Article 18
Assistance médicale à la
procréation
Objet : Cet article propose de modifier le
régime
juridique de l'assistance médicale à la
procréation
.
I - Le dispositif proposé
Le
I
de cet article modifie le chapitre premier dans le titre IV du
livre premier de la deuxième partie du code de la santé publique
relatif aux dispositions générales.
Le
1°
modifie les articles L. 2121-1 et L. 2141-2.
Article L. 2141-1du code de la santé publique
L'alinéa unique de l'actuel article L. 2141-1 relatif à
la définition d'une AMP n'est pas modifié. Cette dernière
demeure une pratique clinique ou biologique (...) permettant le
procréation en dehors du cadre naturel.
A cet alinéa sont ajoutés deux alinéas
supplémentaires qui prévoient le régime de la stimulation
de l'ovulation :
- pour faire entrer cette pratique dans le champ d'une AMP lorsqu'elle est
conduite dans le cadre de cette dernière ;
- pour préciser que les règles de prescription et de suivi
des traitements d'induction sont fixées par voie réglementaire.
Article L. 2141-2 du code de la santé publique
Cet article prévoit la finalité de l'AMP. Celle-ci est de
répondre à la
« demande parentale d'un
couple »
. La nouvelle rédaction proposée
élargit les conditions d'accès à cette assistance au
risque de transmission d'une maladie particulière grave au sein du
couple. Désormais, l'AMP est ouverte à la fois aux couples
infertiles et aux couples risquant de se transmettre entre eux ou à
l'enfant, une maladie d'une particulière gravité. Ainsi qu'il a
été précisé dans l'exposé
général, cette extension ne fait que légaliser une
pratique ayant déjà une base réglementaire
79(
*
)
.
Il est en outre rappelé les conditions que doit remplir le couple pour
bénéficier d'une AMP : être un homme et une femme, ce
qui n'autorise pas l'AMP pour des couples homosexuels, être non pas
majeur mais en âge de procréer, être marié ou en
mesure de prouver au moins deux années de vie commune. Il faut en outre,
évidemment, consentir préalablement aux techniques de l'AMP, soit
le transfert d'embryons, soit l'insémination. Le texte proposé
pour cet article par le présent projet de loi prévoit enfin que
la
« dissolution »
du couple fait obstacle à
la réalisation de l'AMP.
Le
2°
proposé par cet article prévoit des
renumérotations au sein de ce chapitre du code de la santé
publique.
Le
3°
propose une nouvelle rédaction des articles
L. 2141-3 et L. 2141-4 du code de la santé publique.
Article L. 2141-3 du code de la santé publique
Le
premier alinéa
édicte les conditions dans lesquelles
peut être créé un embryon dans le cadre d'une AMP. Cette
création doit se faire obligatoirement avec les gamètes d'au
moins un des deux membres du couple.
Le
deuxième alinéa
prévoit la congélation
d'embryons en vue de la réalisation différée du projet
parental. Cet alinéa prévoit en outre l'obligation d'une
« information détaillée »
des deux
membres du couple sur le devenir possible des embryons dans le cas où
ces embryons ne trouveraient pas d'utilisation dans le cadre du projet parental.
L'article est complété par un
dernier alinéa
qui
limite la création d'embryons, en n'en permettant pas la création
de nouveaux si le couple dispose encore d'embryons congelés.
Article L. 2141-4 du code de la santé publique
Cet article précise le sort de l'embryon créé
in
vitro
. Ce dernier est intimement lié au projet parental.
Le
premier alinéa
reprend la teneur de l'actuel dernier
alinéa de l'article L. 2141-3 ; il prévoit que les
membres du couple, chaque année, sont consultés
« sur le point de savoir s'ils maintiennent leur projet
parental »
.
Le
deuxième alinéa
dispose qu'en cas de réponse
négative, trois alternatives s'offrent à eux pour les embryons
qui ne seront,
in fine
, pas transférés : l'embryon
est accueilli par un autre couple, il fait l'objet d'une recherche ou il est
mis fin à sa conservation.
