Article 25
(art. 26 bis de l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre
1945)
Reconnaissance mutuelle des mesures
d'éloignement
Le
présent article introduit dans l'ordonnance n° 45-2658 du
2 novembre 1945 le principe de la reconnaissance mutuelle des
décisions d'éloignement exécutoires prises par les Etats
membres de l'Union européenne à l'encontre de ressortissants de
pays tiers à l'Union européenne. Il transpose ainsi la directive
2001/40/CE du Conseil du 28 mai 2001 relative à la reconnaissance
mutuelle des décisions d'éloignement des ressortissants de pays
tiers, ce qui aurait dû être fait avant le 2 décembre 2002.
Tous les pays de l'Union européenne, à l'exception du Danemark,
ainsi que l'Islande et la Norvège sont parties à cette directive.
Elle doit assurer une plus grande efficacité dans l'exécution des
mesures d'éloignement.
Reposant sur la coopération, elle
suppose que chaque Etat partie accorde sa confiance aux normes juridiques des
autres Etats parties
. L'ensemble de l'acquis Schengen est basé sur
ce principe de confiance.
D'ores et déjà, l'article 26
bis
deuxième
alinéa de l'ordonnance, issu de la loi n° 92-190 du 26
février 1992, prévoit une procédure de reconduite à
la frontière d'office de l'étranger en situation
irrégulière qui a fait l'objet d'un signalement aux fins de
non-admission en vertu d'une décision exécutoire prise par l'un
des autres Etats parties.
Cet article met en oeuvre les articles 25 et 96
de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985.
Ainsi, à l'occasion de la délivrance ou du renouvellement d'un
titre de séjour, les services de la préfecture ont l'obligation
de consulter le système d'information Schengen (SIS). Si
l'étranger est signalé aux fins de non-admission, le
préfet peut retirer le titre de séjour.
La convention Schengen laisse une marge de manoeuvre à l'Etat non
signalant qui peut délivrer ou ne pas retirer le titre de séjour
à l'étranger signalé si des
« motifs
sérieux »
existent. L'Etat qui déroge au
signalement doit consulter l'Etat qui a signalé l'étranger au
SIS.
Peut constituer un motif sérieux le fait d'être marié
à un national, à un étranger en situation
régulière, de séjourner régulièrement dans
le pays depuis longtemps ou d'être réfugié. D'autres motifs
sont possibles. Si l'Etat non signalant ne déroge pas au signalement, il
met en oeuvre l'éloignement en vertu de l'article 26
bis
deuxième alinéa de l'ordonnance du 2 novembre 1945.
La reconduite à la frontière d'un étranger signalé
par un autre Etat partie à la convention Schengen n'obéit pas
à la procédure spéciale définie à l'article
22
bis
de l'ordonnance relatif aux arrêtés de reconduite
à la frontière. Elle est immédiatement exécutoire
et les recours sont ceux du droit commun
156(
*
)
.
On rappellera que sont, entre autres, signalés au SIS les
étrangers suivants :
- ceux qui constituent une menace pour l'ordre public ou la
sécurité ou la sûreté nationales d'un des Etats
parties. Peuvent notamment entrer dans cette catégorie les
étrangers condamnés pour une infraction passible d'une peine de
prison d'au moins un an et les étrangers à l'égard
desquels il existe des raisons sérieuses de croire qu'ils ont commis des
faits punissables graves ou des indices réels qu'ils envisagent de
commettre de tels faits,
- ceux qui font l'objet d'une mesure d'éloignement, de renvoi ou
d'expulsion non rapportée ni suspendue comportant ou assortie d'une
interdiction d'entrée, ou, le cas échéant, de
séjour fondée sur le non respect des réglementations
nationales relatives à l'entrée et au séjour des
étrangers.
Le projet de loi complète donc ce dispositif par un alinéa
nouveau à l'article 26
bis
qui transpose la directive
européenne de 2001
. Cette directive permet l'éloignement
d'office d'un étranger ayant fait l'objet d'une décision
d'éloignement prise par un autre Etat membre.
L'article 25 de la convention Schengen offre déjà en partie cette
possibilité.
Mais la directive, qui vise spécifiquement les
mesures d'éloignement, élargit le champ des décisions
d'éloignement concernées et encadrent mieux la procédure
de reconnaissance mutuelle.
En outre, le préfet n'aura pas à prendre une mesure
d'éloignement, ce qu'il est encore obligé de faire avec l'article
26
bis
deuxième alinéa précité. La
convention Schengen, plus générale et floue, ne présente
pas les mêmes garanties. La directive prévoit notamment que
l'existence d'une décision d'éloignement exécutoire
autorise le retrait d'un titre de séjour, dans la mesure où la
législation nationale de l'Etat qui a délivré le titre le
permet.
Elle formalise également la coopération et les
échanges d'information entre les Etats parties, notamment la
transmission des documents attestant du caractère exécutoire de
la décision d'éloignement.
Les recours contre ces reconduites à la frontière seront, de la
même manière que pour les reconduites découlant de
l'application de l'article 26
bis
deuxième alinéa, soumis
au droit commun.
L'étude d'impact du projet de loi souligne que les mécanismes
de compensation financière entre les Etats parties, afin de
résorber les éventuels déséquilibres financiers
résultant de la mise en oeuvre de cette directive, restent à
définir.
Une proposition de la commission a été
présentée au Conseil. Le principe général qui
régit cette proposition est que l'Etat membre auteur de la
décision doit rembourser l'Etat membre exécutant sur la base des
frais réels. Quelle que soit la solution retenue, l'application de la
directive ne devrait pas entraîner des charges plus importantes, mais
pourrait en revanche nécessiter la prise en compte d'avances de
trésorerie plus fréquentes.
Enfin, par coordination, l'article 33 du projet de loi, modifiant l'article 35
bis
de l'ordonnance du 2 novembre 1945, complète la liste des
motifs pouvant justifier un placement en centre de rétention en y
ajoutant ce cas particulier de reconduite à la frontière.
Votre commission vous soumet un amendement précisant explicitement
que ce troisième alinéa à l'article 26 de l'ordonnance du
2 novembre 1945 est une transposition de la directive communautaire du
28 mai 2001. Un décret en Conseil d'Etat complète la
transposition.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 25
ainsi
modifié.