3. Une structuration en trois programmes peu satisfaisante
La Cour
des comptes, dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour
2002, a consacré de longs développements à la mise en
place de la LOLF et a déploré le niveau très inégal
d'appropriation de la réforme par les ministères. Le
ministère des affaires étrangères ne figure pas parmi les
plus avancés, mais est néanmoins parvenu à concevoir un
projet de nouvelle architecture budgétaire, comportant trois
programmes
70(
*
)
:
- un programme «
rayonnement et influence de la
France
», qui comprendrait les crédits de l'action
diplomatique (directions géographiques, contributions internationales,
FED, action humanitaire et de maintien de la paix, coopération de
défense) ;
- un programme «
coopération et action
culturelle
», qui regrouperait la majorité des
crédits de coopération, d'action culturelle et d'action
audiovisuelle extérieure ;
- un programme «
réseaux et services publics à
l'étranger
», où seraient regroupés les
crédits des activités consulaires et de gestion du
ministère, ainsi que les crédits des postes et des services
extérieurs.
Il ne serait donc pas prévu de « programme
support »,
dont la mise en place est parfois recommandée
par la Direction du budget, maître d'oeuvre de la LOLF. Votre rapporteur
considère cependant que le principe d'une « fonction
support », s'il apparaît légitimé par le fait
qu'il serait complexe et artificiel de chercher à tout prix à
ventiler dans des actions les rémunérations et charges de
fonctionnement afférentes à certaines fonctions par nature
polyvalentes (tels que celles ayant trait aux ressources humaines, à
l'administration générale ou aux missions transversales), ne doit
néanmoins pas devenir un « alibi » pour y loger des
fonctions plus spécialisées.
Le risque de ces fonctions
support est en effet que la mise en place de la LOLF procède d'une
démarche inversée
: cette loi doit constituer un levier
de modernisation de l'administration et inciter les ministères à
réformer leur organisation interne, c'est-à-dire à
remodeler leur directions selon les actions qu'ils auront identifiées,
et non pas à figer l'existant pour en déduire une nomenclature
budgétaire. En d'autres termes, c'est la réforme
budgétaire qui doit impliquer la recherche de cohérence et de
spécialisation des fonctions, et non la structure existante qui imprime
son architecture aux actions et programmes.
Votre rapporteur spécial se félicite qu'un programme soit
dédié à la coopération, qui fait en effet partie
intégrante de la vocation de ce ministère.
Il considère
néanmoins que ce projet d'architecture globale est largement perfectible
et peut faire l'objet de deux principales critiques :
-
le programme de coopération ne rassemble pas l'essentiel des
crédits d'APD au sens du CAD
, puisqu'il ne représente que
56 % des crédits que le ministère consacre à l'APD.
Le programme « rayonnement et influence de la France » est
constitué quasiment pour moitié de crédits d'APD,
essentiellement par l'action relative aux financements multilatéraux,
manifestement trop volumineuse puisqu'elle représente près du
quart du budget du ministère. Le troisième programme inclut
également des crédits d'APD, tels que ceux afférents au
cabinet du ministre délégué à la coopération
ou une partie de la dotation de l'AEFE.
A contrario
, le programme de
coopération comporte trois actions, soit près de 30 % de son
volume budgétaire prévisionnel, qui ne font partie du
périmètre de l'APD. Si votre rapporteur conçoit que
l'ensemble des crédits d'APD ne puissent être logés dans le
programme de coopération, et qu'inversement la nature de la
coopération (qui recouvre un champ géographique plus large que
celui de l'APD) implique d'y inclure des crédits non
comptabilisés dans l'APD
, il demeure que cette architecture ne
contribue pas à accroître la lisibilité et la
cohérence de la nomenclature budgétaire et n'est pas suffisamment
conforme à l'esprit de la LOLF. On en vient ainsi à se demander
si ces trois programmes constituent vraiment un progrès par rapport aux
trois agrégats
71(
*
)
actuellement retenus dans le « bleu », une nouvelle
dispersion succédant à l'actuelle
, et si la réflexion
sur la LOLF n'a pas davantage constitué en des changements
d'intitulés et des transferts entre chapitres ;
-
les actions du programme de coopération sont
déséquilibrées
: l'action « lutter pour
le développement et l'éradication de la
pauvreté » - dont l'intitulé pourrait somme toute
être celui du programme lui-même et dont la configuration
budgétaire rappelle fortement celle du chapitre
« fourre-tout » qu'est le 42-15
« coopération internationale et
développement » (à la différence notable que
cette action est exclusivement dédiée à l'APD) -
représente près de 40 % de la masse budgétaire du
programme. Les actions « coordination de la coopération
administration centrale » du programme de coopération et
« une organisation performante pour une diplomatie en
action
72(
*
)
» (dont
le libellé sonne un peu creux) du troisième programme ont
également toutes les caractéristiques de fonctions support et
pourraient donc être fusionnées.