Dans le seul cas, ce qui est contestable, où le couple choisit la
destruction, la demande est écrite et confirmée par écrit
après un délai de réflexion de trois mois.
Le
troisième alinéa
prévoit que, si les membres du
couple ne répondent pas, ou s'ils sont en désaccord sur le
maintien du projet parental ou sur le devenir des embryons, il est mis fin
à la conservation de ces derniers
« si la durée de
celle-ci est au moins égale à cinq ans ».
Il doit bien être compris que ce n'est qu'au bout d'un délai de
cinq ans, qu'en cas de désaccord dans le couple, même survenu
précocement, qu'il est mis fin à la conservation des embryons.
Le
quatrième alinéa
prévoit également la fin
de la conservation de l'embryon lorsque ce dernier avait été
l'objet d'un don en vue d'un accueil et que cet accueil n'a pas eu lieu dans un
délai de cinq ans.
Le
4°
prévoit une renumérotation des articles du code.
Le
5°
modifie les règles entourant l'accueil de
l'embryon : le
a)
prévoit que l'autorisation par
l'autorité judiciaire, à laquelle est subordonné l'accueil
de l'embryon, est de trois ans ; le
b)
prévoit, pour sa
part, que seuls les établissements à but non lucratif pourront se
livrer à des activités d'accueil.
Le
6°
propose une rédaction nouvelle pour les articles
L. 2141-7 et L. 2141-9 du code de la santé publique.
L'article L. 2141-7 prévoit les possibilités de recours
à l'AMP avec tiers donneur.
La structure de la phrase pourrait tout d'abord laisser entendre que
«
L'AMP avec tiers donneur peut être mise en oeuvre
(...)
lorsque le couple dûment informé y
renonce
». Il faut bien évidemment comprendre que l'AMP
avec tiers donneur peut être mise en oeuvre
lorsque le couple renonce
à l'AMP au sein du couple
. Ce point étant
précisé, il reste que les conditions d'ouverture de l'AMP avec
tiers donneur peuvent paraître paradoxales : si en effet les deux
premières conditions semblent restrictives
(risque de transmission
d'une maladie grave ou échec de toute autre technique d'AMP)
, la
troisième condition,
(le renoncement du couple à une AMP au
sein du couple),
qui n'en est pas véritablement une, affaiblit
singulièrement la portée des deux premières. Il reste que
la rédaction retenue, qui veut que le couple renonce après avoir
été « dûment informé », renvoie
implicitement, sinon juridiquement, aux risques et impossibilités qui
peuvent le conduire à renoncer.
L'article L. 2141-9 prévoit le régime juridique de
l'entrée et de la sortie du territoire des embryons.
Le
7°
de cet article modifie les caractéristiques de
l'équipe d'accueil au sein des centres d'AMP ; en effet, cette
dernière cesserait d'être pluridisciplinaire pour devenir
« clinico-biologique ».
Le
8°
prévoit une nouvelle rédaction pour l'article
L. 2141-11 du code de la santé publique, l'ancienne
rédaction étant transférée et modifiée
à l'article L. 2141-12.
Article L. 2141-11 du code de la santé publique
Cet article prévoit que les personnes subissant un traitement
potentiellement attentatoire à leur fertilité pourront
bénéficier du recueil et de la conservation de leurs
gamètes. L'autorisation d'accéder à cette technique est,
pour les mineurs et les majeurs sous tutelle, donnée par les titulaires
de l'autorité parentale ou le tuteur. Certes, le principe d'un
consentement à cette conservation est nécessaire mais il heurte
celui, juridique, du parallélisme des formes puisque, pour pouvoir
bénéficier d'une AMP, il suffit d'être en âge de
procréer.
Article L. 2141-12 du code de la santé publique
Cet article prévoit que les modalités d'application de ce
chapitre seront mises en oeuvre par un décret en Conseil d'Etat.
Le
II
de cet article modifie le chapitre II relatif aux conditions
d'autorisation et de fonctionnement des établissements.
