à recourir à une nouvelle FIV si la qualité des embryons se trouvait affectée par le processus de congélation ;

- à l'initiative de M. Jean-François Mattei, est précisé à l'article L. 2141-4 que les couples sont consultés annuellement par écrit sur le maintien de leur projet parental ; est en outre ajouté, sur proposition de la commission spéciale, qu'ils peuvent manifester leur intention à tout moment ;

- à l'initiative de la commission spéciale, de M. Jean-François Mattei et de plusieurs de ses collègues, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel qui prévoit que les couples ne « demandent » pas mais « consentent auprès du médecin qui les interroge » à ce que leurs embryons surnuméraires fassent l'objet d'un accueil, les membres du couple pouvant rarement demander d'eux-mêmes que cet accueil soit possible, sans qu'on leur en ait préalablement exposé la possibilité.

La procédure retenue par l'article L. 2141-4 pour la destruction anticipée des embryons, -une demande écrite, confirmée par écrit après un délai de trois mois- est, en outre, étendue à l'utilisation de ces embryons à des fins de recherche.

Est enfin précisé, sur proposition de la commission spéciale, qu'il est mis fin à la conservation des embryons, non seulement si le couple mais encore l'un seulement de ses membres ne confirme pas le maintien de leur projet parental. Ainsi, devant le silence de l'un des membres du couple, sollicité à plusieurs reprises et qui ne répond pas, il est possible de présumer du silence de l'autre et de mettre fin après cinq ans à la conservation des embryons.

Sur proposition de la commission spéciale, il est précisé que les embryons introduits sur le territoire national respectent les principes prévus par les articles 16 à 18 du code civil, c'est-à-dire concrètement qu'ils n'ont pas été réalisés par un procédé de clonage :

- à l'initiative de Mmes Yvette Roudy et Martine Lignières-Cassou, l'Assemblée nationale a adopté un amendement à l'article L. 2141-10 sur les effets secondaires, les risques et la pénibilité des techniques d'AMP ;

- à l'initiative de la commission spéciale, elle a adopté un amendement précisant que le consentement d'un des deux titulaires de l'autorité parentale suffit à procéder à la conservation des gamètes de mineurs, notamment un traitement potentiellement attentatoire à leur fertilité ;

- à l'initiative de la commission spéciale, l'Assemblée nationale a ajouté un 3° à l'article L. 2141-12 pour prévoir, dans le champ du décret en Conseil d'Etat pour l'application de ce chapitre, les modalités de recueil et de traitement des informations relatives au consentement des hommes ayant accepté l'éventualité d'un transfert post mortem d'embryons ;

- elle a ensuite, sur proposition de la commission spéciale, adopté deux amendements au 2° et après le huitième alinéa de cet article, prévoyant la compétence de l'APEGH pour se prononcer à titre consultatif sur les demandes d'autorisation des centres d'AMP et sur le retrait de ces autorisations ;

- elle a, enfin, à l'initiative de sa commission spéciale, adopté un amendement précisant que les modalités de mise en oeuvre des déplacements d'embryons seront fixées par décret.

III - La position de votre commission

Le renforcement de l'encadrement du secteur de l'AMP


Les dispositions du présent article prévoient deux séries de mesures susceptibles de contribuer à un meilleur encadrement des activités d'AMP.

A l'instar de ce qui est pratiqué pour les examens de DPN et DPI, il est prévu (3° du II) que les activités d'AMP seront pratiquées dans des centres dont l'autorisation devra mentionner le nom des praticiens habilités à y exercer.

Il a été à plusieurs reprises souligné que les difficultés d'application de la loi étaient d'abord issues des notions d'agrément et des responsabilités des praticiens, le droit en vigueur permettant à un praticien non agréé d'exercer dans une clinique « sous la responsabilité d'un praticien nommément agréé ».

Le Conseil d'Etat rappelle dans son étude 80( * ) que « certaines caisses d'assurance maladie se sont opposées à la prise en charge des actes d'AMP effectués dans un centre autorisé quand ils n'étaient pas réalisés par un praticien agréé, estimant qu'il y avait une contradiction entre les dispositions de la loi 1994 et le code de déontologie médicale qui précise que chaque médecin est responsable de ses décisions et de ses actes. En réalité, la responsabilité du praticien dans l'esprit de la loi n'a pas cette portée et semble plutôt désigner une responsabilité administrative de gestion et d'organisation des activités. Cette responsabilité paraît avoir été fixée par référence au service public et non au mode d'organisation du secteur privé. Pourtant, la CNMBRDP a en conséquence été amenée à accorder un agrément à plusieurs praticiens par centre d'AMP, sans qu'un rapport ait été bien établi entre le volume d'activité en AMP et le nombre d'agréments accordés par centre ».