Le
1°
ajoute à l'article L. 2142-1 relatif aux
activités cliniques d'AMP la stimulation ovarienne, par cohérence
avec les modifications apportées à l'article L. 2141-11.
Le
2°
prévoit la suppression de la référence
à la CNMBRDP et au CNOSS pour l'instruction des demandes d'autorisation
des centres d'AMP pour pratiquer ces activités. A l'instar des
activités de DPI et DPN, le précédent gouvernement avait
prévu de régionaliser ces activités. Cette
compétence sera désormais confiée aux ARH sous la
direction de l'APEGH.
Le
3°
prévoit, pour les centres d'AMP, la même
procédure que pour les centres de DPN (
cf. article 17
),
à savoir que l'autorisation du centre devra mentionner le nom des
praticiens habilités à y exercer les actes fixés par
l'autorisation.
Il subordonne, en outre, la mise en oeuvre d'une fécondation
in
vitro (FIV) auxdites autorisations biologiques et technologiques. En effet,
cette activité exige l'accomplissement d'actes des deux natures,
cliniques et biologiques.
Cette obligation permettra le regroupement de tous les actes au sein d'un
même centre et d'éviter la dispersion des responsabilités
entre plusieurs établissements ou laboratoires successifs.
Le Conseil d'Etat avait formulé une telle proposition
(cf.
ci-dessous).
Le
4°
prévoit le retrait ou la suppression des autorisations
pour les mêmes raisons que le retrait d'autorisation des DPN et
DPI : violation des dispositions légales, d'une part, volume
d'activités et résultats insuffisants, d'autre part.
Le
5°
propose de compléter l'article L. 2142-4 en
renvoyant à un décret en Conseil d'Etat les modalités
d'application du présent chapitre et notamment les dispositions
relatives :
- aux actes cliniques et biologiques d'AMP ;
- aux conditions de fonctionnement des établissements pratiquant
l'AMP ;
- aux conditions de formation et d'expérience des praticiens ;
- aux conditions d'exercice et d'organisation d'AMP ;
- aux conditions dans lesquelles sont tenus les registres de
gamètes et d'embryons dans les centres d'AMP.
II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a modifié substantiellement cet article.
a) L'élargissement du recours à l'AMP
L'Assemblée nationale a élargi les conditions de recours à
l'AMP, en adoptant deux amendements.
Le premier, à l'initiative de la commission spéciale et de
Mme Yvette Roudy, supprime la condition de deux ans de vie commune pour
les personnes non mariées et la remplace par la notion de
« concubins ».
Les auteurs de l'amendement ont justifié de modifier ainsi les
conditions prévues par le législateur de 1994 pour deux
raisons : la discrimination résultant du dispositif en vigueur
entre couples mariés et non mariés et l'âge tardif auquel,
parfois, beaucoup de femmes font des demandes d'AMP.
Le second, adopté à l'initiative de la commission
spéciale, prévoit d'autoriser le recours au transfert
post
mortem
d'embryons.
Ainsi, dans un délai compris entre six mois et dix-huit mois
après le décès du père, la femme peut demander
à ce que soit réalisé le transfert de l'embryon. Elle
doit, en outre, bénéficier d'un accompagnement
personnalisé. Le mariage ou remariage fait obstacle à ce
transfert.
b) Le principe de l'évaluation systématique de toute
nouvelle technique d'AMP
Sur proposition de sa commission spéciale, l'Assemblée nationale
a prévu, en introduisant un article L. 2141-1 nouveau, que toute
nouvelle technique d'AMP fasse l'objet d'une évaluation préalable.
Cette évaluation est l'objet d'un protocole autorisé par l'APEGH
qui juge de sa pertinence scientifique, de l'importance de ses objectifs ainsi
que de l'acceptabilité éthique du projet.
Dans les mêmes conditions que pour la recherche sur l'embryon
(
cf. article 19
), les protocoles sont transmis aux ministres
en charge de la santé et de la recherche qui peuvent les suspendre ou
les interdire.
Le protocole doit prévoir l'accord du couple, qui est exprimé
après un délai de réflexion. A l'issue de
l'évaluation, les embryons éventuellement conçus à
cette fin d'évaluation sont détruits.
Une liste des établissements aptes à réaliser ces
évaluations est établie par l'APEGH.
Ce dispositif est complété par un article L. 2141-1-2
nouveau qui soumet à l'autorisation expresse du ministre chargé
de la santé le passage à l'application clinique d'une nouvelle
technique d'AMP. Car, s'agissant d'une application sur le vivant, la
mère sur laquelle sera transféré un embryon conçu
au moyen de cette nouvelle technique bénéficiera des dispositions
de la loi Huriet de 1988 sur les recherches biomédicales, ce qui ne sera
pas le cas de l'embryon qui n'est lui-même qu'une personne potentielle.
Aussi l'application clinique de cette technique nouvelle est-elle soumise
à l'autorisation du ministre.
c) Les garanties entourant la stimulation ovarienne
L'Assemblée nationale a adopté plusieurs autres amendements de
précision ou de nature rédactionnelle :
- à l'initiative de Mme Marie-Thérèse Boisseau et de
la commission spéciale, elle a adopté un amendement
rédactionnel supprimant le pléonasme,
réitéré par le texte initial, des
« deux »
membres du couple ;
- à l'initiative de sa commission spéciale et de
M. Yves Bur, est introduite à l'article L. 2141-3 une
exception à l'interdiction par le couple de recourir à une
nouvelle FIV lorsqu'il dispose encore d'embryons congelés.
Conformément à une observation du Comité national
consultatif d'éthique, il sera autorisé à recourir
à une nouvelle FIV si la qualité des embryons se trouvait
affectée par le processus de congélation ;
- à l'initiative de M. Jean-François Mattei, est
précisé à l'article L. 2141-4 que les couples
sont consultés annuellement
par écrit
sur le maintien de
leur projet parental ; est en outre ajouté, sur proposition de la
commission spéciale, qu'ils peuvent manifester leur intention à
tout moment ;
- à l'initiative de la commission spéciale, de
M. Jean-François Mattei et de plusieurs de ses collègues,
l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel
qui prévoit que les couples ne «
demandent
»
pas mais «
consentent auprès du médecin qui les
interroge
» à ce que leurs embryons surnuméraires
fassent l'objet d'un accueil, les membres du couple pouvant rarement demander
d'eux-mêmes que cet accueil soit possible, sans qu'on leur en ait
préalablement exposé la possibilité.
La procédure retenue par l'article L. 2141-4 pour la
destruction anticipée des embryons, -une demande écrite,
confirmée par écrit après un délai de trois mois-
est, en outre, étendue à l'utilisation de ces embryons à
des fins de recherche.
Est enfin précisé, sur proposition de la commission
spéciale, qu'il est mis fin à la conservation des embryons, non
seulement si le couple mais encore l'un seulement de ses membres ne confirme
pas le maintien de leur projet parental. Ainsi, devant le silence de l'un des
membres du couple, sollicité à plusieurs reprises et qui ne
répond pas, il est possible de présumer du silence de l'autre et
de mettre fin après cinq ans à la conservation des embryons.