En outre, le Conseil d'Etat s'était inquiété des situations peu logiques engendrées par le système d'autorisations séparées dont font l'objet les activités cliniques et les activités biologiques d'AMP.

« Les activités cliniques et les activités biologiques d'AMP font ensuite l'objet d'autorisations séparées, ce qui conduit parfois à des situations peu logiques : un laboratoire de médecine libérale qui a déposé un dossier en même temps qu'une clinique privée pour travailler avec elle peut se voir accorder une autorisation tandis qu'elle sera refusée à la clinique. Le laboratoire n'est alors pas en mesure de mettre en oeuvre son autorisation. Insatisfaisante du point de vue de ces « établissements orphelins » , cette situation l'est aussi du point de vue de la planification sanitaire, puisqu'un certain nombre d'autorisations sont bloquées et indisponibles pour d'autres équipes.

« Il est ainsi souhaitable de lier l'autorisation accordée aux établissements de biologie et aux établissements cliniques 81( * ) . Pour prévoir le couplage des autorisations accordées aux établissements de biologie et aux établissements cliniques, il est nécessaire de modifier l'article L. 184-1 du code de la santé publique qui leur est relatif, ainsi que l'article L. 152-10 pour y inscrire que les équipes pluridisciplinaires des centres d'AMP ont un caractère clinico-biologique.
»

Or, votre commission constate que la substitution de la qualification « clinico-biologique » à celle de « pluridisciplinaire » n'est pas conforme à ce que souhaitait le Conseil d'Etat, ni même l'exposé des motifs du présent projet de loi, au demeurant fort obscur, qui justifie le 7° du I de cet article en ces termes « au 7° l'article L. 2141-10 relatif à la procédure de mise en oeuvre de l'AMP est modifié. La notion d'équipe pluridisciplinaire, clinico-biologique est introduite pour insister sur l'importance que la prise en charge du couple soit collective (sic) ».

Elle vous propose en conséquence de modifier le 7° du I du présent article pour y inscrire la notion d'équipe pluridisciplinaire clinico-biologique .

Le présent article prévoit en outre la possibilité de retirer ou suspendre l'autorisation de certains centres en raison de leurs résultats trop faibles. Cette proposition avait également été formulée par le Conseil d'Etat 82( * ) pour qui « la faculté de révoquer l'autorisation accordée à un centre ou à une équipe avant le terme des cinq ans prévu par la loi donnerait à ces contrôles un poids accru. Plus ouvert, le régime d'autorisation des centres d'AMP y gagnerait aussi une forme de respiration. Le système, en effet, est aujourd'hui bloqué car presque toutes les autorisations qui pouvaient être accordées conformément aux impératifs de la carte sanitaire l'ont été. Il est donc très difficile pour de nouvelles équipes d'obtenir l'autorisation de pratiquer ces activités, alors même que certains centres ou laboratoires autorisés ont soit une activité trop peu importante pour pouvoir entretenir leur savoir-faire, soit des résultats insuffisants ».

Il faudrait donc compléter l'article L. 184-2 du code de la santé publique, qui dispose que « tout établissement ou laboratoire autorisé à pratiquer des activités d'AMP ou de DPN, tout centre pluridisciplinaire de DPN est tenu de présenter au ministre chargé de la santé un rapport annuel d'activité » , en prévoyant que l'autorisation accordée peut être révoquée avant cinq ans, en cas d'activité ou de résultats insuffisants.

Le sort de l'embryon conçu in vitro

Le présent article comble une lacune de la loi du 29 juillet 1994 qui n'avait pas, alors, tranché le sort des embryons créés in vitro et qui ne trouvaient plus, dans le cadre de la « demande parentale » la perspective d'être transférés.

Certes, le principe de l'accueil avait été prévu mais il n'avait pas permis, à lui seul, de régler la difficulté ouverte pour les embryons surnuméraires.

Le texte proposé prévoit tous les cas pour l'embryon in vitro .

Les parcours possibles de l'embryon conçu in vitro

 

Embryon conçu in vitro dans le cadre d'un projet parental

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 


Avant 5 ans : le couple est consulté chaque année

 
 


Après 5 ans : le couple a-t-il répondu ?