Sur proposition de la commission spéciale, il est précisé
que les embryons introduits sur le territoire national respectent les principes
prévus par les articles 16 à 18 du code civil,
c'est-à-dire concrètement qu'ils n'ont pas été
réalisés par un procédé de clonage :
- à l'initiative de Mmes Yvette Roudy et Martine
Lignières-Cassou, l'Assemblée nationale a adopté un
amendement à l'article L. 2141-10 sur les effets secondaires,
les risques et la pénibilité des techniques d'AMP ;
- à l'initiative de la commission spéciale, elle a
adopté un amendement précisant que le consentement d'un des deux
titulaires de l'autorité parentale suffit à procéder
à la conservation des gamètes de mineurs, notamment un traitement
potentiellement attentatoire à leur fertilité ;
- à l'initiative de la commission spéciale,
l'Assemblée nationale a ajouté un 3° à
l'article L. 2141-12 pour prévoir, dans le champ du
décret en Conseil d'Etat pour l'application de ce chapitre, les
modalités de recueil et de traitement des informations relatives au
consentement des hommes ayant accepté l'éventualité d'un
transfert
post mortem
d'embryons ;
- elle a ensuite, sur proposition de la commission spéciale,
adopté deux amendements au 2° et après le huitième
alinéa de cet article, prévoyant la compétence de l'APEGH
pour se prononcer à titre consultatif sur les demandes d'autorisation
des centres d'AMP et sur le retrait de ces autorisations ;
- elle a, enfin, à l'initiative de sa commission spéciale,
adopté un amendement précisant que les modalités de mise
en oeuvre des déplacements d'embryons seront fixées par
décret.
III - La position de votre commission
Le renforcement de l'encadrement du secteur de l'AMP
Les dispositions du présent article prévoient deux séries
de mesures susceptibles de contribuer à un meilleur encadrement des
activités d'AMP.
A l'instar de ce qui est pratiqué pour les examens de DPN et DPI, il est
prévu
(3° du II)
que les activités d'AMP seront
pratiquées dans des centres dont l'autorisation devra mentionner le nom
des praticiens habilités à y exercer.
Il a été à plusieurs reprises souligné que les
difficultés d'application de la loi étaient d'abord issues des
notions d'agrément et des responsabilités des praticiens, le
droit en vigueur permettant à un praticien non agréé
d'exercer dans une clinique
« sous la responsabilité d'un
praticien nommément agréé ».
Le Conseil d'Etat rappelle dans son étude
80(
*
)
que
« certaines caisses
d'assurance maladie se sont opposées à la prise en charge des
actes d'AMP effectués dans un centre autorisé quand ils
n'étaient pas réalisés par un praticien
agréé, estimant qu'il y avait une contradiction entre les
dispositions de la loi 1994 et le code de déontologie médicale
qui précise que chaque médecin est responsable de ses
décisions et de ses actes. En réalité, la
responsabilité du praticien dans l'esprit de la loi n'a pas cette
portée et semble plutôt désigner une responsabilité
administrative de gestion et d'organisation des activités. Cette
responsabilité paraît avoir été fixée par
référence au service public et non au mode d'organisation du
secteur privé. Pourtant, la CNMBRDP a en conséquence
été amenée à accorder un agrément à
plusieurs praticiens par centre d'AMP, sans qu'un rapport ait été
bien établi entre le volume d'activité en AMP et le nombre
d'agréments accordés par centre ».
En outre, le Conseil d'Etat s'était inquiété des
situations peu logiques engendrées par le système d'autorisations
séparées dont font l'objet les activités cliniques et les
activités biologiques d'AMP.
«
Les activités cliniques et les activités
biologiques d'AMP font ensuite l'objet d'autorisations séparées,
ce qui conduit parfois à des situations peu logiques : un laboratoire de
médecine libérale qui a déposé un dossier en
même temps qu'une clinique privée pour travailler avec elle peut
se voir accorder une autorisation tandis qu'elle sera refusée à
la clinique. Le laboratoire n'est alors pas en mesure de mettre en oeuvre son
autorisation. Insatisfaisante du point de vue de ces
« établissements orphelins » , cette situation l'est
aussi du point de vue de la planification sanitaire, puisqu'un certain nombre
d'autorisations sont bloquées et indisponibles pour d'autres
équipes.
« Il est ainsi souhaitable de lier l'autorisation accordée aux
établissements de biologie et aux établissements
cliniques
81(
*
)
. Pour
prévoir le couplage des autorisations accordées aux
établissements de biologie et aux établissements cliniques, il
est nécessaire de modifier l'article L. 184-1 du code de la
santé publique qui leur est relatif, ainsi que l'article L. 152-10
pour y inscrire que les équipes pluridisciplinaires des centres d'AMP
ont un caractère clinico-biologique.
»
Or, votre commission constate que la substitution de la qualification
« clinico-biologique » à celle de
« pluridisciplinaire » n'est pas conforme à ce que
souhaitait le Conseil d'Etat, ni même l'exposé des motifs du
présent projet de loi, au demeurant fort obscur, qui justifie le 7°
du I de cet article en ces termes
« au 7° l'article
L. 2141-10 relatif à la procédure de mise en oeuvre de l'AMP
est modifié. La notion d'équipe pluridisciplinaire,
clinico-biologique est introduite pour insister sur l'importance que la prise
en charge du couple soit collective (sic) ».
Elle vous propose en conséquence de modifier le 7° du I du
présent article pour y inscrire la notion
d'équipe
pluridisciplinaire clinico-biologique
.
Le présent article prévoit en outre la possibilité de
retirer ou suspendre l'autorisation de certains centres en raison de leurs
résultats trop faibles. Cette proposition avait également
été formulée par le Conseil d'Etat
82(
*
)
pour qui
« la
faculté de révoquer l'autorisation accordée à un
centre ou à une équipe avant le terme des cinq ans prévu
par la loi donnerait à ces contrôles un poids accru. Plus ouvert,
le régime d'autorisation des centres d'AMP y gagnerait aussi une forme
de respiration. Le système, en effet, est aujourd'hui bloqué car
presque toutes les autorisations qui pouvaient être accordées
conformément aux impératifs de la carte sanitaire l'ont
été. Il est donc très difficile pour de nouvelles
équipes d'obtenir l'autorisation de pratiquer ces activités,
alors même que certains centres ou laboratoires autorisés ont soit
une activité trop peu importante pour pouvoir entretenir leur
savoir-faire, soit des résultats insuffisants ».
Il faudrait donc compléter l'article L. 184-2 du code de la santé
publique, qui dispose que
« tout établissement ou
laboratoire autorisé à pratiquer des activités d'AMP ou de
DPN, tout centre pluridisciplinaire de DPN est tenu de présenter au
ministre chargé de la santé un rapport annuel
d'activité »
, en prévoyant que l'autorisation
accordée peut être révoquée avant cinq ans, en cas
d'activité ou de résultats insuffisants.
Le sort de l'embryon conçu in vitro
Le présent article comble une lacune de la loi du 29 juillet 1994 qui
n'avait pas, alors, tranché le sort des embryons créés
in vitro
et qui ne trouvaient plus, dans le cadre de la
« demande parentale »
la perspective d'être
transférés.
Certes, le principe de l'accueil avait été prévu mais il
n'avait pas permis, à lui seul, de régler la difficulté
ouverte pour les embryons surnuméraires.
Le texte proposé prévoit tous les cas pour l'embryon
in
vitro
.
Les parcours possibles de l'embryon conçu in vitro
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Embryon conçu in vitro dans le cadre d'un projet parental |
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Il n'y a
plus de projet parental :
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Il maintient son projet parental |
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Si aucun des membres du couple n'a répondu sur le maintien |
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Si désaccord du couple sur le maintien du projet parental |
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Si maintien du projet parental |
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A la recherche |
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Il est mis fin à sa conservation |
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Conservation des embryons |
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Fin de conservation |
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Fin de conservation |
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Conservation |
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Si pas accueilli dans les cinq ans : fin de conservation |
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Seules
quelques difficultés rédactionnelles attirent l'attention de
votre rapporteur. Ainsi la notion de
« dissolution »
du couple n'apparaît pas suffisamment précise pour permettre au
praticien de s'opposer à une demande de transfert devenue, selon les
termes de la loi, illégale. La notion de dissolution vise-t-elle le
divorce pour les couples mariés ? A la date du dépôt
de la demande, de l'audience de conciliation ou du jugement
définitif ? S'agit-il pour les couples non mariés d'une
séparation de corps, d'un arrêt de la vie commune ? Comment
devra-t-il contrôler que cette condition de dissolution ne fait pas
obstacle au transfert ?