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Il n'y a plus de projet parental :
l'embryon est destiné soit :

 

Il maintient son projet parental

 
 

Si aucun des membres du couple n'a répondu sur le maintien

 

Si désaccord du couple sur le maintien du projet parental

 

Si maintien du projet parental

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

A la recherche

 


A l'accueil

 

Il est mis fin à sa conservation

 

Conservation des embryons

 
 

Fin de conservation

 

Fin de conservation

 

Conservation

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Si pas accueilli dans les cinq ans : fin de conservation

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Seules quelques difficultés rédactionnelles attirent l'attention de votre rapporteur. Ainsi la notion de « dissolution » du couple n'apparaît pas suffisamment précise pour permettre au praticien de s'opposer à une demande de transfert devenue, selon les termes de la loi, illégale. La notion de dissolution vise-t-elle le divorce pour les couples mariés ? A la date du dépôt de la demande, de l'audience de conciliation ou du jugement définitif ? S'agit-il pour les couples non mariés d'une séparation de corps, d'un arrêt de la vie commune ? Comment devra-t-il contrôler que cette condition de dissolution ne fait pas obstacle au transfert ?

Aussi, votre commission vous propose-t-elle sur ce point un amendement de précision qui, par un renvoi au troisième alinéa du code civil, définit strictement les conditions dans lesquelles cette dissolution doit être entendue comme le « cas de décès, de dépôt d'une requête en divorce ou en séparation de corps ou de cessation de la communauté de vie, survenant avant la réalisation de la procréation médicalement assistée ». Cet alinéa prévoit en outre que le consentement « est également privé d'effet lorsque l'homme ou la femme le révoque, par écrit et avant la réalisation de la procréation médicalement assistée, auprès du médecin chargé de mettre en oeuvre cette assistance ».

La grande prudence de votre commission sur les propositions d'ouverture de l'Assemblée nationale


L'Assemblée nationale a ouvert plusieurs possibilités que votre commission vous proposera de modifier ou de supprimer.

L'Assemblée nationale a souhaité mieux encadrer la pratique entourant la stimulation ovarienne.

Votre rapporteur a déjà détaillé, dans son exposé général, les raisons pour lesquelles il était conduit à proposer le renvoi à des recommandations de bonnes pratiques et non à un décret comme il est à présent prévu.

Votre commission ne saurait non plus agréer l'élargissement proposé par l'Assemblée nationale d'ouvrir l'AMP à des couples non mariés qui ne font pas la preuve d'au moins deux ans de vie commune. L'une des instigatrices de cet élargissement, Mme Yvette Roudy, au nom de la délégation aux droits des femmes, a également proposé avec Mme Martine Lignères-Cassou un amendement prévoyant une information du couple sur le caractère pénible et les effets secondaires induits par l'AMP. C'est en effet reconnaître le caractère lourd de cette assistance. En conséquence, l'exigence d'une durée de vie commune n'est sans doute pas superfétatoire afin de s'assurer de la solidité du couple et que les embryons conçus in vitro le sont dans le cadre d'un projet parental solide. Aussi, votre commission vous propose-t-elle, par amendement, de revenir à cette exigence initiale du projet de loi qui était déjà celle posée par le législateur de 1994.

Votre commission vous proposera en outre de supprimer par amendement deux transgressions qui, en l'état, ne lui semblent pas devoir être confirmées.

La première est relative au transfert post mortem d'embryons. Votre rapporteur a, dans son exposé général, détaillé les raisons pour lesquelles il s'opposait à un tel transfert.

La seconde est relative à l'évaluation des nouvelles techniques d'AMP. Présentant ce dispositif, le rapporteur de l'Assemblée nationale avait reconnu que cette évaluation supposait la création d'embryons à des fins de recherche.

Le principe de la création d'embryons à des fins de recherche correspond à deux réalités. La première est la création d'un matériau pour la recherche, ce qui n'est, pour personne, tolérable. La seconde est l'éventualité qu'au cours des essais de recherche sur une technique nouvelle d'AMP, un embryon se trouve conçu et viable.

Même entourée de toutes les précautions, une telle perspective est par principe inacceptable. Selon les mots exprimés par M. Jean-François Mattei devant votre commission, il ne saurait y avoir « des essais d'homme ».

Sans doute le législateur devra-t-il s'interroger sur les moyens de mieux accompagner la mise en oeuvre de nouvelles techniques d'AMP. Les partisans des évaluations soulèvent à juste titre que les erreurs qui ne sont pas constatées in vitro risquent de l'être in vivo . Néanmoins constatant le risque de dérive et de contournement de l'interdit absolu qu'elle entend réaffirmer, votre commission vous propose de supprimer cette disposition.

Enfin, votre commission vous propose d'adopter un amendement de conséquence avec l'amendement proposant l'interdiction du clonage thérapeutique, à l'article 19.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

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