Aussi, votre commission vous propose-t-elle sur ce point un
amendement
de précision qui, par un renvoi au troisième alinéa du
code civil, définit strictement les conditions dans lesquelles cette
dissolution doit être entendue comme le
« cas de
décès, de dépôt d'une requête en divorce ou en
séparation de corps ou de cessation de la communauté de vie,
survenant avant la réalisation de la procréation
médicalement assistée ».
Cet alinéa
prévoit en outre que le consentement
« est également
privé d'effet lorsque l'homme ou la femme le révoque, par
écrit et avant la réalisation de la procréation
médicalement assistée, auprès du médecin
chargé de mettre en oeuvre cette assistance ».
La grande prudence de votre commission sur les propositions
d'ouverture de l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a ouvert plusieurs possibilités que votre
commission vous proposera de modifier ou de supprimer.
L'Assemblée nationale a souhaité mieux encadrer la pratique
entourant la stimulation ovarienne.
Votre rapporteur a déjà détaillé, dans son
exposé général, les raisons pour lesquelles il
était conduit à proposer le renvoi à des
recommandations de bonnes pratiques
et non à un décret
comme il est à présent prévu.
Votre commission ne saurait non plus agréer l'élargissement
proposé par l'Assemblée nationale d'ouvrir l'AMP à des
couples non mariés qui ne font pas la preuve d'au moins deux ans de vie
commune. L'une des instigatrices de cet élargissement, Mme Yvette
Roudy, au nom de la délégation aux droits des femmes, a
également proposé avec Mme Martine Lignères-Cassou un
amendement prévoyant une information du couple sur le caractère
pénible et les effets secondaires induits par l'AMP. C'est en effet
reconnaître le caractère lourd de cette assistance. En
conséquence, l'exigence d'une durée de vie commune n'est sans
doute pas superfétatoire afin de s'assurer de la solidité du
couple et que les embryons conçus
in vitro
le sont dans le cadre
d'un projet parental solide. Aussi, votre commission vous propose-t-elle, par
amendement,
de revenir à cette exigence initiale du projet de loi
qui était déjà celle posée par le
législateur de 1994.
Votre commission vous proposera en outre de supprimer par
amendement
deux transgressions qui, en l'état, ne lui semblent pas devoir
être confirmées.
La première est relative au transfert
post mortem
d'embryons.
Votre rapporteur a, dans son exposé général,
détaillé les raisons pour lesquelles il s'opposait à un
tel transfert.
La seconde est relative à l'évaluation des nouvelles techniques
d'AMP. Présentant ce dispositif, le rapporteur de l'Assemblée
nationale avait reconnu que cette évaluation supposait la
création d'embryons à des fins de recherche.
Le principe de la création d'embryons à des fins de recherche
correspond à deux réalités. La première est la
création d'un matériau pour la recherche, ce qui n'est, pour
personne, tolérable. La seconde est l'éventualité qu'au
cours des essais de recherche sur une technique nouvelle d'AMP, un embryon se
trouve conçu et viable.
Même entourée de toutes les précautions, une telle
perspective est par principe inacceptable. Selon les mots exprimés par
M. Jean-François Mattei devant votre commission, il ne saurait y avoir
« des essais d'homme ».
Sans doute le législateur devra-t-il s'interroger sur les moyens de
mieux accompagner la mise en oeuvre de nouvelles techniques d'AMP. Les
partisans des évaluations soulèvent à juste titre que les
erreurs qui ne sont pas constatées
in vitro
risquent de
l'être
in vivo
. Néanmoins constatant le risque de
dérive et de contournement de l'interdit absolu qu'elle entend
réaffirmer, votre commission vous propose de supprimer cette disposition.
Enfin, votre commission vous propose d'adopter un amendement de
conséquence avec l'amendement proposant l'interdiction du clonage
thérapeutique, à l'article 19.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.